(+Joan) I'M NOT WEIRD.

C'était le genre de journée que j'aimais pas. Le genre de journée ou je ne faisais absolument rien. Et franchement, regarder des films tout l'après midi, ça avait le don de me taper sur le système. Depuis que Chandler avait quitté l'appartement, je me sentais seule. Beaucoup trop seul. Et je ne supportais pas ça. Je poussais un soupir me redressant finalement et ferma la porte de l'appartement sans trop savoir quoi faire. J'avais déjà passée pas mal de temps avec Dorian c'est dernier temps et si je l'appelais encore une fois il risquait de ne plus pouvoir me supporter. Non. Il fallait que je trouve autre chose. Légèrement pensive, je me dirigeais vers le campus espérant tomber sur quelqu'un de ma connaissance sans grand succès. Faut croire que je n'avais pas énormément de chance. Après un énième soupir de ma part, je me dirigeais finalement vers la Quincy House. C'était l'endroit ou j'avais sûrement le plus de chance de passer une bonne journée et il était beaucoup plus probable que je tombe sur quelqu'un que je connaissais. Je montais les quelques marches et poussais la porte d'entrée me dirigeant directement vers le salon. Complètement vide à l'exception d'une fille qui me tournait le dos. D'ailleurs, je ne croyais pas lui avoir déjà parlée un jour. Mais, j'étais pas quelqu'un de réservée. Bien au contraire. J'avais même tendance à être un peu trop nature et enjouée. Alors au lieu de la saluer comme l'aurait fait n'importe quel personne normal moi je courais et lui sauter sur le dos. « SALUUUUUUUUUUUUUT. »

J'avais hurlée d'une tel façon que j'aurais très certainement cassée la tête à n'importe qui. D'ailleurs, à sa place, je me serais collée un pain. Quoi que.. Ça aurait été bizarre que je me frappe toute seule. Mais, j'aurais pas aimée me sentir agressée de la sorte et qu'on me monte sur le dos. Sauf qu'elle, au lieu de s'énerver, elle criait encore plus fort que moi et ça me faisait rire. J'étais pas chez les Quincy pour rien. Je comprenais de plus en plus pourquoi on était considérés comme les gentil du campus. Prenait les Mathers par exemple. J'aurais fais ça chez eux et peut être qu'ils seraient déjà en train d’élaborer tout un plan de vicieux pour se venger. Elle me laissais tomber et moi, je déserrais mon étreinte. Le but, c'était pas non plus de tenter de l'étrangler mais, même une fois à terre, je continuais à glousser. Et maintenant que je lui faisais face je tendais ma main pour attraper la sienne et la secouais dans tout les sens pour la saluer un peu plus convenablement. Sauf que je réalisais après que c'était les mecs qui se serraient la main. Du coup, je lui sautais une nouvelle fois dessus pour l'embrasser avant de reculer de quelques pas un énorme sourire sur le visage. « Moi c'est Chrissy. » Je me mettais à sautiller sur place certainement de très bonne humeur sans trop savoir pourquoi. « Ça rime avec chauve souris, pissenlit et puis jolie aussi. » Et là, c'était techniquement le moment ou je ferais mieux de me taire plutôt que continuer à débiter des âneries pareil.

C'était vraiment une sale manie que j'avais. De foutre des rimes à la plupart des mots je veux dire. Parce que c'était censé être le réflexe d'un enfant de maternelle, pas d'une femme de 21 ans. Sauf que je faisais jamais rien dans les règles et ça avait tendance à sortir spontanément. Un jour, peut être, j'apprendrais à réfléchir avant de parler pour éviter de débiter tout ce qui pouvait me passer dans le cerveau mais, de toute évidence, j'avais un long chemin à faire avant d'y parvenir. J'écarquillais grand les yeux avant d'exploser de rire en l'entendant reprendre la parole. Elle venait vraiment de faire des rimes elle aussi ? Alors la, putain, je la vénérai. Parce qu'au lieu de me prendre pour la dernière des connes elle se mettait à mon niveau et ça, c'était plutôt chouette. En fait, chez les Quincy y avait vraiment les gens avec les plus gros problèmes. Suffisait de voir Alek ou encore moi. Et puis si maintenant on pouvait la rajouter dans le tas, c'était genre.. Enorme ? J'avais presque envie de sautiller partout mais j'me contenais un minimum, pour la réputation m'voyez. « Pas mal. D'ailleurs mal ça rime avec original qui rime aussi avec banal. » J'fronçais les sourcils quelques secondes l'air perplexe. « D'ailleurs, c'est étrange non ? Banal et original j'veux dire. Ça rime alors que c'est de parfait opposé. » Ouais, j'me posais souvent des questions débiles et alors ?

J'avais de la chance qu'elle soit pas encore partit en courant. Parce que déjà, y avait mieux comme première rencontre que sauter sur le dos de quelqu'un et puis mes questions un brin inintéressante aurait pu la faire fuir. Quoi que.. J'avais pensée la même chose avec ALek et pourtant, il en avait rien eu à foutre. Peut être qu'en fait il manquait des cases à tout les Quincy. Ouais, c'était envisageable comme option. Tout les Quincy étaient tarés en fait. Là était l'explication. Et là, sa question, elle me laissait sur le cul. Ah ouais, mais c'était super intelligent hein. J'me demandais même pourquoi j'y avais pas pensée avant. Pas que je me me croyais être la plus intelligente mais, ça aurait du au moins une fois effleurer mon esprit non ? « Toi je t'aime bien. J'sens qu'on va pouvoir avoir de graaaaaaaande discussions toi et moi. » J'ricanais un coup en y pensant. Si on commençait à chercher l'utilité de tout les mots on étaient pas sortit de l'auberge. On risquait d'ailleurs plus de chopper des migraines atroces qu'autre chose. « Vas y, j'ai une question pour toi. » Fallait s'attendre au pire avec moi mais, c'était vraiment une question qui me perturbait alors autant que je la pose non ? « On met le dentifrice avant ou après avoir mouillé sa brosse à dent ? »

De grandes discutions philosophiques avec Chrissy, c'est en effet ce dont avait besoin Joan. Vous ne pouvez pas imaginer le bonheur et l'allégresse dans lesquels la jeune femme était plongée. La Quincy venait de rencontrer un esprit aussi éclairé que le sien. Et ce n'est absolument pas péjoratif loin de là, elle pensait un peu comme les philosophes des Lumières, que des esprits brillants comme ceux des deux jeunes femmes éclairaient le monde de leur lumière et que grâce à elles, les gens voyaient dans le noir comme des petits chatons tous mignons. Des sortes de lampadaires de l'esprit, des torches du cerveau, des LED de la pensée. Puis enfin ! Enfin, la brune allait pouvoir parler autant qu'elle voulait avec quelqu'un, on ne la sommerait pas de se taire parce que c'est fatiguant de l'écouter ou autre connerie de ce genre. Lindley prenait toujours plaisir à écouter les autres parler, elle ne voyait pas pourquoi son argumentation à elle serait plus ennuyante que celle d'un autre. Surtout que, sans vouloir se vanter, elle trouvait qu'elle avait un verbe particulièrement bien construit et qu'elle aurait fait une politique hors-pair. Puis sa forte était claire, forte sans casser les oreilles et suave. Enfin d'après elle encore une fois, elle ne s'était jamais vraiment écouter parce que lorsqu'on s'écoute on entend pas sa voix comme les autres l'entendent et de toute façon elle détestait s'enregistrait et se ré-écouter. C'est pour ça que, par exemple, elle ne regardait les vidéos où elle apparaissait qu'en mode muet. Pour éviter d'être traumatisée à mort. Alors évidemment, comment ne pas aimer une fille qui lui donnait matière à réflexion et qui semblait aussi à fond qu'elle dans le débat ? « Je ne sais pas trop, mes parents m'ont apprit à mouiller la brosse à dents en premier, du coup je pense que j'apprendrais la même chose à mes enfants et que je me moquerai à vie des gens qui font l'inverse. Par contre, j'ai déjà essayé de mouiller le dentifrice. Parce que mouiller la brosse à dents après avoir mis le dentifrice ça revient à mouiller le dentifrice. Et en fait ça change rien … »

Oui c'était le genre de truc dont tout le monde se foutait mais moi, ça me perturbait vraiment. J'avais toujours des questions hyper existencielle du genre et c'était pas ma faute si ça m'intéressait autant. Bref. La brosse à dent, l'eau et le dentifrice c'était un sujet de conversation hyper passionnant. Limite j'pouvais en parler pendant des heures et des heures sans jamais m'en lasser. BLAGUE. Non en vrai c'était juste une question hein. J'allais pas non plus faire un débat dessus même si au final, j'en étais carrément capable. Sauf que si je commençais à me lancer dans des trucs comme ça, la brune en face de moi allait sûrement finir par péter les plombs pour ensuite tenter de me tuer à coup de brosse à dent. Tiens quand je disais que les brosses à dents occuper une grande partie de ma vie. Je les voyais même utilisée en tant qu'arme de crime c'est pour dire. Bref, j'avais vraiment de gros souci dans ma tête et ça s'empirait avec le temps. Dire que je voulais devenir psycholoque. J'allais être aussi dérangée que mes patients et du coup, j'étais même pas sûre de leur être d'une grande aide au final. Ouais, je commençais un peu à m'éloigner du sujet de base mais tout ça c'était uniquement la faute de ces brosses à dents quoi. A croire qu'elles me contaminaient totalement l'esprit. C'était trop machiavélique comme truc en fait. Limite elles étaient vivantes ou un truc du genre. Ouais non, fallait que je me calme. Mon esprit recommençait à partir dans des délires un peu trop gros. « Du coup tu te moquerais de moi parce que je la mouille après avoir mis le dentrifrice moi. Du coup j'mouille le dentifrice. Je trouve que ça mousse pas assez sinon. Enfin tu vois quoi. Tu devrais essayer les deux à la suite. J'te jure que c'est bizarre la différence. » Ouais bon, là j'étais prête à avouer que j'étais complètement dérangée pour le coup.

Sans blague, Chrissy était en train de triturer le cerveau de Joan avec le bout de sa brosse à dents. La jeune femme n'était pas sure d'avoir envie de se moquer de l'autre Quincy. C'est-à-dire, le sujet était évidemment risible, mais la blondinette venait d'en faire un sujet super sérieux, genre si elles n'arrivaient pas à résoudre l'énigme de la brosse à dents, la Terre allait être prise de spasmes – autrement dit des tremblements de terre, mais je trouvais cool l'idée des spasmes, genre la Terre c'est quelqu'un. Puis après, les océans et les mers allaient se déchaîner et au final, la planète allait être vidée de tout habitant en l'espace de quelques minutes. Allez savoir si ça n'avait pas déjà commencé. Si ça se trouve, elles allaient sortir de la Quincy House et se serait l'apocalypse. Puis elle souleva une théorie intéressante qui plongea l'esprit scientifique de Lindley dans un tourbillon sans fin. Et si ça moussait plus ? Cela voulait-il dire que ça lavait mieux ou au contraire, comme le dentifrice était moins compacte, il avait moins d'efficacité ? « C'est troublant. Tu crois qu'il y a une étude anglaise là-dessus ? Tu sais, il y a souvent des études anglaises genre sur quel est le goût préféré de cigarette électronique des gens ou combien de fois par an les propriétaires de chihuahua sortent leurs animaux. Enfin leurs chiens quoi. Que leurs chihuahua. Tu penses que les propriétaires de chihuahuas sortent combien de fois par an leur petit chien ? » Et ça avait tout à fait un rapport avec les brosses à dents sur deux points : petit un, il fallait des brosses pour nettoyer les chihuahuas, et éventuel petit deux, peut-être qu'il y avait une étude anglaise sur chacun de ces deux cas. Ou une étude américaine, il y a souvent des études américaines aussi.