TW // avortement.
Black roses
Il est dix-huit heures passées, lorsque le médecin vient me voir une dernière fois, m’autorisant à rentrer chez moi, me confirmant que tout va bien et qu’il ne reste plus rien. C’est étrange, c’est comme si Roman avait senti la dureté des mots avant qu’ils ne soient dit, car de ma chambre juste avant qu’il ne fasse son entrée, lui, il est sorti. J’aurai voulu que ce soit plus rapide, je crois, j’en ai presque la sensation que ça fait des jours que je suis là. Seulement, même quand on paye, dans la médecine, il y a des aléas. Des femmes qui accouchent, qui ont besoin d’un médecin, qui ne peuvent plus patienter, quand moi, après tout, je n’avais qu’à attendre afin que mon problème soit réglé.
Je croyais que je ne pleurerais pas, que j’étais la femme forte que le monde voit. Je pensais que mon cœur était trop dur, pas assez bienveillant. Mais ça a été plus fort que moi. En salle de réveil, à l’abris des regards, j’ai accusé le contre-coup de cette histoire. De mon ventre évidé quand ça faisait un mois qu’il y était. Que j’étais devenue obsédée à cette idée. J’ai regretté peut-être une fraction de seconde lorsque je suis remontée en chambre et que j’ai recroisé ses iris attristées. Silencieuse, j’ai hoché le visage, et j’ai finalement dormi toute l’après-midi, ou en tous les cas, une bonne partie, faute de l’anesthésie.
Récupérant les ordonnances et le compte rendu – que j’ai eu derechef envie de brûler – j’envoie un message à mon chauffeur, histoire de m’assurer qu’il nous attend devant la sortie du bâtiment. Le trajet jusqu’au manoir familial est muet, accompagné par une main dans la sienne et le regard tourner sur un paysage connu par cœur, à dire vrai. Je me déteste de me sentir autant faible, autant soulagée, du bordel qui se trouve dans mes pensées, et ne m’anime que lorsque je perçois le moteur s’arrêter. « Merdique, la journée. » comme s’il était vraiment nécessaire de le préciser.
Dune
(Wendy Witter)