Kinda Outta Luck - Olive

Je sais que lorsque j’ai pris la décision de tout arrêter, je n’ai pensé qu’à moi. Je ne t’ai pas demandé d’explications, je ne t’ai pas laissé la chance de t’expliquer ou quoi que ce soit d’autre. J’ai pensé à moi et seulement à moi, préférant me protéger que de t’épargner. C’est égoïste mais s’il y a bien une chose que j’ai appris dans la vie c’est qu’il faut savoir être égoïste de temps en temps pour s’en sortir. Mon regard sur toi, je laisse un léger rire se glisser entre mes lèvres et souffle Un petit peu… Mais je crois que je ne peux pas t’en empêcher. C’est juste que ça ne sert à rien d’être désolé et que je ne t’en veux pas d’être la personne que tu es, que tu as été et que tu voulais ou que tu voudrais être. Si cela passe par une excessivité de “je suis désolé”, ainsi soit-il. Et je sais que cela cache quelque chose de plus profond. Personne ne s’excuse autant s’il n’a pas quelque chose de douloureux ancré dans son âme. Comment je peux en être si sûre ? Je m’excusais de tout il y a quelques années encore. De faire des erreurs, de respirer et même de vivre. Mais ce n’est pas à moi de creuser. Nous sommes chacun sur notre propre timeline et nous devons vivre à notre rythme. Tu te redresses, ce qui rompt le contact et laisse une drôle de fraîcheur sur ma main. Cela me perturbe alors je rapproche mes bras de moi, glissant mes mains dans mes poches. Ce n’est pas pour mettre de la distance, juste que c’est bizarre, sans ce contact. J’acquiesce à tes premiers mots. Je suis en capacité de comprendre beaucoup de choses mais peut-être pas tout. Il risque d’y avoir plus de questions par la suite mais pour le moment, respectueusement, je t’écoute. L’accident de moto, j’étais au courant. Quand on est un sportif, en plus d’être le fils de deux célébrités, notre vie est dans tous les journaux et magazines. Mais le reste, effectivement, je ne le savais pas. Même pas pour la dépression. Je n’ai jamais trop cherché de papiers sur toi pour la simple et bonne raison que je sais que les journalistes racontent majoritairement des bobards. Et puis, ne serait-ce pas une certaine violation de ta vie privée ? C’est clairement pas ce que je voulais pour nous. Et je suis contente de ne l’avoir jamais fait parce que je n’y aurais pas cru et la réalité m’aurait prise de plein fouet. Je déglutis difficilement, choquée d’apprendre tout cela. J’ai du mal à comprendre les décisions qui t’ont mené à ça. Mais je suppose que l’accident qui t’a éloigné de ton rêve était partiellement de ta faute. Alors, quand on se sent coupable, on fait des choses regrettables. Juger autrui n’a jamais servi à rien et ne servira jamais à rien. Et j’entends que tu as été assez fort pour te juger toi même et te sortir de ce brouillard dans lequel tu étais. Il y a des jours plus sombres que d’autres mais c’est normal. Je me redresse rapidement et me glisse à tes côtés sur une chaise tirée de la table voisine. J’ai toujours eu besoin du contact humain pour me sortir de mes pires moments, comme pour sentir que je n’étais pas seule et que tout est bien réel. La douleur, certes, mais aussi la chaleur humaine et le soutien des gens autour de moi. Un bras glissé autour de tes épaules, l’autre sur ton ventre, je souffle Je suis désolée que tu ais eu à vivre cela et que tu pensais que c’était une solution pour t’en sortir. Nous avons vécu la même chose et n’avons pas réagi de la même manière. Je suppose qu’elle est là, toute la beauté de la vie. Je sais ce que c’est, la dépression. La manière dont on a plus envie de rien, de sortir, de vivre et que chaque matin, on se dit que si respirer n’était pas inné, on serait mort depuis longtemps. Parce que je l’ai contemplé plusieurs fois, la mort. Je l’ai même suppliée de venir me chercher mais elle ne l’a jamais fait. Sale égoïste qui fauche ceux qui n’ont rien demandé et laisse souffrir des âmes pendant des années. Mais je crois qu’elle a vu ce que je ne voyais pas : la lumière que je pourrais apporter à certaines personnes. Écoute si au moins ça t’a permi d’ouvrir les yeux là-dessus, je ne regrette pas ce que j’ai fait. J’aurais dû m’y prendre autrement mais ça, c’est une discussion que je ne souhaite pas avoir pour le moment. Un jour peut-être. Est-ce que tu peux me promettre que la prochaine fois que t’auras envie de toucher à un joint, tu m’appelleras ? Si je dois être là pour toi, je le ferai. Nous ne sommes plus ensemble mais tu as compté pour moi et tu compteras encore bien longtemps, je le sais.

Il y a des histoires qui commencent, fleurissent et meurent tous les jours. C’est la beauté de la vie, en quelque sorte. La nôtre n’a pas survécu à la tempête qui s’est imposée à elle mais c’est ainsi. Ça arrive et au moins, maintenant, nous n’avons plus des dizaines de questions qui se glissent dans nos esprits à longueur de journée. Tu sais ce qu’il en est, je sais aussi ce qu’il en est et c’est peut-être la meilleure chose qui soit. Mais je veux juste que tu gardes ce chemin, cette direction où ces choses qui bousillent ton corps et ton esprit, ne font plus partie de ta vie. Fais attention, je fais pas trop peur comme ça mais je peux être très tenace et effrayante. Je ris légèrement, mais c’est pour remettre un peu de légèreté dans nos vies, dans ce moment, mais aussi pour bien te faire comprendre que si tu venais à me décevoir une seconde fois, les choses pourraient changer et pas dans le bon sens du terme. Oui, je vais bouger mais tu sens bon la lessive. Alors trente secondes. Laisse moi trente secondes de plus avant de me re-déplacer face à toi, de profiter de mon chocolat chaud et de ma pâtisserie. Ça fait peut-être même un peu plus que ça. Je me redresse, mes bras quittant ton corps et je retourne d’où je viens. Je croque dans ma pâtisserie, bois une gorgée de ma boisson et demande, Alors, t’as quelqu’un dans ta vie ? C’est la curiosité qui m’appelle, l’envie de savoir si je suis la dernière qui a eu le titre de petite amie ou si j’ai déjà une remplaçante, quelques mois seulement après notre rupture. Pas de jalousie, juste de la curiosité, beaucoup de curiosité - qui ne devrait pas durer éternellement, j’ai un cours de patinage dans une petite demi heure.

Il y a des moments où il faut poser les armes au sol et ouvrir son coeur. C’est ce que nous avons fait tous les deux, pendant ces quelques minutes de discussions. Il semble que je te devais une explication et moi, je crois que j’avais besoin d’entendre que ce n’était pas quelque chose que t’avais toujours fait pendant notre relation et que tu continuais à le faire. Je n’avais aucune envie de me rendre compte que je m’étais complètement trompée sur ta personne. Je crois que ça aurait été fatal et bien trop déstabilisant pour moi. Je ne suis pas la plus habile qui soit avec les relations humaines et personnelles mais à ce point ? Come on ! C’est donc ça, tu avais peur de moi. Et je ne peux m’empêcher de laisser un sourire se dessiner sur mes lèvres. Qu’est-ce que c’est mauvais, comme excuse. Mais j’adore l’idée, je ne peux le nier. Faire peur, imposer le respect et la crainte assez pour que tu prennes tes distances mais pas trop pour que tu restes trop loin de moi. Je profite de ces quelques moments dans tes bras avant de retrouver ma place initiale pour une légère discussion, un moment partagé avant de devoir m’en aller pour remplir mes obligations. Ce n’est pas que la librairie va être vandalisée si je ne suis pas là mais je dois être là, juste au cas où. Et je dois réviser aussi, accessoirement. Mes examens ne se prépareront pas tout seul, mes dossiers non plus, à mon grand regret. J’aime ce que je fais mais j’aimerais avoir un peu plus de temps pour le patinage. Un jour peut-être. Et il y a une question qui me taraude alors je la pose. La franchise n’a pas toujours été mon fort mais je sais que je dois arrêter de me cacher derrière ma tignasse blonde. Je t’écoute et acquiesce. Je ne sais même pas pourquoi j’ai demandé ça. Peut-être pour voir la véracité de tes propos, voir si je comptais vraiment pour toi ou si je comptais si peu que tu m’as remplacé en un claquement de doigts. Non plus. Que je souffle rapidement, croquant à nouveau dans ma pâtisserie. De toute façon, tu veux trouver comment quelqu’un quand t’es tout l’été à Boston et qu’eux, ils visitent le monde ? Nous vivons dans deux mondes différents, je le sais. Mais mon été à travailler m’a permis de me concentrer sur moi et de me préparer à cette dernière année d’étude. Ce n’est pas plus mal.

Assise face à toi, un sourire de façade sur le visage, j’essaye de tirer le vrai du faux, de voir ce que tu vas me dire, me servir. Je sais que tu n’es pas un menteur mais je sais aussi que tu n’es pas quelqu’un qui est fait pour rester seul. Tu as bien trop d’énergie et de lumière à donner au monde pour rester de ton côté et comme tu l’as dis, tu es maintenant libéré et peux avancer. C’est étrange à entendre mais je ne peux pas t’imposer quoi que ce soit. Notre histoire s’est arrêtée parce que j’en ai décidé ainsi alors je n’ai pas mon mot à dire. Un faux sourire caché derrière ma tasse de chocolat chaud, je souffle C’était tout comme. Boston l’été est une ville pleine de touristes et désertée par ses étudiants. Enfin, j’ai pu me concentrer sur moi même, avancer à ma façon et cela est le plus important je crois. Se reconstruire avec des bases encore plus solides pour ne pas se laisser écraser par la vie. Je te regarde et mordille l’intérieur de ma joue pour ne pas laisser mes commentaires s’infiltrer entre nous. Un dernier bout de croissant ingurgité, je lance Tu vas faire fureur, sois prêt pour ne plus avoir de temps libre. Je t’adresse un clin d’oeil et finis ma boisson avant de me lever de ma chaise. J’ai un cours dans une demi-heure, il faut que j’y aille. J’attrape mes affaires, me rhabille rapidement, de manière décousue et brouillonne ce qui jure avec ma grâce naturelle. Si tu as besoin de moi, tu sais où me trouver. Que je souffle en m’approchant de toi. Un tendre baiser sur ta joue, je souris avant de te faire un signe de main et de quitter les lieux aussi vite que possible. Une démarche rapide et gracieuse, pratiquée quarante heures par semaine sur la glace. C’est un peu comme si je flottais. Et à bientôt, João. Je l'espère.

rp terminé.