Mon étoile filante. Elle m'a permis d'atteindre le ciel, puis de partir en fumée.
« Hey salut. Tu as l'ai perdu. Moi c'est William. Je peux faire quelque chose pour toi ? »
« Oui bien sûr. Je viens d'arriver à Londres et je n'y connais pas grand chose alors.. »
« Alors je pourrais te servir de guide. Suis moi ! »
Un jour, je tomba sur elle. Mon étoile, comme j'aimais l'appeler. Ma bonne étoile. Mon étoile filante. Celle qui me guidait. En vérité, c'était elle qui m'avait suivi. Fraîchement débarquée à Londres, elle cherchait un endroit où vivre. Et c'est naturellement que je lui proposais de venir vivre dans le groupe. Mais ne vous méprenez pas, je ne l'avais pas fait pour aider mon prochain. Enfin si, bien sûr que je voulais l'aider. Mais.. j'ai eu le coup de foudre. Le vrai de vrai. Celui qu'on ne vit qu'une fois, un truc du genre. Quand je l'ai vu, elle m'est apparue comme une évidence. Elle avait les cheveux comme le soleil. Elle sentait drôlement bon. Et elle avait des yeux qui donnaient envie de se noyer dedans. Elle accepta volontiers, pour mon plus grand plaisir. Enfin, surtout à mon plus grand étonnement. Une fille qui accepte rapidement ce genre de proposition, c'est qu'elle n'avait peut être pas bien le choix. Elle venait de partir de chez elle, tout comme moi je l'avais fait, et nous avions tous les deux nos raisons. C'était peut être ça qui nous avait rapproché autant. Le fait qu'on vive les mêmes choses, au même moment. On pouvait se comprendre parfaitement. A la maison, elle fut très bien accueillie, mais c'était parce que nous avions un code entre nous.
« Les mecs, vous vous souvenez de ce qu'on s'était dit. On ne touche pas aux copines des autres. Je nous ai trouvé une nouvelle colocataire, mais elle est réservée. »
Il n'était pas question qu'un autre tente quoi que ce soit avec elle, c'était clair avec eux depuis le début. J'avais mis mon droit de véto dessus. 4 jours après son arrivée à la maison, nous dormions ensemble. Nous étions ensemble. Nous vivions ensemble. De nouveau, j'avais une femme dans ma vie. Et de nouveau, j'avais une femme qui m'aimait. ENFIN. J'étais aimé. Alors, dès qu'elle eut l'âge légal pour le faire, nous nous sommes mariés, Eva et moi. Pour le meilleur et pour le pire. Quand elle m'a dit oui, j'ai cru que c'était pour le meilleur. J'en étais persuadé parce qu'il ne pouvait pas en être autrement. Et je ne dis pas ça parce que je l'aimais. Je dis cela parce que c'est la femme de ma vie. Notre rencontre ne pouvait pas être le fruit du hasard. Je venais de quitter mon père, elle venait de quitter ses parents, et nos routes se sont croisés. Hasard, ou destin, peu m'importait à vrai dire. Depuis que je l'ai rencontré, nous ne nous étions plus quittés, c'était bien simple.
« Trois vodka, un martini, et deux bières s'il te plait. »
« Eva, tu as tes deux cocas et deux whiskys en attente. Je te prépare le reste de suite. »
Eva n'ayant pas l'accord de ses parents pour notre mariage, nous avons du nous débrouiller tous seuls, comme on pouvait le faire. Tout aurait pu être plus simple si ses parents m'avaient accepté, mais je ne faisais pas parti de leur monde, comme les gens aimaient me le faire comprendre. Nous travaillions dans le même club le soir. J'étais barman, et je m'occupais des cocktails, et elle les servait. Même au travail, nous étions complémentaires. Nous n'avions pas ou peu d'argent, mais nous étions heureux. Seulement, je savais d'où elle venait, de quel milieu elle venait je veux dire, et je voulais lui donner tout ça. Lui redonner ça, à nouveau. Tout ce qu'elle avait toujours connu, depuis qu'elle était toute petite. Pour mon étoile, j'aurai décroché la lune. Et j'étais persuadé que je pouvais avoir de l'or au bout des doigts. Nous voulions vivre tous les deux, et il fallait économiser. A la place, je n'ai amené que la destruction autour de moi, faute d'avoir pu faire ce qu'il fallait.
« Tiens, voilà tes 10000 livres. Tu as deux mois pour me rendre tout ça. Je suis même grand seigneur, je peux te prendre 500 par semaine. Passé ce délai, tu sais comment les choses se dérouleront, William. »
Quand on a pas d'argent il faut emprunter. Alors on emprunte où on peut. Et souvent aux mauvaises personnes, surtout quand on a du mal à rembourser. Pourtant, j'en avais besoin de cette argent. Pour nous acheter une voiture, déjà, et pour prendre notre appartement, à tous les deux. Je lui avais dit que je m'occupais de tout, que je me débrouillais pour nous deux. Pour notre couple. Mais je voyais bien au fil du temps que je ne pourrais jamais rembourser. Alors, a chaque fois que j'allais les voir pour rembourser une partie, mais moins que ce que je devais, et que j'essayais de gagner du temps, je me faisais cogner. C'est arrivé trois fois. A la quatrième, ils ont dit que je ne ressortirais pas d'ici, si je n'avais pas l'argent au complet. Je savais que tôt ou tard, ils s'en prendraient à mes proches. A Eva. Et ça, je ne pouvais pas le permettre. J'aurais pu lui demander qu'elle paie pour moi, car sa famille en avait les moyens.. Mais c'était mon erreur, et je devais réparer mon erreur. C'était peut être con de faire ça, de se séparer de la femme qu'on aime pour ça, mais je ne voulais pas que son regard change parce que j'avais fait une erreur. Je ne voulais pas voir dans ses yeux qu'elle ne m'aimait plus. Je préférais mourir que de voir ça. Mourir, une belle idée. Alors, il a fallu que je me sépare d'elle. Et pourtant, je lui avais juré de vivre avec elle pour le pire. Mais je ne pouvais pas la perdre. L'idée n'était pas compliquée : pour disparaître, il fallait simuler ma mort. Rien de plus simple. Une voiture, un pont, et on sautait du pont avec la voiture. Le seul truc dur, c'était de finir vivant.
Pour que l'opération soit une réussite, il me fallait une planque aussi. Et un truc crédible. Avant de tomber du pont, j'ai appelé Eva. Je l'ai appelé, parce que c'était la dernière conversation que j'allais pouvoir avoir avec elle, avant de régler un problème que je ne pourrais peut être jamais régler de toute ma vie. Je n'ai jamais eu beaucoup d'argent, alors comment trouver une telle somme. Surtout que si je devais passer pour mort, il fallait que je le reste jusqu'au bout. Je me souviens de cette conversation. Je me souviens lui avoir dit que je l'aimais. Je me souviens lui avoir dit qu'elle avait fait de moi le plus heureux des hommes, et que j'espérais que j'avais fait d'elle la plus heureuse des femmes. Qu'elle m'avait apporté tout l'amour que je n'avais jamais eu, et que pour rien au monde je ne l'oublierais. Que pour rien au monde, je ne finirais pas ma vie à ses cotés.
« Coucou ma jolie. Comment se porte la plus belle des femmes de ce monde ? »
« Oh, très bien, et toi ? »
« Parfaitement bien. Je t'appelle parce que je suis sur le chemin du retour, mais que je ne pouvais pas attendre plus longtemps pour te dire tout ça. Eva, je t'aime. Je t'aime de tout mon cœur. De toute mon âme, comme je n'ai jamais aimé auparavant, et comme il ne me sera plus jamais possible d'aimer autant. Ton regard a su me faire sourire. Ton sourire, illuminer mes journées. Tes lèvres me rendre dingue. Tu m'as fait me sentir vivant. Je suis le plus heureux des hommes au jour d'aujourd'hui, et je voulais que tu le saches. Alors, je vais rentrer. Je vais te préparer à manger, et j'aurais toute la nuit pour.. »
La conversation s'est terminé sur un crissement de pneus, un bruit sourd, moi criant, tombant du pont. Et puis plus rien. C'était la dernière fois que j'entendais ma déesse. A l'intérieur de la voiture, on retrouva mon téléphone, complètement mort, et mes papiers, pour certifier que j'avais bien été à l'intérieur. Ma mort simulée faisait les gros titres, et je ne faisais officiellement plus parti de ce monde. Nouvelle séparation. La pire de toute, parce que c'était moi qui l'avais décidée, celle là. J'espère seulement qu'un jour, elle me pardonnera. Une fois fait, j'ai quitté Londres. Je suis parti au nord, pour faire l'hermite. Pour me faire oublier. Pour commencer une nouvelle vie, la pire de toutes celles que j'aurais pu envisager. J'étais seul. Plus seul que je n'ai jamais été de toute ma vie. J'ai commencé à remonter l'Angleterre, en mangeant ce qu'on voulait bien me donner, jusqu'à ce que je tombe sur un truc.
« Ecoute moi bien mon garçon. Je n'ai pas d'argent pour engager quelqu'un, mais tu m'as montré que tu savais te servir de tes dix doigts. Alors, je te paie sous le manteau, tu dormiras en haut, à l'étage du garage, et je ne dirais rien à personne. En retour, ne t'attends pas à des miracles. La paie sera ridicule. Le travail, dur. C'est à prendre ou à laisser, fiston. »
Ce mec, c'était Clayton, le garagiste. Je travaillais au black, dans un garage à Newton Bewley, quasiment tout au nord, pour tenter de survivre. Ce n'était pas très bien payé, mais le patron était sympa avec moi, et il me couvrait. De là, je vivais comme je pouvais.