tales of past we're always catching us (Roméo)

Assise sur l'estrade du terrain de basketball, tu termines d'ancrer le crayon sur ton carnet de dessin. Une page qui se tourne, l'inspiration envolée pour tenter un autre croquis sur la page suivante. Mais tu n'as ni envie de rentrer chez-toi, ni envie de retourner dans ta chambre à la Adams. En réalité, le ballon te fait de l'œil depuis tout à l'heure en regardant les joueurs mettre un panier après panier. Ce n'est pas si difficile non ? Enfin, ils font deux fois ta taille, mais quand même, tu peux certainement le faire toi aussi. Matériels rangés donc ton sac, tu lèves ton fessier et descends les marches de l'estrade. Les joueurs étant partie, tu ne risques pas de te taper la honte. Tu récupères une balle et la fait glisser contre tes paumes, imitant les basketteurs un peu plus tôt. Corps placé devant le panier, te rendant compte qu'il est super haut, mais tu lances quand même. Pas de la bonne façon malheureusement et loupes. Tu ressayes en y mettant plus de force sauf que tu te rates encore une fois. Plus difficile que tu ne le pensais Fallon. L'agacement monte à une vitesse lumière, têtue, tu t'acharnes sur cette balle. Lancée, après lancée, ton esprit ne comprend plus rien, tu deviens même folle à sortir des gentillesses comme si la balle pouvait t'écouter et contrôler sa trajectoire pour te faire marquer un point.

Rien de prévu après la fin des cours, l’un de ses potes lui a proposé de remplacer un joueur dans l’équipe de basket. Ayant fortement besoin de décompresser, il a accepté sans se faire prier. Les vannes entre potes, les paniers réussis et ratés, aucune pensée angoissante ou stressante ne pouvait traverser son esprit durant le match de basket - ball. Il a ignoré cette fille sur l’estrade, son attention étant focalisée sur son jeu. La fin du match sonne, tout le monde se rend dans les vestiaires y compris l’italien. Ce dernier comptant s’hydrater, s’est très vite rendu compte avoir oublié sa bouteille d’eau dans la salle. Il y retourne alors, la récupère sous un siège et se redresse en observant l’étudiante s’acharner sur le panier. Il pourrait rire de cette situation mais l’envie s’envole quand il se souvient du couteau qu’elle lui a planté en plein cœur. Il boit une gorgée au goulot de sa petite bouteille d’eau, avale amèrement en dévisageant son ex. Il repose sa bouteille, se dirige vers elle :  ﹙ Elle te répondra pas.  La balle. Il la lui reprends des mains, se positionne, fléchis les genoux et lance la balle qui tombe directement dans le panier : ﹙Refais - le, vas y. Il lui rend la balle, ajoute  : ﹙Tu dois écarter tes jambes environ à la largeur de tes épaules et tu tiens mal le ballon là. Froidement, pose ses mains sur celle de Fallon pour lui montrer la manière de faire qu’elle puisse avoir un bon contrôle. ﹙Tu dois fixer l’anneau du panier maintenant et fléchir sur tes genoux avant de lancer la balle. Sans explication, il se tient là à la conseiller pour mettre un panier , trop bon pour lui épargner le ridicule.

L'esprit concentré sur cette balle que tu essaies vraiment de faire rentrer, mais rien à faire Fallon. Tu n'y arrives pas. T'es même sur le point d'abandonner, d'arrêter de t'acharner sur ce pauvre ballon et de ramasser ton matériel pour partir. Sauf que... Doux Jesus Marie Joseph. Problème à quelques pas de toi. Sa voix résonne. Timbre que tu n'oublieras pas de si tôt. Alors tu t'attends au pire, à la haine qu'il déversera surement toi, aux paroles empoisonnées, aux mots qui te blesseront sans doute pour avoir été une piètre petite amie. Mais... Rien de tout ça. Au contraire, il prend la balle, te fait une démonstration. Paupières qui s'ouvrent, surprise. Sous le choc. T'es peut-être en train de rêver tout compte fait ? Alors tu te pinces juste le bras pour t'en assurer. Grimace. C'est bien réel. Ton ex est plutôt calme. Balle dans tes paumes, le garçon passe derrière toi pour t'aider à mieux contrôler ce ballon. Les mains entrent en contact avec ta peau. Ça t'aurait fait frémir, mais tu ne sens aucune douceur en réalité, il est froid. Même s'il Paraît serein. Et alors, tu te demandes à quoi il joue. Pourquoi fait-il ça alors que tu es certaine que tout ce qu'il veut, c'est t'incendier ? Glisse rapidement une mèche derrière ton oreille, lèvres pincées nerveusement entre les canines. La panique te gagne, mais tu essayes de rester concentrée. Il est juste là, derrière toi, il respire le même air sens en être dégoûté alors contente toi de ça Fallon. Fléchies les jambes et les écartes comme t'instruis Roméo. Tu donnes tout, t'élances un peu plus en y mettant toutes tes forces. Et bingo ! Un panier. Un point. En joie, t'oublies tout un instant et tu sautilles, danse de la victoire. Ce n'est que lorsque tu t'apprêtes à lui sauter dans les bras que tes pas stoppent. Immobile. Réalité qui te rattrape. Tu recules. Une mains sur ton front, l'autre sur ta hanche. — Merci. Really ? C'est tout ce que tu trouves à dire Fall ? — Pourquoi t'as fait ça ? T'aider. Demandes-tu avec une pointe d'incertitude, venant peut-être de lui tendre le bâton pour te faire taper.

Comme si c’était hier, il s’en souvient encore de la fois où cette nana a heurté son égo et meurtri son cœur alors l’amertume est encore là, encore piquante et vive. L’expression de son visage se veut impassible et pourtant la froideur se ressent dans le ton de sa voix et ses paumes gelées sur les siennes. Conséquences de sentiments sincères qu’il a eu à son égard.  Aussi froid qu’un iceberg mais il reste et l’aide à le réussir son panier, pour lui éviter le ridicule ou peut- être parce qu’il est temps de considérer que l’eau à couler sous les ponts. Il ne sait pas trop, Roméo. Trop fatigué pour penser, il s’est juste laissé porter par la spontanéité il faut croire. Fallon suit minutieusement ses conseils et parvient à lancer le ballon tout pile dans le panier. Sourire satisfait sur le coin des lèvres à peine perceptible, il reste de marbre Roméo tandis que l’étudiante se met à sauter de joie, à deux doigts de lui sauter dans les bras mais il ne bouge pas, arque un sourcil puis elle se recule. Elle le questionne et il secoue la tête en répondant simplement : ﹙ Parce que t’avais l’air flippante à parler avec le ballon … Et parce que dans le fond, il ne voulait sûrement pas la voir galérer mais plutôt crever que de l’admettre. ﹙ Il est où ton tocard ? Il sait pas faire de basket pour t’apprendre ? Curieux, un brin rancunier, il fallait qu'il le remette sur le tapis.  

Expression taillée dans la forge, le garçon reste de marbre, le regard perçant, le ton froid. La rancune tenace et pourtant l'eau a coulé depuis sous le pont. Tu n'es pourtant pas si inoubliable non ? Mais tu dois bien avouer que chaque histoire comporte son lot de rebondissements et que c'est ce qui les rendent captivantes. Tu souris, tu souris avec la tendresse d'un regard dénué d'espoir. Celui de pouvoir enterrer cette colère à ton égard. L'espoir d'enterrer un passé douloureux et avancer. Et pourquoi pas laisser place à une meilleure entente ? Tu souris, malgré son gabarit et son imposante impassibilité. Tu ne faiblis pas face à lui, qui a pourtant toutes les armes visant à te blesser. — Ça m'agaçait de ne pas pouvoir mettre un panier. Tu peux très rapidement partir en couille Fallon, mais sans exagération toutefois. Sauf que Roméo ne peut pas s'en empêcher. Il te fait don d'une piqure de rappel ou alors est-ce de la jalousie mal placé ? Faisant corps avec tes idées noires, ton regard accroche ses prunelles, point d'ancrage, balle que tu fais balader d'une paume à l'autre. — Qui ? Insolente. Feindre l'ignorance. Jouer avec ses sens. — C'est de la jalousie ? Toujours plus loin. Tu as peut-être un peu trop touché son égo ? Vilaine. — Pourquoi revient-on sans cesse au passé ? Hausse les épaules et sans prévenir, lance la balle de toutes tes forces dans sa direction. — Vas-y, montre moi à quel point t'es doué.

Les échecs cuisants, il ne les supporte pas. Douloureux quand cela concerne sa vie amoureuse. Il n’aime pas facilement, Roméo alors, rare sont les fois où il a décidé de confier son cœur comme il l’a confié à Fallon. Cette dernière l’a brisé, mis en miette, en plus de fissurer son égo par ce qu’il a considéré comme une infidélité, une trahison. Les mois, les jours peuvent défiler , la cicatrice elle, restera toujours la même et la douleur restera mémorable parce qu’il l’avait réellement aimé cette nana, Roméo. Intérieurement satisfait de son panier, il s'abstient de montrer une quelconque once de joie, parce qu’elle ne le mérite pas et que sa rancune parle pour lui.  Remettre le passé sur le tapis n’est pas une bonne chose, il le fait quand même.  Il hausse les épaules, secoue la tête : ﹙ J’suis pas jaloux.  Tu fais ce que tu veux avec qui tu veux. C’est clair, net et un peu sec.  Se mordant nerveusement la lèvre inférieure, sa seconde question et s’empare du ballon. Il se positionne, s’élance et la balle touche le bord de l’anneau . Raté. ﹙ Il faut croire que c’est plus simple de mettre un panier que d’oublier. Le mal que tu m’as fait. Faut mieux en rire que d’en pleurer. Il revient vers son ex, lui rend la balle ﹙ A ton tour. Il la regarde et ajoute : ﹙ Tu prends les choses avec légèreté comme si c'était normal d'avoir merdé, comme si c'était rien.Que notre histoire c'était rien.

C'est toi le problème Fallon, ça a toujours été toi. Cette incapacité à pouvoir te contenter de ce que tu as. Était-ce une maladie ? Existait-il un remède ? L'amour suffisait-il ? Non, sinon vous n'en serez pas là aujourd'hui. Mais alors quoi ? Quelle serait la solution ? Au fond, tu n'en sais rien. Mais dire que tu n'as jamais aimé ce garçon, serait mentir. Dire que tu n'as jamais éprouvé de sincères remords, serait mentir. Sauf que tu es faite ainsi, poupée de cire, qui ne montre rien, à porter un masque. Celui de l'indifférence, celui, dont rien n'atteint et pourtant... Pourtant. — Pourquoi tu m'parles de lui alors ? Pousse le vice dans le chaos de ses sentiments. Haine qu'il ne garde qu'uniquement pour toi maintenant et tu le lis dans ses yeux. Son regard, ses mimiques que tu n'as guère oubliées. — On n'oublie jamais Roméo. On fait juste semblant. Hausse les épaules lorsqu'il rate son panier. Surprise. — C'est ma présence qui te rend si mauvais ? Tu peux toujours t'en aller. À ton tour, tu saisis la balle et lances. Il touche l'anneau, mais retombe sur le côté. Il y a du progrès pour toi cela dit. Nouvelle lancée contre son torse. — Tu veux que je fasse quoi de plus que ce que je n'ai pas arrêté de faire quand j'ai merdé ? J'ai reconnu mes torts. Je me suis excusée, tant de fois. T'attends quoi de moi Falcone ? Laisse tomber ton corps, fessier qui se pose contre le sol. Jambes dénudées que tu croises devant ta poitrine. — Tu veux que je baisse la tête à chaque fois que je te croise ? Tu veux que je m'excuse encore et encore jusqu'à ce que ta rancœur disparaisse ? Qu'est-ce que tu veux Rom ? Regard porté sur ton interlocuteur. Le problème, c’est qu'il n'est pas le seul en quête de vérité, toi aussi, tu veux comprendre pourquoi tu es comme ça, pourquoi tu gâches toujours tout.

L’eau a coulé sous les ponts mais pourtant, noyé dans l’amertume, il se sent incapcable de se comporter comme si de rien n’était face à son exe. Le fait est qu’il n’a toujours pas digéré cette histoire passée, parce que les sentiments avaient été sincères, qu’il avait misé gros sur cette relation en pensant que Fallon serait la solution, à l’inverse, elle n’a été qu’un problème de plus à gérer.  Il hausse les épaules à sa question, Roméo comme si ça lui passait au dessus de la tête , comme s’il ne s’était jamais demandé s’ils ne formaient pas le couple parfait aujourd’hui  :  ﹙ Pour savoir si ça a valu l’coup. Et il ne peut s’empêcher de se demander si elle le fréquente encore de tocard comme il le qualifie si bien.  ﹙ Tu fais semblant ouais, c’est ce que t’as toujours fait, Fall’. Paroles qui fusent, arrière goût aigre au fond de la bouche, trop difficile pour lui de jouer la carte de l’indifférence face à un passé toujours présent, une douleur toujours aussi vive. Récupérant la balle après son panier raté, il arque un sourcil, sourire méprisant au coin des lèvres. ﹙ Tu crois ? Trop tendu pour marquer un panier, c’est vrai. Elle s’y essaie à son tour et le rate. Vous êtes quittes cette fois. Il récupère le ballon contre son torse, l’écoute encore.  Fallon s’assoit sur le sol et nerveusement, il dribble une fois :  ﹙ J’suis sensé accepter tes excuses et tourner la page ? Faire comme si rien ne s’était passé ? Comme si tu m’avais pas pris pour un con ? Comme si la douleur n'avait jamais existé : ﹙Si ça a été aussi simple pour toi d'tout foutre en l'air, c'est pas aussi simple pour moi de l'accepter. Serre la balle entre ses paumes tandis ses billes la toisent malgré lui : ﹙Ca a compté au moins pour toi ? Question qu'il ne s'est jamais risqué à lui poser jusqu'ici.    

Prise dans le torrent de tes propres erreurs, tu n'avais pas mesuré l'ampleur de ses sentiments. Tu constates maintenant à quel point, les choses deviennent encore plus compliquées aujourd'hui. Tu pensais qu'il suffisait de s'effacer pour apaiser les mœurs. — Ça ne t'avancera à rien et tu le sais très bien. Ce n'est que pousser encore plus loin, le vice. La vengeance, peut-être même cette rancune à ton égard. Par contre, ce dont tu as horreur, c'est qu'on puisse parler à ta place. Pique d'acide balancé, poing serré, hésitante. Entre le laisser se défouler et croire qu'il sait tout de toi. — Alors c'est bien dommage, parce que ça prouve qu'en fait, tu ne me connais pas depuis tout ce temps. Ce n'est pas de ta faute si t'es comme ça Fall, pas de ta faute si tu n'arrives pas à comprendre toi-même pourquoi tu gâches tout. Tu ne fais pas exprès, c'est plus fort que toi, tu ne contrôles pas et ça, personne n'a l'air de voir, de comprendre, pas même toi. — Non, je ne t'ai jamais demandé ça et encore moins de tourner la page. Je ne t'ai même rien demandé, parce que c'est moi l'erreur. Parce que je sais que je ne mérite pas que tu me pardonnes. Mais... Regard qui suit la balle lorsqu'il essaye de mettre des points. Tu cherches les mots pour ne pas trop en dire. Novice des sentiments. — J'veux juste pas qu'on tourne en boucle sur ça. Parce que ta rencune, je t'assure que je l'ai en tête et je ne vais pas l'oublier de si tôt. Les paroles sont de plus en plus blessantes, mais tu fais avec, t'as pas le choix. Néanmoins, touchée. Surprise. Tu ne comprends même pas pourquoi il te la pose, cette question. — T'es vraiment sérieux ? Lui arraches la balle des mains après t'être levée, nerveuse. — Si ça n'avait pas compté, si tu n'avais pas compté, je ne serais déjà plus là à cet instant. À vouloir gratter un tout petit semblant de complicité datant. Tes sentiments ont été sincères, juste que tu n'as pas su les préserver.

L’ego trop grand, surdimensionné parfois, il se souvient d’avoir laissé tomber l'armure pour elle en pensant naïvement que Fallon serait le remède à son cœur abîmé d’une première relation mais ce ne fut pas le cas, loin de là … Il a volé en éclats cette fois,  victime d’une trahison qu’il a encore du mal à digérer. Le temps aide à oublier paraît -il, c’est faux et plus le temps passe, plus il s’en pose des questions, Roméo. Difficile de croire que son amant avait quelque chose de mieux que lui et il ne veut pas le savoir. Il hoche la tête en écoutant Fallon, malheureusement, oui, il se rend compte qu’il n’a jamais vraiment connu celle qu’il a aimé fut un temps : . ﹙ Je sais. Je te connais pas et j’ai pt’être un peu trop cru en toi. Son erreur à lui d’avoir voulu penser pouvoir mettre cet oiseau en cage alors qu’il tenait trop à sa liberté.  Elle encaisse, Fallon et Roméo reste braqué malgré lui, la rancune toujours aussi vive et présente en lui. ﹙ J’sais ouais, on devrait pas tourner en rond, juste oublier. Fronce les sourcils, regard qui affronte encore le sien. Si cette relation n’avait pas compté pour lui, la situation aurait été bien plus simple qu’elle ne l’est aujourd’hui. La balle arrachée des mains, il arque un sourcil, ne riposte pas. ﹙Si j’ai compté pour toi alors pourquoi tu m’as baisé ? Pourquoi t’as pas été honnête avec moi ? C'est si mal de vouloir éclaircir certains points même si cela signifie revenir sur un passé qu'il veut oublier ? Il s'approche d'elle, prunelles noirs dans les siennes, pose ses mains sur la balle pour la récupérer : ﹙Tu le vois encore ?   Le moment où jamais d'être honnête.