THE DESCENT | BILLEE

The descent  • Elle sent le regard de Billie sur elle, qui tente de comprendre, d’entendre les mots, sous les silences. De définir l’avant. Mais elle a questionné en premier, l’amérindienne, alors, c’est à Billie de raconter, de se livrer. “Rien de dramatique.” Ils ont ce goût, ces mots là, celui d’un c’est pas grave, qui cherche à adoucir ce qui ne l’est pas. Doux. Ils veulent atténuer les cicatrices que l’on conserve du passé. “On a pas tous les moyens de voyager.” Oui, c’est vrai. Et ce n’est pas un drame, de ne pas les avoir. Ca ne remet pas en cause la valeur de son histoire. “Ou de manger ce qu’on veut.” Ca le compresse si fort, le cœur d’Haiwee. Elle en a oublié, le temps de plusieurs secondes, de respirer. “Mais je peux, maintenant.” Bien sur, c’est tant mieux, mais elle a toujours la sensation qu’elle aurait dû s’abstenir de demander, s’en veut d’avoir voulu être intrusive, et pourtant, elle est persuadée que ce qu’elle a vécu, ce qu’elle a été, c’est aussi pour ça, qu’elle va follement l’apprécier. Dans sa vie, vouloir la garder. “J’ai mes anges gardiens.” Elle se demande qui ils sont, pourquoi elle leur donne cette appellation, sur sa bouche, il y a trop de questions. Et cette grotte semble trop petite pour les contenir, pourtant, elle avoue se dire, qu’au moins, leurs secrets ne pourront pas en sortir. “A toi.” Le souci c’est qu’elle se sent stupide maintenant. Parce que même si elle a grandi avec peu, elle sait qu’elle n’a jamais manqué de rien. Parce que si elle a eu un ange gardien, elle sait – même sans avoir de vraies nouvelles – qu’il va bien. Elle le ressent, dans ses tripes. C’est ce que ça fait, lorsqu’on est profondément attachée. Alors presque elle culpabilise, parce que pour elle, vraiment, ça ne l’est pas, dramatique. « T’as bien dû l’entendre, non ? » elle tente de commencer avec une pointe d’humour qu’elle n’a pas. « Elevée dans une forêt, avec les loups, tout ça. » Elle reprend les mots qu’elle a entendu sur elle, plusieurs fois. La jeunesse dorée d’Harvard n’est pas souvent très aimable. « Une vraie sauvage qui ne devrait pas avoir le droit d’étudier dans une telle université. » Errer dans les grottes, oui, mais pas sur les bancs de la faculté.

> @Billie O'Malley