Getting Closer (Mia & Lexie 3)

Lexie ne pensait pas pouvoir être à se point déstabilisée par le compliment :  elle, qui s’est promis de contrôler ses sentiments, cette attraction qui bouillonne au fond de son être, et qui a plutôt réussi jusqu’à présent. C’est vrai quoi, elle côtoie déjà madame Campbell plusieurs fois par semaine, en cours, et l’étudiante musèle sans trop de difficultés son cœur et son corps qui hurlent leur besoin de ces différentes interactions qu’elles peuvent avoir. Alors, par quel prodige maléfique s’est-elle laissée distraire au point de ne plus pouvoir triompher sur ces élans ?

Tu vois quand je t’ai dit que tu ne contrôlais rien du tout. Ça se contrôle pas ça Lexie, tu le sais pourtant !

Non, ça ne se contrôle pas, mais ça se maîtrise. Heureusement ses joues empourprées ont pu, sans doute, passer pour de l’humilité, plus que pour du véritable trouble. Et elle a été capable retourner sincèrement l’éloge, sans calcul, ou dessein caché. Parce qu’elle le pensait véritablement. Mais sa professeure ne semble pas croire à cette louange, qu’elle assimile peut-être à une simple politesse :

─ Mouais... mon mari ne dirait pas ça. Il dirait même que je suis un cas perdu !

Lexie laisse passer doucement la tension qui menace de crisper sa mâchoire à la mention du fameux mari.
Et alors quoi ? t’avais bien vu son alliance non ? De toute façon t’es tombée d’accord avec toi-même que cette relation était inenvisageable dans tous les cas. Ça change rien à ta situation.Non ça change rien. Alors pourquoi ça la dérange autant ? Mais autre chose la bouleverse davantage, et ça n’a rien à voir avec la jalousie emprisonnée en son sein : Comment peut-on dire un truc pareil à son épouse ? Et surtout cette épouse là ! Bon sang quel connard ! De façon presque imperceptible, elle serre les poings. Si elle a pu contenir sa jalousie, la colère, le sentiment de révolte qui l’envahissent sont indomptées. Elle les rattrape de justesse, comme on tire sur la laisse d’un chien enragé, desserre doucement ses doigts repliés sur eux-mêmes, et répond avec un sourire, néanmoins crispé, tout en récupérant le ballon, pour engager la dernière manche.

« Je suis persuadée qu’il ne le pense pas. Après tout, s’il vous a épousée, c’est que que vous êtes quelqu’un d’incroyable à ses yeux. Et de mon point de vue, vous êtes loin d’être un cas perdu ! Si ça peut vous rassurer. »

Elle aurait pu dire qu’à SES yeux à elle, madame Campbell était quelqu’un d’extraordinaire, mais il lui faut être prudente, elle pourrait trop en révéler et elle ne veut pas créer de malaise entre elles. C’est la dernière chose qu’elle souhaite.

- ça va : j’ai d’autres talents, je ne suis pas totalement désespérée.

Lexie chasse immédiatement, de ses pensées les visions déplacées, qui se sont empressées de venir toquer à la porte de son imagination, concernant les autres « talents » de sa professeure, et se contente de rétorquer, avec un sourire sincère.

« Je n’en doute pas. »

Ce n’est pas l’étudiante qu’il faut persuader du contraire. Mais cela ne l’empêche pas de garder la victoire comme cap. Parce qu’elle déteste perdre, Lexie, puis elle aime prouver qu’elle vaut quelque chose, surtout à sa professeure. Et alors qu’elle dribble en direction du panier, elle évite les tentatives désespérées de son adversaire pour récupérer la balle entre ses doigts.
C’est assez incroyable de la voire bondir autour d’elle, comme si sa vie en dépendait.  Puis elle est mignonne de continuer à se battre malgré sa défaite certaine et imminente. Certaine ? … Et bien si Lexie se donne à fond, oui, sa victoire sera incontestable, mais : et si elle la laissait gagner ? Pour lui éviter justement de penser qu’elle est un cas perdu, comme le semble le dire l’autre couillon ? Non ce serait trop évident, et madame Campbell verrait bien qu’elle agirait par pitié et ce serait pire. Néanmoins Lexie laisse cette pensée s’insinuer dans son esprit, alors qu’elle approche dangereusement du panier et donc de la victoire. Jusqu’à la dernière seconde elle hésite, mais sa sincérité et son honnêteté poussent le ballon jusque dans les filets de ce dernier panier qui signe sa victoire. Elle se tourne donc vers sa professeure, un sourire éclatant de fierté insupportable sur le visage.

« Gagné ! » Elle lui tend alors la main. « Mais c’était serré, vous avez perdu de peu et franchement, vous m’avez bluffée ! Vous devriez reprendre le basket, vraiment. Parce que là, avec un bon entraînement vous me mettez la misère. ».

Les doigts de son enseignante serrent les siens et Lexie ressent de nouveau ce papillonnement étrange au creux de son estomac. Elle l’ignore, non sans mal, tout en remarquant l’air dépité de son adversaire face à cette défaite, qu’elle accepte néanmoins. Peut-être aurait-elle dû la laisser gagner... Mais les yeux de madame Campbell brillent d’une lueur particulière, alors qu’elle répond d’une façon étrangement plus contenue que l'éclat qui scintille dans son regard.

- Je vais peut-être m’y remettre oui… C’était fun.

L'étudiante opine du chef : "N'est-ce-pas ? Le basket c'est toujours fun de toute façon !". Elle se retient d'ajouter le "surtout avec vous !", qui lui brûle les lèvres, et lance le ballon dans le chariot servant à les rassembler. Lexie se dirige ensuite vers son sac pour boire une ou deux gorgées d’eau. La vache, il fait chaud !

C’est ça de t’émoustiller ainsi.

Puis elle range sa gourde, tout en déclarant, les yeux pétillants de malice : « Alors, on va se le boire ce café ? » Puis elle lève les mains en signe de défense, pour se justifier « C’est vous qui avez lancé l’idée après tout. Puis c'est vous qui avez promis de payer aussi, ça j'ai retenu !» Elle ponctue cette dernière phrase d'un clin d'oeil taquin.