jude & billie ⊕ good old days

Une foule de passagers bloquaient le passage à la douane en piaillant je ne sais quelle plainte dont tout ce que je retirais était que ça faisait déjà trente-cinq minutes qu'ils me faisaient poireauter. Je n'étais pas d'humeur à attendre et je trépignais d'impatience depuis vingt bonnes minutes, prête à insulter tout ce qui ne bougeait pas. Irritée, je pris la décision de forcer le passage et de jouer des épaules pour les dégager du chemin en tirant ma simple valise derrière moi. J'avais emmené peu d'affaire, je n'avais qu'un bagage que j'avais pu prendre en cabine du fait du respect des dimensions de celui-ci et pourtant, j'attendais aussi longtemps que ceux qui récupéraient leurs valises sur les tapis à cause de ces abrutis. Le trajet Cambridge-Orlando était plutôt court et rien n'était venu perturber le vol ; ni les turbulences, ni les passagers désagréables. Tout s'était déroulé de façon impeccable et ces débiles vêtus de sandales et de bobs venaient me gâcher mon plaisir d'un voyage sans taches. Lorsque l'un d'entre eux me jeta un regard peu avenant tandis que je le poussais hors de mon chemin, je crus que j'allais devoir faire de la purée de touristes quand ma réplique acerbe le relança dans une nouvelle sorte de plainte. Je lui adressai un majeur peu amical et traçai mon chemin, pressée de retrouver mon ami, qui devait déjà m'attendre. Nous avions convenu de passer la première journée à Disney World, puis je rencontrerais Aaron demain, dès qu'il serait réveillé. J'étais déçue de ne pas voir sa petite bouille directement, mais je savais que Jude et moi allions passer une journée inoubliable à côté de ça. Enfin, je passai les portes coulissantes qui me rendaient ma liberté et j'accélérai un chouïa le pas, ma valise suivant bruyamment dans mon dos. Il ne me fallut que quelques secondes pour apercevoir la tignasse familière de Jude un peu plus loin. Je lui fis un sourire et agitai la main, arrivant presque en courant près de lui. « Désolée de t'avoir fait attendre, » dis-je en arrivant à proximité de lui. « J'ai eu droit à une bande de débilos incapables. » Je ris malgré moi et me lançai dans ses bras sans attendre un mot. Cette coupure pour aller voir Jude était carrément la bienvenue en ce moment, ça me faisait un break du drame qui était toujours en place dans ma vie à Cambridge. Je l'étreignis quelques secondes puis le relâchai. Je le toisai du regard en faisant une grimace. « T'as déjà trop d'avance sur le cramage, comment j'vais pouvoir te rattraper ? »

J’avais hâte d’y être. En fait, je ressemblais à un gamin dans l’avion totalement impatient d’attérir. C’était la première fois de ma vie que j’allais à Disneyland parce que ma mère n’ayant jamais été très riche, nous n’avions jamais eu l’occasion d’y aller. De un, il fallait aller soit jusqu’à Orlando ou Los Angeles, et de deux, ça n’est vraiment pas donné. Alors avec Billie, lorsqu’on décida de se voir à Orlando et de passer un moment agréable à Disneyworld. Bien sûr, je lui en voulais toujours un peu de nous avoir caché la vérité et de s’être fait passée pour morte, mais honnêtement, j’étais beaucoup trop content d’avoir retrouvé ma Billie pour être rancunier. Et puis, avec son retour je me sentais moins seul, parce que je savais qu’elle était là même si elle n’était pas venue au Summer Camp. Elle avait pas mal de trucs à régler avec son retour et je me doutais aussi qu’elle voulait régler les choses avec Roxanna bien que ça semblait plutôt ardue. Je ne voulais pas me mêler de leurs histoires, surtout que la première fois où j’avais essayé de défendre la cause de Billie auprès de Roxanna, elle m’avait raccrochée au nez. Si elle ne voulait pas lui parler, alors tant pis pour elle, mais elle faisait une grosse erreur. Je ne voulais pas embêter Billie avec ça de toute manière, juste passer la journée avec elle. Nous nous étions donné rendez-vous à l’aéroport d’Orlando car mon avion arrivait avant le sien. J’attendais depuis près d’une heure quand son vol fut affiché porte 23 et je l’attendais sagement là-bas, les bras croisés en essayant de cacher mon excitation de gamin. Lorsque je vis sa main s’agiter, je souris grand et je lui fis signe à mon tour, marchant vers elle. « Désolée de t'avoir fait attendre, » Je secouais la tête, « Mais non, t’inquiète pas pour ça ! » - « J'ai eu droit à une bande de débilos incapables. » J’éclatais de rire et je passais mes bras autour d’elle, la gardant dans mes bras. Ca faisait vraiment beaucoup de bien de la retrouver. Elle se détacha alors de moi pour me regarder, « T'as déjà trop d'avance sur le cramage, comment j'vais pouvoir te rattraper ? » Je levais les yeux au ciel en haussant les épaules, regardant mes bras. C’est vrai que je bronzais assez vite. « Tu ne pourras pas ! Je serais toujours plus bronzé que toi et tu me jalouseras… » Je souris en coin et je pris sa valise, « Laisse-moi prendre ça. » Ouais, je pouvais être gentleman quand je le voulais ! Je commençais alors à marcher vers la sortie de l’aéroport, il faisait un super soleil, ça commençait bien pour passer une bonne journée à Disney ! « T’as fait bon vol ? », demandais-je à la jeune femme en la regardant ma montre. On allait arriver tout pile pour l’ouverture du parc.

L'avantage avec les vols aussi courts, c'était qu'à l'arrivée, vous ne vous sentiez pas sales ou infectés par les germes avec lesquels vous aviez cohabité pendant des heures et des heures. Je me sentais fraiche et prête à affronter la journée d'hystérie qui nous attendait, Jude et moi. C'était une première pour nous deux ; je savais que Jude n'avait jamais eu l'occasion d'y aller à cause des problèmes d'argent de sa mère tandis qu'il grandissait. Pour ma part, j'avais été bien trop enrobée dans mes études quand j'étais enfant pour penser à ce genre de distractions, puis quand j'avais enfin commencé à me lâcher un peu à l'adolescence, ma vie avait pris des allures de polar et j'avais eu un millier d'autres choses auxquelles penser depuis. Donc pas de Disney World pour la Billie non plus. J'ignorais si l'on se sentait aussi excité à la perspective d'aller y passer une journée au bout de trois ou quatre fois, mais pour notre première aventure, Jude et moi regorgions de surexcitation. « Tu ne pourras pas ! Je serais toujours plus bronzé que toi et tu me jalouseras… » Levant les yeux au ciel, je fis une grimace peu mature et envisageai déjà de le badigeonner d'indice 50 de gré ou de force. Il me prit la valise des mains et je le laissai faire sans rechigner ; les gentlemen, c'était rare à notre époque alors il fallait en profiter. « Tu te prends pour mon majordome ? » ne pus-je m'empêcher de glisser en me mordant la lèvre, pour me retenir de rigoler. Avec Jude, j'avais décidé de ne pas me poser de questions. Si des non-dits persistaient entre nous à cause des récents événements, ils se régleraient d'eux-mêmes avec le temps, je refusais de pousser le problème. Je mourrais d'envie de retrouver notre bonne, vielle relation, alors je laissais le naturel revenir au galop près de lui. « T'as fait bon vol ? » Comme je l'avais dit, mon vol avait été nickel. C'était l'arrivée qui m'avait posé problème. « Pas de turbulences, pas de turbulents, » répondis-je avec un sourire en coin. Nous nous mîmes en route pour sortir de l'aéroport et rejoindre la zone de navettes. Je regardai l'heure sur sa montre aussi, me penchant par-dessus son bras pour regarder. Ma petite manœuvre manqua de le faire trébucher et je me poussai sur le côté en riant de ma propre gaucherie. Il y avait été habitué, mais il devait quand même avoir envie de m'étrangler des fois. « Et toi, ça a été ? Et Key West, c'est comment ? D'ailleurs, les parcs ferment à onze heures ce soir, donc je nous ai pris une suite dans un des hôtels. Tu crois que ça ne dérangera pas ton pote pour Aaron ? Sinon on part plus tôt. » Quand je terminai mon petit monologue, je montrai un taxi libre à Jude et nous nous en approchâmes. Le conducteur sortit de l'habitacle pour se charger de ma valise ; bon, elle n'était pas lourde du tout et j'aurais pu le faire moi-même mais il y avait toujours ce truc avec la galanterie dont je m'amusais.

C’était dommage qu’Aaron soit si jeune, car ça aurait la possibilité de l’emmener à Disney ce qui n’était pas forcément commun lorsqu’on vit à Cambridge. Parce que les billets d’avion plus le ticket pour aller à Disney en sachant que si on vient de si loin, autant rester un week-end entier, ça faisait vachement cher le petit week-end. Mais Billie et moi étions des enfants dans l’âme et ça nous permettrait de faire toutes les attractions pour adulte sans être handicapés par la présence des enfants. Je voyais ce week-end comme la possibilité de nous retrouver en fait. Je voulais qu’on retrouve notre complicité d’avant et qu’on oublie tout ce qui pouvait avoir un rapport avec les tentatives de meurtre, le FBI ou ce genre de trucs. Car si j’avais eu une année difficile, je n’osais même pas imaginer celle de mon amie qui avait dû rester caché tant de temps. Un sourire se dessina forcément sur mes lèvres quand je vis la brunette avancer – ou que dis-je, courir – vers moi pour atterrir dans mes bras. Je pris soin de prendre sa valise et j’eus forcément le droit à une petite remarque dont j’aurais dû me préparer, parce que c’était Billie quoi. « Tu te prends pour mon majordome ? » Je ris légèrement en levant les yeux au ciel, ne prenant pas la peine de répondre à sa remarque. Bien sûr, j’étais son majordome, et puis quoi encore ? La galanterie, ça existe encore de nos jours ! Je lui demandais si elle avait fait bon vol en marchant vers la sortie de l’aéroport et elle me répondit aussitôt, « Pas de turbulences, pas de turbulents, » Je souris et je regardais l’heure, constatent que nous étions piles dans les temps et bien entendu, la demoiselle, en tentant de regarder l’heure elle aussi, manqua de trébucher et là, je ne pus m’empêcher d’éclater de rire, sans aucune retenue. « Eh bien, ta maladresse elle n’a pas changé ! », lançais-je entre deux rires. « Et toi, ça a été ? Et Key West, c'est comment ? D'ailleurs, les parcs ferment à onze heures ce soir, donc je nous ai pris une suite dans un des hôtels. Tu crois que ça ne dérangera pas ton pote pour Aaron ? Sinon on part plus tôt. » J’hochais la tête, « Oula, doucement les questions ! » Je souris et je m’avançais avec elle dehors et elle me montra un taxi vers lequel nous avancions, « Key West c’est juste… le paradis sur terre ! Pour l’hôtel ça me va, j’ai prévenu ma cousine qui le garde que je risquais de ne pas rentrer ce soir donc elle a tout ce qu’il faut pour Aaron… » Le chauffeur de taxi s’occupa de la valise à Billie et je lui ouvrais la porte pour la laisser entrer dans la voiture en premier : autant rester galant jusqu’au bout. Je m’installais à ses côtés dans la voiture et j’attachais ma ceinture alors que le chauffeur prit place au volant pour nous demander où nous allions. Je lui répondais que nous allions à Disney et il nous mit alors en route. Je regardais à travers la fenêtre et je m’adressais à Billie, « Il fait hyper beau, je sens qu’il va y avoir du monde dans le parc. Tu as déjà été là-bas ? » Je tournais le regard vers la demoiselle et j’ajoutais, « T’imagine même pas à quel point j’suis excité, j’me sens comme un môme de huit ans ! » Je ris un peu et je détournais à nouveau mon attention dehors.

Le soleil brillait dans le ciel et présageait une grosse journée de beau temps. Tant mieux ; ça allait être plus agréable pour se promener dans les parcs. J'avais regardé rapidement sur internet avant de partir et avais vu qu'il existait au moins six ou sept parcs, rien que pour Disney World. D'après ce que j'avais vu par rapport aux attractions à sensations fortes, nous allions plutôt nous perdre dans Magic Kingdom et les Hollywood Studios une bonne partie de la journée, car c'était là que se trouvaient les plus intéressantes. Ni Jude, ni moi ne savions si nous supportions ce genre de trucs et pourtant, nous avions une envie folle d'y foncer tête baissée. Ça allait être fun si l'on ressortait de là à moitié sonnés. Je m'engouffrai dans le taxi en remerciant Jude, qui m'avait tenu la porte ; eh beh oui, je sais aussi être polie quand je ne me moque pas de lui. Il s'installa à son tour et indiqua au chauffeur de prendre la direction de Disney. Le paysage défila sous mes yeux pendant quelques minutes, puis Jude nota à son tour le temps resplendissant. « Il fait hyper beau, je sens qu’il va y avoir du monde dans le parc. Tu as déjà été là-bas ? » Je secouai la tête pour lui répondre que non, je n'y étais jamais allée auparavant. Je devais avouer que découvrir quelque chose comme ça pour la première fois avec Jude, me faisait extrêmement plaisir. « T’imagine même pas à quel point j’suis excité, j’me sens comme un môme de huit ans ! » Je pouffai de rire et me tournai d'un quart de tour vers lui, passant un bras sur ses épaules. « Oooh mais Jude .. Tu es un môme de huit ans, dans ta tête. » Je tapotai son bras de manière compatissante et me redressai sur la banquette, riant et jetant un coup d’œil au temps radieux. « J'espère qu'on va croiser Ariel, » dis-je en trépignant d'impatience. « Ou Perry l’ornithorynque ! » m'exclamai-je comme une gamine. Sur ce coup-là, je n'étais pas mieux que Jude. Je sortis un plan du premier park et l'observai une minute avant de le tendre à Jude. « Tu veux qu'on commence par quoi ? On y va doucement au début, ou on attaque direct comme les deux fifous qu'on est ? »

Disney, c'est grand. Alors on allait facilement avoir tout le week-end pour tout faire, dans un sens ça n'était pas plus mal qu'elle nous ait déjà réserver un hôtel. Nous allions déjà payer bonbon l'entrée, alors autant y aller jusqu'au bout en passant le week-end là-bas et profiter à fond. Surtout que ça n'était pas l'aspect financier qui dérangeait le plus. Je souris en coin lorsque je la laissais entrer dans le taxi par pure galanterie, et mon sourire s'agrandit encore plus lorsqu'elle me remerciait parce que oui, ça faisait bizarre qu'on soit "gentil" l'un envers l'autre. Entre nous c'était un peu "qui aime bien châtie bien". Alors que le taxi nous conduisait vers notre destination, je demandais à la jeune femme si elle avait déjà été à Disney, ou si nous allions être deux gamins paumés dans un immense parc totalement hystériques. Le pire, c'était que la connaissant, et me connaissant, nous étions capables de nous perdre. Je lui avouais que je me sentais comme un gamin de huit ans tellement j'avais hâte d'y être et elle se tourna vers moi d'un air sérieux en me répondant, « Oooh mais Jude .. Tu es un môme de huit ans, dans ta tête. » Je lui fis une grimace, une grimace digne d'un môme de huit ans comme elle disait si bien.« Tu peux parler, t'es vraiment pas mieux »,grognais-je en cachant un sourire pour continuer de jouer le jeu du gamin boudeur.« J'espère qu'on va croiser Ariel, » J'haussais les sourcils et je tournais la tête vers elle, « Ou Perry l’ornithorynque ! » Je me pinçais la lèvre et je murmurais, « Peeeeerrrryyyyyyyy ! », chantonnais-je sur le même air que dans ce dessin animé stupide qui passait sur Disney Chanel quand j'étais gamin. Billie sortit un plan du parc et je fus impressionné par la grandeur de celui-ci. J'observais le plan quand elle me demanda, « Tu veux qu'on commence par quoi ? On y va doucement au début, ou on attaque direct comme les deux fifous qu'on est ? » J'haussais les épaules. Nous, des fifous ? Mh...« Moi je dis, on commence en beauté ! On fait le manège qui fait le plus peur du parc ! » Je posais mon doigt sur la tour de la terreur et je souris en coin en regardant Billie, « J'ai entendu dire que celui là est terrible. Tu vas pas te dégonfler, hein ? » Bien sur qu'elle n'allait pas se dégonfler, j'en étais sûr et certain mais j'aimais bien la taquinais, au cas ou vous ne l'auriez pas encore remarqué. Le taxi fini par s'arrêter une fois arrivés à destination et je lui tendais plusieurs billets en lui disant de garder la monnaie. J'avais toujours rêvé de faire ça, comme un gros bourge. « DISNEY, NOUS VOILAAAAAAAAA ! », criais-je comme un gogole en sortant du taxi. En fait, il n'y avait qu'avec Billie que je m'autorisais à être aussi con et gosh, ça faisait un bien fou !

J'avais beau me moquer ouvertement du taux d'excitation de Jude, je sentais que ça bouillonnait de la même façon en moi. À la fois pressée de tout découvrir et stressée par la perspective d'y laisser la vie, il n'y avait qu'une chose dont j'étais certaine et c'était que je ne pouvais pas attendre une minute de plus. Ça tombait bien, parce que Disney se profilait justement à l'horizon. Le chauffeur nous demanda à l'entrée de quel park nous souhaitions être déposés et j'attendis une minute la réponse de Jude pour l'informer de notre choix.
« Moi je dis, on commence en beauté ! On fait le manège qui fait le plus peur du parc ! J'ai entendu dire que celui là est terrible. Tu vas pas te dégonfler, hein ? » Il pointa la Tour de la Terreur sur le plan et mon estomac fit une vrille dans mon ventre. « Jude .. c'est un ascenseur qui tombe plus vite que la force de gravité .. » Je le fixai un moment, gardant une expression impassible avant de finalement laisser paraître un sourire en coin. « Il faudrait être débile pour ne pas vouloir le faire ! » J'indiquais donc au conducteur de nous déposer devant les Hollywood Studios et cinq minutes plus tard, nous y étions enfin. Jude s'empressa de sortir et de se mettre à hurler tous ses poumons, me faisant éclater de rire tandis que j'attrapais la valise que le gars me tendait. Je le remerciai en lui filant un bon pourboire et rejoignis Jude. « Tu feras moins le malin dans vingt minutes, quand tu pleureras près des portes de l'ascenseur parce que tu veux pas monter. » Je lui filai un coup de coude joueur et nous nous engageâmes sur les pavés avec le reste des visiteurs. « Va te mettre près des portes pour attendre l'ouverture pendant que je vais déposer ça à la consigne. » Je désignai le petit stand à bagages non-loin et m'y précipitai, voyant qu'il n'y avait qu'une personne présente. Il me fallut cinq minutes pour faire prendre en charge mon bagage, puis je rejoignis le brun en trottinant. Derrière les grilles, les cast members commençaient à s'agiter, ce qui devait forcément signifier qu'ils allaient procéder à l'ouverture. Je demandai à Jude s'il avait son billet en main et sortis le mien en commençant à avancer, jetant un dernier coup d’œil au plan pour bien repérer où se trouvait notre première destination. « T'es prêt ? Ça va être la guerre, va falloir courir pour doubler tout ça ! » dis-je en désignant l'amas de gens aussi excités que nous.

En fait, c'était un des premiers parcs d'attractions dans lequel j'allais de toute ma vie. Nous avions été à Six Flags avec les Dunster mais c'était tout, alors les manèges à sensations ne me faisaient pas trop peur parce que je n'en avais jamais réellement vu. J'avais entendu dire que la Tour de la Terreur était assez impressionnant comme manège et je voulais voir si Billie allait être cap' d'y aller, bien que je me doutais qu'elle était le genre de fille à être cap' de faire toutes les attractions possibles et inimaginables. Alors que notre taxi s'approchait du parc, je lui montrais sur le plan le manège et elle me répondit d'une manière... un peu bizarre. Genre, sans aucune intonation dans sa voic qui me laissait savoir si elle disait ça par peur ou par excitation. « Jude .. c'est un ascenseur qui tombe plus vite que la force de gravité .. » J'hochais la tête avec un petit sourire et je tournais le regard vers mon amie qui ajouta, « Il faudrait être débile pour ne pas vouloir le faire ! » Ah, bah elle avait envie d'y aller ! Le chauffeur nous arrêta donc devant Hollywood Studios et je payais le taxi avant de sortir de la voiture. J'attendais que Billie sorte et nous récupérions sa valise pendant qu'elle établissait une stratégie pour qu'on évite d'attendre trente ans devant le premier manège. « Tu feras moins le malin dans vingt minutes, quand tu pleureras près des portes de l'ascenseur parce que tu veux pas monter. » Je fronçais les sourcils et je levais les yeux au ciel, « Non, tu veux dire que TU feras moins la maligne quand TU pleureras parce que tu auras trop peur ! » Je lui rendais son petit coup de coude, souriant en coin alors que nous avancions vers le parc. Il y avait déjà beaucoup de monde, c'était impressionnant. « Va te mettre près des portes pour attendre l'ouverture pendant que je vais déposer ça à la consigne. » J'hochais à nouveau la tête et je fis comme elle me disait, soit : aller près des portes. Il y avait déjà du monde qui attendait mais ça allait, nous n'étions pas si mal placés. Je sortais mon billet de ma sacoche et Billie revient près de moi une fois qu'elle fut débarrassée de sa valise. Ça commençait à s'agitait, que ça soit à l'intérieur ou à l'extérieur du parc. « T'es prêt ? Ça va être la guerre, va falloir courir pour doubler tout ça ! » Je regardais autour de moi, il y avait la tonne de personnes derrière nous et je regardais Billie, « Ça va, je cours assez vite ! Au pire, on court et l'autre rejoindra celui qui a réussi à s'approcher le plus de l'entrée de l'attraction ? » Les portes s'ouvrirent et là, ce fut la folie. « Le dernier arrivé à la Tour paie le déjeuner à l'autre !», criais-je à Billie. Les gens bousculaient comme des tarés et une fois passé les tourniquets, je vérifiais que Billie n'était pas trop loin derrière moi et je me mis à courir comme un dingue vers la Tour de la Terreur. Je ne voyais même pas où Billie était, l'objectif était d'arriver avant. Une fois dans la file d'attente, je regardais autour de moi pour savoir où Billie était. Je ne la voyais même pas, mais je pensais qu'elle était derrière moi. J'attrapais mon téléphone et je lui envoyais un sms, « Je suis devant, viens me rejoindre ! »

Les gens commençaient à bousculer derrière nous de plus en plus. En temps normal, j'aurais arraché quelques paires d'yeux pour ça, mais j'étais bien trop ancrée dans la magie de Disney pour m'en soucier. Néanmoins, je mis quelques coups d'épaules pour pousser ceux qui prenaient la liberté de se coller à nous au maximum. Espace vital, s'il vous plait ! « Ça va, je cours assez vite ! Au pire, on court et l'autre rejoindra celui qui a réussi à s'approcher le plus de l'entrée de l'attraction ? » J'acquiesçai, trouvant la suggestion ingénieuse et me mis à prier pour ma pauvre vie quand les grilles s'ouvrirent. Heureusement qu'une seule personne pouvait passer à la fois sur chaque tourniquet, sinon nous serions probablement piétinés à l'heure qu'il est. « Le dernier arrivé à la Tour paie le déjeuner à l'autre ! » Il était passé avant moi au tourniquet, me laissant hallucinée par son défi, alors que j'étais encore coincée dans ce foutu truc tournant. Je m'en dégageai le plus rapidement possible et partis en trombes ; je n'apercevais même plus Jude dans la foule. Devinez qui va payer le déjeuner ? Pleine d'espoir, j'accélérai ma course, mais dès que je m'engageai sur Sunset Boulevard, je poussai un cri d'excitation en changeant totalement ma trajectoire. « AH ! La Bête ! » criai-je en courant dans la direction de la mascotte marron, peu préoccupée par le concours avec Jude. Quelques enfants passèrent devant moi pour prendre une photo et avoir un autographe. Oui, je n'étais quand même pas une sauvage. Quand vint mon tour, je m'approchai timidement, donnai mon iPhone au cast member l'accompagnant et allai enrouler un bras misérablement par-dessus ses épaules. Bon sang, il mesurait trois mètres ou quoi ? Je gloussai de stupeur quand je me sentis soulevée du sol, me retrouvant avec un gros bras sous les genoux et l'autre gros bras sous les épaules. Surexcitée, je me mis à rire et levai un bras en regardant l'objectif. J'espérais pour lui qu'il ne faisait pas ça avec tous les adultes qui lui demanderaient une photo parce qu'il aurait des courbatures demain ! Il me reposa et je remerciai la paire en sautillant, puis m'éloignai en direction de la Tour. Je vis que j'avais reçu un SMS de Jude ; je le lus et levai les yeux au ciel en voyant qu'il me précisait bien qu'il était arrivé en premier. Riant, je repris ma course et passai devant une centaine de personnes qui étaient déjà entassés derrière Jude. « Désolée papy, j'me suis faite attaquer par une bête. » Contente de son expression perplexe, je déverrouillai mon téléphone et lui montrai la photo que je venais de prendre, tout sourire. « Allez, va. Sois pas jaloux. Promis, dès qu'on croise Sully, on s'arrête ! » Il y avait approximativement une cinquantaine de personnes devant nous. J'avais un peu fait des recherches sur cette attraction et je savais qu'il y avait deux ou trois ascenseurs de vingt et une places qui tournaient en continu. En gros, nous allions passer dans la première fournée. L'excitation monta encore d'un cran en moi. Pour le moment, la file n'avançait pas, l'attraction n'était pas encore ouverte, mais je sautillais déjà sur place, fixant Jude. « On va probablement mourir, t'en es conscient ? »

Faire des concours avec Billie, c’était ça notre truc. Non, en fait c’était celui qui arriverait à embêter l’autre le premier, ou le plus possible, ou de la manière la plus originale encore. C’était ça, que j’aimais le plus dans ma relation avec la demoiselle : quand nous étions ensemble, nous étions comme deux gamins de huit ans qui ne faisions que nous chamailler, mais comme on dit, qui aime bien châtie bien, et cette expression nous allait comme un  gant à Billie et moi. Je n’avais jamais été à Disney de ma vie, mais s’il y a bien une chose que je savais, c’était que c’était la folie et qu’il y avait toujours un monde de fou dans les attractions. Si nous ne voulions pas attendre trente ans de pouvoir faire la Tour de la Terreur, il fallait courir, et vite. Je ne savais même pas si Billie avait entendu mon petit jeu : le dernier arrivé payait le déjeuner ce midi. Je me mettais à courir, bien que je me fasse bousculer dans tous les sens. Je ne quittais pas la tour des yeux qu’on voyait à des kilomètres à la ronde tellement celle-ci était immense. Et c’est une fois arrêté dans la file d’attente que je reprenais mon souffle, balayant la queue qui ne faisait que s’allonger derrière moi du regard pour apercevoir Billie. Ce n’était que quelques minutes après que je lui eut envoyé le sms que je la vis débarquer en annonçant fièrement, « Désolée papy, j'me suis faite attaquer par une bête. » Je fronçais un peu les sourcils, « Une bête ? », demandais-je, un peu perplexe jusqu’à ce qu’elle me tende son téléphone et que je vis la photo d’elle et de la bête de la Belle et la Bête. J’éclatais de rire et je plissais les yeux en regardant la photo alors qu’elle me dit, « Allez, va. Sois pas jaloux. Promis, dès qu'on croise Sully, on s'arrête ! » Je souris en coin et je relevais le regard vers la jeune femme, demandant alors, « Attends, je comprends pas…sur la photo c’est qui la bête ? » J’essayais de ne pas rire, mais je faisais bien évidement allusion au fait que Billie pouvait être la fameuse « bête » de la photo. Nous avancions petit à petit dans la file d’attente à l’intérieur de la tour et Billie me demanda alors d’un air sérieux – trop sérieux, ça faisait même limite peur. « On va probablement mourir, t'en es conscient ? » Je ris et je passais mon bras sur ses épaules, avançant avec elle dans une petite salle qui ressemblait à une bibliothèque. Les gars un peu bizarre de l’attraction nous ordonnaient de rester bien au milieu et une vidéo se lança pour expliquer le principe du manège. Une fois terminé, une porte s’ouvrit et nous suivions les gens devant nous. Je gardais mon bras sur ses épaules et je lui murmurais, « On ne va pas mourir Billie. On va dans la quatrième dimension, c’est cool non ? » Bon, je faisais genre ça ne me faisait pas peur, mais je dois bien avouer que je commençais à flipper un peu. Mais c’était ce que j’aimais avec ce genre de manège. L’adrénaline.