Tonight is the night [WitMan]

C’est elle qui l’a attaqué sur ce terrain si délicat et si d’autres se seraient révoltés, lui ne lui a juste démontré qu’un peu de contrariété, encore une preuve de son caractère indifférent face à la chose. « Génial. » Des félicitations voilées d’amertume qui sont rapidement coupées par l’arrivée impromptue du room service après avoir frappé à la porte. Le chariot est conduit dans l’entrée sous le regard envieux et avisé de la locataire des lieux qui s’est aussitôt empressée d’aller fouiller dans son sac à mains pour remercier l’employé. Mais de sa position, l’ancien Kirk ne peut qu’en supposer, la connaissant un peu pour l’avoir côtoyée dans le milieu des mondanités. L’homme parait satisfait malgré le manque de reconnaissance sur ses traits et se dérobe de leur suite en laissant derrière lui le champagne précédemment commandé. Armée de l’une des deux bouteilles et de deux verres qu’elle tient avec adresse et dextérité, la rousse se fout complètement des quelques gouttes qui ruissèlent contre le verre et s’écrasent sur le parquet ciré, revient vers lui et lui sert de quoi le souler. « A moi ? » C’est son anniversaire, sa soirée et il était même question de services qu’elle lui demanderait.

Si beaucoup de choses font défaut au Kirk comme le courage et la prise d’initiatives, une promesse est promesse et il fera tout selon certaines limites et conditions pour la tenir. Aussi lorsqu’il accepte la coupe et l’amène devant ses yeux pour contempler les bulles danser selon la capillarité du verre et sa forme, de toutes les grandes équations de l’univers qu’il pourrait en trente secondes développer, Wendy fera toujours partie de celles qu’il ne pourra jamais expliquer. Pourtant, il va s’y essayer…
« La vérité. Tu es belle, tu es riche, tu es jeune et tu as le monde à tes pieds. »   Et lui, son reflet dans le verre lui prouve a par b qu’il est tout le contraire. « J’suis pas un cheval sur lequel tu devrais miser. »   Pas un cheval de courses tout court, il se qualifierait plutôt de mulet sur lequel les autres s’appuient pour traverser les épreuves de la vie pour rapidement l’oublier. Mais son verre, il le lève pour trinquer, ajoutant pour clôturer dans un rire presque désabusé : « Et j’embrasse très mal. »   C’est ce qu’on raconté les quelques filles qui ont eu le culot de venir jusqu’à lui dans l’unique but de se moquer. 

C’est pourtant simple, des histoires de cœur il en a eu comme tout autre adolescent avant lui, mais des ascenseurs émotionnels qui n’allaient toujours que dans un seul sens, vers un crash monumental avant de se réveiller devant la triste vérité, crachée de la bouche des filles qui s’amusaient à le larguer après d’odieux paris : rebus de la beauté, l’amour, ce n’était tout simplement pas pour lui. Alors sa confiance dans la gent féminine n’en est depuis que très peu épanouie, préférant s’écarter de ce sentier qu’il juge trop dangereux pour sa santé. Il en a oublié les principes et l’art subtile des codes de la féminité, ne sait que très peu distinguer les sous-entendus dans leur gestuelle finement calculée. Non, il s’est tourné vers les mystères de la science parce qu’à ses yeux ils sont beaucoup moins risqués à dénouer.

Et si Wendy en profite pour boire cul-sec sa flute, lui s’amuse à gouter aux différents aromes avant de l’entendre l’apostropher. « Je suis Wendy Witter, » ça, rien ni personne ne pourra la contredire, l’ancien kirkland affectionnant cette façon de s’enorgueillir, un trait de caractère dont il est totalement dépourvu et que secrètement il lui envie. « Je mise sur qui je veux. » Par contre çà c’est entièrement faux parce qu’elle doit avoir une armée derrière elle de consultants payés grassement pour la conseiller, l’aiguiller afin de ne pas déraper, des manager pour son image et nombre d’employés se pliant en quatre pour la moindre des fantaisies quitte à devoir rester dans le secret. Alors sur ce détail, il a arrêté de boire pour la scruter, à peine convaincu parce que c’est un caprice qu’elle pourrait regretter. « Montre-moi. Comment tu embrasses. Montre-moi.» Tout son environnement vient de s’écrouler, analysant complètement hébété ce qu’elle vient de lui demander, à la limite d’un ordre imposé. Il indexe sans grande conviction les hauteurs avant de gesticuler de la main, se trouvant une excuse les yeux égarés sur la bouteille qu’elle détient.  « On devrait peut-être boire encore un peu, »    pour lui donner du courage mais surtout pour lui faire oublier à elle ce qu’il va se passer, qu’elle ne conserve aucune trace de la prochaine désillusion qu’elle vient de commander. Dans ses yeux, aucune échappatoire n’est possible : ce que Wendy veut, elle l’obtient et ce peu lui importe les moyens. Alors après quelques secondes d’hésitation il s’enfile à son tour la flute d’un trait dans l’espoir que l’alchimie avec son sang ne le grise un peu et le désinhibe de ses propres limites. Les deux paumes claquant sur ses cuisses, il se redresse sans mot dire, les mâchoires serrées face à la rousse qui le fusille, tente une approche mais recule, tergiverse plusieurs fois, sa main hésitante à prendre sa joue avant de bafouiller :  « ferme les yeux. »    

Déjà qu’il manque cruellement de confiance en lui, à la savoir capable d’avoir qui elle veut, un refrain assez connu lorsqu’il est question de Wendy Witter et de ses désirs à rendre n’importe quel étudiant envieux, voir ses deux orbes le fixer aurait eu un effet plus dévastateur qu’autre chose, lui faisant à coup sûr perdre ses moyens. Alors s’il lui demande de fermer les paupières, ce n’est que parce qu’il est décidé à y aller, qu’elle l’a mis au défi de se dépasser et qu’il consent à tenter l’expérience parce que quelque part, au fond, elle lui plait. Une chose qu’il ne s'est jamais avoué puisque depuis trop longtemps, à chaque fois, il se prend des murs de femmes de moindre pédigrée. Quant à sa main positionnée sur sa joue, ce sont les doigts de la rousse qui viennent doucement se poser dessus, l’incitant à continuer dans sa lancée lorsqu’elle susurre son nom presque désabusée par le temps qu'il met… « Dan… » C’est que son futur employé doit se préparer, puisqu’il doit rivaliser avec tous ceux qui l’ont déjà embrassée. Alors le temps pose des points de suspension, d’interrogation lorsqu’il observe ses traits immobiles, fronce les siens à la pensée de ne pas être à la hauteur de ses attentes, à l’idée qu’elle puisse elle aussi le dénigrer dès qu’il aura le dos tourné.

Puis il ne sait pourquoi, porté par la curiosité, de son pouce libre il effleure la tiédeur de ses lèvres, en étudie la douceur avant de s’y aventurer, se penche doucement sur elle le visage incliné. Le contact est timide, des bouches qui s’apprivoisent dans une attitude distante, le temps pour lui de se sentir assez confiant afin d’entreprendre une prospection plus complète de son anatomie. C’est sa paume sur l’ovale de son visage qui donne le la, plus présente lorsqu’il se permet de relever les barrières entre ses lèvres entrouvertes, à la recherche d’une rencontre, faisant de sa langue une étude complexe. Dans un désordre sensuel et affectif il se perd avec elle le temps de quelques secondes avant que leurs élans ne se fassent plus lascifs pour être écourtés, se reculant, encore perturbé par ce qu’elle vient de lui demander. Alors l’ex kirkland se retourne vers le verre qu’il avait laissé pour le saisir lentement, « voilà, » souhaitant rapidement changé de sujet, un peu confus parce qu’il vient de se passer.  « Maintenant on peut boire au désastre, » et il lui fait une fleur sur ce coup, se descend lui-même sans qu’elle n’ait besoin de tirer la première, très peu optimiste quant à sa prestation.