PART ONE
Je déteste les préjuger. Généralement, lorsqu’on me voit, on pense tout de suite à la petite bourge de base, à la fifille à son papa. Ouais, j’aime mon père, oui il a du fric et alors ? Ça ne fait pas de moi quelqu’un de méchant ou de sans cœur pour autant. J’ai un sac Louis Vuitton alors on me côtoie par intérêt ? J’ai un nom qui sonne bien du coup, je peux rentrer dans n’importe quelle soirée ? L’argent, ce n’est pas ce qu’il y a de plus important dans la vie, ça passe au second plan. Je suis heureuse, heureuse comme je suis, heureuse de la vie que j’ai mené jusqu’ici et heureuse ce que je suis devenue. Je ne suis pas une petite prétentieuse de première qui regarde les gens de haut, je n’affiche pas ma fortune aux quatre coins de la rue. Je suis née avec des principes, des valeurs et ça, peu de personnes arrivent à le comprendre à notre époque. En soit, je n’ai pas vraiment d’ennemis, la plupart des gens m’apprécie parce que je suis quelqu’un de simple, gentille, une personne qui fait passer le bonheur des autres avant le sien. Je suis toujours en train de m’inquiéter pour savoir si tout va bien ici et là. C’est sans doute cette sociabilité qui a fait que j’en suis arrivée là aujourd’hui. Ceux qui ne peuvent pas me voir en peinture, je dirais que c’est parce qu’ils jugent beaucoup trop vite et sans connaître.
PART TWO
J’ai grandi dans un orphelinat tenu par des bonnes sœurs, en République Tchèque, mon pays natal. Mes parents sont décédés dans un accident de voiture alors que je n’avais que quelques mois. Je ne dirais pas que ça ne me fait rien, c’est triste mais, je ne les ai jamais connu, je n’ai jamais eu l’occasion de m’attacher à eux, ce qui a rendu cette tragédie beaucoup plus facile à encaisser. A l’âge de trois ans, on m’a envoyé dans un orphelinat en Californie. J’étais une petite fille plutôt calme, sage, toujours le sourire aux lèvres et me faire trimballer à droite et à gauche ne me posait aucun problème, je m’adaptais. Un jour, Allison m’a attrapé par la main et m’a emmené voir un jeune couple accompagné de leur fils. Ce dernier devait être âgé d’une dizaine d’années de plus que moi.
« Darja, je te présente monsieur et madame Kurkova. » Je leur ai adressé l’un de mes plus beaux sourires et, je les ai salué, par politesse.
« Dobrý den paní. Dobrý den pane. » Ils se sont tous les deux regardés alors que leur fils se mit à rire aux éclats. Je restais avec ce sourire débile collé au visage, allez savoir pourquoi, sans doute parce que je ne comprenais pas leur réaction. Monsieur Kurkova a fini par me sourire à son tour, il s’est baissé et m’a adressé quelques mots en tchèque. Je savais s’il parlait cette langue à l’instant même où Allison avait prononcé leur nom de famille avec difficulté.
« Elle… » Madame Kurkova semblait, quant à elle, très embêtée. Elle fut coupé par la jeune femme qui s’empressa de rajouter :
« … A à peine quatre ans. Elle vous comprend mais, ne parle que tchèque pour le moment. Il va lui falloir du temps. » Pendant ce temps, son mari a repris la parole :
« Dobrý den můj milý, budete mít krásný úsměv, řekni mi! » J’ai fini par déposer un baiser sur sa joue en guise de remerciement. Je crois que ce geste les a vraiment touché puisqu’ils sont revenus plusieurs fois à l’orphelinat après ça, ils ont fini par me ramener chez eux, à Los Angeles et, ils m’ont adopté.
PART THREE
A mon arrive en Amérique, on a décidé de me donner comme prénom Maelline et de garder Darja comme second prénom car, cela sonnait trop étranger et mes parents avaient peur que ça me cause certains problèmes. A l’époque, je ne comprenais pas vraiment pourquoi mais, je m’en foutais à peu. J’allais avoir une vraie famille, j’avais une vraie famille et ça, c’était sans doute la plus belle chose qui puisse m’arriver. Monsieur et madame Kurkova avait déjà trois enfants, deux garçons et une fille. Deux d’entre eux avaient quitté le nid familial, on les voyait qu’aux repas de famille tous les dimanches midis. Il ne restait plus que Raphaël, quatorze ans et moi, cinq ans. Raphaël, c’était le grand frère idéal, il trainait toujours dans mes pattes, rattrapait mes gaffes, m’aidait à apprendre l’anglais, me corrigeait lorsque je faisais des erreurs, me protégeait de tout et de rien.
« C’est une o-r-an-g-e. Dis, une o-r-an-ge. » Je fixais cette petite boule orange, tournais la tête dans tous les sens pour la voir sous tous les anges puis, essayais de répéter après lui.
« Une o… Or… Orange ! C’est une orange. » J’affichais un large sourire, fière de mes progrès avant de lui retirer le fruit des mains pour le remettre dans la corbeille.
« Oui, c’est bien Maelline ! Maintenant prenons… » Je me levais et attrapais un livre dans la bibliothèque, bien que je connaissais déjà ce mot.
« Oui ça ! C’est un livre. Le titre c’est le Petit Prince. » M’informa mon frère en croisant les bras. J’observais la couverture avant de lui montrer le jeune blond du doigt.
« Le Petit Prince ? Parce qu’il était petit le prince ? » Il se mit à rire et je ne pus m’empêcher de faire pareil. On s’entendait bien tous les deux et à mes yeux, c’était mon frère, mon vrai frère et ce, même si les liens du sang ne nous unissaient pas. En réalité, tous les enfants de la famille Kurkova avaient été adoptés, madame était stérile. Aucun de nous ne connaissions réellement nos parents mais cela ne nous posait pas vraiment de problèmes, on était heureux ainsi.
PART FOUR
« Allez ! Allez les enfants, on va être en retard ! » Ma mère était déjà dans le hall d’entrée, prête à quitter la maison, ses valises dans la voiture. Mon père avait pris l’avion la veille, il nous attendait de pied ferme sur le territoire africain. Je m’arrêtais nette en haut des escaliers, ne sachant comment faire pour descendre cette trentaine de marches sans les dévaler quatre à quatre sur les fesses.
« Maman, est-ce que je peux prendre mes vieux jouets pour les petits enfants qui habitent là-bas ? Raph m’a dit qu’ils en avaient pas… Moins ?… Euh comment on dit déjà ? » J’étais en train de réfléchir, grimaçant légèrement. En réalité, j’avais déjà tout préparé, ma mère n’avait pas le choix et je savais que dans tous les cas, elle allait accepter. Elle était comme ça maman, toujours prête à donner, à faire plaisir aux autres, le cœur sur la main, c’est d’ailleurs pour cette raison que nous étions comme ça. Mes parents avaient toujours tout fait pour que le monde soit meilleur. Ils avaient de l’argent, une belle et grande maison, nous manquions de rien sans pour autant frôler l’excès, le reste allait dans nos voyages, nos projets, les associations etc.
« Pas beaucoup, j’ai dit qu’ils en avaient pas beaucoup. » Vient rectifier mon grand frère en prenant mes valises. Je lui accordais un sourire en guise de remerciement et il ajouta à l’attention de ma mère :
« Elle voulait les jeter. » Bah oui, je n’étais pas habituée à ce genre de vie. J’avais dix ans, six ans s’étaient écoulés depuis mon arrivée chez les Kurkova, c’était la première fois qu’on m’emmenait.
« Pas de problème ma chérie, prends tout ce que tu veux. » Maman était impatiente de partir, je pouvais la comprendre. On allait retrouvés papa et puis, aider tous ces gens. J’allais passer un an là-bas, allais étudier dans l’une de leurs rares écoles et suivais également des cours à domicile.
« Dis princesse quand tu seras de retour, ça te dis de partir quelques semaines au Cambodge avec moi ? » Je descendis les escaliers tout sourire, surexcitée face à cette idée. Ma mère semblait déjà au courant puisqu’elle approuva d’un geste de la tête et rapidement, je confirmais les pensées de Raphaël en acceptant sa proposition. C’était un rythme à prendre, un rythme que j’aimais malgré les quelques difficultés que je pouvais rencontrer. Voyager, aider les autres, ce n’était pas un mode de vie mais une passion, un besoin.
PART FIVE
Cela faisait deux bonnes heures que j’étais réveillée et je profitais de ce moment de solitude pour me préparer, aller à la boulangerie et faire le petit déjeuner. J’étais une lève tôt, je le suis toujours d’ailleurs. Je n’ai jamais compris à quoi ça servait de dormir, c’est juste du temps de perdu. Je toquais à la porte de la chambre dans le but de le réveiller, bien qu’il avait l’air de déjà l’être.
« Hey, bien dormi ? » Le questionnais-je le sourire aux lèvres. Il se redressa légèrement, fronça les sourcils et me questionna du regard.
« Wahou, t’as fait le petit déj ? T’es la femme parfaite ou t’as quelque chose à te reprocher ? » Je ne pus m’empêcher de sourire de plus belle, déposant le plateau devant lui avant de me glisser à ses côtés. Il déposa un baiser sur mes lèvres, je laissais tomber ma tête contre son épaule et soupirais d’un air désespéré :
« Oba !… Je rentre demain. » Les yeux perdus dans le vague, je pivotais légèrement la tête après quelques minutes de silence pour voir sa réaction. Il soupira à son tour, passant son bras autour de mes épaules. Je tombais facilement amoureuse. J’avais un cœur gros comme… Comme… Allez savoir, je ne trouvais même pas de comparaison adaptée. Je m’attachais facilement et les séparations étaient toujours très douloureuses or, j’étais bien obligée de rentrer un jour ou l’autre. Je ne faisais que ça. J’allais à droite, à gauche, visiter de nouvelles terres, revenais sur mes pas or, tout me ramenait à Los Angeles.
« Déjà ? Je pensais pas que ça allait passer aussi vite. » Je me mis à réfléchir, réfléchir encore et encore jusqu’à trouver une pseudo solution.
« Moi non plus mais… On pourra s’écrire ?! » Combien de kilomètres séparaient la Thaïlande de l’Amérique ? Des milliers. Il allait rester ici alors que j’allais rentrer chez moi. Je ne pouvais faire autrement, c’était mon quotidien. Je ne pouvais pas tomber amoureuse de tous les mecs que je croisais et restais à leurs côtés jusqu’à ce que la flamme s’éteinde. C’était absurde. Je n’étais plus une gamine de trois ans, il fallait que je fasse des choix et ma place était auprès de ma famille.
« Tu sais très bien que ça marchera pas. Ça marche jamais ce genre de relation. » Il avait raison, je le savais parfaitement. Je me contentais de déposer un baiser contre sa joue, murmurant à son oreille :
« Miluji tě. » Moi et mes déclarations d’amour, c’était tout une histoire. Je ne suis pas le genre de filles faciles qui se laissent avoir par n’importe qui. Je ne couche pas avec le premier venu, je ne me drogue pas, je bois qu’en soirée, je suis quelqu’un qu’on pourrait qualifier de banal, si la banalité existait encore sur cette terre.
« Moi aussi. » Et le lendemain matin, aux premiers rayons de soleil, j’étais dans cet avion qui me ramenait chez moi. Toujours la même rengaine.
PART SIX
Plantée dans l’entrée, mes valises à la main, je laissais tomber mes sacs à même le sol et fixais la porte d’entrée comme si c’était la dernière fois que j’allais la franchir.
« Je suis plus certaine de vouloir y aller Danny. On est bien ici non ? Je veux dire, j’ai pas besoin d’aller à Harvard, je peux très bien continuer mes études ici, en Californie. » Daniel, mon frère. Enfin, un de mes frères. Il a vingt-trois ans, il a été adopté beaucoup plus tard que nous autres, à l’âge de quatorze ans. On était parti en Tanzanie, au début juste pour le taff de mon père et parce qu’ils avaient besoin de ma mère (elle est médecin). Je crois qu’elle a eu un vrai coup de cœur pour Danny, elle n’a pas voulu qu’on reparte sans lui. Je dois dire que je m’étais rapidement attachée à lui également. Il parlait un peu anglais mais avec un accent très prononcé, il avait ces petites fossettes lorsqu’il souriait… Il m’a fait craquer. Il a mis un peu plus longtemps que moi à se faire à cette nouvelle vie, au luxe, aux soirées mondaines, au fait qu’on faisait un peu ce qu’on voulait ici contrairement à chez lui. Or aujourd’hui, on dirait un vrai américain alors que moi, moi qui ai quasiment toujours vécu là-bas et, parfois encore j’ai du mal à trouver ma place dans ce monde. Il se positionna devant moi, mis ses deux mains sur mes épaules et plongea son regard dans le mien.
« Alors là, tu peux toujours rêver. Ça fait des années que tu rêves d’y aller, tu vas pas tout abandonner parce que t’as la trouille. » J’arquais les sourcils, surprise par la fin de sa phrase. Nan mais oh, mon petit frère qui me fait la morale, on aura tout vu !
« J’ai pas la trouille ! » M’exclamais-je en croisant les bras alors que c’était le cas. Je n’avais jamais réellement été en cours. Je veux dire, je suivais mes parents partout, Raphaël, Daniel et moi, comme Sarah-Lou et Sven avant nous, comme Hope très bientôt bien qu’elle n’avait encore que deux ans et demi, on voyageait partout et les cours, c’est maman et papa qui les faisaient à la maison la plupart du temps. Si ce n’était pas le cas, on se retrouvait dans une école du tiers-monde pour quelques mois, parfois un ou deux ans.
« Je serais là. Saam forever. » Me rassura-t-il accompagné de l’un de ses sourires que j’aimais tant. Je soupirais et finis par acquiescer.
« Oui bon ça va, saam forever, je viendrais, je te laisserai pas tout seul. » Voilà comment je me suis retrouvée à Harvard. En fait, je viens tout juste d’arriver parce qu’à la dernière minute, j’ai prétendu devoir partir en Bolivie pour du bénévolat. C’était le cas or, c’était aussi un moyen pour moi de repousser cette rentrée. Du coup, au lieu de faire comme Daniel et de me présenter à la rentrée de septembre, je vais seulement mettre les pieds dans cette grande université dans laquelle j’ai toujours rêvé d’étudier. Oui je suis une trouillarde et je l’assure –ou pas.
Accueil
t'as choisi les meilleurs ex æquo avec les Mathers :sifle: 
OMGGGGGGGGGG. 
De rien. 
