TW • It's my soul that needs surgery • Soline

Je ne peux pas nier que je suis heureuse qu’elle le passe, son tour. Pourquoi ? Tout simplement parce que je n’ai aucune envie de me battre pour garder le nom de Raphaël. Gigi Desrosiers, je trouve que c’est quand même mille fois plus beau que Gigi De Lourdes ou, pire encore, que Gina-Gisela de Lourdes. Si je le pouvais - et voulais que mon père sache où je me trouve - je porterais plainte contre lui pour m’avoir donné un prénom aussi laid. Enfin, la conversation n’est pas là et je ne veux pas penser à lui ce soir. Aujourd’hui, je profite d’une boisson que l’on ne m’a pas - encore ? - fait payer et m’informe sur la demoiselle dont j’espère rencontrer le chemin de nombreuses fois encore. Je ne sais pas pourquoi, je ne sais pas comment mais elle m’intrigue et a l’air d’être de ce genre de filles dont on a envie de s’entourer. Un peu fun, toujours partant pour faire la fête, sortir, rire et vivre un peu. Peut-être tout sur fond de manipulation mais je ne cherche pas non plus à me trouver la meilleure amie du siècle, qu’on se le dise. Surtout qu’il s’agit d’une femme proche de mon cher mari. Ce n’est pas avec elle que je vais pouvoir le critiquer pour le pouvoir de le faire alors… Quoi que. Elle ne sait pas s’il est heureux ? Et questionne le fait qu’il ne l’était probablement pas avant. Là dessus, nous sommes d’accord. Mais est-ce que ça ne sert pas aussi à ça, un petit ami ? À se remonter l’estime, à voir le verre à moitié plein, à sortir au soleil et ne plus cramer comme un vampire ? À moins que ça en soit un et là, c’est une autre histoire. Je ne l’ai jamais connu triste, en tout cas. Les addictions masquent des peines, il n’y a pas à dire. Elles sont là pour remonter, justement. Mais s’il a tout arrêté et s’en sort bien, c’est que celui qui partage ses draps lui provoque le bien dont il a besoin, non ? Je ne sais pas trop. Je suis toujours partie du principe que l’adage “chasse le naturel et il revient au galop” était vrai alors j’attends presque le moment où il va replonger, où l’adrénaline de ce couple qu’il entretient ne sera plus assez. Raphaël n’oserait probablement avouer qu’il est malheureux. Que je réponds rapidement alors qu’elle avance que je ne pose pas la question à la bonne personne. Y a-t-il vraiment beaucoup de monde qui avoue quand quelque chose ne va pas ? Remplacer une addiction par une autre… C’est un comportement des plus destructeur, on ne va pas se mentir, mais c’est ce que l’on fait tous plus ou moins. J’ai remplacé l’adrénaline des concours de mini miss par une vie de la nuit ici. Que j’ai fini par remplacer par l’instrumentalisation de mon corps… Que j’ai fini par abandonner afin de revenir ici et me concentrer sur mon projet professionnel. Mais vous voyez, je ne souhaite pas devenir manager chez Pull and Bear ou Dior mais bien la nouvelle propriétaire du Nirvana. Vous la voyez la boucle ? Elle est là. S’il te le semble alors… Peut-être que c’est le plus important. De toute façon, tu veilles sur lui ? T’as pas d’aile dans le dos Joséphine mais si t’es amie avec Raphaël, je suppose que ça a une importance, non ? Et j’y tiens, à cet abruti de français. Je ne peux pas le nier. Il m’a sauvé et je ne voudrais pas qu’il finisse brisé. Pour le meilleur comme pour le pire. Et j’ai surtout besoin de savoir si l’envie de divorcer lui prend… Est-ce qu’elle acceptera cette main que je lui tends ? Va-t-on faire pair, toutes les deux ? Je suis sûre qu’on ferait un duo à tomber !

Ce serait un échec, avouer une faiblesse que de dire haut et fort que l’on est malheureux. Rares sont ceux qui prennent le risque de le faire et les commentaires moralisateurs qui suivent ne sont jamais agréables à entendre. Aucune personne triste n’a envie de s’entendre dire qu’il faut relativiser, que la vie est belle et qu’on a des amis, de la famille et tout ce qui va avec. L’intention est souvent belle mais rarement bonne. Alors, forcément, je ne pense pas que mon mari n’ait avoué un quelconque malheur à qui que ce soit à un moment ou à un autre. S’il l’a fait, j’en suis la plus heureuse mais je crois que tout ce qu’il se passe dans sa vie depuis plusieurs mois montrent cette envie de l’être, heureux, mais l’incapacité de l’être. Après tout, plus on cherche et moi on trouve, non ? Mais ce n’est pas ma bataille. Je serai là pour le ramasser quand il le faudra mais je ne peux pas me planter, m’immiscer et m’imposer non plus. J’ai bien vu la manière dont il m’a remballé avec Naboo hier. Mais c’était légitime alors je ne peux pas lui en vouloir. Alors, il va falloir que je la missionne, qu’elle m’aide, me soutienne et sois les yeux et oreilles que je ne peux pas vraiment être. Après tout, mon retour dans sa vie pourrait annoncer de mauvaises choses pour le français et son petit-ami alors que Joséphine a toujours été là. Plus ? J’arque un sourcil et joue avec le contenu de mon verre en ne la quittant pas du regard. Sommes-nous en présence d’un homme jaloux ? Ou tu as été méchante avec lui ? Parce qu’elle n’a vraiment pas l’air commode la demoiselle. Et si elle est aussi froide et presque sèche au travail - alors que dans un corps de métier comme le sien, il faut être tout sauf ce qu’elle me donne depuis tout à l’heure - je me doute que dans le privé, ce n’est pas un bisounours surexcité et joyeux non plus. Ma demande soufflée, je la regarde changer totalement de posture. Cette manière qu’elle a de se placer me fait penser qu’il y a une ouverture dans son esprit, une place où je pourrais me glisser et m’arranger pour que Raphaël ne manque de rien. Je sais bien qu’il n’a besoin de rien mais moi, j’ai bien besoin de garder ma place dans sa vie et mon titre surtout. Que le brun qui partage sa vie ne rêve pas trop, Mme Desrosiers, c’est moi. Tu as tout compris. Et je pense bien que ce sont ces indices non dissimulés sur sa relation avec Zack qui me font penser qu’elle ne va pas refuser et qu’elle sera une alliée de qualité. Je suis venue pour m’y ré-installer définitivement. Parce que Boston c’est un peu ma maison aux États-Unis. J’y suis arrivée de la manière la plus illégale qui soit, certes, mais ma famille habite ici. Et même si j’ai aimé vivre à Los Angeles, c’est ici que ma vie se trouve. J’ai racheté une partie du Nirvana alors je ne compte pas quitter la ville. Petite information placée comme ça. J’ai un job maintenant, il faut que je gère ce club et petit à petit, je rachèterais le titre de propriété total de cette entreprise qui a toujours été comme une maison pour moi. Alors quand j’en ai appris la vente, je ne pouvais que sauter dessus. Enfin, sur ce que je pouvais me payer - une vingtaine de pourcent - mais les discussions avec la propriétaire ont été fructueuses et… Je suis heureuse. Et puis, je pense qu’on pourrait bien s’entendre toutes les deux. Je souris et sors un feutre de mon sac à main. J’écris mon numéro derrière le ticket de carte que je sors en même temps et lui tends. T’es pas obligée de me contacter que pour parler de Raph. Je ne la connais pas mais peut-être que nos chemins sont fait pour se recroiser, se lier et ne jamais se diviser. Puis, j’ai besoin de copines, peut-être qu’elle aussi ?