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Il fait nuit, bien doré, comme quand j'étais gosse et que je regardais longtemps dans le soir. Je respire l'odeur des restaurants et bars des alentours, dehors ça s'amuse, ça fête quelque chose ou alors rien, c'est juste pour le plaisir de gueuler. Je crache la fumée de ma clope, doucement, en filet pour percer la nuit, j'ai la mine du défoncé, je le sais. La rue scintille en ligne, en fond, en rond, à l'infini, de près ça fait plus vrai, plus banal aussi. Je repense à tout à l'heure, à ta mélancolie, ou c'était peut-être le temps, le passé puis le présent qui se rencontrent, comme des retrouvailles à la con. De loin on aurait pu croire que t'étais heureuse, de mes yeux j'ai bien vu que t'étais triste. Mais depuis, nous sommes tous les deux ici, paumés mais la débilité marqués sur nos faciès. Haaa ça j'sais pas! Si t'es plus sexy que celui qui a le rôle du meilleur ami dans ma vie. Faut dire, il place la barre bien en haut aussi. Pis, j'ai bien envie de te revoir taper du pied. Parce que quand tu fais des choses comme ça, j'oublie que mon coeur a des lésions. Je sais qu'en ce moment t'es perdue, tu te poses des questions, personne pourra te sauver à part toi. Mais tu sais pas quoi faire, t'as pas trouvé de chemin, t'as pas trouvé le sommeil. Et tu sors et tu fumes et tu bois en attendant le soleil. Ton cerveau est à mille à l'heure, tu fais tout pour le déconnecter. Tu portes tant, tu ne vois même plus que c'est toi qui fait naître des paysages colorés dans ma vie. Tu brûles, à l'intérieur c'est un feu sauvage épris de l'océan. Je voudrais te protéger au creux de ma main, te déposer au bord de l'eau pour te glisser sous le sable. Que le bruit des vagues te nourrisse, que tu poses tes grands yeux bleus, sur toi. Mais je n'ai que ma tristesse pour te faire oublier. Mais tu sais moi aussi la vie ça m'effraie J'dis pas ça... Moi c'est pas du vrai malheur. A coté du tien. Je ne crois pas qu'on puisse imaginer. Que personne ne le puisse. Ce que ça fait, dedans. Il faudrait certainement plusieurs vies rien que pour avoir une idée de la souffrance qui t'a giflée en quelques jours. En seulement quelques jours. Il n'y a rien à faire. C'est hors de portée. On ne peut pas imaginer. On ne peut pas imaginer ni comprendre ce qu'il faut de force, de générosité et d'amour avant tout ça pour qu'une fois tout en ruine, il reste encore une braise qui palpite. Sous les décombres de la peau. Un souffle sous les cendres qui rit encore un peu, parfois, avant de retomber. Alors tout ce que je fais, c'est t'avouer ce qui me peine au point de m'emmener dans cet état. Comment ça "toi aussi"? Qui sont les autres? La dernière bouffée tirée sur ma cigarette que je viens écraser au sol, sous mon pied. La risée qui s'échappe de mes lèvres avec la fumée. Tu sais saisir toutes les occasions toi! Pour en profiter, gentiment. Je t'écoute attentivement, la tête qui commence à se pencher, encore, un petit peu. En pleine réflexion, entrain d'imaginer cette nuit que tu es entrain d'annoncer. Et si c'était à moi de choper l'opportunité? Ma caboche se redresse brusquement, comme si je venais d'être illuminé J'vais te faire des pancakes salés et des sucrés! Ce qui veut dire que ton invitation est acceptée Si t'étais pas mariée, je t'épouserai! Toi et tes conditions de vie. Parce qu'on serait l'infini, un élan dans la nuit, des instants arrachés à la vie. Tu dirais bleu, je dirai noir, toujours, on serait des arrêts sur des images qui ne s'useraient jamais. On pourrait voyager un moment comme ça, insoumis au temps, aux heures, le monde tournerait, on tournerait autour du monde, avec accrochée à nos sourires, l'insouciance des années qui resteraient. Mais notre éternité ne sera qu'une nuit. Moi ça me va. Mon genou se pose à terre au milieu de ces gens, ta main dans la mienne je viens te demander Gigi, acceptes-tu d'être mon doudou pour ce soir? La mine attendrissante, le sourire aussi étoilé que mes pupilles.
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