(+ Lilly) surprised to see me that soon ?

Comme à chaque fois que les fêtes se terminaient en fanfare, le jeune prince avait un mal fou à revenir à un rythme plus normal et encore moins à se pencher sur ses éventuelles bonnes résolutions du nouvel an. Cette année, il s’était refusé à en prendre : ainsi, pas d’éventuelle culpabilité parce qu’il n’aurait rien tenu de ce qu’il s’était promis. A la place, le soir de son retour à Cambridge, Eventine n’avait pas hésité une seconde à se pointer direction la Cabot House, les dortoirs de ces fameuses demoiselles où il tâcha d’être discret pour mieux frapper à la porte de la seule qu’il voulait voir en cette minute précise : Lilly. « Surpriiiiise ! » lança-t-il d’un ton extrêmement cabotin, accompagné d’un sourire dont il avait le secret sans oublier un joli bouquet de fleurs, car même un prince pouvait avoir du savoir vivre. « Je n’ai pas de champagne sur moi par contre, je t’ai ramené une boîte de chocolats et de marrons glacés de Monaco, j’espère que tu n’as pas prévu de te mettre au régime bientôt… » poursuivit-il non sans déposer un baiser léger comme une brise contre son front. « Bonne année ma belle, tu as passé un bon réveillon j’espère ! »

Inutile de craindre le fait que Lilly ne soit pas contente de le voir : elle ne l’avait jamais envoyé sur les roses et avait toujours cet enthousiasme rafraîchissant à lui transmettre dès qu’ils se voyaient. A vrai dire, après ses fêtes de fin d’année passées à Monaco, il avait viscéralement besoin de cette fraîcheur qu’elle seule était capable de lui offrir la plupart du temps : d’ailleurs, il ne mettait jamais de masque et ne demeurait pas secret en sa présence, il n’était pas non plus prince à ses côtés, juste Eventine, le brun violoniste prêt à apporter des marrons glacés à sa meilleure amie dès qu’il en avait l’envie. « Ah, tu es la meilleure, tu le sais ça ? » s’exclama-t-il aussitôt avant de passer la porte de la chambre de Lilly, ôtant par la même occasion son manteau car la température était loin de le lui faire garder sur le dos. « Tu plaisantes ? Je n’allais tout de même pas venir squatter ta chambre les mains vides, j’ai été élevé avec certaines manières tout de même ! Et puis tu mérites le meilleur taratata ! Ça me fait plaisir de faire des après fêtes totalement improvisées avec toi, loin du protocole et des choseries du genre qui en ce moment me collent vraiment de l’urticaire… » Le jeune prince n’hésita pas à déposer ses cadeaux sur le lit de la jolie blonde avant de s’asseoir précautionneusement sur le lit juste en face. A la bonne franquette, comme dirait l’autre, il n’y avait vraiment rien de tel ! « Je savais que les marrons glacés te feraient plaisir… j’ai croisé un chocolatier qui en vendait et bim, ça m’a donné l’idée ! Mon réveillon à moi était… bon barbant j’avoue, mais j’ai été ravi de revoir ma famille et surtout ma sœur Charlotte, qui a accouché d’un petit Raphaël mi-décembre. Attends que je te montre une photo de la merveille… » murmura-t-il avant de lui tendre son téléphone portable où il avait pris une photo de sa sœur aînée et de son nouveau-né. Il ne fallait pas croire : Eventine craquait littéralement devant les bébés.

Eventine offrit un sourire des plus radieux à l’attention de Lilly lorsqu’elle le complimenta à son tour. Entre eux, cela n’avait jamais été une histoire de compliments pour combler une conversation ennuyeuse et creuse, ils pensaient l’un comme l’autre toute l’affection qu’ils se vouaient, que ce soit par des gestes ou par des paroles. Le jeune prince s’était également languit de sa meilleure amie, du reste. Il n’y avait qu’elle pour illuminer d’un coup d’un seul son quotidien devenant parfois terne et sans intérêt. La preuve, il ne pouvait pas faire un pas sans être scruté par tout le monde et ce soir encore, il avait dû feinter son garde du corps pour que celui-ci ne le suive pas jusqu’ici… « Peut-être que c’est pour ça que je suis venu à l’improviste ? Tu sais que j’aime bien te surprendre et puis je ne viens pas pour que tu me couvres de cadeau ma biche, ta simple présence me suffit amplement ! » D’autant qu’il regrettait au-delà des mots de ne pas avoir pu passer les fêtes avec elle. Eventine lui avait promis qu’un jour ils passeraient Noël ET le jour de l’an tous les deux et il comptait bien tenir sa promesse à un moment donné : il restait un jeune homme de parole, après tout ! « Il est sublime hein ? Je te dis pas le nombre d’heures que j’ai passé à gagater… je ne pouvais plus m’arrêter ! Mais j’essaye de négocier auprès de Charlotte pour qu’elle vienne me rendre visite, et elle m’a promis de venir pour mon prochain concert à New York. J’ose espérer que tu y seras aussi… c’est tradition ! » Aussitôt, le jeune prince prit place aux côtés de Lilly et l’incita à venir se blottir dans ses bras. Ils avaient toujours été tactiles l’un envers l’autre et au moins, Eventine ne feignait pas… « Tu n’as pas passé de bonnes fêtes ? » lui demanda-t-elle dans la seconde qui suivit son installation sur le lit. Hélas, il ne put répondre à sa question au sujet de son voyage car un poids dans sa poitrine le raidit subitement, rendant sa respiration difficile non sans le faire grimacer. S’il avait une crise maintenant, il allait hurler.

Eventine ne manqua pas de laisser un petit rire amusé peupler un temps l’atmosphère sonore de la chambre de Lilly alors qu’elle insistait pour lui faire la surprise la fois prochaine. Bien qu’il ne soit pas quelqu’un d’intéressé de nature, rien que la perspective d’être surpris de la sorte lui faisait plaisir. Il savait, qui plus est, que la jolie blonde taperait en plein dans le mille : elle le connaissait trop bien pour tomber à côté de la plaque. « Je suppose que si je dis que ce n’est pas la peine tu vas me maudire sur au moins cinq générations ? » papillonna-t-il des yeux d’un air faussement innocent lui donnant une véritable tête à connerie. En présence de Lilly, il n’y avait plus de prince qui tienne : il reprenait ses réflexes de jeune homme et d’étudiant lambda pour sa plus grande joie, s’éloignant du protocole et autres obligations du genre qui n’avaient de cesse de peser plus lourd chaque jour sur ses épaules. « A vrai dire il ne faudrait pas que l’on m’ait filmé ou photographié sinon je suis bon pour me payer la honte de ma vie… ça devait être fameux parce que j’ai gagaté pendant des heures ! Je résiste pas aux petites joues façon « le parrain » tu n’imagines pas… sans parler des mains et des pieds potelés ! » Eventine était sûr, cependant, que Charlotte, Andrea ou Pierre avaient forcément immortalisé la scène au moins une fois, quelque soit le moyen employé. Ils aimaient tellement le charrier que c’en était agaçant à la fin ! Une chance que Lilly équilibre la chose actuellement en lui offrant autre chose que des taquineries… « L’année prochaine je négocierai pour rester ici au moins le premier de l’an. Ça te dirait un réveillon de toute fin d’année avec ma modeste personne ? » Et le beau brun était sérieux ! Il aurait d’ailleurs rêvé pouvoir faire des plans sur la comète mais hélas son corps, ce traître, se mit à dévoiler un secret qu’il gardait jalousement depuis des lustres et qu’il aurait adoré garder au moins encore un peu. Par chance, sa respiration se décoinçait peu à peu mais il avait subitement blêmit à cause du manque d’air… comme d’habitude. « Mes crises se rapprochent… ce n’est rien ma belle, je t’assure ça va passer » tenta-t-il de la rassurer non sans maladresse.

Cette fois-ci, Eventine éclata littéralement de rire rien que d’imaginer Lilly en train de le maudire non pas sur cinq mais sur SIX générations si d’aventure il s’amusait à dire que ce n’était pas la peine et qu’elle pouvait tout aussi bien profiter de ses cadeaux aujourd’hui sans vouloir lui rendre la pareille. Autant pisser dans le Rhône pour en augmenter le niveau, sa meilleure amie était aussi têtue qu’il savait l’être à ses heures perdues… « M’en parles mes frères et sœurs sont capables de m’en envoyer quelques-uns par sms juste histoire de dire « on t’a bien euuuuuu », c’est vraiment pas une sinécure d’être leur frère, sans déconner ! Tu n’imagines pas le nombre de fois que je pourrais me plaindre auprès de la SPED, la société protectrice des Eventine en détresse… mais puisque tu es toujours adorable et que je suis sûr que tu seras très sage d’ici là, possible que je te ramène un ou deux clichés en souvenir, si tu me promets de les garder pour toi évidemment ! » Hors de question qu’il risque d’être la risée de tout Harvard au passage même s’il avait toute confiance en Lilly et qu’elle ne lui ferait jamais un tel petit dans le dos. La blondinette Cabot s’était toujours montrée d’une gentillesse adorable envers lui, tant et si bien qu’il se sentait sans arrêt d’immenses élans protecteurs envers elle. Il ne voulait pas qu’il lui arrive la moindre bricole… elle ne méritait que du bonheur et rien d’autre. « Hey on a un an pour se préparer alors commence à prendre des notes on va se prévoir un truc de ouf ! D’ailleurs, on n’est même pas obligés de rester sur Cambridge, on peut carrément se prévoir THE voyage aussi… » Eventine avait un jet privé en claquant des doigts et son garde du corps se plierait juste à son désidérata du moment, point barre. Trop longtemps qu’ils prévoyaient un réveillon avec Lilly sans jamais avoir l’opportunité de mener ce projet à bien… « Ne me tape pas et ne te mets pas en colère… mais possible que je souffre d’insuffisance cardiaque et que bon… le fait de faire du jogging à répétition ou d’être toujours à me balader pieds nus dans mon jardin n’a pas arrangé les choses » avoua-t-il, main sur le cœur, reprenant son souffle dans la mesure du possible. Le jeune prince n’avait jamais autant redouté la réaction de quelqu’un…