TW • A Nightmare on Elm Street •• Corter

« J’affectionne davantage Dutch, » Un signal pour m’encourager à rentrer parce que quand Dutch reprendra vie une fois sortis tous les deux d’ici, je sais très bien qu’est-ce que de promesses me réserve cette fin de soirée. « Simon est … trop guindé. » Guindé ? Et pourtant c’est à lui que je dois de pouvoir enfin me montrer, chose que l’on évitait de part le passé pour une raison qu’elle avait tout de suite comprise sans pour autant en connaitre les origines.
Alors lorsque mon pouce effleure les motifs de sa peau masquée, en modifie légèrement les détails au point d’en imprimer mes empreintes depuis bien longtemps marquées en elle, il y a comme un léger problème. Je ne donne pas cher de mon siège une fois qu’elle aura pris place dans l’habitacle après avoir été trempée par cette fraiche ondée, l’eau ruisselant sur ses courbes en creusant dans son sillon des entailles sur son derme bleuté, comme un fleuve allant se perdre dans le confluant de ses cuisses fuselées.  

 Elle aura beau me toiser, faire preuve de cran pour ne pas rester ici cette nuit avant de laisser son regard juger de l’endroit, comme résignée, il n’est évidemment pas question de s’attarder entre ces murs plus que nécessaire. « T’es en train de me dire que pour ta voiture on va dormir ici ? » Bien loin du confort qu’elle a pour habitude de goûter, je doute qu’elle parvienne à trouver le sommeil et ce n’est pas parce que cet endroit est soi-disant hanté. Le lit, vétuste, couvert par des draps poussiéreux qui n’ont pas pris l’air depuis des mois, des rideaux décorés par des toiles d’un naturel rebutant…. « Cooper… »  Mauvais nom, mauvaise formulation mais elle a raison et c’est à regret que j’abdique en sa faveur, mais pas sans sourire de bon cœur. « J’ai toujours un sac dans le coffre à la rigueur, » de ce qu’on utilise dans ce milieu la nuit pour se débarrasser des soucis. Une fois dedans elle ne pourra laisser de traces sur le cuir…  « Il nous suffira de ne croiser personne en route… » juste pour rire parce même pour Halloween je doute qu’une femme dans un sac plastique soit perçu d’un très bon œil.

Comme craintive elle a reculé sans que ses pieds ne viennent à bouger, juste de quelques centimètres pour mettre une distance face à l’idée que j’ai suggéré. « Un sac à cadavre ? » C’est dans le thème de la soirée bien que la proposition ne semble pas la faire rire autant que moi. Pourtant il n’y avait pas une once de méchanceté dans mes propos et je n’ai jamais voulu la blesser, en serait incapable même si je le pouvais. Alors mes doigts sont allés redessiner l’ovale de ses traits, épousant le nuancier bleuté jusqu’à en altérer l’éphémère perfection d’une simple caresse. « Je ne te forcerais jamais » tu le sais bien, « pour quoique ce soit » même si un soir d’hivers, lors de cette tempête où tu t’étais réfugiée dans l’ivresse, j’ai bien failli et je m’en suis voulu quelques jours pour ça, jusqu’à ce que tu me le fasses oublier, que tu me pardonnes pour cette témérité mal placée.  

Joey n’est pas de ces visages qui disparaitront avant l’heure sous du plastique mais de ceux qui s’effilent sous un lanterneau rouge, au sourire factice qui vous déshabille pour vous mettre à l’aise avant de vous éconduire à toujours plus consommer, dans la semi-pénombre d’un bar et dans ce décor tamisé, dans les volutes des cigares d’une clientèle friquée. Elle ne connaitra jamais plus les bas-quartiers, la solitude et la nécessité, pas tant que je me tiendrais debout à ses côtés.
Alors s’il faut choisir entre du matériel et son amour propre, je n’ai pas vraiment à y réfléchir à deux fois avant de me décider. « On rentre. » C’est acté et me risque même au gout de ses lèvres méthylènes avant de l’inciter vers la sortie. En contrebas de ces escaliers ne résonnent plus autant les rires et clameurs déchainées. Et ce qui n’était qu’une suspicion se révèle être vrai une fois la dernière marche passée, nous retrouvant dans le grand hall là où là même tantôt nous nous étions quittés. Mais cette fois nous repartons à deux et non divisés jusqu’à me figer devant la porte d’entrée, devant le spectacle orageux qui gronde et qui progressivement inonde les parterres défraichis. « Si ce n’est pas pour mon siège, » elle acceptera pour son propre bien à elle cette veste dont je me déleste afin de nous en faire un abri.