if you're homesick give me your hand and I'll hold it ~ lia

Grondé par Lia ? Bleeker aimerait bien voir ça ! Il y avait un petit comique à l'idée de se retrouver face à une Lia correctrice et qui hausse la voix. La côte gagnée, l'étudiante indiqua un parking à l'auré de la plage pour qu'ils puissent s'y garer. Cody arqua un sourcil, espérant sincèrement que Lia ne songeait pas une seconde à plonger le moindre orteil dans la mer. Elle ne crèverait pas d'hypothermie, non, elle se transformerait en glaçon humain, conservée par le froid comme les mammouths à poils longs au fin fond de la Sibérie. Après tout, pourquoi pas ! Cody n'objecta pas, ça l'amusait plus qu'autre chose cet élan de folie. « Tes désirs sont des ordres. » Euh ouais, non, ne pas sortir cette phrase de son contexte. Une fois la voiture arrêtée, il en oublia son sourire pour poser très sérieusement sa question, la première vérité de la soirée. Sa main abandonna le volant et il pivota sur lui-même, tournant tout son corps vers Lia. Il baissa la tête pour perdre son regard sur un voyant clignotant du tableau de bord. Pas bon signe en règle générale, mais il occupait l'attention de Cody. « Qu'est-ce qui ... » Pause. Juste le temps de trouver comment formuler clairement la question. Ah, oui. « ... T'aide à ne pas penser à elle jour après jour, nuit après nuit après nuit après nuit ? » Elle. Inutile d'apporter davantage de précision quant à l'identité de ce "elle". Mais si Lia avait un remède miracle, alors Cody le prendrait. Tout est bon à prendre dans ce genre de situation. 

Ce qui était marrant, c’est que Lia, bien qu’elle n’avait pas une once de méchanceté en elle, pouvait être très…sévère, parfois. Très peu indulgente, très rancunière, quelque peu superficielle. Tous ces défauts, mais elle n’était pas méchante. Elle n’hausserait jamais la voix contre Cody, elle ne faisait que le taquiner, à vrai dire. La main de Lia se perdait dans sa propre chevelure, alors qu’elle riait à leurs plaisanteries. Ensemble, ils étaient deux grands enfants : lui, il apportait beaucoup d’innocence, et elle, un peu plus de sérieux, mais tout ça, dans les bons moments. Ils se complétaient ensemble, et c’était ça, la vrai amitié. Lia avait proposé de jouer et de se défier à action vérité, c’est donc Cody qui lança le jeu pour de bon, ce qui amusait une fois de plus Lia. Cependant, quelques instants plus tard, un sourire compréhensif orna son visage, alors qu’elle posait son regard sur Cody, légèrement perdu, puis gêné, puis quelque peu triste. Pas besoin d’explications ni de précision quant à l’identité du «elle» qu’il avait interpellé. Il parlait de elle, de la fille de Lia, qu’elle avait perdu dès la naissance du bébé. Il lui posait cette question, car lui aussi était parent, et qu’il avait perdu sa fille. C’était un truc qui les rapprochait aussi tous les deux et qui faisait qu’ils se comprenaient sans n’avoir rien à dire. Juste d’un regard ou d’un soupir. Elle posa une nouvelle fois, comme au début du trajet en voiture, sa main sur celle de son ami, toujours dans la voiture. « Tu veux que je te dise la vérité? » Bien sûr que c’est ce qu’il voulait. C’était Action ou Vérité. « Je pense toujours à elle. J’espère toujours que la nuit, je ne penserai pas à elle, parce que je dormirai et que ce sera mon repos, mon repos d’elle, mais c’est faux, je rêve à elle. Je m’imagine ce qu’elle est devenue aujourd’hui, parce que mon seul souvenir d’elle, c’est alors qu’elle n’avait que quelques minutes de vie à peine… C’est horrible pour une mère, ça. Mais si tu veux tout savoir, ce qui me fait tenir, c’est l’espoir de la retrouver un jour. De la revoir, de la prendre dans mes bras, de l’entendre me dire maman. Cet espoir, aussi minime est-il, me fait tenir debout. » Je ne lâchai pas son regard. Il avait besoin de ce support que j’essayais de lui apporter. Ce que je ne lui avais pas dit et que je ne voulais pas lui dire tout de suite, c’était que Morgan, le père de ma fille, était aussi à Harvard, et qu’il m’avait dit que je reverrais ma fille bientôt… Du moins, pas comme je le voulais, mais je la reverrais tout de même, c’était ça l’important.

J. E. S. Sans aucun doute les trois plus belles lettres de l'alphabet pour Cody, trois lettres tellement pleines de sens pour lui. Ce n'était pas comme réciter bêtement l'alphabet tel un enfant de six ans, non. Pour Bleeker, c'était un espoir, un rêve, un eldorado auquel il se raccrochait malgré le déchaînement des éléments contre lui. Naïf. Voilà ce qui le qualifiait le mieux, lui qui croyait bêtement qu'il suffisait de prouver à son ex qu'on avait mûri pour récupérer la garde de sa fille. Mais non, ça ne se déroulait comme ça que dans les téléfilms de Noël qui passe en boucle à cette période. Dans la vraie vie, il fallait se battre à coup d'avocats et d'amendements. Mais le Cody, il voulait rêver un peu. Il rêvait cependant moins depuis qu'il avait appris que son ex enseignait depuis relativement peu de temps à Harvard. Ah, cette Maggie, elle lui en faisait décidément voir de toutes les couleurs. Et Lia, oh Lia, sans doute la seule personne au monde à capter sa douleur encore mieux qu'un smartphone 4G. Comme si leurs capteurs sensoriels étaient infiniment liés. Il ne sourcillait pas, fixant juste qu'au bout des lèvres Lia durant son discours. C'était dingue comme ils se ressemblaient mine de rien même si, en les voyant, on croirait plus à un remake de Laurel et Hardy, de Castle et Beckett, de Sasha et Pikachu. Enfin, comme on dit, les opposés s'attirent. Ne souhaitant pas trop se plonger dans ces confessions nocturnes par peur de perdre le peu qui lui restait de virilité, Bleeker conclut par un bref mais sincère ; « Je pense que ce ne sera bientôt plus un espoir, mais bien quelque chose qui se réalisera. » Il l'espérait sincèrement pour elle puisqu'elle était une fille bien. « Tu m'as pas posé la question, mais action. » fit-il en s'étirant les bras vers le ciel … Ou pas. Il percuta le plafond de la voiture avec ses mains avant de les recroqueviller bêtement contre son torse, souhaitant que Lia n'ait pas remarqué ce Cody gaffeur.