rolling in the deep w/ meghan

Ce ne fut que lorsque la jeune femme attrapait mes mains que je me rendis compte qu'elles tremblaient. J'avais envie de hurler mon désespoir, de pleurer ma peine... mais, aussi vive que soit la douleur, aucun son ne parvenait à sortir de mes lèvres qui, entrouvertes semblaient vouloir exprimer bien plus que la souffrance elle-même. L'impuissance se lisait dans mon regard bleuté qui, sous les larmes semblait vider toute l'eau du monde et rien de ce que pouvait faire ou dire la jeune femme ne paraissait me calmer, que ce soit le flot intarissable de mes pleurs ou la violence de mes sentiments. « On me veut du mal, on me veut du mal... » Répétais-je dans une ultime tentative de me faire comprendre, de m'expliquer. Je me sentais persécutée, délaissée, mal-aimée comme jamais je ne m'étais sentie de toute ma vie, rien ne me paraissait susceptible d'apaiser mes maux, nulle personne n'était à mes yeux capable de m'apporter une quelconque aide. Meghan était là sans l'être, je ne voyais en elle qu'une silhouette aux contours flous, qu'une présence invisible, qu'une voix parmi le silence, me suppliant de communiquer mais ma logique restait scellée, figée dans l'incompréhension totale et je vivais, spectatrice, victime et coupable de tout ce carnage. « Je voudrais pouvoir t'expliquer... » Je croisais son regard de biche et plongeais dans celui-ci quelques instants, croyant y voir une chose que je n'avais jamais vu, pensant comprendre quelque chose et me jetais à son cou, entourant son cou de mes bras frêles en enfouissant ma tête dans ses longs cheveux bruns sans trop comprendre le pourquoi du comment, juste qu'une chose n'allait pas, qu'elle était là et que j'avais ce besoin de sentir que j'étais loin d'être seule.

Les mains de Kaleigh tremblaient et étaient humides à cause de ces larmes. Je serais un peu plus mes doigts entre ces mains pour lui faire comprendre que j'étais là. Cette dernière était déroutée, désemparée et je n'arrivais pas à se calmer. « On me veut du mal, on me veut du mal... » répétait-elle sans cesse. Je n'avais toujours compris qui lui voulait du mal, les raisons de sa tristesse mais au fond de moi je me doutais que ces problèmes étaient affectifs, qu'ils étaient causées par ses exs sûrement. Car ces moments de désespoir sont toujours causés par des personnes proches, des personnes qui sauront vous briser le cœur, ce qui arrivait actuellement à Kaleigh. Je levais ma main et passais mon pouce sur sa joue, essuyant les perles salées qui coulaient sur ses joues. Je n'aimais pas la voir pleurer et la savoir si désemparée. « Je voudrais pouvoir t'expliquer... » me dit-elle. Je la croyais. J'étais certaines que si elle pouvait, elle m'aurait tout expliqué. Mais là, elle en était capable, c'était certains. Mon regard croisa le sien et nous restions là, à se regarder un long moment. Soudain, elle se jeta à mon cou et enfouit sa tête dans mes cheveux. Je sentis son souffle saccadé caressait mon cou. Je la serrais dans mes bras et frottais lentement son dos. « Kaleigh, je suis là pour toi. Arrête de pleurer. J'aime pas te voir comme ça. » lui chuchotais-je. Ce n'était pas des paroles en l'air, je pensais sincèrement ce que je disais. J'étais là pour elle si elle avait besoin de moi.

« Kaleigh, je suis là pour toi. Arrête de pleurer. J'aime pas te voir comme ça. » Je compris à cet instant, alors que la jeune femme m'enlaçait tendrement dans ses bras pour me réconforter, que ce qu'elle me disait était superficiel. Superficiel parce qu'elle ne pouvait être là pour moi, parce qu'elle ne comprenait rien à mon mal-être et que ce fait symbolisait le fossé qui nous séparait. Nulle personne n'était - à mon sens - en mesure de me comprendre et donc, de m'aider. Alors, je décidais de mentir à la jeune femme avec le semblant de logique qui me restait, la remerciant, déclarant avoir besoin d'une bonne nuit de sommeil et déclinant toute tentative d'être raccompagnée. Me relevant, je constatais que la tête me tournait toujours et malgré cette gêne, je me dépêchais d'enfiler mes chaussures et de prendre la sortie à la hâte de façon à pouvoir distancer l'étudiante et prendre le chemin que je souhaitais, bien à l'opposé de la maison dans laquelle elle me pensait aller me réfugier. En réalité, je fonçais vers ma voiture et hésitais à prendre le volant. Qui pouvait savoir ce qui allait m'arriver ? M'avait-on droguée ? Avait-on trafiqué mon moteur de sorte qu'il explose ? Décidant de prendre le risque, je démarrais en trombe, manquant de rentrer dans un arbre et d’abimer la carrosserie, ce que je fis malgré tout en appuyant un peu trop fort sur la pédale. Prise de panique, je détalais et laissais sur le parking mes dégâts, fonçant vers la première supérette du coin, la première ouverte à cette heure-ci dans l'espoir d'y trouver quelque chose d'utile, voulant rouler jusqu'au petit matin, jusqu'au soir suivant et même après, tandis que je m'enfonçais peu à peu dans les méandres d'une réalité exacerbée par une terrifiante et violente maladie dont je souffrais et qui, secondes après secondes, minutes après minutes, me dévorait peu à peu jusqu'à me faire disparaître complètement.