(Bohème&Kala) with or without you

Pour la 2e fois de ma vie, en quatorze ans, j'étais allée voir mon père. Je l'avais totalement ignoré pendant toutes ces années. N'ouvrent aucune des lettres qu'il avait pu m'envoyer. Je lui en voulais. Et c'était toujours le cas. Seulement j'étais allée le voir il y a peu et j'avais appris qu'il souhaitait faire une demande de sortir. Chose qui m'avait complètement bouleversée. Je ne le voulais pas. J'en avais peur. Mais durant le rendez vous, je ne reconnus pas celui qui était mon père. Et je me demandais alors si ces 14 années à être enfermé avaient vraiment pu le changer. Ça avait l'air, car même Bohème avait réussi à parler avec le directeur de la prison qui lui avait dit qu'il était un peu le modèle de rédemption ici. Je n'y croyais pas. Et pourtant, je le voulais fort. Penser que mon père avait peut être un cœur et des remords. Et si sa fille ne peut pas lui pardonner, qui le ferait ?

Une fois dehors, sur le chemin de retour je vis une affiche pour les six flags. Je demandais alors à Bohème d'y aller. De quoi me changer les idées. Je ne voulais plus en parler. J'avais juste envie d'en profiter avec lui. "N'en parle pas a Kas s'il te plait" Puis une fois garés et à l'extérieur de la voiture, telle une enfant, je pris la main de Bohème pour l'entraîner à l'intérieur. "On commence par quoi ? Je veux tout faire !

@Bohème Chatelain

Cet élan de curiosité - si l'on peut voir les choses ainsi - de Kala envers son père me rends à la fois compréhensif et prudent au-delà des mots. A force de côtoyer le milieu carcéral par le biais de mon métier, je ne sais que trop bien qu'un homme en taule est changé à jamais, mais souvent dans le mauvais sens du terme. Alors durant l'entrevue, je veille au grain. Aucune intervention de ma part, juste quelques œillades bien sentie afin que le paternel en question sache qu'à la moindre incartade, je lui apprendrais le sens fondamental du mot enfer et qu'il n'appréciera sûrement pas la leçon en question. Mes lèvres sont scellées à jamais fut ma première intervention à la sortie, non sans laisser mes doigts caresser doucement les siens. Je voudrais enlever toute cette merde qui gravite autour d'elle... mais au lieu de me laisser le faire, Kala s'intéresse aux six flags, me provoquant un sourire amusé d'un même temps. Tu n'as pas encore compris que je te suis où tu veux ? Jusqu'à ce que son moral soit au top et que la laisser toute seule ne soit pas un problème.Malheureusement, mon métier exigeant ne m'offre pas le luxe de lui offrir un moment illimité, surtout en pleine affaire de maltraitance infantile. Mmh... et si pour cette fois tu me conduisais ? Où tu veux. Pour faire ce que tu veux. Cette fois, tu as les commandes et moi je te suis. Rarissime réaction chez moi. Mais le courage de Kala aujourd'hui valait bien plus que cela encore.

@Kala Malacki

Cette deuxième rencontre avec mon père m’avait tout de même bouleversée. Je tentais de ne pas trop le montrer à Bohème. Je n’avais pas voulu parler du passé. Je lui avais demandé comment était sa vie en prison, ce qu’il comptait faire dans l’avenir. Quels étaient ses plans s’il sortait. Je n’avais pas envie de l’entendre me demander pardon ou se trouver des excuses. Ce n’était pas ce que j’étais venue chercher en venant ici aujourd’hui. Non. Je voulais savoir s’il était réellement capable de sortir. S’il était mieux enfermé ou en liberté. Après tout, il est quand même resté enfermé pendant quatorze ans, et il reste humain. Je suis peut-être trop gentille, trop naïve. Mais je repensais aux mots de Milo, et il m’avait dit que certaines personnes pouvaient changer en passant par la case prison. J’espérais réellement que ce soit le cas de mon père. « Tu sais qu’il risque de ne pas être content s’il apprend que tu lui as caché ça ? » J’étais contente que Bohème décide de garder cela entre nous. Mais je voulais aussi être sûr qu’il sache dans quoi il s’embarque. Alors qu’on entrait, je vis une affiche pour les six flags et c’est sans réfléchir que je lui demandais d’y aller. Le temps de me changer les idées. Avec lui. Je le regardais et souris à sa proposition. « Alors viens. » Puis je lui pris sa main afin de l’amener tout d’abord nous acheter de quoi manger. Cette entrevue m’avait creusé l’appétit. « Tu veux manger quoi ? Moi je veux un bon gros burger avec des frites et une barbapapa pour le dessert ! » Dis-je à la personne qui tenait le stand de fast-food. « Aaaah, et deux bières ? » Demandais-je tout en regardant Bohème pour lui demander confirmation quant à cette boisson.

@Bohème Chatelain

Cabotin, comme toujours, j'esquisse un petit sourire à la simple idée de Kassim m'en collant une pour lui avoir caché une chose pareille. Je m'attends à ce genre de réaction - somme toute légitime - de sa part et pourtant, il me connaît bien. La loyauté, je l'ai chevillée au corps, que ce soit envers ma famille ou, dans le cas précis, envers Kala. Oh il m'en mettra très probablement une et après on en parlera plus. Pas de quoi sauter au plafond ! que je lance d'un ton léger, tentant d'ôter toute trace de culpabilité de son esprit. C'est ta décision. Je n'ai pas le droit d'interférer mais Kass non plus. Alors respire, si tu ne dis rien il n'en saura rien, en tout cas pas de ma part. Ma tentative de déculpabilisation mise de côté, je m'empare de sa main tendue et la suit, m'amusant de son enthousiasme hautement communicatif. En temps normal j'éviterais toute junk food, mais pas aujourd'hui. Je veux profiter autant qu'elle, me gaver parce que j'en ai envie, et mettre de côté tout ce qui, en temps normal, me pousserait à agir de façon raisonnable. Un burger dégoulinant de fromage avec une tonne de frites... et un donut fourré chocolat noisette en dessert... même si possible que je te pique un peu de ta barbapapa ! D'un côté je lance ma propre commande au responsable du stand, de l'autre c'est comme s'il n'y avait que ma conversation avec Kala. Deux bières, obligé ! Grosse capacité, s'il vous plaît. Ma galanterie m'incite à dégainer ma carte avant même que la jolie brune n'en n'ait l'idée. Lui changer les idées passe aussi par cela, dans mon esprit du moins.

@Kala Malacki

Je ne savais même pas si Kassim savait que je connaissais Bohème. Je ne sais pas s’il accepterait qu’il m’aide de la sorte. Connaissant son avis sur mon père, il lui en voudrait surement pour son aide. Mais il avait raison sur un point. Mon cousin n’était pas du genre rancunier. Il disait ce qu’il avait à dire, ou faisait ce qu’il avait à faire et il passait à autre chose. Bien que cela ne semblait pas être le cas avec mon père. Avec lui je sentais que ça ne passerait jamais. Pourtant, j’aimerais vraiment que Kassim soit de mon côté pour le coup. Mais à défaut de l’avoir, je pouvais compter sur Bohème. « Merci. » Terminais-je par lui dire, car il n’y avait que ça à dire de toute façon. Il était sincère dans sa démarche et ça me faisait plaisir. « J’aime pas avoir des secrets pour lui. » Je regardais l’avocat avant de rajouter. « Les secrets ça sort toujours et quand ça sort, c’est encore pire. » Seulement je ne voyais pas comment je pouvais lui dire pour Bohème. Ne voulant pas mettre mon cousin sur lui. Mais je tentais de ne pas y penser, voulant profiter de ce moment dans ce parc d’attraction. « Ok mais j’te piquerais aussi un peu de ton donut aussi. » Rien qu’à l’intitulé j’en salivais. Et alors que Bohème passait continuait à passer commande, je me retournais pour voir les différentes attractions et tenter de faire un choix. Avant de me retourner vers mon ami. « J’réfléchis mais … est-ce une bonne idée de manger avant de faire les attractions ? » Je me mis à rire. « Ca prend combien de temps une digestion ? » Je regardais alors nos plats arriver, je pris ma commande comprenant qu’il avait payé. « Merci d’avoir payé. » Je lui déposais un baiser sur sa joue, avant de nous asseoir à une table. Tout en lui piquant une frite, parce qu’on sait tous que c’est toujours meilleur chez les autres, je lui dis en le regardant. « J’te préviens, je veux faire du carrousel. » Et peut-être que je n’allais faire que les attractions pour enfants, parce qu’au fond, c’est ce que je suis encore.

@Bohème Chatelain

Ah, les secrets. Très utiles suivant les situations, pour éviter de blesser un proche ou de provoquer davantage de catastrophes dans un relationnel, ils sont des compagnons exigeants et très envahissants, quand on ne prend pas garde. Si tu y penses trop, clairement Kass va lire en toi comme dans un livre ouvert. Je ne t'encourage pas à lui mentir, me fais pas dire ce que je n'ai pas dit... mais tu as le droit à ton jardin secret. A tes décisions. Garde ça à l'esprit. Kass le comprendrait très certainement s'il passait outre son envie de te protéger. Envie que je comprends, du reste... d'où le fait que je ne t'aurais pas laissée venir ici en solo. Fidèle à mon propre côté secret, rien de ce qui s'est passé aujourd'hui ou se passera ne sortira de ma bouche. Mon métier ainsi que ma position dans les BH implique une sorte de double vie. Celle que je possède en dehors de ce merveilleux bureau dont je suis fier, et celle qui me fait porter la robe d'avocat. Les deux sont opposées, mais condamnées à vivre ensemble néanmoins. Fais toi plaisir et pique que je reprends d'un ton nettement plus léger, avant de cligner plusieurs fois de mes cils noirs recourbés. Tu sais que je viens d'avoir une putain de sale image de nous, gerbant tripes et boyaux en haut de la grande roue ? Quelle erreur de débutant. En moyenne entre deux et cinq heures... c'est que y'en a long de tuyauteries là-dedans ! Ceci dit, on peut commencer soft et laisser les sensations fortes pour la fin de soirée. Je chope une frite que je déguste en poussant un soupir de contentement. Depuis quand n'ai-je pas eu de soirée aussi légère et sans noirceur ? Des mois. Des années. Je ne saurais dire... Carrousel c'est parti ! Mais je te préviens, le cheval est pour moi que je ris tel le gamin que je ne suis plus depuis longtemps. Ou que, clairement, je n'ai jamais été. Et on fera un tour de maison hantée. Si on ne se casse pas les cordes vocales, c'est nettement moins fun ! Cette fois, c'est moi qui pique dans son plat, tout en me disant qu'effectivement, l'herbe est toujours plus verte ailleurs.

@Kala Malacki

La situation n’était facile pour personne. Ni pour moi. Ni pour Kassim que je ne voulais pas embêter avec ça. Ni pour Bohème qui se retrouvait un peu entre nous deux. Mais j’appréciais le fait qu’il arrive à faire la part des choses et qu’il tente de m’aider du mieux qu’il peut. Si ce n’était pas avec lui, j’y serais surement allée seule. Je l’écoutais me donner des conseils concernant Kassim. On le connaissait très bien tous les deux, et on savait sa réaction. « Faut juste que je vois comment lui amener la chose. C’est tout. » Même s’il avait raison. J’ai le droit à mon jardin secret. Mais peut-être que justement j’en ai marre de garder les choses pour moi, après quatre ans à ne pas avoir dit un mot. Il était temps que je parle. Même si ne faisait pas plaisir aux autres. « Quoi ? C’est la grande roue qui te fait vomir toi ? Petite nature ! » Que je lui répondis pour l’embêter. Car moi-même je ne savais pas comment je pourrais être dans un quelconque manège. L’entendant me dire la durée d’une digestion, je grimaçais. Il allait nous falloir beaucoup de temps avant de pouvoir monter sereinement dans un manège à sensation. Sans avoir peur de vomir notre repas. C’est pourquoi j’en profitais pour lui dire que je comptais bien faire du carrousel. On pouvait commencer par-là d’ailleurs. « Ca va ! Normalement y a toujours deux chevaux l’un à côté de l’autre. Le bel étalon avec sa jument. » Je dis cela en le regardant et en souriant. Sans arrières pensées quelconque. Parce que je suis comme ça, un peu trop innocente. « Ca fait jamais peur les maisons hantées, mais ok. » Dis-je en espérant ne pas parler trop vite. Je mangeais tout en continuant à parler à Bohème, tout en écoutant les cris des autres passagers des manèges. Pour certains, ça ne donnait clairement pas envie.

@Bohème Chatelain

Une œillade à l'attention de Kala et je vois déjà la fumée s'échapper de son crâne. Tu sais que là, tout de suite, tu es en train de te faire des nœuds au cerveau princesse ? Non pas que je ne comprenne pas pourquoi. Connaissant Kassim comme je le connaissais, je sais par expérience qu'il risquait de ne pas aimer la cachotterie. Mais dans la seconde, cela ne me semble pas être le plus important... profiter de la fête foraine et de la douceur dans laquelle cette dernière nous embarque, ça oui. Tu sais ce qu'elle te dis la petite nature ? En un geste calculé, j'applique du ketchup sur mon doigt afin d'en décorer le nez de Kala la seconde d'après. En vérité, avant que j'ai la nausée, il fallait vraiment que je sois secoué... mais quand même. Voilà, bel étalon et sa jument, j'adhère, aller viens ! que je cabotine doucement tout en grimpant sur le dos du cheval sur le carrousel, n'ayant même pas de certitudes quant à ma présence dans un quelconque manège que ce soit durant mon enfance. Je crois bien que c'est la première fois que je monte dans un machin comme ça... que je note presque plus pour moi-même qu'autre chose, alors que l'amusement prend place contre mes lèvres. Quand tu attraperas mon bras pour être sûre que je suis pas loin, on en recause !

@Kala Malacki

Une chose était sûr : elle n’allait pas pouvoir garder trop longtemps ce secret vis-à-vis de Kassim. Elle le pourrait évidemment. Mais elle ne le veut pas. Avoir des secrets pour lui ne lui fait pas du bien. Lui qui est comme un grand frère pour elle, il lui est difficile de ne rien dire. Il suffisait tout simplement de savoir comment amener la chose. Et aux paroles de Bohème, elle se mit à rire. « Les seuls nœuds que je vois, ils sont dans tes cheveux. » Et après avoir dit cela, elle vint lui secouer sa chevelure. Non, il n’y en avait pas. Il avait d’ailleurs de très beaux cheveux. Cela se voyait qu’il y prenait soin. « Heyyyy, on t’a jamais dis de ne pas jouer avec la nourriture ? » Ca va que ce n’était pas grand-chose, mais il s’agissait vraiment d’un sujet qui lui tenait à cœur. N’ayant pas grandit dans le luxe, elle savait ce que c’était de devoir compter les moindres centimes pour son repas. Un peu moins maintenant, mais elle était passée par là dans sa jeunesse. Heureusement pour lui, il ne s’agissait que d’un petit trait de ketchup, qu’elle nettoya à l’aide d’une serviette. Alors qu’ils avaient terminé, assez rapidement, leur repas, ils se dirigèrent directement vers le carrousel que Kala avait demandé de faire. Le temps de digérer tranquillement. Tous les deux, l’un à côté de l’autre, ils s’assirent chacun sur un cheval. Pendant que le manège commençait à tourner, elle tendit sa main à Bohème. « C’est vrai ? On t’a jamais amené dans un Carrousel ? » Ils réfléchissaient d’ailleurs au prochain manège qu’ils feraient. Et apparemment, le jeune homme avait envie d’amener Kala dans une maison hantée. « Alors allons-y. » Dit-elle, voulant montrer à l’avocat qu’elle n’avait pas peur.

@Bohème Chatelain

Mes cheveux sont impeccables ! que je me défends aussitôt avant de passer littéralement à l'offensive physique... bien que cette dernière ne se résume, finalement, qu'à un trait de ketchup déposé contre le nez de Kala. Tu sais que pour ne pas gâcher tu aurais aussi bien pu le lécher après l'avoir récupéré avec ton doigt ? A mon arrivée à Boston je ne roulais pas sur l'or non plus, la richesse de mes parents n'étant plus la mienne depuis très, très longtemps. Nous nous sommes parfois privés avec Mia pour joindre les deux bouts. Mais cet épisode, afin de ne pas gâcher notre journée ensemble et surtout la perspective de s'éclater dans des manèges - à sensations ou pas - je me contente de le garder soigneusement enfermé à double tour dans mon esprit. Dans cette optique, je garde un silence relatif jusqu'à être en place sur un cheval du carrousel, m'imaginant enfant. L'innocence de cette période me paraît lointaine, diffuse, presque effacée. Non, jamais que je reprends dans un petit soupir. Tu sais j'ai été renié à quatorze ans, alors ça n'implique pas avoir les parents les plus cajoleurs du monde sont les derniers propos que je prononce avant que le manège ne se mette en marche. Et, afin de mesurer pleinement cette première expérience en la matière, j'attrape la main de Kala afin de la serrer dans la mienne, non sans lui offrir un sourire lumineux et sincère.

@Kala Malacki