ALEJANDRO ► un rendez-vous (très) spécial

C'est vrai que des investisseurs comme lui, il n'y en a sûrement pas tous les jours et Alejandro n'en laisse peut-être pas l'impression, mais il sait très bien que ses charmes sont tout à son avantage. D'ailleurs, ce n'est que de bonne guerre, puisque des femmes aussi séduisantes que Shayanes usent certainement du leur.

Offrant une porte de sortie à la jeune femme d'affaires, elle s'empressa de la refermer. Pas question de le faire revenir plus tard, elle préférait visiter tout de suite. Tant mieux, lui aussi. Du reste, l'Espagnol acquiesça avec un air compréhensif.

-Je comprends. Puis, Cambridge, ce n'est pas un grand centre non plus et tu n'as pas à t'en faire, je n'ai pas l'intention de me faire critique ou quoique ce soit.

En fait, si, mais peu importe, il voulait surtout détendre l'atmosphère. Shaira ne verra jamais le dossier qu'il va écrire sur sa boutique et ses affaires de toute façon, l'impression qu'elle lui a laissé. Ils finirent leurs verres de vin, puis descendirent en bas. Une fois dans l'arrière-boutique, le jeune homme observait un peu partout, les mains jointes derrière son dos. Comme il aperçut les employés, il demanda tout naturellement:

-Tu les paies à faire quoi?

Travailler, bien sûr, mais la question, c'est "en quoi consiste leur travail". Enfin, ils se retrouvaient dans la boutique, l'endroit par lequel il était entré, à moins que la réception ne se trouve de l'autre côté. En tout cas... Pas de speech de vente, elle lui laissait le soin d'explorer et c'est ce qu'il fit, effleurant de ses doigts quelques vêtements. Il jetait ensuite un œil à la déco et lâchait un petit "hum..." un brin mystérieux, avant de reporter son attention sur Shaira.

-C'est bien... On devine que tu as dû y mettre beaucoup d'effort. Le registre des entreprises indiquaient que tu es propriétaire depuis peu?

Shayanes lui expliquait en long et en large ce que faisaient ces employés, somme toute, les tâches qu'on est en droit de s'attendre de gens qui travaillent dans le domaine des vêtements. Au fond, est-ce que cette boutique était simplement un lieu de design ou aussi une boutique pour vendre des vêtements? L'option 2 semblait planer plutôt que la 1, parce qu'autrement, les lieux seraient un peu différents. C'était peut-être un mixte des deux aussi.

En tout cas, Shaira connaissait jusqu'au papier dans lequel les vêtements étaient emballés. On la sentait passionné, mais très contrôlante aussi et perfectionniste, décidant des moindres détails, la délégation ne semblait pas son fort. Chacun sa manière de gérer son entreprise après tout. Ceci dit, il est clair qu'en décidant de tout, elle se met beaucoup de charges sur les épaules. Alejandro n'est donc pas étonné d'apprendre qu'elle participe à toutes les tâches, cela, il l'avait deviné et il se contenta d'acquiescer.

-Tu veux garder contact avec ce qui se passe au plancher.

Alejandro bien sûr n'a jamais eu à gérer une boutique. Son grand-père si, mais aujourd'hui, l'homme contrôle un immense fonds d'investissements et de capitaux, un conglomérat qui regroupe des dizaines d'entreprises de production, de vente, etc. Impossible donc de prendre toutes les décisions et de décider de tout.

-Deux ans que tu y mets tant d'heure et d'effort. Tu n'aurais pas envie par moment d'en faire un peu moins?

Posait-il des questions trop personnelles? Peut-être, ce sera à Shaira d'en décider de toute façon. En tout cas, la visite semblait déjà faite et avait été assez rapide. C'était petit, modeste même, mais il faut voir le potentiel qui se cache, c'est ça tout l'intérêt. Acquérir l'entreprise, en avoir des parts sera plus facile tant qu'elle ne sera pas trop développée...

-Bien, merci beaucoup pour la visite. Je crois que ça fait le tour, à moins qu'il n'y ait des pièces secrètes que tu veuilles me montrer?

Alejandro certain assez bien Shayanes, elle lui rappelait vaguement quelqu'un qu'il connait bien. En tout cas, elle tenait vraiment à son entreprise, on sentait que cela était la prunelle de ses yeux. Plus que son enfant? Il y en a qui sont carriéristes à ce point après tout. Le père d'Alejandro a déjà dit à ce dernier que son père à lui, donc le grand-père d'Alejandro, c'était plus occupé de son petit fils qu'il ne s'était jamais occupé de son fils... Il faut dire qu'on ne devient pas l'homme le plus riche d'Europe en commençant comme vendeur dans une boutique de vêtements en claquant des doigts. À entendre Shayanes parler de son entreprise familiale, le jeune homme hocha de la tête et fit un petit sourire, disant juste:

-Je te souhaites de la mener aussi loin que tu le pourras alors. Et avec le coup de pouce de Zara, si tu l'obtiens, aucun doute que tu atteindras un nouveau sommet.

Alejandro avait cru naïvement, preuve qu'il n'y connait pas grand chose... qu'ici, c'était seulement la boutique, mais non, il y avait l'atelier aussi. Tout dans le même endroit? Un peu comme dans l'ancien temps. C'est assez rare qu'on voit cela de nos jours. Les couturiers sont ici? Ou bien l'atelier est de taille modeste lui aussi, ce qui ferait du sens.

-Ah d'accord. Bien on pourra les visiter si tu le veux bien.

Entre temps, Shayanes reçut un appel et l'Espagnol en profita pour continuer à regarder un peu le décor. Bien sûr, il entendit des bribes de la conversation et il n'y prêta pas trop d'attention, jusqu'à ce que la Brésilienne se mette pratiquement à gueuler au téléphone. À l'évidence, elle avait quelques soucis.

-Pas de soucis.

Il jeta un rapide coup d’œil à sa montre.

-Je vois que le temps file. Je ne pensais pas passer autant de temps ici, mais comme on dit, en agréable compagnie, le temps passe vite. Par contre, je crois qu'il vaut mieux mettre fin à la visite, j'ai déjà assez abusé de ton temps, je suis certain que tu as beaucoup de travail.

Alejandro réalisa que sa visite tombait un peu mal. En plus d'être occupée, d'avoir un emploi du temps chargé, Shayanes avait des soucis avec un certain Aaron, le genre de soucis qui requérait les services d'un avocat, autrement dit, des gros soucis. Alors il trouvait plus poli, plus d'usage, de mettre fin à la visite et de la laisser tranquille. Shaira s'excusait de son côté et disait ne pas vouloir le mettre à la porte. Oh non, elle ne faisait rien de tel! D'ailleurs, il bougeait sa tête de gauche à droite.

-Je n'y manquerai pas, mais avec un peu de chance, je n'aurai pas à le faire. Je crois que j'ai vu l'essentiel et sans doute que les officiels de Zara te donneront des nouvelles. Ne t'inquiètes pas, je ne me sens pas obligé de partir.

Comme elle disait que cela avait été un plaisir pour elle de le rencontrer, l'Espagnol lui faisait un beau sourire.

-De même pour moi, j'ai été content de te revoir. Tu veux bien m'accompagner à ton bureau? J'y ai laissé mon manteau.

Oui, il ne pouvait pas partir tout de suite et se retrouver dehors en shirt. Alors il suivit Shaira jusqu'au bureau où ils ont passé la majorité de leur entretien. Alejandro prenait son manteau et l'enfila, vérifia que tout s'y trouvait, son portefeuille en cuir espagnol, son Iphone dernier cri, ses clés de voiture, tout y était. D'ailleurs, quand il prit son téléphone, il le garda en main.

-Tu... si tu veux, je peux te donner mon numéro et toi le miens? Ça te fera un contact et puis, si jamais tu as envie d'aller prendre un café, parler portugais avec quelqu'un sur le campus, tu pourras.

C'était une invitation à peine déguisée, c'est vrai, dans un cadre moins affaire aussi, où ils pourraient discuter en toute liberté. Bien sûr, ils sont tous les deux membres de la maison Eliot, les chances qu'ils se revoient sont élevées, mais avoir le numéro de téléphone, c'est quand même mieux.

Shayanes acceptait de le raccompagner, évidemment. Elle connaissait ses manières. L'Espagnol retrouva son manteau, s'assura que tout y était, mais c'était aussi son excuse pour avoir le téléphone en main et demander le numéro à la Brésilienne. Celle-ci n'hésita pas le moins du monde à le lui donner sur un papier. Elle se disait même ravis de pouvoir de le recontacter, d'aller prendre un café avec lui, comme il le suggérait.

-Très bien, alors je n'hésiterai pas à t'appeler, Shaira.

Le jeune homme s'approcha et vint faire la bise à la Brésilienne. Maintenant qu'ils se connaissaient mieux, il pouvait se permettre de le faire non? Après quoi, il ajoutait son petit sourire charmeur, son regard la détaillant un peu.

-Bien, je te dérange pas plus longtemps. Bonne fin de soirée.

Sur ce, il quitta les lieux, un petit sourire sur les lèvres, heureux à l'idée de sans doute revoir Shayanes.