Cover me with sunshine || (ft Leslie)

Il hausse légèrement les épaules à la question de son père Lyssandre. « Harlem. » Qu’il lâche avec nonchalance et sans la moindre once d’hésitation. Après tout, s’il y en avait bien eu un pendant toutes ces années qui avait développé un esprit machiavélique pour toutes les bêtises possibles et imaginables, c’était lui. Il était donc plus facile de l’accuser au détriment de Ingvar ou de Lyssandre, qui pourtant n’étaient pas en reste dès qu’il s’agissait également d’y mettre leur grain de sel. Toujours est-il que les jumeaux, comme beaucoup de cadets, avaient simplement cherché à faire comme leurs aînés sans avoir vraiment besoin qu’on leur enseigne quoi que ce soit. Il leurs avait suffit d’observer les plus grands, et de faire les choses à leur façon. « Mais t’en fait pas, nos enfants nous le rendront. » En tout cas, il l’espérait Lyssandre. Avoir des enfants en aussi bonne santé et épanouis dans leur foyer que eux l’avaient été. Un futur dans lequel il pourrait se perde à penser, mais actuellement, c’était le passé qui l’attirait.

Lui non plus n’a pas de mal à imaginer parfois à quoi aurait pu ressembler leur vie si leur père avait refait la sienne avec une autre, même si tous les scénarios semblaient sonner faux. A croire que cette réalité était la seule réellement possible, à croire que le monde entier aurait pû être différent si leur père avait retrouvé l’amour. Peut-être n’auraient-ils jamais été en Irlande, peut-être ne seraient-ils jamais venus à Boston. Harlem n’aurait jamais rencontré Ange, Dahlia Viktor et lui… Ca lui semble si surréaliste à croire, que sa rencontre avec le Martinez ne tienne qu’à si peu de choses. Que leur avenir incertain aurait pu ne jamais exister. Certes, il avait parfois souffert dans cette relation Lyssandre, mais si c’était à refaire, il le ferait. Et surtout, il continuerait à se battre pour préserver sa relation avec le blond. Après tout, ils étaient encore bien vivants, tous les deux, et tant qu’ils respiraient, il avait encore ses chances. « Les choses sont de plus en plus compliquées entre Florian et moi. J’ai l’impression de ne plus du tout savoir comment communiquer avec lui. Pourtant… Je continue de l’aimer. De l’aimer vraiment. Mais je ne sais plus quoi faire avec lui. J’ai l’impression de devoir faire mon deuil alors qu’il est pourtant juste à quelques pâtés de maison d’ici. Je sais que c’est pas comparable avec ce que toi t’as vécu mais… J’en suis là. » Dans cette relation à sens unique - telle qu’il la voit - sur laquelle il se confie, incapable de garder cela pour lui un peu plus longtemps, incapable d’imaginer une autre histoire d’amour dans sa vie, d’imaginer une quelconque autre réalité que celle-ci, dans laquelle il aime désespérement le Martinez. Tout comme Leslie avait dû le ressentir à la perte de sa femme.

Epouse et mère dont Lyssandre garde la photo entre ses doigts, délicatement, comme s’il s’agissait d’un bien précieux, inestimable dont il fallait prendre soin. D’un sens, c’était exactement ce qu’elle représentait pour lui, comme bien d’autres de ces photos mais il ne pouvait nier que celle-ci racontait une histoire bien plus puissante encore. « Merci papa. » Il vient poser sa tête contre son épaule, ferme un instant les yeux et puise dans ce contact le réconfort dont il a besoin. Aussi seul qu’il se sentait parfois, il sait qu’il ne l’est jamais vraiment.

Leslie laissa échapper un petit rire lorsque Lyssandre accusa son frère d'être à l'origine des plus grandes frasques de leur enfance. Le pire, c'était que ce n'était pas faux, Harlem avait toujours été le premier à entraîner les autres dans les bêtises. Et, à présent qu'il avait grandi, il se laissait entraîné dans des bêtises encore plus grandes. En y songeant, le père Wayne lâcha un petit soupir. Ce n'était pas évident d'être papa. Mais il le savait, dès que son épouse lui avait annoncé sa grossesse : c'était fini la sérénité, il ne connaîtrait que la peur jusqu'à la fin de sa vie. Et il l'expérimentait chaque jour, angoissé à l'idée qu'il arrive du mal à ses enfants.

« J'espère bien qu'ils vous le rendront ! Et j'espère surtout que vous aurez autant d'amour que j'en ai. » répondit-il ensuite, sur le ton de la boutade, à son fils. Oh oui, si c'était compliqué, s'il avait dû se serrer la ceinture et organiser sa vie différemment, il ne regrettait rien. Il n'aimait pas que l'on parle de « sacrifice ». Il ne voyait pas ses enfants comme un sacrifice.
Il sourit doucement lorsque Lyssandre lui expliqua la situation compliquée dans laquelle il se trouvait avec Florian. Leur relation n'avait jamais été de tout repos, de ce qu'avait compris son père, mais il savait également qu'il n'avait pas nécessairement toutes les cartes en main.

« Peut-être que vous avez besoin un peu de temps. Mais si vous vous aimez vraiment, tous les deux, alors vous trouverez une solution. » dit-il. « L'amour, ce n'est jamais simple. Des fois, j'ai l'impression que lorsqu'on aime réellement, il faut accepter de souffrir... » commenta-t-il ensuite. Il n'avait pas vraiment de conseil précieux à donner, parce qu'il savait que c'était à son fils de gérer tout ça, de se rendre compte de ce qu'il voulait ou ne voulait pas. Il gardait cependant espoir de le voir heureux, et que la situation avec Florian allait s'arranger bientôt.
Le quinquagénaire posa une main contre l'épaule de son fils, avant de venir lui ébouriffer les cheveux de nouveaux. Il avait l'air ravi de pouvoir garder la photographie de sa mère et Leslie savait qu'il en prendrait soin. Elle ne se perdrait pas avec Lyssandre.

« Tu as faim ? Tu veux que je réchauffe quelque chose à manger ? » demanda-t-il ensuite simplement. C'était un peu sa bouée de secours, la nourriture. Lorsqu'il ne savait plus trop comment remonter le moral de quelqu'un, ou qu'il voulait tout bonnement que cette personne passe un bon moment, il lui proposait un repas. Ce dernier était préparé par ses soins et il mettait beaucoup de cœur à l'ouvrage.

Il n’avait jamais fuit l’idée d’avoir des enfants un jour le Wayne. Ca avait toujours été là, quelque part, au fond de lui. Même quand il avait prit conscience de l’entièreté de son attirance amoureuse et physique, il n’avait jamais fait une croix sur cette possibilité, ce futur. Si sa moitié ne pouvait pas porter leurs enfants, alors iels pourraient toujours faire appel à une mère porteuse, ou encore adopter. Des options, il y en avait suffisamment pour qu’il puisse un jour être père à son tour, que ce soit ou non par le sang. Alors forcément, lorsqu’il évoque ce projet d’avenir, qu’importe son interlocuteur, il ne peut s’empêcher d’avoir une pensée pour Leslie, son modèle, pour le père exceptionnel qu’il avait été. Et qu’il était toujours. Il avait élevé ses enfants dans l’amour et la confiance, si bien qu'ils étaient tous libres de venir se confier à lui dès qu’ils en ressentaient le besoin, qu’importe le sujet. Une complicité que l'aîné des Wayne espérait découvrir un jour avec ses propres enfants. « Je suis sûr qu’avec leur grand-père pas loin, ils pourront avoir que le bon exemple. Et nous aussi. » Dans les moments de doutes, ceux il ne se sentirait pas à la hauteur, il n’aurait qu’à venir voir son propre père pour savoir que tout irait bien. Tout comme aujourd’hui.

Troublé quand il a passé la porte de l’appartement, il sent déjà le réconfort de son père faire effet. Certes, les mots ne sont pas ceux qu’il voudrait entendre mais ils sont sincères et plus pertinents avec la réalité de sa situation. C’est aussi pour cela qu’il est là Lyssandre, parce qu’il n’a pas besoin que l’on nourrisse son imaginaire idéal ou son ego. Même s’il aimerait que son père lui dise qu’il a raison et que Florian fait juste l’enfant, il sait que ça ne serait que pour lui faire plaisir, que le situation et plus complexe, et qu’il se doit aussi de respecter le ressenti de Florian vis-à-vis de celle-ci, même s’il n’en a pas toujours la patience. Difficile quand celui qu’il aime est loin de lui depuis si longtemps. « J’ai peur que le temps n’arrange rien… » Confie-t-il tristement, fataliste. Après tout, ils avaient déjà pu bénéficier de plusieurs mois pour y voir clair, pour essayer d’avancer, mais rien ne semblait y faire. « C’est pas la souffrance qui me fait peur, mais l’idée de l’avoir perdu. De me dire qu’il ne reviendra jamais. Qu’il ne m’aimera plus… » Fleur bleu sans jamais l'avoir su, il réalise combien fuir l’amour n’aurait pas pu fonctionner éternellement pour lui.

La tête posée contre l’épaule de son père, il ferme les yeux à son contact, trouve un peu plus de sérénité, de paix dans son coeur. Même quand tout va mal, Leslie savait y faire avec ses enfants. « Je veux bien dîner ici ce soir. » Parce que c’est de la compagnie de son père dont il a besoin avant tout, de la compagnie de quelqu’un qu’il aime, inconditionnellement, et qui avait su lui rendre cet amour, sans jamais qu’il ait à en douter un seul jour de sa vie Lyssandre.

Le quinquagénaire fut touché par les mots de son fils. « Je ferai de mon mieux pour être le meilleur grand-père possibles ! » déclara-t-il, comme il le faisait d'ailleurs déjà avec les enfants de Ingvar. Ce n'était pas chose aisée d'être un parent ou un grand-parent, mais cela valait toutes les tourmentes, toute la charge mentale. Et il le referait encore et encore, s'il avait le choix. Il passa de nouveau une main dans les cheveux de Lyssandre, pour remettre quelques mèches rebelles en place. Il se souvient, lorsqu'il était enfant, quand il passait du temps à démêler sa tignasse. C'était une petite séance de nostalgie, ce soir-là.

Le père Wayne hocha la tête, comprenant parfaitement les tourments de son enfant. L'amour n'était pas chose aisée. « Je comprends... » dit-il simplement, posant une main tendre contre l'épaule de son interlocuteur. Oh, cela pouvait arriver. Les ruptures, ce n'était pas rare, loin de là, et Lyss était bien placé pour le savoir, puisqu'il avait déjà eu ses déboires avec Florian. Ce n'était pas comme si c'était la première fois que leur couple battait ainsi de l'aile pour se reformer. Il fallait garder espoir. Car si le cœur de son fils pensait que c'était le bon, le grand amour, il devait y avoir une raison, n'est-ce pas ? Leslie y croyait, lui qui avait suivi sa petite-amie à l'autre bout du monde !
« Je sais que c'est facile à dire, mais ne t'en fais pas trop par avance... » lui conseilla-t-il un peu bêtement, ne trouvant plus les mots pour le réconforter. Alors il était temps de passer à la prochaine étape, à savoir : la nourriture en guise de réconfort.

« Très bien, je vais nous réchauffer ça, alors... » déclara-t-il avec tendresse, avant de se lever du sofa pour aller faire la chose promise.