J’ai peur. C’est constant, linéaire, cette possibilité, ce risque d’abandon, ne m’a jamais quitté d’aussi loin que mes souvenirs m’amènent. Je crains la distance, je fuis les silences impulsivement, dangereusement, presque à quatre pattes sur le sol. Il fait chaud et puis froid, je ne sais plus, je ne sais jamais véritablement. C’est trop souvent noir là-haut, celui-là bat trop constamment fort. Parfois je ne vois rien venir, un simple mot et ma mâchoire se crispe sous l’effet de la colère, mes poings s’élancent et s’échouent sur un visage, peu importe lequel, peu importe la raison. Je ne vis qu’aujourd’hui, demain n’a nulle garantie. Parfois, trop souvent même, je pense à la mort. Un jour j’aimerais qu’elle m’oublit, le suivant j’aimerais la tuer pour pas avoir quitter cet autre idiot pour moi. La ligne est si fine entre l’amour et la haine, j’en sais quelque chose. Certains jours je me dis qu’elle serait mieux sans moi, sans tout ça, tous ces bagages que j’emporte partout avec moi, cette maladie incurable. Je suis atteint, impossible de le nier davantage, c’est sur papier, promptement diagnostiqué troublé mentalement. C’était un état limite, sur le bord de la ligne, toujours sur le point de tomber ou de me relever. Certains autres jours je me dis que personne ne l’aimerait comme moi, à sa juste valeur, que personne ne la regarderait comme moi, mon plus beau joyaux. Je crois égoïstement l’aimer mieux, l’aimer plus que quiconque, sans doute est-ce vrai. Je suis fonctionnel, mais qu’en niant une part de ma vie, qu’en l’oubliant. Il m’a fallut un temps avant de me rencontrer, de faire ma connaissance et de m’accoutumer à ce que j’étais et resterais pour le restant de mes jours. La marginalité de ma personnalité, la puissance de mes émotions sans cesse exacerbées, mon besoin d’être adulé, mon obssesive crainte des adieux. Toutes des conséquences de mon passé trouble que j’avais subit plus que choisit.
Je n’ai jamais ressentie d’amour et d’attention de la part de mes parents. Ma mère a toujours été trop préoccupé par son apparence physique pour nous aimer. Elle passait trop de temps à craindre que mon père ne la trompe avec la voisine pour s’occuper de nous, de moi et de mes soeurs. Ma plus grande soeur avait quinze ans, mon autre quatorze et moi, le petit dernier, en avait sept quand tout a commencé. Mon père abusait d’elles, parfois les deux à la fois, parfois même sous mes yeux. Elles avaient beau se plaindre, pleurer, crier à ma mère ce qu’il leur faisait, elle ne voulait rien entendre. Elles allaient jusqu’à lever leur jupe, montrant littéralement leur lésions, une larme aux bords des cils, mais elle n’a jamais rien vu, rien fait pour les sauver, l’amour l’avait depuis longtemps rendu aveugle. J’étais le seul homme dans cette famille, dès que j’en avais l’occasion je serrais les poings pour les défendre, en vint. J’ai reçu coup de poing, coup de pied, claques, il me demandait parfois de me choisir ma ceinture favorite et de la lui donner pour qu’il s’en serve contre ma peau. Parfois même c’était mon tours, il me faisait... Un clignement de trop et on me tirait les cheveux, m’étranglait jusqu’au dernier souffle que pour le plaisir du risque. On m’a mal nourrit, mal vêtu, mal lavé, mal aimé. Je n’ai jamais reçu la moindre attention de la part de ma mère, j’aurais pu crier jusqu’à en perdre la voix qu’elle n’aurait pas tourner l’oeil vers moi, alors au bout d’un moment j’ai juste préféré me taire. Me taire si longtemps que j’en oubliais des mots, comment les prononcer et les faire vivre. Les rares fois où je devais me prononcer ma voix était éraillée, colorée d’une douleur, d’un malaise qui n’avait jamais de repos. Parfois je me demande comment j’ai pu vivre ces choses et y survivre. J’aurais pu fuir et pourtant je suis resté, pour elles, pour ces femmes que j’avais appris à n’aimer que par pitié, par larmes partagées. Éventuellement mon père s’est tut, de manière radicale... il a succombé à ces blessures suite à un accident de la route, ça a anéantis ma mère jusqu’à la pousser dans une profonde et irrévocable dépression. Le calme après la tempête, il était déjà trop tard pour moi cependant, je suis marqué à vie, les séquelles permanentes et présentes en chaque jour que je vis. Mon unique libération, plaisir en ce monde que j’aurais pu trouver ordinaire si je n’en avais pas compris la marginalité dans le regard des autres, fut le sport. Le football américain a sauvé ma vie. Je réussi à m’éprendre de ce vent qui faisait mouvoir ma chevelure doré, de l’odeur du cuire du ballon ovale et de se texture sous mes doigts rugueux. C’était le seul amour que je connaissais, le plus tangible qui soit. Les Steelers, les Packers, les Giants, les Bears, je vivais à travers le rêve de joindre une de ses équipes un jour. On disait de mes jambes qu’elle était aussi rapide que l’éclair, de mes bras, fort et solide, qu’il pourrait attrapé un météore, tout ça n’avait aucune valeur à mes yeux, je ne voulais que jouer, jouer à m’en épuiser.
Quand j’ai su mes soeurs en sécurité je me suis enfin enfuit, je n’étais plus capable de vivre sous ce toit, chaque bruit me rappelant de couinement du lit quand il... quand ce monstre les... mon psychologue me dit souvent de ne pas bloquer ces souvenirs, de les accepter comme étant une réalité que j’ai vécut, mais qui ne m’atteindra plus jamais, c’est plus difficile qu’il ne semble. Bref, j’ai donc quitté le domicile ‘‘familial’’ à l’âge de dix-sept ans, déjà trop mûr pour mon âge. J’ai toujours aimé l’école, j’y excellais par plaisir plus que par compétition. On m’a souvent dit que j’étais extraordinairement intelligent, je dirais plutôt que je suis passionné. J’ai toujours été très solitaire, trop turbulent ou trop violent pour les autres, tous ces silences me servaient de temps d’études. Ma passion pour le sport et l’académie c’est rapidement transformée en bourses d’études, pour n’importe où, pour l’équipe de mon vouloir, pour l’université de ma préférence. J’hésitai deux secondes avant de choisir les Crimsons d’Harvard.
Et puis j’ai rencontré Valentine Eden Joly, il y a un an de cela. Le miracle que je n’avais même jamais attendu, mon amour véritable. Je n’y aurais pas cru si on me l’avait dit à l’avance, pas cru qu’un tel sentiment était possible. Me sentir plus complet qu’entier, me sentir léger, complice d’un secret qui n’appartenait qu’à deux uniques êtres en ce monde. Cet ange avait les ailes cassées, tout comme moi, et je m’étais juré de les lui réparer à coup de sourires. La plus belle, la plus mienne. Elle m’a montré l’amour, m’a appris à m’aimer en sa présence, m’a fait vivre une idylle digne d’être couché sur papier. J’ai rencontré Val sur internet, et elle a tout de suite suscité ma curiosité. Elle n’était cependant pas à prendre, ses lèvres caressaient quotidiennement celles d’un autre homme, plus chanceux, plus séduisant, plus près. Alors que je vivais au Canada, elle vivait aux États-Unis et la distance l’empêchait d’ouvrir son coeur à la possibilité d’un nous. Le profondeur de mon attachement prenait de l’ampleur à tous les jours, chaque nouvelles découvertes m’obligeant à plier toujours un peu plus les genoux, à l’aimer sans condition. Les cours étaient interminables, mettant inscrit à l’Université de Montréal à l’époque, et les heures passées sans elle étaient cruellement surmontées. Elle m’a tout appris, mon premier amour qui ressemblait à mon dernier, il en avait le parfum. Chacune de ses colères faisaient papillonner mon ventre d’extase, elle était belle en ces temps, du moins je me l’imaginais ainsi. Comme toujours, irrésistible. J’aurais aimé la garder captive, lui façonner une cage à sa taille pour qu’elle s’y plaise et ne quitte jamais ma vie, mais, mon oiseau avait le goût de la liberté et surtout je n’étais pas le premier. Ma jalousie avait jurée de m’achever un de ces jours, toujours présente à me faire douter de ma certitude la plus sincère, un tel amour ne pouvait être que partager. Je m’imagine les pires horreurs dès qu’elle quitte l’ordinateur. Je me connais, je comprend que mon trouble bordeline nourrit ma paranoïa, mais rien à faire, je serrais les dents à chaque fois que nous deviens nous séparer. Un jour j’ai craqué, bien que la question m’avait longuement brûlé les lèvres, je lui ai demandé si elle retournait mes sentiments. Elle aurait fait de moi l’homme le plus heureux sur Terre. Mais rien. Son silence dura et s’étendis sur de longues journées d’absence étouffante, en janvier dernier. Je n’arrivais plus à penser à autre chose qu’à son dernier souffle, même celui-là je ne pourrais l’avoir qu’à moi. Je ressentais toujours tout en accéléré, à son extrême, ma peur était quadruplé par ma sensibilité à l’émotion, j’allais mourir si elle ne me répondait plus... Et enfin elle le fit, alors que je venais d’apprendre qu’Harvard avait été la cible d’un criminel armé de bombes. Valentine avait survécu avec comme séquelle une douleur psychologique, je fis de mon mieux pour l’aider, elle resta deux fois plus de temps qu’à l’habitude avec moi, à m’écrire sur l’ordinateur et je me sentis désiré pour la première fois de ma vie. Ne vous m’éprenez pas, il y eus d’autres femmes avant elle, mais rien qui ne séduisait mon âme à ce point, qui m’apprenait le réel sens du mot «amour». Elle n’arrêta cependant jamais de me vanter les qualités de son petit ami. La dernière fois ce fut horrible, j’aurais presque pu l’oublier, ce fut comme ... on emploi souvent le bris de coeur pour illustrer un tel déchirement, j’ignorais que c’était si littérale, si physique. Ce n’est pas le coeur en soi qui s’émiette, c’est tout ce qui l’entoure qui meurt à sa place. C’est le souffle qui manque, les muscles qui abandonnent, la vision qui se brouille, l'appétit qui se perd. J’ai vécu un mois comme ça, un fantôme, à n’avoir de cesse que de regretter son absence. J’ai beaucoup réfléchis, trop sans doute, pour en venir à ces conclusions... il me la faut, elle m’appartient. Et je déménageai à Harvard. Je me suis inscrit en droit pour être en mesure d'aider, d'être utile pour un jeune qui aurait vécu une douleur similaire à la mienne, si profondément encrée qu'elle devient une part de soi. Je veux être utile par dessus tout et Harvard à éduqué les meilleurs avocats sur Terre, je n'ai jamais peur d'un défi, je ne crains que l'indifférence de Valentine.