TW | Out of time | Xiver

 
Dans sa question se dissimule un double sens dont elle ne prend qu’à l’instant conscience. Bien sûr elle a envie de connaître son avis, d’obtenir son aval, mais il y a un autre appétit bien plus viscéral. Le fait qu’elle ne parlait pas forcément de l’appartement, ni de cette chambre qu’ils partagent sur le moment. Ce qu’elle veut savoir, c’est si elle lui plaît. Si le manque énoncé a décuplé ses envies, aiguisé ses besoins. Si les comédies romantiques citées ont réussi à lui démontrer ce qu’un jour, au téléphone, elle a voulu lui souffler. Mais Haiwee a du mal avec la communication, les non-dits et les choses qu’elle n'ose pas lui demander. Peureuse invétérée. Sans se douter que ses doigts, elle pourrait finir par se les mordre, à l’excès.

Suspendue à ses lèvres, elle l’observe porter le verre à leur lisière, sans boire et lancer un commentaire, « Le matelas. Faut penser à le changer. » le souffle court, après le conseil qu’il vient de lui donner, ses pensées enclines à la vilénie sont obscurément échaudées. Elle jure que son esprit est aliéné par ce désir émancipé. Mais elle comprend qu’il musèle ses véritables pensées face à ces nouveautés. Volontaire, peut-être, de ne pas la blesser. « En fait il n’y a que deux choses qui... » Il amorce en se retournant, posant son verre, son visage habillé de cet air arrogant, elle, à l’inverse, boit une longue gorgé, elle renouvelle sa témérité. « … justifient ma venue. » Elle entend son palpitant tambouriné, sans entendre ce qu’il veut signifier, les deux choses, elle s’essaie de les déterminer avec rapidité. En vain, faible de sa docile naïveté. « La seconde se trouve là-bas. » suivant de ses prunelles le chemin de geste qu’il réalise à l’aide de sa tête, pour les poser, à la finalité, sur ce qu’elle lui a subtilisé. Gênée, l’interrogation sur la première raison s’en vient à filer, elle se promet d’y revenir après.

Alors, elle est honteuse, l’espace de quelques secondes, elle se permet même d’hocher le visage avant de boire une autre gorgée. Elle s’approche jusqu’au niveau de ses hanches, toujours à genoux, naturellement, elle reproduit ses mouvements. Laissant choir son récipient à moitié vide, à son tour, sur la table de chevet, son corps se plaquant contre le sien dans ce déplacement. Et si elle ressentait déjà la chaleur de l’alcool dans son être, ça se décuple lorsqu’elle réalise ce qu’elle vient d’effectuer. De fait, elle reprend le regard fuyant, ses phalanges abandonnées sur son ventre. « On m’a appris que ça se fait. » Un fin sourire naissant sur la douceur de ses traits. « Dérober quelque chose d’un endroit qui nous plaît. » Que l’on aime, de façon passionnée. D’un endroit qui nous a marqué, à jamais. « Et j’ai un très bon professeur. » A ses yeux, à son cœur, le meilleur.

 
L’obligation de l’absence, ce déménagement forcé, cette affection qu’elle s’entête à lui porter, c’est ça qui a guidé son acte. Celui de lui dérober l’un de ses bibelots les plus discrets. Un souvenir matériel afin de se remémorer que leur cohabitation était réelle. Elle se raccroche à ce qu’elle peut, faute de mieux. « Il est vraiment mauvais s’il ne t’enseigne que çà. » ce sourire, elle ne le connaît que trop bien, il reflète avec intensité de plus licencieux desseins. Et si elle a envie de lui souffler que ce n’est pas la seule chose qu’il lui a inculqué, elle ne le peut, parce qu’il vient effleurer l’ovale de son visage, il amorce un sacré naufrage. Mêlant son souffle avide à sa respiration, et fait perdre à Haiwee la raison. Cette sensation quand il pose ses lèvres sur les siennes, toujours si intensément la même. Ou presque. Parce qu’elle jure que le manque de sa présence a aiguisé le reste. Le désir qui s’insinue instantanément dans toutes les particules de son être. Pour les faveurs de cet homme, il est si facile, pour elle, de perdre la tête…

L’espace d’un moment, elle ne calcule plus rien, si ce n’est son corps aimanté par le sien. Cette langue qu’elle s’aventure à infiltrer entre ses lèvres afin de caresser la sienne en un détonant ballet. Elle se rapproche, à son cou, ses ongles s’accrochent. Eprouvant les paumes de son amant glissantes sur son être s’échaudant, sa taille l’encerclant. Assaillie par des volontés inverses, envieuse de son contact, de ses effleurements et de leurs incroyables impacts, mais aussi perturbée par cette intimité dont ils ne jouissent qu’à moitié. Victime de cet appartement partagé. « Attends, attends, » bridant ses propes élans, pourtant ce n’est pas comme s’ils n’étaient pas coutumiers de ce genre d’instant, bien que la Haiwee pourrait déplorer le fait d’être en capacités de pouvoir les compter. Elle se surprend d’ailleurs à songer que sa faim de lui ne saurait être rassasiée, même s’ils en sont encore au point de s’apprivoiser. De s’apprendre, maitre et élève dévouée. « J’suis pas sûre que… » La bataille fait rage dans ses pensées, en guerre contre elle-même, sa raison et son cœur. Ses inclinations et sa pudeur. Elle paraphe ses mots en l’embrassant à nouveau, soufflant le froid, le chaud, et d’une faible voix respirant contre sa peau, « C’est pas vraiment insonorisé. » Ils peuvent tout entendre, tout écouter, une violation de vie privée et elle en est, par avance, troublée.  

 
Elle se bat contre ses envies et sa raison, la force de ses volontés, de ses émotions. Ce besoin qu’elle a de lui, si puissant. Multiplié par le fait qu’il ne l’a pas touché depuis longtemps. Mais malgré sa faim de lui, elle souffre de sa pudicité, mal à l’aise avec les moments flirtant avec l’intimité. « Et après ? » Après, elle les entend d’avance les commentaires de ses colocataires. Mais à la faveur du sourire qu’il lui sert, elle avoue qu’elle se fourvoierait volontiers afin de lui plaire. De ressentir ses paumes contre sa peau, de se laisser aller aux loisirs de son bourreau. « J’croyais que les amérindiens faisaient du troc, » le visage de l’asiatique oscillant en direction de la relique qu’elle lui a dérobé, elle en esquisse un sourire en réponse du sien, moins gênée que tout à l’heure parce qu’envoûtée par cet effet qu’il lui fait. « Je te l’échange » toujours proche d’elle, il s’aventure à proposer. Et ses empreintes s’imposent sur l’amérindienne afin de la faire basculer, expirant un faible gémissement guidé par cette tendre domination.

Encore arrimée à son cou, elle éprouve avec langueur ses doigts courant sur elle, augmentant son rythme cardiaque, sa respiration… Elle déplace sa main droite afin d’épouser l’ovale de son visage en une caresse. Son faciès qu’elle vénère au moins autant que tout le reste, amoureuse dont il est l’unique faiblesse. « Contre quoi ? » Maligne sur un sujet qu’elle ne maitrise pas. Dans leurs regards, pourtant, se traduit leur envie commune, brûlante d’un désir qu’elle ne saurait cacher, quand de ses ongles elle l’invite à nouveau à braver les limites de la proximité, elle retrouve la saveur de ses lèvres, s’augmente à nouveau la fièvre. Perdue face à l’ardeur de ses personnels desseins, elle égare les brides de sa lucidité, ne répond plus de rien. Accrochant le tissu de son vêtement, elle s’envisage à céder à la luxure. Aux promesses de langoureuses tortures.
Cependant elle se stoppe encore, le souffle court, victime de sa dualité, des contraires qu’il peut lui inspirer, c’est si difficile de lui résister, c’est le cas depuis le premier jour qu’elle le connait. « La raison numéro une… » Elle fronce un tantinet les sourcils, dévoilant le fait qu’elle est subitement encline à la contrariété, ses prunelles aux siennes accrochées. Elle se décide à le questionner. « T’es venu que pour ça ? »

 
Elle ne pensait pas que son questionnement allait avoir cet effet-là. Même si au départ, il ne réalise pas. « Pour çà… Pour la statuette ? » qu’il interroge à son tour, comme une phrase qui lui semble à lui-même bête. Jusqu’à ce que la véritable signification se fraie un chemin dans sa tête. « Attends, tu veux parler de… » Et son regard descend en contre-bas, lui arrachant un soupir avec ça. Elle a beau être encore habillée, sous ses yeux et l’expression qu’il affiche, elle se sent soudainement dénudée. Elle baisse sa vision face à cette réaction, à la limite d’être honteuse d’avoir demandé, des mots qui lui paraissaient pourtant justifiés. En sa présence, parfois, elle ne sait comment s’exprimer, marchant sur des œufs faute du partage de cette affection qui n’est pas équilibrer. Pour lui, c’est son âme qu’elle vendrait, mais l’inverse reste à prouver… « Non, je ne pense pas qu’à ça. » Il signe comme fin de la discussion, tout en arrêtant les marques de désirs qu’il pouvait lui accorder.

Alors elle soupire dans l’espoir de se trouver une contenance au milieu du rejet qu’elle subit, elle le jure, elle s’essaie à faire le vide dans son esprit. Rejetant les contres pour ne garder que les oui. Les paupières fermées le temps de rapidement réfléchir, et s’armer d’un sourire au moment de les rouvrir. « Sheng, arrêtes… » Elle s’aventure à lui murmurer tandis que de sa paume, elle va caresser ses traits, son pouce suivant le chemin de cette barbe qu’il arbore et qu’elle adore. Continuant jusqu’à aller sur sa lèvre inférieure s’arrimer. Elle l’effleure à la force de toute sa douceur. De tous ses désirs réprimes. Elle tend à effacer cet air contrarié. « Je n’ai pas dit que tu ne pensais qu’à ça. » Elle s’explique quand elle ose récupérer l’une de ses mains, néglige sa bouche de ses doigts, pour porter la dextre emprisonnée à ses propres lèvres. Ressentant cette bouffée de fièvre. Elle sait, pour avoir vécu avec lui plusieurs mois, qu’il n’est pas en boucle permanente sur ce sujet-là. Au contraire, elle réalise même que c’est elle qui s’est proposée à lui, à chaque fois. « Je t’ai demandé, » elle souffle contre ses empreintes qu’elle se plaît à toucher, qu’elle s’autorise à embrasser, fascinée par le délicieux effet qu’elles savent lui procurer, « si ton manque n’était que … charnel. » Si c’était une véritable carence d’elle. Puis elle ose infiltrer, sans réelle prise de conscience du lascif de son geste, résultat d’une simple envie, de son goût prononcé pour lui, sa phalange entre ses pulpeuses. Ignorante luxurieuse autant qu’érotiquement amoureuse.

 
Plus elle s’attarde, plus son souffle se fait court, plus elle s'essaie à mémoriser de ses empreintes les contours… Hypocrite parce qu’elle éprouve cette unique sensation, dans le creux de son ventre, dans le creux de ses reins. Ce désir qu’elle apprivoise et qu’elle se perd à vouloir brider. Par pudicité mais aussi par envie de compter. Que ce soit elle, qui lui ait manqué. Allant de son corps à son caractère, son être et ses manières. Haiwee toute entière. Les paupières de l’étudiant allant jusqu’à se fermer lorsqu’elle ose aller plus loin dans cette quête de lui, à la vérité, son index totalement embrassé ; « Pas forcément, mais maintenant… » et s’il l’arrête de son pouce, elle ne peut bloquer la naissance d’un sourire, se satisfaisant de son pas forcément, car de la part de Sheng, une réponse telle que celle-là, pour décrire le manque, c’est géant.

Les prunelles à nouveau sur elle, cette lèvre inférieure qu’encore il dessine, la puissance de ses ressentis, « Parce que toi non ? » il interroge, inclinant le visage, si bien qu’elle est au bord du naufrage, intouchée depuis leur dernier voyage, « Alors que tu... m'y invites. » A braver les interdits, à faire grimper leurs envies. Bien qu’elle hésite, qu’elle ne sache pas réellement ce qu’elle fait, qu’elle est dans cette lutte perpétuelle, l’affection et ses desseins charnels, incapable d’y échapper. Alors elle s’approche à nouveau, dépose la main qu’elle effleurait sur son flanc, elle ravive seule le brasier, si proche de lui quand maligne, elle lui souligne, « Je t’apprends. » au sens figuré, elle apprend ce qu’il peut apprécier, les réactions qu’elle pourrait lui provoquer. « Et tu sais très bien que moi aussi… » j’en ai envie. « Tu restes toute la nuit ? » sa paume revenue s’accrocher à son col, avant de l’attirer à elle pour l’embrasser, ou bien peut-être que c’est l’étudiant, qui inconsciemment, l’attire à lui.