Can't stay here
@Lex Reynolds
06 06 2022 •• Lex's.
06 06 2022 •• Lex's.
Avant d’accéder à ma requête, je n’ai pas de mal à remarquer qu’elle réfléchit à ce qu’elle vient de me balancer. Un discours de presque sourdes, pas vrai ? Cependant, les mains posées sur mes genoux en gentille fille bien docile, je confirme que je ne bougerais pas tant que je n’aurai pas obtenu ce piètre café. "Je vais te cherche ça." Je lui en offre un sourire surfait, comme si cette demande avait une importance démesurée.
Elle disparait donc, de l’autre côté de la porte, et je reste quelques minutes à tenter de mettre de l’ordre dans mes pensées. Je suis bien placée pour savoir que c’est difficile d’occuper une place élevée dans la société. Que c’est une pression constante que d’être bien née. Mais je ne vois pas comment, elle peut préférer cette vie à celle qu’elle avait. Même si ses parents n’étaient pas les plus bienveillants. Et dans les méandres de mon esprit, je me laisse surprendre par son être à nouveau devant moi, si bien qu’elle m’interpelle d’un "Voilà." Je récupère naturellement la tasse entre mes doigts. Et si je pourrais lui souffler un merci, je me retiens, attend et espère qu’elle poursuive sa plaidoirie.
Si elle prend la peine de boire une gorgée, je ne touche absolument pas à mon café. Je le sais, que c’est sa contenance, qu’elle est en train de se chercher. "Mon père a pas aimé que je rate les examens du premier semestre, alors qu'on avait un accord." Je ne commente pas, le fait qu’elle a joué avec le feu dans ce cas. "Il est venu me chercher pour me ramener à Amsterdam et a transféré mon dossier à l'université libre." Mise a part le côté retrait de Boston, je ne vois pas en quoi c’était une mauvaise idée. "Il a prit le contrôle de mes réseaux et de mon téléphone par savoir à qui je parlais, ce que je disais, etc." C’est donc là, que ça a commencé à pécher. "En gros, j'avais plus aucune liberté." Cette foutue recherche de liberté… Une quête qui fait pencher le monde entier. "Je pouvais juste aller à la fac et étudier, rien d'autre." Comme une mauvaise petite fille. " Zéro relation sociale, zéro sortie. C'était juste moi et mes putains de syllabi. " Une prison dorée, je jure que de voir le mal, j’essaie. " Et je te dis pas l'ambiance au souper le soir..." Alors elle s’est juste enfuie ? Je ne sais pas si je la trouve stupide ou courageuse, mon verdict n’est pas encore prêt à tomber. "Donc tout comme toi, il aime pas qui je suis devenu." Tu vois, ça me fait rire, ça. Si bien que j’en hausse les épaules, un tantinet moqueuse, j’envisage même de porter la porcelaine à ma bouche avant de reculer, j’ignore avec qui elle peut bien partager la vaisselle, alors j’avoue que ça ne me donne pas envie de goûter. Wendy Witter indubitablement maniérée.
C’est ma propre salive que j’avale, une déglutition sonore, forcée, comme pour marquer le départ ou la suite, en tous les cas, le fait que c’est à moi de m’exprimer. « Techniquement, je n'ai jamais dit que ça me déplaisait. » Ce qu'elle est devenue, même si mon expression faciale doit, pour moi, parler. « Donc, pour un caprice tu as renoncé à tous tes privilèges ? » Je ne le trouve pas si mal, mon résumé. Cette vie dans laquelle elle navigue, pour moi, ça ressemble à un piège. « Tu vas le regretter. » J’espère qu’elle en a conscience, mais peut-être que c’est ce dont elle a besoin, galérer, afin de comprendre que la vie de luxure, ce n’est pas à toutes les personnes qu’elle est donnée. « Et au lieu de t’enfuir, tu n’as pas songé à négocier ? » Ils restent ses parents, bien qu’ils soient un brin aliénés.
egotrip
(Wendy Witter)