Emrys & Priape
J’étais loin de me douter que mon frère, en plus de toutes les galères que nous traversions déjà, avait en plus des problèmes avec Eliah et qu’ils avaient même rompu. Je l’écoutais me raconter ce qu’il s’était passé pour qu’ils en arrivent là.
« Tu sais je suis sûr qu’elle ne pensait pas à mal en te cachant cela… » Je savais que j’avais moi même raté quelques épisodes importants de la vie de Caly, pas parce qu’elle avait l’intention de me les cacher, juste parce que j’étais carrément absent et focalisé sur bien d’autres choses ces derniers temps et qu’elle n’avait donc pas eu l’occasion de se confier à moi…
«Peut être qu’en en rediscutant au calme tous les deux vous pouvez toujours parvenir à vous réconcilier. » fis-je avec une pointe d’espoir dans la voix pour tenter de lui remonter le moral. Cette rupture avait du être la goutte d’eau pour mon frère. Après tout, il m’avait jamais paru aussi heureux et épanoui que cet été après s’être mis en couple avec la jeune femme.
« Une chose est sûre, Eliah tient à toi… » Je ne supportais pas de le voir aussi mal, j’aurais fait n’importe quoi, dit n’importe quoi, juste pour qu’il retrouve un semblant de sourire. Je ne trouvais rien de mieux que de l’attirer contre moi et de l’entourer de mes bras. Après lui avoir assuré que j’étais là pour lui, Em’ eut un petit rire et se dégagea rapidement de mon étreinte et je le reconnus bien là : on était des Zacharias quand même, on allait pas rester des heures à pleurnicher dans les bras l’un de l’autre. Il tourna alors la tête vers moi et me posa une question qui me hantait :
Crois-tu qu'on peut surmonter ça ? Et une foule de questions suivirent. Questions auxquelles bien sûr je n’avais pas de réponse. On avait survécu au décès de Thalya. Mais à quel prix ? Notre famille n’avait jamais plus été la même… Emrys était parti, Arté s’était engagé dans l’armée, j’avais sombré dans la drogue. Et à présent, des années après, une nouvelle épreuve nous tombait dessus, alors on était en droit de se demander dans quel état on allait s’en sortir. Certainement pas indemnes. Lorsqu’il évoqua nos parents, une vague de colère grandit en moi. Déjà, depuis les révélations sur la responsabilité de notre père concernant le départ d’Emrys, je n’avais plus eu de contact avec lui. Mais de savoir que notre propre mère n’avait pas eu le courage de nous annoncer la terrible nouvelle du décès d’Arté en personne, cela n’avait fait qu’alimenter ma rancœur à l’égard d’eux.
« On a du être adoptés, on est trop géniaux pour être leurs enfants… » lançai-je sur un ton léger malgré l’amertume que l’indifférence de mes parents avait provoqué en moi.
« Heureusement que t’es là toi... » confiai-je à mon frère. Une idée surgit alors dans mon esprit.
« Tu sais quoi Em’ ? Je crois qu’on devrait aller le voir tu sais… Arté et Thalya… Là bas, à Athènes. Lui dire au revoir une dernière fois… » Ne pas avoir pu assister aux funérailles de notre propre frère, ne pas lui avoir fait nos adieux dignement, voilà probablement ce qui nous manquait pour pouvoir accepter sa mort, avancer et faire notre deuil.