(flashback) Mode punching ball activated PV Read

Le jeune homme avait passé la soirée à boire. Mais pas seulement. Il ne savait pas où il s'était procuré ce joint, ni même ce que c'était réellement, mais cela lui avait fait tellement de bien qu'il en avait pris un deuxième. Et c'était chancelant, l'esprit embrumé par l'alcool et la drogue qu'il se décida à revenir dans sa chambre, à l'hôtel. L'état de béatitude dans lequel il se trouvait lui faisait tant de bien qu'il allait certainement s'écrouler dans son lit telle un rocher tombant d'une falaise. Sans doute que Ryley allait lui sauter dessus et lui poser des tas de questions, mais il prétexterait être fatigué et s'endormirait. Sa maladie était devenue une bonne excuse ces temps-ci. Depuis la dispute et depuis qu'il avait commis cet acte odieux... Il devrait en parler à Ryley, mais comment ne pas le perdre ? Ils venait tous deux tout juste de se trouver... Et à cause de sa connerie éternelle, il brisait les derniers moments de bonheur de sa vie. Il poussa un soupir alors que la montée des escaliers lui paraissait la montée des plus hauts sommets. Mais quel idée de se mettre si mal ? N'était-il pas censé être le garçon responsable et parfait que l'on connaissait ?

Il arpentait un couloir, sans être sûr d'être dans la bonne direction, lorsqu'il entendit une voix familière. Il leva les yeux : Nevada. Il poussa un soupir. Il avait pas envie de la voir. Pour la première fois de sa vie, il avait pas envie de la voir, mais en même temps, il était plus que zen, la drogue faisant son effet. Il ôta le joint qu'il était encore en train de fumer de ses lèvres, toussant un bon coup, avant de prendre la parole. « Non c'est pas moi, c'est le pape. » dit-il en s'approchant de la silhouette de son amie. « Si t'avais parlé à l'écureuil, il te l'aurait dit. D'ailleurs, il est là-bas.... » continua-t-il en tendant la main vers un espace vide. N'importe qui aurait compris aussitôt qu'il n'était pas clean le moins du monde. « T'en veux ? » demanda-t-il ensuite en tendant le joint à la demoiselle, sans réfléchir. Il devait puer l'alcool et son sourire et sa voix chancelante venaient s'ajouter aux preuves accablantes.

Read était totalement dans la mouise, il se sentait s'envoler un peu partout et respirer difficilement. C'était dur, très dur dans son état de santé fragile de jouer ce petit jeu. Un jeu plus que dangereux. Mais après tout, il se sentait comme s'il n'avait rien à perdre. Il était bloqué dans une situation qu'il voulait fuir, il voulait juste savoir comment vivre et d'ailleurs même s'il ferait mieux de ne pas arrêter de vivre. C'était tout son passé et toutes les emmerdes présentes qui lui avaient sauté à la gorge et le jeune homme était comme cerné par des idées joyeuses et funestes à la fois. Savoir qu'il serait papa devait le rendre heureux, mais la menace de la mort était si lourdement présente qu'il redoutait de ne jamais même voir son enfant. Et Ryley... Ryley l'aimait tant et lui jouait avec ses sentiments en le miroitant, en le trompant. Il avait honte, honte de l'avoir trahi et s'être ainsi trahi lui-même.
Mais alors qu'il souriait stupidement à son ami, il sentit la main de celle-ci venir retomber rapidement et violemment contre sa joue. Une gifle. Nevada venait de le gifler. Elle s'était emparé du joint avant qu'il ait pu faire un seul geste et l'avait jeté par terre. Read ne dit pas un mot, ignorant sa question et regardant le joint écrasé comme si c'était la plus affreuse des choses qui venait de se passer. « T'aurais pu juste dire que t'en voulais pas hein... je l'aurais éteint. » dit-il en titubant, se rattrapant au mur, avant de rire aux éclats. Il riait à gorge déployée. « Tu m'as frappé... » dit-il doucement, alors qu'il continuait à rire nerveusement. « L'écureuil est témoin, tu m'as frappé ! » s'exclama-t-il ensuite en s'écartant vivement de sa meilleure amie. « Ca commence par toi et après c'est tous les autres !» continua-t-il, en divagant totalement. Il rit de nouveau, se caressant la joue dans un massage, elle avait tout de même giflé fortement. Il se pencha vers elle. « Tu veux savoir ce que j'ai dans la tête ? J'ai dans la tête mon petit ami.... » reprit-il ensuite.

Le secouriste restait étonné face à la réaction de sa meilleure amie. Son cerveau fonctionnait très mal et il ne comprenait pas vraiment ce qu'elle était en train de dire. Il se gratta nerveusement la tête, lançant un regard plein d'incompréhension à son interlocutrice. On aurait pu croire qu'il venait de reprendre un peu ses esprits, mais ce n'était nullement le cas. D'ailleurs, il se remit à parler, et ce qu'il dit fut la nouvelle preuve de son état désastreux. « Tu t'en tapes ? Mais je comprends pas... parce que tu te tapes pas, c'est moi que tu tapes... Alors ce que tu dis n'a aucun sens. T'es sûre que t'as pas bu quelque chose de trop fort ? » demanda-t-il. Il rit ensuite de nouveau fortement, se perdant lui-même dans ses explications. Puis il tituba, avant de se pencher de nouveau vers elle. Nevada ne le croyait pas. Il fit la moue et leva l'index, l'air solennel.
« J'ai un petit-ami maintenant et il embrasse très très bien. J'adore son odeur en plus et puis, il m'aime trooooooop. Je crois qu'il va me demander en mariage un jour, mais chut c'est un secreeet, y a que l'écureuil qui sait si c'est vrai.... Et je vais aussi être papa dans environ 8mois, voire un peu moins. Mais ça aussi c'est un secret ! Si papa le sait, il va m'enfermer dans le placard au fond de la cuisine ! » déclara-t-il. Puis il éclata à nouveau de rire, tournant la tête vers l'endroit où se trouvait le présumé écureuil de ses hallucinations, observant longuement comme s'il entendait quelque chose. Il rit « Oui, oui comme tu le dis ! T'es plutôt malin pour un écureuil ! » s'exclama-t-il en direction du vide en hochant la tête en signe d'acquiescement. Et de nouveau un rire écarlate et clair. Il fit quelques pas en arrière et sourit à Nevada. C'était presque son sourire normal cette fois-ci, tout comme le visage plus sombre qui suivit. Comme s'il se rendait compte peu à peu de son comportement, de ses mots.

Tout tournait un peu trop autour de Read alors qu'il essayait tant bien que mal d'ignorer l'écureuil et de se concentrer sur son interlocutrice. Celle-ci avait l'air absolument furieuse, pourtant elle n'avait absolument aucune raison de l'être. Notre jeune homme fronçait les sourcils en l'observant, se grattant de nouveau la tête. Nevada avait l'air de ne pas trop aimer l'écureuil pourtant si sympathique à qui il s'adressait. Titubant, il posa un doigt contre les lèvres de son amie.
« Chut ! Ne dis pas ça, tu vas lui faire de la peine ! » Puis il rit stupidement, s'écartant de très peu de pas, avant de sourire de nouveau. Pourquoi avait-il tant bu et fumé ce joint à la con ? Il ne le savait pas lui-même. Certainement que si sa meilleure amie lui racontait cette rencontre hasardeuse et rocambolesque le lendemain, il ne s'en souviendrait pas. Du moins, il ne pourrait pas se l'expliquer. C'était un peu comme s'il avait fini d'être lui-même au fur et à mesure depuis le décès de Mary. Read avait ensuite repris des couleurs grâce à Viki, mais après leur divorce, il était redevenu ce garçon paumé qui ne savait même pas s'il était placé au bon endroit. A présent qu'il avait appris la grossesse de River et l'amour que lui vouait Ryley, c'était un peu comme si deux obus lui avait transpercé l'esprit. Il ne vivait plus dans le même monde, ou plutôt, il avait terriblement peur de vivre dans ce monde qui était le sien et celui du reste de l'humanité... Alors il avait dû trouver un moyen de fuir. Et ce moyen était bien plus stupide que tout ce qu'il aurait pu imaginer d'ordinaire.

« Je suis pas raide dingue de lui, c'est lui qui l'est. Il m'a dit ça sur la plage. Alors je l'ai embrassé et paf !!! » continua-t-il en riant. C'était un comportement puéril et indigne de lui, de l'homme que tout le monde connaissait, mais il était lancé pour dire encore des choses bien pires. « C'est pareil pour la fille, celle que j'ai mise enceinte. Je la connaissais même pas. Je l'ai rencontrée le premier jour du camp d'été... C'était aussi sur la plage. Et plouf, j'lui ai mis la petite graine comme on dit. » Cette fois-ci il ne rit pas, il ne sourit même pas bêtement. Peut-être qu'une part de son esprit se rendait compte, malgré le fait qu'elle soit embrumé par l'alcool, à quel point ses actions avaient été graves. C'était l'effet papillon. « Bon, maintenant elle est enceinte et je suis obligé de la connaître ! Elle s'appelle River et je crois qu'Alek la connaît. Alors ça boucle la boucle ! » Il fit quelques pas avant de déposer un bisou sur la joue de Neva. Il disait et faisait n'importe quoi. Un manque de respect pour lui-même, pour ceux dont il parlait, mais aussi pour son interlocutrice.

Read regardait son amie avec un regard presque vide alors qu'il ne cessait de tourner dans son esprit les mots qu'il venait tout juste de prononcer. Il ne savait plus s'il racontait n'importe quoi ou si tout était véritable. C'était juste un casse-tête dans son état. Il rit de nouveau bêtement lorsque Nevada lui demanda s'il était fier de lui. Question bête. Réponse bête.
« Ca dépend si le bébé est beau. » Read n'aurait jamais eu des propos si irrespectueux de tous dans une situation normale. A vrai dire dans une situation normale, il se serait rendu compte que Neva était fatiguée, qu'elle ne pouvait pas discuter avec lui, et surtout il n'aurait jamais étalé sa vie ainsi. Non pas qu'il ne comptait plus sur Nevada, mais depuis qu'elle était enceinte, il avait tenté de l'écarter de ses propres soucis, de sa maladie et de tout le néant qui était le sien.

Il s'immobilisa un instant face à la nouvelle question de son interlocutrice, ne sachant plus vraiment que répondre. Il fit mine de réfléchir avant qu'une étincelle de lucidité traverse son regard et qu'il se remette à rire. C'était juste désespérant. Heureusement que son père ne le voyait pas dans cet état, où il l'emmènerait aussitôt en cure, ou pire, il le ferait enfermer quelques temps dans un hôpital psychiatrique pour que son cher fiston puisse traverser cette passe difficile. Il fallait avouer que Read ne voyait plus le monde en rose depuis à présent quelques temps, la vie n'avait pas été tendre.

« Bah t'es conne ou quoi ? Je suis pas riche, je suis pas particulièrement beau ni intelligent, alors pourquoi elle me dirait que c'est moi le père si c'était pas le cas ? Tu crois pas qu'elle aurait choisi un mec beaucoup plus avantageux ? »Il fit mine de réfléchir. « A part si c'est juste une question de sexe. On est plutôt complémentaire de ce côté-là. »
Alors là, ce devait certainement être la cerise sur le gâteau, le couronnement du roi des bouffons.