(+Andy) POURQUOI T'ES PAS NORMAL ?

C'est qu'il devenait carrément blessant pour le coup. Sauf que pour la première fois depuis le début de notre conversation qui n'en n'était pas vraiment une, j'encaissais ses paroles sans rien dire. A vrai dire, je redevenais juste.. Moi ? Je détestais dire des choses méchantes et avec tout ce que j'avais balancé j'étais au moins tranquille pour une dizaine d'années. Du coup, je le fixais seulement. Le laissant parler et me rabaisser encore et encore. Moi, la seule chose que je voulais savoir était : pourquoi ? Pourquoi est ce qu'il se sentait obligée d'être aussi méchant ? Pourquoi est-ce qu'il n'était pas capable d'avoir ne serait ce qu'une seule parole gentille ? C'était du délire. « T'a raison, j'suis carrément pas la personne la plus intelligente sur terre. J'tacorde même que je peux être carrément débile des fois. » Pour le coup, j'étais sûre qu'il ne s'attendait pas à un tel retournement de situation. Ouais, je devais carrément le laisser sur le cul là. « Ouais bon ça va, j'ai compris. J'suis pas intelligente et j'ai une tête de débile. Très bien. » C'était pas la peine de m'enfoncer encore plus. J'avais plus envie de me battre là. En réalité, ça me fatiguait plus qu'autre chose. Peut être qu'au final, il était l'une des rares personnes que je ne pouvais pas aider. Peut être que y avait rien à faire pour lui. Et je comptais pas m'en manger plein la tronche à chacun de mes essais. « Tu veux connaître ma théorie à moi ? Je pense juste que t'es le genre de mec qui souffre. Tellement que tu te sens obligé de décharger toute ta haine sur les autres en pensant que ça pourrait te soulager. Et tu veux que je te dise ? C'est le genre de truc qui marche pas. Parce que si ça va pas à l'intérieur de toi, tu peux bien continuer à descendre les autres plus bas que terre mais en aucun cas ça ne t'aidera à te sentir mieux. »

Tout à coup, Chrissy semblait... plus... calme ? Moins sur la défensive. Ou du moins, elle ne ripostait plus, me laissait parler en fronçant des sourcils, signe que ce que je lui disais n'était pas pour lui plaire. Et même le pire en fait, c'est qu'elle confirma qu'elle était pas la personne la plus intelligente sur terre, me donnant raison. Okay... sacré retournement de veste. Je ne bronchai pas, de toute manière comme elle m'avait donné raison et s'était auto-insultée j'avais pas besoin d'insister davantage, elle avait déjà touché le fond. Et en plus elle disait qu'elle avait une tête de débile, qu'est-ce que j'pouvais rajouter à ça moi franchement ? Jackpot là. Mais son air soudainement si sérieux ne me disait rien de bon. Pas que je craignais quelque chose, non... Ou plutôt oui mais non. Je sentais venir à des kilomètres qu'elle allait encore essayer de me psychanalyser et ça ne me plaisait pas forcément. Je la fixai sans rien dire en l'écoutant parler et émettre ses théories sur le pourquoi du comment de mon comportement, sans rien dire. Mouais. J'souffre ouais mais j'étais comme ça déjà avant d'souffrir, j'ai juste... été élevé comme ça ? Dans l'optique que tous les hommes ne sont pas forcément bons et qu'on n'a pas besoin d'être aimé de tous pour vivre heureux et bien. C'est bon t'as fini ? Tu fais des études de psycho ? Tu peux élaborer toutes les théories que tu veux sur le pourquoi du comment je suis comme ça, ça ne m'intéresse pas. Sur ces mots, je me retournai et repris mon chemin, regrettant pour le coup d'être venu sur le campus à pieds. Ca aurait été tellement plus simple pour couper court à cette discussion.

Ouais, parce que faire du mal aux autres ça aidait sûrement pas à se sentir mieux. Bien au contraire même. Il espérait juste pouvoir se soulager mais, m'insulter n'allait pas le rendre meilleur ou réduire la peine qu'il pouvait ressentir intérieurement. Par contre, le fait que j'arrête de répliquer ça l'avait mis sur le cul. Ouais. J'étais sûre qu'il comprenait pas pourquoi j'agissais comme ça. Parce que d'un coup, j'arrêtais tout bonnement de lui renvoyer ses piques. Parfois, je me demandais si je n'avais pas vraiment un gros problème au niveau du comportement. J'poussais un soupir en voyant qu'une nouvelle fois, il repoussait totalement mon aide. Pourquoi ? Parce que franchement, j'étais carrément moins chiante quand on arrêtait de m'envoyer chier à tout bout de champs. « Pourquoi pour une fois dans ta putain de vie tu ferrais pas un effort ? J'sais pas moi. Arrêter rien que pour quelques heures d'être aussi désagréable. Parce que tu vas finir par te retrouver tout seul comme idiot. » J'savais qu'il avait absolument rien à faire de ce que je pouvais lui dire. D'ailleurs, il tournait juste les talons comme pour le confirmer et j'hésitais pendant quelques secondes. Après tout, il était peut être mieux que je lui fiche la paix pour aujourd'hui non ? Sauf que j'étais une emmerdeuse née et que j'avais pas envie d'abandonner aussi facilement. Du coup, j'marchais vite pour le rattraper et reprit la parole une fois à sa haute. « J'vais marcher avec toi tiens.

Chrissy m'disait de faire des efforts, et m'affirmait que j'allais finir tout seul. Elle analysait mal alors... Parce que, en bonne psychologue, elle aurait du remarquer que j'suis pas si chiant avec les gens qu'j'aime, non ? Eux, j'en prends soin. Les Eliots, j'en prends soin. Alors j'finirai pas tout seul... et de toute manière, quand bien même ça aurait été le cas, j'étais pas certain que ça puisse me déranger vraiment. En arrivant à Harvard, j'pensais déjà que toute manière, j'aurais pas d'femme, pas d'enfants, et que plus tard je perdrais mes potes à cause de nos jobs respectifs. Je m'éloignais donc, mais Chrissy ne lâcha pas le morceau et finit par me rattraper en m'disant qu'elle allait marcher avec moi. C'est pas vrai... ? Je soupirai, me prenant la tête d'une main. Est-ce que j'peux savoir qu'est-ce qui t'fait penser qu'j'ai besoin d'être aidé ? Parce qu'honnêtement, c'est vraiment pas l'cas. J'suis bien dans ma peau après tout. J'ai un peu la rage ces derniers temps parce que mon rêve est parti en poussière, mais l'fait d'écraser les autres, ça datait pas d'mon opération du cœur puis d'toute manière, Chrissy était pas au courant de ça.

J'poussais peut être un peu trop le bouchon là. Parce que déjà que je m'étais pris un coup de genoux dans le nez alors que j'avais pas été extrêmement chiante, j'osais pas imaginer maintenant. J'limaginais déjà jeter mon corps dans une poubelle. Ouais, non. C'était peut être un peu trop glauque comme vision ça. Puis, malgré sa méchanceté assez poussé, il avait quand même des limites. Ouais c'était beau d'espérer. J'avais même pas mal d'espoir le concernant. Mais j'pouvais pas nier que là, y avais un effort. Outre le fait que j'avais vraiment l'air de le désespérer, il ne m'avait pas insulté ce qui était plus ou moins un bon signe. « Je.. Ben.. » Ouais, y avait carrément mieux comme réponse et déjà qu'il me trouvait débile je devais enfoncer encore un peu plus mon cas. « Je veux juste être sympa. J'aime pas voir les gens tristes et.. J'sais pas. J'espérais juste te faire rire un peu. Te donner le sourire tu vois ? » Ouais parce qu'à la base ça partait pas du tout d'un mauvais sentiment. Bien au contraire. J'étais toujours sympa avec tout le monde alors pourquoi je ne le serais pas avec lui ?

Chrissy sembla un peu plus hésitante, sans doute était-elle surprise que je l'envoie pas chier encore une fois, ou du moins... pas sans l'insulter quoi, faut dire que pour une fois, j'l'avais envoyée bouler mais sans lui dire qu'elle ne servait à rien et qu'elle me pompait l'air avec son air niais, bien que j'n'en pensais pas forcément pas moins. En entendant sa réponse, j'm'arrêtai sans broncher et la fixai, fronçant les sourcils. J'ai mes potes quand ça va pas, et t'en fais pas partie. J'avançai un peu pour être à peu près à sa hauteur, avant de reprendre la parole. Si j'peux m'permettre de te donner un conseil : arrête de vouloir plaire à tout l'monde et d'vouloir être gentille avec tout l'monde. Y a plein de gens qui en ont rien à faire que tu veuilles être gentille avec eux, puis ça t'aidera pas toi non plus à t'sentir mieux. Ben ouais... Si envoyer chier tout l'monde, c'est être triste, j'en déduisais qu'si elle voulait tant l'bonheur des autres, c'tait parce qu'elle-même n'était pas forcément bien dans sa peau non plus. Je repris la marche en silence, tâchant de n'pas me prendre la tête davantage.

Ouais ben ma gentillesse, elle avait quand même des limites. Je m'étais arrêtée aussi en le voyant se stopper et je fronçais les sourcils en entendant sa réponse. « J'ai mes potes quand ça va pas, et t'en fais pas partie. » Ouais parfois j'aimais bien imiter les gens. Parce que c'était chiant et puis surtout parce que là, il m'avait vraiment saoulée. Je plaçais mes mains sur mes hanches le toisant du regard. « Tu sais que tu peux vraiment être un pauvre con McDonalds ? » C'était carrément ce qu'il était la plupart du temps. Parce que si je lui avais vraiment fais quelque chose de méchant j'aurais pu comprendre ses réactions mais là, il avait aucune excuse. Et je comprenais pas du tout pourquoi il cherchait tant à me blesser. Parce que oui, c'était réellement blessant à force. « Etre sympa ça m'apportera sûrement plus de chose dans la vie que réagir comme tu le fais. T'es juste un idiot profond. Le genre de mec qui se croit invincible à tout mais tu veux que je te dises ? T'es un abruti fini. Et j'espère vraiment qu'un jour, tout se retournera contre toi. » Ouais parce que la roue finissait toujours par tourner et dans son cas, il risquait vraiment de s'en prendre plein la gueule.

Chrissy s'était arrêtée de nouveau et par automatisme, j'en fis de même, me retournant vers elle et arquant un sourcil quand elle me renvoya dans les dents que j'faisais pas partie d'ses potes. Dieu merci, non. J'l'ai pas prétendu, et j'veux pas l'aider non plus. Je pinçai les lèvres en l'entendant m'appeler McDonald's, ce qui eut pour simple effet de me rappeler Luke, ce mec lamentable, pitoyable au possible et qui s'avérait être à mon plus grand désarroi, mon frère. Comme quoi, même en m'trouvant des surnoms, Chrissy ne me rappelait jamais des gens pour qui j'avais de l'estime, ne serait-ce qu'un minimum. Ça t'fait surtout passer pour la bonne poire de service, le mouchoir sur lequel on peut s'moucher et qu'on jette quand on a terminé. C'est comme ça qu'plein de gens te voient et quand tu l'réaliseras, l'abruti fini s'fera un plaisir d'te rappeler qu'il t'avait déjà prévenue. J'suis ptêtre le genre de mec à qui il va arriver plein d'merdes parce que j'me boufferai l'revers de la médaille, et toute manière, dieu seul savait à quel point j'pouvais me le manger ce revers, mais toi, t'es l'genre de fille à qui il va arriver plein d'merdes et qui comprendra pas c'qu'elle a fait pour mériter tout ça. J'préfère être un con et emmerder la terre, plutôt qu'être une ignare et m'faire chier dessus.

Vous vous êtes déjà mangés des grenade dans la tête ? Genre les vrais grenade hein, pas le fruit. Ben c'était exactement ce qu'Andy venait de m'envoyer. Avec ses mots, il avait eu le même impact qu'une bombe et franchement, j'crois bien ne jamais avoir été aussi blessée que sur le moment. Parce que j'pouvais en supporter des choses. J'me foutais qu'on dise que j'ai une tête de débile ou que j'étais totalement timbrée. Ouais, c'était le genre de chose qui m'atteignait pas. Mais là.. Là.. Il avait fait fort. Tellement que je sentais les larmes me monter aux yeux. Est-ce que les gens me voyaient réellement comme il pouvait le décrire ? Est-ce que je n'étais qu'un mouchoir dont tout le monde se foutait ? Après tout, c'était possible sauf que je ne voulais pas le croire. Et je le détestais de dire des choses comme ça. Parce que j'avais absolument rien fais pour mériter de prendre quelque chose comme ça. Non, j'avais vraiment rien fais. Tout les mots blessant qu'il m'avait envoyé et que j'avais retenu semblait vouloir ressortir et des larmes commençaient à rouler sur ma joue alors que je continuais à le fixer. « Bravo, t'as gagné. » J'me sentais stupide de pleurer comme ça, surtout devant lui mais mon émotivité un peu trop présente avait finalement prit le dessus. « T'es vraiment un pauvre type. » Et j'passais devant lui le bousculant au passage pour rebrousser chemin.

Faut dire que je venais de lui en mettre plein la tronche et de littéralement faire exploser son monde de bisounours. Je vis ses yeux s'embuer progressivement, jusqu'à finalement être vraiment être remplis de larmes, qui commencèrent bien vite à rouler sur ses joues. D'une voix tremblante, elle m'annonça que j'avais gagné. Me bousculant et m'insultant une dernière fois, je levai les yeux au ciel, mais ne ripostai pas. De toute manière elle était déjà plus bas que terre, j'avais détruit son monde de rêve et ses espoirs d'être aimée par tout l'monde ou presque. J'sais c'que c'est d'voir son rêve partir en fumée, y a pas besoin de davantage. Je la regardai partir un moment avant de lui tourner le dos à mon tour et reprendre mon chemin en direction de l'appartement que je partageais avec Briony, me demandant si la trace de morsure sur mon mollet était partie... ou pas. J'espérais quand même qu'elle le soit vraiment, j'vérifierais une fois arrivé, ça m'ferait chier de la garder longtemps.