tu redevenais un gosse, coda, pour ton plus grand plaisir. alors que tu passais un bon moment dans le café avec ce jeune nerd, au monde semblant diamétralement opposé au tien, tels que le soleil et la lune, le paradis et l’enfer, tu fonçais, l’esprit virevoltant, vers ces vélos qui t’avaient fait de l’œil. tu te laissais volontairement emporter par le bonheur une fois tes pieds sur les pédales, les actionnant le plus vite possible. et filant comme une fusée sur ce vélo qui ne t’appartenait pas, ça restait un détail vraiment insignifiant à tes yeux, car le jeu en valait réellement la chandelle dès que tes mirettes en avaient découvert deux non attachés dans le coin. l’idée était d’autant plus alléchante quand tu n’étais pas seul, accompagné d’un eben qui semblait buguer, impression qui te ne freinait pas au contraire. il fallait être rapide au cas où les propriétaires reviendraient rapidement, donc tu n’avais vraiment pas pris le temps de beaucoup le rassurer à ce sujet, faisant comme tu avais pu. mais un peu plus loin, tu avais ralenti, à cause de lui. tu ne l’entendais pas, ne le voyais pas non plus. après quelques secondes qui te parurent une éternité, tes poumons le remercièrent mentalement, il te frôla presque avant de prendre la tête de cette course illégale. mais il te cria surtout de ne pas t’arrêter et sourire en coin, tu essayas de le rattraper. tu espérais au fond qu’il n’était pas mort de trouille mais le bonheur de le voir accepter ton défi éclipsa tout doute. tu ricanas enfin, complètement dans ton élément, te sentant pousser des ailes. ces mêmes ailes qui le suivaient, t’étonnant de ne pas le voir s’arrêter de sitôt. pédalant derrière lui, tu crias toujours pour le stimuler. — c’est ça, little angel, oui c’est ça ! T’ES PARFAIT, YOUHOUUUU ! mais dans une descente, tu faillis lui rentrer dedans sans remarquer qu’il avait ralenti. tes doigts serrant les freins, pas trop brusquement pour éviter une chute, tu fis demi-tour vers lui. l’atmosphère avait changé, tout te semblait soudain plus sombre, plus inquiétant. la mine perdue, tu sondais les environs au cas où. qu’est-ce qui avait changé ? tu n’avais pas eu l’impression qu’un truc l’avait perturbé pendant la course, alors tu t’approchas de lui, laissant le vélo sur le trottoir. ton souffle te parut d’un coup rapide mais tu mis cela sur le compte de l’adrénaline, de la course qui avait éveillé tous tes sens et tes tripes. tu l’entendis jurer avant de te faire face, tu cherchas alors son regard pendant qu’il cria ton nom. — eben !? est-ce que tu vas bien ? mais tu te rendis compte que maintenant qu’il n’était sans aucun doute pas habitué à ça, ce que tu pouvais être naïf parfois avec les gens. car personne n’était comme toi, car tu l’avais plus ou moins contraint de te suivre en vélo. tu l’avais cru totalement paré à ça, tu aurais dû t’en douter que non. tu sentais bien qu’il avait effectué un grand saut dans le vide, pour rejoindre ton monde. sûrement trop intense pour un début. — je m’excuse, j’aurais peut-être dû demander ton avis avant, mais ouais. tu reculas de quelques pas pour lever tes bras en l’air avant de tournoyer sur toi-même en riant. — C’ÉTAIT GÉNIAL, tu trouves pas ? en quelque sorte. le fait qu’il employait le terme illégalité te dérangeait cependant, tu avais conscience que ce monde te collait encore à la peau, faute d’avoir grandi dedans. d’avoir vécu certaines choses que personne n’aurait supposé derrière tes yeux et ta gueule d’ange, pourtant la marque sur ton visage restait un bon indicateur de cette vie ou des mauvaises habitudes que tu prenais. — c’est vrai, tu as vu un peu de quoi j’étais capable, tu comptes me dénoncer pour… le vol ? tu regardas les vélos un court instant, s’il savait la liste de tous tes méfaits, qu’est-ce que tu signerais pour voir ce moment, vraiment. mais ton regard semblait l’éviter à présent, un peu inquiet de sa réaction. mais elle t’arracha un rire, un de ces rires incontrôlables mais t’arrivas vite à te calmer. tu ne voudrais pas lui donner une bonne raison de protester. — peut-être ? sans réfléchir, ta main trouva la sienne avant de la caresser. tu te fichas à présent de cette nouvelle proximité qui éveilla pourtant en toi de nouvelles sensations. — tu ne m’as pas dit ce que tu avais ressenti durant la course ? le but, c’était pas justement que tu sortes de ta zone de confort ? alors c’est quoi qui semble t’inquiéter, hum ? tu te demandais aussi pourquoi il parlait moins que d’habitude, avant de te rappeler qu’il était sensible… sensible à tout, néanmoins tu osas un contact sur son menton avec ton autre main. il n’avait jamais été aussi proche de toi. — tu n’as pas à te sentir coupable, little angel. c’est moi l’unique responsable, ne te rends pas malade car je t’ai poussé… à voler. tu soupiras, un peu gêné pour lui, il n’avait pas à payer pour ça, par ta faute et qu’il voyait cela déjà comme… une erreur de parcours. mais sa dernière question t’arracha presque un cri de surprise. — tu m’arraches les mots de la bouche… euh tu veux qu’on continue notre balade à vélo dans le parc ? on se laisse porter par le moment car, après ce qu'on a fait, ce serait un gâchis de les abandonner ici déjà. tu pouffas, tu redevenais aussi cet ado qui remarquait qu’il ne quittait plus tes lippes du regard. tu les humectas machinalement avec ta langue, il te plaisait déjà mais en cet instant, encore plus. ou bien était-ce l’adrénaline encore présente dans tes veines qui te poussait à savoir quel goût avait ses belles lèvres délicates. fallait-il résister, ignorer la tentation qui pointait le bout de son nez mais clairement emballé, un son sortit de ta bouche. — tu te lances ? tu te retenais volontairement de lui dire de quoi tu parlais, à ton tour d’être patient, tu l’avais poussé à voler un vélo, dorénavant tu lui laissais le choix entre le paradis de tes lèvres et l’enfer de la balade, ou bien entre le paradis de la balade et l’enfer de tes lèvres.
(Coda Weaver)
; I just wanna live. Don't really care about the things that they say. Don't really care about what happens to me.