TW | We can be Heroes | Shendy

Tous les efforts du monde ne suffisent pas. Rester en comité Adams n’est pas quelque chose que j’apprécie s’il n’y a pas de véritable challenge. Je m’étais prise au jeu des Olympiades, parce que mon esprit de compétition – et probablement le sien – est bien trop acéré. Les griffes, je ne sais pas faire autre chose que de les montrer. Et je ne saurai dire pourquoi, car ça ne me ressemble pas, n’étant pas des plus fanatiques des soirées que l’on passe à s’enivrer, mais j’attrape l’une des bouteilles du buffet proposé par notre maison afin de nous accompagner pour achever cette soirée. J’ignore si je vais la boire, mais je retire un plaisir malsain à continuer mon chemin, armée de mon butin.

Les mètres sableux sont avalés, avant que je ne le prenne en pitié. Lui, toujours avec ma robe entre ses doigts, et moi affublée de ses vêtements qui me filent toujours la nausée, même si je m’en suis pratiquement accoutumée. Alors je m’arrête, je pose ma bière, la bouteille, les enfonce dans le sable pour ne pas les voir se déverser. Et commence me déshabiller tout en lui balançant, faussement amusée, « Je croyais qu’on allait passer une bonne soirée. » Concrètement, ce n’est pas l’idée que je m’en fais.
 

En un mouvement presque sec, il récupère le short que je viens de lui lancer, prenant la peine de préciser au sujet de ces camarades que l’on vient de quitter. « des petits joueurs » Et pas qu’un peu, ils ne sont que des pions dans la partie d’échecs que nous avons – il y a de ça quelques mois déjà – débuté. « Même ton copain » Une œillade noire lui est décochée. Parce que l’identité du copain, je ne peux l’ignorer. Bien que ledit ami, lui, l’ait fait, m’ignorer. J’en crache un soupir, réalisant avec aigreur que je ne sais pas comment rebondir. « Pas sûre qu’on soit encore copains. » j’ose baragouiner entre mes mâchoires serrées, il faut tout simplement croire qu’il n’a pas digéré l’avortement, dans nos mémoires, encore récent.

Et suivant le chemin de son regard, j’accueille son rictus pervers et ses mots en un sourire carnassier enclin à la malignité. « J’aurais pris plaisir à te le retirer…de force. » Je le détaille de haut en bas, j’en amorce une grimace, surjoue le fait qu’il ne me plaît pas, d’une inutilité suprême lorsqu’on se remémore cette fameuse nuit dans le jacuzzi. « Plaisir. » que je répète, vicieuse à souhait, même si vers une autre vérité que mes paroles vont me mener, « Je ne suis pas d’humeur, » je n’aurais jamais cru pouvoir, un jour, dire ça, « pour ces jeux-là. » Le libertinage immoral mis sur pause, le malsain de côté, « mais j’aurais dû le monnayer. » le bermuda, c’est d’ailleurs forte de cette idée que le haut, je ne le retire pas.

 

« T’en perds Witter, » de l’argent ou bien de la candeur ? Parce que depuis quelques jours, voir quelques mois, il est vrai que j’ai perdu cette essence qui fait que je suis moi. Depuis cette putain de photo, n’est-ce pas ? Seulement, puisque je ne l’avoue pas à haute voix, j’estime que de l’extérieur ça ne se voit pas. Et quand je le constate lui, en train de reculer vers l’étendue d’eau bleu foncé, parfait reflet du ciel étoilé, je comprends d’avance son idée, parce que j’aurais pu l’avoir aussi, mon esprit n’ayant que le sien comme égal en termes de perfidie. « La haute couture, ça se nettoie comment ? » J’en contracte instinctivement mes mâchoires, trahissant ma contrariété, bien que je m’évertue à feindre le désintérêt. « C’est une question qu’il faut poser à l’employé du pressing, ça. » Autrement dit, ma lessive, je ne la fais pas.

Mais ce n’est pas suffisant pour le stopper, parce qu’il continue à se mouvoir en direction de l’océan, armé de son air de conquérant. « Tu la retires ? » Les phalanges sur les pans de la chemise, je me dois d’avouer que j’hésite. Car même si je m’exécute, même si je lui donne ce qu’il attend, il va la jeter à l’eau, tout me le laisse penser dans son comportement. « Trois mille dollars, Sheng. » Je lui lance, l’avisant par cette phrase que c’est ce qu’il me devra, s’il cède à ses désirs et la jette. C’est le prix a payer lorsqu’on souhaite s’habiller en WW ou en maison Balmain. Dans le fond, je m’en moque, mais dans la forme, j’ai horreur qu’il ait le dessus sur moi. Parce que par automatisme, forcément, je m’approche du rivage, les pas teintés de rage. Et me refuse catégoriquement à lui rendre son vêtement. « J’en démordrais pas. » Je gagne et tu perds, il ne peut y avoir que ce résultat.

 

Mais l’autorité, malgré qu’elle soit naturelle chez moi, ne semble pas fonctionner, car l’étudiant paraît déterminé. Déterminé à me faire crisser. Si bien que j’avance vers lui, l’eau léchant mes chevilles et l’énervement en train de grimper. A la base, est-ce que je ne l’avais pas dit que c’était une mauvaise idée, cette soirée ? Ici plus que tout à l’heure, je n’explique pas mon acceptation de me balader à ses côtés. « Courage, trois mille dollars à la clef. » Sa chemise, je vais la lui faire bouffer. Et continuant d’avancer – à petit pas certes – dans sa direction, tandis que lui aussi s’approche, j’ose encore une fois hausser le ton, « Si tu oses… » mais l’avertissement est aussi vain qu’avorté, puisqu’il lâche la robe, d’un geste nonchalant qui m’arrache un rictus mauvais. « Pas assez rapide. » Jamais homme n’a été aussi agaçant que lui avant ça, je peux le jurer.

Et l’étoffe dans l’eau, je ne prends pas la peine de la ramasser, exècre l’idée de, face à lui, m’incliner, la symbolique me procure d’avance l’envie de gerber. Les prunelles plantées dans les siennes, je lui crache de toute ma candeur, finalement ; « J’accepte les chèques ou les virements. » Pour le remboursement. Alors mes doigts vont achever de déboutonner sa chemise que je suis encore en train de porter. Je la retire et lui tends, contrairement à lui, moi, je le fais correctement, d’ailleurs, je le fais même en souriant. « Ce n’est pas pour t’obéir mais… C’est ton parfum, ça me donne la nausée. »

 

Devant sa mine soudainement déconfite, je me dis que mes mots ont su le heurter. Cela reste la meilleure chose que je sais faire, cracher mon venin, frapper. Et je soutiens son regard, fière de mon effet. Je reste stoïque, le bras tendu, sans sourciller. Je ne laisse rien paraître, marquise manipulatrice comme je me sais capable d’être.
Alors quand son corps se plie en deux, le coin de mes lèvres osent s’arquer, trahissant le fait que je me complais dans l’idée d’avoir gagné. « T'es au-dessus de mes moyens. » Mes paupières s’abaissent accompagnées d’un rictus mauvais, j’exècre le fait d’être comparée à une prostituée, je suis d’ailleurs convaincue qu’il le sait. Seulement je lui refuse le droit de m’atteindre, les faiblesses, c’est tout ce que je peux craindre.

J’en reste silencieuse, bercée par le bruissement des vagues couplé à ma respiration agacée, et le laisse venir à moi, la robe déchue entre les doigts. Et s’il récupère la chemise à peu près rapidement, j’avoue que je ne fais pas de même, déclinant mon regard sur les traits de son visage, peu coutumière de le regarder dans ce paysage. « Pourtant tu n’es plus enceinte, » Si j’avais froncé les sourcils à l’idée d’apprécier à demi cet aparté, le fait est que je troque derechef cette impression contre le profond dégoût face au mot qu’il vient d’utiliser pour me définir. Sujet sensible, plus que ce que je m’accorde à le dire. Je crache un incontrôlé, entre mes dents serrées, « dis pas ça. » le rappel de l’erreur est trop cuisant, trop récent. Et ce que j’ai abandonné avec aurait probablement pu être plus qu’important. « Et la dernière fois que tu l’as eu sur toi, tu le portais plutôt bien, » et si je m’en souviens… C’est que mon avis ne diffère pas du sien. Du coup, mauvaise, j’attrape le tissu imbibé, mais je ne prends pas la peine de le passer, peu impatiente de me couvrir de cette chose détrempée. Préférant l’escamper sur le sable, au loin, sans même regarder où elle pourrait retomber. De toutes les manières, j’estime qu’il doit me la rembourser. « Si je ne te connaissais pas, » seulement je le fais, le connaître, et bien mieux que ce que je me permets de l’avouer, je me joue de la psychologie inversée, « je pourrais croire que t’as de nouveau envie de me baiser. »