(+) Pourquoi n'as-tu pas écouté? w/Jackie

Je pense que Jackie avait tout dit : il ne servait à rien de s’éparpiller et la famille ça craint. Je crois que nous pouvions aisément résumer notre conversation précédente par ces deux simples phrases comme quoi, elle avait le sens de la synthèse. Je lui souriais néanmoins quand elle m’informa que si je faisais Roméo et Juliette, elle postulerait pour le rôle de la muette. Ce serait pour le coup, un véritable rôle de composition songeais-je avec amusement. Je préférais donc me concentrer sur la conversation suivante, qui en mon sens, valait largement le coup. « Je ne sais pas, je pars du principe que je ne serais pas ton seul correspondant mais pour réussir à le pari, oui, il faudra au minimum un pigeon vivant » rétorquais-je avec un sourire amusé. Je n’allais pas lui dire qu’il n’avait pas besoin d’être voyageur sinon elle serait capable de demander à un de ses amis de capturer un pigeon, de lui coller un papier à la patte et de me le déposer dans une cage. Elle en serait capable et elle paraissait vraiment prête à tout pour réussir ce pari. « Tu auras le droit à un invité, je ne suis pas pingre, tu pourras amener la personne de ton choix par contre, va falloir me donner la destination maintenant car nous devons sceller les termes du contrat avant le Summer Camp ! » décidais-je pour pimenter la chose et surtout la forcer à cogiter.
Il y a un autre sujet que je voulais pour ma part cogiter : ses sentiments pour Cody. Le simple fait qu’elle me demande de ne rien dire me mit sur la piste et je la toisais avec un amusement mais également une tendresse somme toute fraternelle. « Tu en pinces pour lui hein ? Qu’est-ce qui t’empêche de te déclarer ? Je te promets, cette discussion restera entre nous et je ne jouerai pas les cupidons de bac à sable »

Il n'y a bien qu'à Caleb qu'elle venait de promettre d'envoyer quelques cartes postales. Peut-être une à ses parents qui lui financeraient surement une partie du voyage, mais basta. Le pigeon voyageur, ça t'es exclusif mon cher Caleb, tu devrais en être super heureux d'ailleurs. Elle se débrouillerait, elle avait encore trois semaines tout au plus pour trouver le moyen de faire parvenir à Caleb un pigeon vivant - détail important - avec un parchemin. Et puis si jamais elle n'y arriverait pas.. tant pis. Elle trouverait bien un autre pari débile à faire avec son ami pour un voyage. J'adorerais aller en France ! A Pariiis. Je te trouve très joli. fanfaronna-t-elle dans un très maigre français. C'était sa copine Norah qui lui avait appris quelques mots, s'en servant pour draguer les quelques touristes français au Spring Break, sans grand succès. Jackie ne connaissait pas du tout l'Europe.. On m'a toujours dit que la capitale Française était un superbe endroit et qu'il fallait y aller au moins une fois dans sa vie ! souria-t-elle en s'imaginant déjà dans les plus grandes rues de la ville, au bras de son invité encore mystérieux.
La Lowell avait beau avoir eu envie d'éviter le sujet, elle avait finalement sauté la tête la première dedans. Sentiments et Cody n'allaient pas dans la même phrase, c'était pas possible. Et pourtant, Jackie en avait, pour lui. C'est mon meilleur ami Caleb. J'peux pas, après cinq ans, arriver comme une fleur et lui dire que j'l'aime plus qu'il ne le pense tu vois. J'ai pas envie de gâcher ce qu'on a. J'ai pas envie d'être.. une copine de plus. Alors ça passera, jusqu'à ce que j'en rencontre un autre. dit-elle les joues rougissantes. Après tout, l'amour était une maladie à laquelle le temps était le remède (phrase philosophiiiique powaaa).

« J’en suis touché ! Vraiment, je t’assure ! » rétorquais-je non sans humour, la pressant à me donner une destination. Jackie arrêta son choix sur Paris et j’affichais un air amusé quand elle me complimenta. « Merci beaucoup, tu n’es pas mal non plus dans ton genre » lui répondis-je dans un parfait français. Eh oui, en Allemagne, beaucoup d’élèves étudient le français et mon père avait veillé à ce que je l’apprenne car après tout, la langue des diplomates est celle de Molière. « Oui c’est une belle vite, il y a beaucoup de choses à visiter et je promets de t’organiser un voyage aux petits oignons » lui dis-je avec un petit clin d’œil –encore faudrait-il qu’elle gagne le pari.

La suite de la conversation s’orienta alors sur la vie sentimentale de Jackie, c’était presque une évidence après avoir parlé de la ville des amoureux. Je soupirais en secouant la tête. « Et s’il pensait la même chose de son côté ?! Tu vas faire quoi, rester à ses côtés, jouer la parfaite amie alors que tu désires bien plus et sauter à la gorge de ses copines par jalousie ?! Cela n’est pas bon de garder ses sentiments et puis, qui sait, même si votre relation est courte, cela n’empêche pas que tu n’auras pas le regret de ne rien avoir tenté. Au pire, joue le coup de la fille bourrée pour te rétracter le lendemain » la conseillais-je du mieux que je pouvais tandis que je pinças sa joue rouge.

Elle avait voulu faire la maline à sortir quelques mots de français, pensant faire fière allure.. sauf qu'elle ignorait que Caleb était aussi doué pour cette langue et lorsqu'il lui répondit dans un français plus que parfait, Jackie laissa tomber sa tête sur son épaule, se cognant le front car elle ne pensait pas qu'elle irait aussi fort. M'en veux pas hein, mais j'sais absolument pas c'que ça veux dire. J'pense que si j'pars pour Paris, j'devrais me procurer un petit guide de phrases types. dit-elle en se massant le haut de la tête. Elle voulait au moins connaître les phrases clés, genre savoir où étaient les toilettes, ça c'était important pour Jackie ! J'y compte bien Caleb ! fit-elle avec un petit sourire en coin.
Son soupire en disait long sur ce qu'il pensait, et Jackie ne se trompait pas. Il voulait limite qu'elle lui saute dans les bras, lui avouant qu'elle aimait, quitte à monter toute une mascarade avec un abus d'alcool. La Lowell replaça un mèche de cheveux derrière son oreille puis se racla la gorge avant de reprendre. Il pense pas comme moi, j'en mettrais mon voyage à Paris en jeu ! Même si ça ne dure que quelques semaines, après se sera plus pareil, et j'veux pas nous enlever ça. Il est trop.. important pour moi. C'est lui le premier à être venu me voir à l'hôpital, c'est le seul à m'avoir dit vraiment que d'avoir un bébé était surement la plus grosse connerie d'ma vie, c'est le seul qui n'a pas peur de m'faire pleurer en me disant la vérité, même si elle est blessante, c'est Cody quoi. Et j'suis certaine que si je pose ne serait-ce qu'une fois mes lèvres sur les siennes, tout changera. Et j'veux pas, j'veux vraiment pas ! Elle posa ses yeux pétillants sur ses petites mains qui tenaient la tasse de chocolat presque vide. C'est pas bon de garder ses sentiments, mais j'y perdrais plus à les dévoiler Caleb. Pour une fois dans sa vie, elle faisait preuve d'une lucidité apparante concernant l'amour, loin de sa naïveté habituelle. Elle savait que Cody et Jackie était une histoire perdue d'avance, que l'amitié leur allait bien mieux que l'amour et que se serait comme ça, toujours.

J’éclatais de rire en la voyant aussi dépitée après sa tentative de parler français. « Tu m’as simplement dit que tu me trouvais très joli. En soi, c’est un beau compliment. L’avantage d’avoir été élevé en Allemagne c’est que je n’étais pas loin de la France alors bien souvent, je passais mes étés dans le Sud » lui expliquais-je la raison pour laquelle je parlais français –du moins une des nombreuses raisons. « Il existe plein de bouquins, je pense que tu n’auras pas de problème à trouver ton bonheur »la rassurais-je n’allant pas jusqu’à lui proposer des cours, je tenais à ma santé mentale. A la place, je pouvais toujours lui promettre de lui organiser le voyage de ses rêves et c’est bien ce que je comptais même si avant, elle devait réaliser son défi. Toutefois, je la connaissais suffisamment têtue et motivée pour tout faire quitte à user du système D. C’est bien un trait de sa personnalité que j’admirais beaucoup : Jackie ne baissait jamais les bras.

« Je suis vraiment désolé pour toi Jackie » murmurais-je en déposant un baiser sur sa tempe. Il était dommage que l’amour ne puisse pas lui être donné surtout dans un moment pareil mais je comprenais son point de vue. J’avais longuement hésité avec Thaïs mais pas pour les mêmes raisons. L’amour m’avait fait trop souvent souffrir pour que j’ose encore une fois me brûler les ailes mais mon épouse avait su me conquérir petit à petit et désormais, nous nous apprêtions à devenir parents. Il est vrai que j’aurais aimé que tout s’arrange pour mon amie, qu’elle puisse oser avouer ses sentiments à Cody mais elle connaissait bien mieux comment réagirait le jeune homme. « Je suis certain qu’il y a quelqu’un sur Terre pour toi ma puce. Tu es un petit rayon de soleil qui mérite sa part de bonheur et puis, dans les disney, la belle finit toujours par trouver son prince charmant » lui dis-je avec un léger sourire. « En attendant, tu peux toujours enchainer les conquêtes, ça fait jamais de mal »rigolais-je.

Elle venait vraiment de lui dire qu'il était joli ? Non pas qu'elle ne le pense pas, mais elle était loin de se souvenir que cette phrase voulait dire cela. Elle pensait à un truc du genre "Je trouve qu'il fait beau".. mais pas ça. Elle plaqua ses mains contre sa bouche avant de rire de bon coeur. Et que m'as tu répondu ? demanda-t-elle en arrêtant soudainement de rire, le toisant du regard. Elle aurait aimé être bilingue, savoir connaître une langue étrangère. Le chinois, le japonais, le finnois, même le créole. Elle s'en fichait. Le sud, c'est mieux que Paris ? le questionna-t-elle avec la possibilité de revoir la destination de son voyage. Peut-être qu'il y avait des villes tout aussi belles que la capitales au sud du pays. Non, Jackie n'aurait aucun mal à trouver un petit guides des phrases types, mais ne voulant pas se donner de fausses joies d'un voyage qui n'aurait peut-être pas lieu, elle ferait ça au dernier moment.
Soit pas désolé, ça va, c'est rien. fit-elle en hochant la tête. Elle ne le vivait pas mal, elle ne le vivait pas bien non plus, mais ça allait. C'était plus supportable qu'elle n'aurait pu le penser à vrai dire. Elle se réconfortait avec le fait qu'il ne sache rien et qu'elle l'aurait toujours auprès d'elle, quoi qu'il advienne de leur vie. Caleb réussit à lui décrocher un sourire, ces mots faisaient plaisir à entendre, d'autant plus de la part d'un homme comme Caleb. Sauf que tu l'as dit tout à l'heure, on est pas dans un Disney. Mais j'finirais par le trouver mon prince charmant, mon héros, mon Jack Sparrow, mon p'tit machin qui me comblera de bonheur. Enchaîner les conquêtes, c'était pas vraiment Jackie ça. Enfin, ce n'était pas Jackie depuis sa rupture avec Jackson. Peut-être qu'il avait raison, peut-être qu'elle devait ne pas restée butée sur l'idée de trouver l'amour mais laisser les hommes aller et venir dans son lit, ou se laisser aller dans le lit des hommes. Non mais attendez, on parle de Jackie là, j'ai du mal à la voir coucher à droite à gauche n'empêche ma petite princesse. Tu crois que j'peux pécho avec ça ? fit-elle en pointant son attelle du bout du doigt avant de pouffer de rire et d'attraper une des autres petites douceurs qui accompagnaient sa boisson lactée et de l'engloutir en une seule bouchée.

Jackie et le français, c’était tout un poème en soi mais elle avait un accent que beaucoup d’hommes trouveraient très attirant. Il était de nature publique que les accents faisaient souvent craquer les européens. J’avais une amie autrefois qui, dès qu’elle entendait un anglais parler en français, n’avait qu’une envie : l’épouser. « Je t’ai répondu que tu n’étais pas mal dans ton genre » lui répondis-je avec un sourire des plus amusés. « Disons que ce n’est pas la même chose. Déjà tu as l’impression d’être dans une fournaise l’été et puis, ce n’est pas la même façon de vivre. Paris… C’est un peu oppressant à la longue et puis faut aimer la pollution »grimaçais-je. Personnellement, je préférais les régions du Sud ou celles de la côte ouest. Je n’avais pas vraiment visité énormément de choses en France mais le peu m’avait plu.

« Ton petit machin ?! Evite de dire cela à un homme, il risquerait d’être vexé. J’imagine bien la chose : tu sais que je t’aime mon petit machin adoré ?! »rigolais-je en secouant la tête de droite à gauche. Oh non, cela risquait de ne pas le faire du tout. Déjà si je prenais mon cas personnel, j’étais vexé dès que Thaïs me taquinait un peu trop sur la question alors je n’imaginais même pas un gars comme Declan par exemple. Je grimaçais lorsqu’elle me demanda si malgré son attelle, elle pouvait attraper des mecs dans ses filets. « Cela dépend… Si tu dragues de futurs médecins, ça peut peut-être le faire » lâchais-je avant d’éclater de rire.