Noam J.E Lewis-Rutterford - Will Higginson

New-York, Manhattan, HARLEM, année 1989. 'Félicitation mademoiselle, vous êtes enceinte de 6 mois' Combien de femmes ne rêvent pas d'entendre ces mots? Combien de femmes ne voudraient pas mettre au monde un petit bout de chou, fruit de l'amour entre elle et leur mari? Sauf que cette demoiselle n'était pas mariée et du haut de ses vingts ans, pas prête à être maman. Il fallait dire qu'elle ne s'y attendait vraiment pas à cette nouvelle. Célibataire endurcie, ce n'était pas le genre de femme à accumuler les conquêtes. Elle était bien trop timide pour ça, bien trop peu sûre d'elle. Il n'avait fallu que d'une fois, une sortie un peu trop arrosée. Cette soirée pourtant elle s'en souvenait encore. La veille elle s'était disputée avec ses parents et elle s'était laissé convaincre par miss bavarde, une de ses amies, de l'accompagner à une soirée. Elles étaient restées très peu de temps sur le lieu de la fête donnée par une des confréries. Ensuite, elles avaient fait le tour des bars de la ville. Elle se revoyait encore descendre la rue, une bouteille de vodka à la main, chantant à tue-tête. Elle était tellement différente ce soir là. L'alcool avait inhibé toute timidité. Et puis elle l'avait vu dans un des bars. Un de ses professeurs. Celui qu'elle trouvait fort mignon d'ailleurs mais elle n'aurait jamais osé lui dire. L'interdit attire de toute façon. Elle avait planté miss bavarde, qui était déjà entourée d'un groupe de jeunes hommes. Elle avait l'habitude qu'on ne fasse pas attention à elle mais plutôt à son amie. Elle s'était assise non loin de lui et c'était lui qui l'avait accostée. Il avait bu, mais beaucoup moins qu'elle. S'était-il rendu compte que c'était son étudiante? Elle ne le savait pas. Après tout, il avait tellement d'étudiants qu'il aurait pu ne pas l'avoir remarqué, elle qui d'habitude était si discrète. Ils avaient parlé beaucoup avant qu'il ne se décide à l'inviter à danser. Ils s'étaient rapproché et il avait fini par l'inviter chez lui. Pour boire un dernier verre avait-il dit d'un air malicieux. Pas besoin de faire un dessin, elle savait où il voulait en venir. Elle aurait du dire non. Mais contre toute attente, elle s'était entendue accepter. Elle s'était réveillée le lendemain matin au son de son vibreur, dans une chambre inconnue. Elle l'avait vite découvert allongé à côté d'elle et au vu de leur nudité, ils n'avaient pas fait qu'échanger des opinions sur un sujet quelconque. Il dormait et elle s'était surprise à le trouver beau comme un ange. Prise de panique, elle s'était enfouie sans le réveiller, ne laissant même pas un mot derrière elle. Fin de l'épisode. A l'université, elle avait tout fait pour l'éviter et quand elle avait remis les pieds à son cours, elle était redevenue l'étudiante discrète, coincée entre miss bavarde et miss je-sais-tout, au deuxième rang. Ses amies n'avaient rien remarqué ou avaient eu la délicatesse de ne rien dire. Et lui se comportait avec elle comme avec les autres. Comme si il ne s'était rien passé. Peut-être avait-il oublié. Elle ne savait pas. Mais mal à l'aise, elle tournait les yeux à chaque fois que son regard se posait dans le sien. Et là, aujourd'hui, on venait de lui apprendre qu'elle était enceinte. C'était lui le père, elle le savait parfaitement. Elle était catastrophée. Elle qui ne s'était pas inquiétée auparavant avait senti une bouffée de stress l'envahir. Il était trop tard pour avorter à présent. Comment avait-elle pu être aussi négligeante? Comment ne s'en était-elle pas rendu compte plus tôt? Il ne restait pas beaucoup de solution. En parler au papa? Il en était hors de question. Pourtant elle eut cette occasion quelques semaines plus tard quand elle le croisa en ville. Il s'était arrêté, l'avait salué en lui souriant. Elle avait à peine répondu. Si il savait. Mais il ne saurait pas. Dans trois mois, elle accoucherait sous X. Et sa grossesse ne serait plus qu'un terrible cauchemar. Fin de l'histoire.

Californie, Los Angeles, VENICE. 'Noam, arrête d'embêter ta petite soeur! Et toi, Samuel, finis tes céréales!' La jeune maman avait poussé un soupir de lassitude alors qu'elle terminait de remplir les sacs de ses enfants de collation. Elle aurait aimé prendre une pause, mais elle n'en avait tout simplement pas le temps. Son mari était parti tôt afin d'assurer sa garde auprès du dentiste et dans quelques heures elle serait devant son bureau. Mais avant ça, elle devait déposer les enfants à l'école. Ses enfants, ses bonheurs. Elle avait tendance à l'oublier un peu ces derniers temps. Pourtant, elle avait subi des événements pénibles qu'elle ne pourrait jamais oublié. L'accouchement de Samuel, 5 ans à présent, ne s'était pas déroulé comme prévu. Les médecins avaient du agir dans la catastrophe et Samuel était resté hospitalisé quelques mois en néonat. Elle avait déjà tellement eu du mal à tomber enceinte, elle qui d'habitude accumulait les fausses couches, qu'elle ne s'imaginait pas un instant perdre son bébé. Après tout, elle l'aimait déjà ce petit être qui avait poussé 8 mois durant dans son ventre. Elle avait donc eu peur pour la vie de Samuel. Etait-ce cette peur qui l'avait poussée à ne plus vouloir revivre une autre grossesse? Peut-être. En tout cas, une chose était certaine, elle avait un blocage à présent et même son mari n'arrivait pas à la faire changer d'avis. Pourtant, elle avait encore une envie grandissante de redevenir maman. C'était d'ailleurs elle qui avait proposé l'adoption. Son mari avait fini par accepter, à contre coeur. Pour le bonheur de sa femme. Mais lui, ne savait pas si il arriverait à aimer des enfants qui n'étaient pas les siens aussi forts que Samuel. Cette crainte s'évanouit quand il eut pour la première fois Noam dans ses bras. Ce petit bébé de quelques jours, abandonné par sa jeune mère, l'avait fait littéralement fondre quand il avait posé son regard bleu dans le sien. Samuel avait alors deux ans et il fut enchanté d'accueillir un petit frère. Noam quant à lui trouva vite ses marques dans sa nouvelle famille. L'expérience se passait tellement bien avec le petit garçon, si agréable, qu'ils décidèrent de la retenter deux ans plus tard. C'est ainsi que Thea débarqua dans ce petit monde. Elle aussi avait été abandonnée, elle aussi avait déjà une histoire difficile derrière elle alors qu'elle ne connaissait encore rien du monde. Donner un peu de bonheur à deux enfants, les considérer comme les leurs, tout partager même leurs noms. Devenir une famille aux différences variées, voilà à quoi ressemblait à présent les Lewis-Rutterford, toujours soudé quoiqu'il arrive.  

California Dream. 'Il faudra peut-être leur dire un jour' 'Je ne suis pas d'accord, cela pourrait tellement les chambouler' 'Mais enfin chérie, ils ont le droit de savoir, le droit de connaître toute leur histoire' 'Tu ne comprends décidément rien!' Enième dispute entre les deux parents, qui se terminait comme d'habitude sur une Madame Lewis qui laissait en plan un Monsieur Rutterford complètement frustré. C'était toujours ainsi, quand ils parlaient de l'adoption de Noam et de Thea leurs avis étaient à l'opposé total. Quant un voulait tout révéler à ses enfants, l'autre préférait se taire pour ne pas les faire souffrir. Résultat des courses? Noam avait à présent 16 ans et il ne savait toujours pas la vérité. Cela n'avait pas empêché le jeune homme de grandir sans trop de problèmes. Noam était l'enfant parfait: aimant avec les membres de sa famille et travaillant bien à l'école. Que demander de plus? Pourtant, l'âge de la rébellion arriva. L'adolescence pointa le bout de son nez et Noam commença alors à se disputer avec ses parents, à leur tenir tête et à sortir avec ses amis en cachette. De toute façon, il trouvait toujours un stratagème afin que ses parents ne se doutent de rien. Il passait donc la plupart de ses soirées avec sa bande d'amis. Ils étaient soudés comme les cinq doigts d'une main et passaient leur temps à refaire le monde, un verre de coca en main, à se taquiner tout en se lançant des défis de toute sorte. Enfin ça, c'était à 16 ans. Parce qu'à 17, ils eurent envie de plus. Ils sortirent alors dans les bars et commencèrent à accumuler les vices. Noam se souvenait toujours de sa première cigarette. Il était avec une amie d'enfance et elle lui avait tendu la sienne, il l'avait prise et sans hésiter l'avait portée à ses lèvres. La première bouffée lui avait arraché les poumons et il avait toussé pendant trois bonnes minutes. Il s'était alors juré de ne plus recommencer. Mais si Noam avait banni la cigarette s'était pour mieux se tourner vers l'alcool. D'abord la bière puis la tequila, le rhum et la vodka. Bien que la plupart de ses amis ne s'imposaient aucune limite, le jeune homme ne s'accordait plus que les sorties les week-ends, ainsi il arrivait à maintenir ses notes scolaires et à ne pas éveiller trop les soupçons de ses parents. Sa vie était donc rythmée par l'école, les sorties et les filles. Demoiselles qui essayaient tant bien que mal d'attirer son attention. Lui n'en avait que faire et alors que ses copains pensaient qu'il avait déjà conclu en privé, il n'était au final jamais sorti avec l'une d'elle. Inaccessible, voilà ce qu'il était.

Californie, dernière année de lycée & ses débuts à Berkeley. Je t'aime. Tout le monde rêvait d'entendre ses mots prononcés par une personne qui nous était chère. Pourtant, pour Noam, ce n'était pas le mot le plus facile à dire. Il fallait qu'il soit en confiance, qu'il pense réellement ces trois petits mots. Elle lui avait dit quelques moins avant lui. Il avait été ému, l'avait serrée tout contre lui mais n'avait rien dit. Elle l'aimait, lui aussi probablement, mais leur histoire allait très vite, il préférait prendre le temps. Elle? Clara, 16 ans. Elle était plus jeune que lui et il l'avait rencontré au lycée. C'était le dernière année et la petite nouvelle. Il faisait partie des parrains de sa promotion et elle lui avait été désignée. Si elle n'avait pas été sa filleule, il ne l'aurait probablement pas remarquée tant elle était discrète. D'ailleurs, les premières semaines, elle semblait intimidée face à ce beau jeune homme. Il fallait dire que Noam dégageait un certain charisme et quand ses yeux bleus malicieux se posaient sur vous, il pouvait faire des ravages. Il lui plaisait c'était ça. Et forcément, cela embarrassait Clara. Noam ne semblait pas s'en être rendu compte et il avait tout fait pour la mettre en confiance, l'épaulant dans cette nouvelle aventure qu'était le lycée, la faisant réviser pour ses épreuves, ... Clara avait fini par s'ouvrir un peu et une amitié avait commencé. Ce n'était qu'à la soirée de la remise des diplômes que leur relation évolua. Des filles tournaient autour de Noam et cela ne plaisait pas à Clara qui lui avait fait savoir. 'Je peux savoir pourquoi tu réagis ainsi? On dirait que tu es jalouse, que tu te prends pour.... Ho mon Dieu!' Il venait de comprendre et n'avait pas terminé sa phrase. Son diplôme fraîchement délivré, il venait d'apprendre que l'université de Berkeley l'avait retenu, tout comme il venait de se rendre compte des sentiments de Clara à son égard. Il avait passé ses mains dans ses cheveux alors qu'elle se tordait les mains, le regard posé au sol. Clara ne le voyait pas comme un ami. Lui qui avait toujours cru qu'elle n'était pas intéressée par lui, venait de se rendre compte qu'il aurait du prendre les devants depuis longtemps. Maintenant qu'il ne serait plus là pour la voir lors des intercours, qu'il serait occupé plus souvent par l'université, comment gérer un début de relation? Il secoua la tête, ne se posant plus de question. Il s'avança vers elle et l'embrassa. Simplement. Trois mois après, Clara lui délivrait son premier "je t'aime" et lui attendit trois autres mois pour lui répondre. Leur relation semblait à présent solide et il en était fou amoureux. Tout semblait allait pour le mieux, rien ne laissait présager la suite. Alors qu'il entrait en deuxième année, Clara se volatilisa. Noam la chercha partout mais il dut se rendre à l'évidence, elle était partie, sans même un mot. Etre plaqué après une année de relation sans aucune explication lui fit un choc et Noam recommença les sorties jusqu'à pas d'heures, l'alcool coulant à flot. Le jeune homme n'avait plus le goût de rien, et contrairement à ce qu'il avait l'habitude de faire il n'ouvra plus un seul livre de l'année et se mit à fréquemment sécher les cours. Dans ce même temps, il commença à vouloir se réinvestir dans des relations amoureuses, surtout pour l'oublier et se prouver qu'il plaisait encore. C'était totalement le cas et Noam n'avait pas besoin de faire grand chose pour attirer les regards. Il accumula donc les petites histoires. Cela ne durait jamais bien longtemps. Pourtant, il les aimait à chaque fois, mais se lassait vite et par crainte de les voir se volatiliser à leur tour, préférait mettre un terme à leur histoire. A chaque fois il cassait sans trop d'explication. Elles ne connaissaient pas son passé amoureux, ni cette peur de l'abandon. Elles ne comprenaient donc pas et le croyaient quand il leur disait qu'il s'était lassé. Un coeur d'artichaud lui? C'était en tout cas ce qu'il se plaisait à faire croire.

Massachussets, Cambridge, HARVARD Partir loin pour tout recommencer. Ses parents n'avaient pas bien pris la nouvelle, Thea s'était effondrée dans ses bras en larmes. Le seul qui semblait le comprendre et être heureux pour lui était Samuel. Ce n'était pourtant pas compliqué de comprendre ce qu'il venait de leur annoncer. Harvard avait répondu positivement à sa demande de candidature, il changeait complètement de cursus, abandonnant les sciences vétérinaires pour se consacrer aux sciences pharmaceutiques. Beaucoup pensaient que c'était parce qu'il venait d'échouer son année mais c'était bien plus profond que ça. Tout lui rappelait Clara et il voulait repartir à zéro, en changeant de ville et de cursus.
Cela fait à présent quatre ans que Noam est arrivé à Harvard. Il ne semble plus attaché à Clara, du moins personne n'en a entendu parler. Il continue toujours à accumuler les petites histoires, plaquant toujours les demoiselles par peur de l'abandon. Côté études, il n'a plus jamais recommencé une année et se montre assidu en cours. Les sciences pharmaceutiques le passionnent et il a de grands projets quant à son avenir professionnel. Afin de financer ses études, il s'est fait engager dans un Starbuck Coffee et il semble se plaire dans cet endroit, s'entendant tout aussi bien avec ses petits camarades de classe qu'avec ses collègues de travail.