bad habits lead to late nights (Harlow & Raph)

Mes yeux roulent quand ses mains cherchent ces fameuses cornes auxquelles on fait mention, sans rien trouver. « Dis pas des choses comme ça, tu vas réduire mon monde imaginaire en cendres. » Et il est plutôt bien, ce petit monde dans lequel je vis - ou plutôt vivait, jusqu'à il y a quelques mois. Trop terre à terre à présent, j’ai fait une croix sur mes fantaisie et m’estime chanceux d’avoir Zack, sans qui mes nuits seraient bien fades. « Une femme, quoi. » Dis-je en riant. Oui, ok, c’est un brin misogyne comme réflexion, surtout venant de quelqu’un qui aime mettre son nez dans les affaires des autres, mais admettons que la gente féminine est reine dans cette discipline. « Sa propre came ? » Je suis curieux de savoir ce qui anime ma nouvelle employée. Et puis ses frères, je dois m’en méfier de gros caïds ? Parce que les problèmes, je les évite surtout lorsque ça concerne le LUX. Maintenant qu’il en parle, je me rappelle pourquoi le nom Rodrič m’est familier, ayant rapidement parlé à l’un d’eux cet été mais rien ne me dit qu’ils soient liés pour autant. C’est peut-être un nom courant dans le pays d’où ils viennent. « Je pense aussi et c’est pareil pour toi. » Je tire une nouvelle taffe et lui repasse le joint en expirant doucement la fumée. « T’sais que je pensais à me retirer et vendre ? C’est tellement chiant d’être là sans toucher à quoi que ce soit. » J'aurais peut-être pu enfin me concentrer sur ce restaurant, que je rêve d’ouvrir depuis des années, ou utiliser mon diplôme qui prend la poussière. « Mais j’vais rester dans les parages, finalement. L’équipe change pas mal en ce moment, ça va donner un nouveau souffle au LUX. » Du moins, j’espère. Il sera encore temps de changer d’avis dans six mois si c’est toujours aussi compliqué de lutter contre mes démons.

@Raphaël Desrosiers LUX, cambridge 12.09.2021

bad habits lead to late nights
« j’peux toujours te donner de quoi le rebooster t’inquiète » Ton imaginaire peut très bien réagir avec la pilule magique, celle qui provoque des hallucinations, comme celle qui te lance dans des délires psychédéliques. J’étais un pro pour ça, tu le savais. Mais malheureusement, tu semblais toujours aussi fermé. « ouais, vraiment les pires » soupirais-je. Je m’en fichais de penser ce genre de choses. J’avais toujours été indépendant et la seule femme qui avait le droit de me faire chier, c’était ma petite sœur. « ouais, j’ai pas fouillé plus que ça, m’demande pas plus d’infos » Pas envie non plus de la foutre dans la merde. J’étais pas du genre à cafter alors j’allais m’arrêter là. J’entendais le compliment et souriais, sans forcément y répondre. J’attrapais simplement le joint pour tirer dessus, me délectant de l’effet qu’il m’offrait. « ça serait une grosse connerie. les gens kiffent ici et ça serait pas pareil si quelqu’un le rachète. imagine ça devient un truc… sans aucun caractère ? » J’imite une tête de dégoût, clairement c’était pas dans mon intérêt si tu vends ce lieu. C’était bien mieux que tu sois le propriétaire et que tu restes dans mes bons papiers.

« Gnagnagna. » Je mime ma main qui parle, de manière très mature, évitant soigneusement de rebondir plus sur le sujet. Ma sobriété ne me vient pas encore naturellement, la preuve en est avec ce joint qui passe de mains en mains depuis une dizaine de minutes. Je dois énormément prendre sur moi pour ne pas déraper et s’il y a bien une personne qui ne m’aide pas, c’est lui. « Mais on les aime quand même. » Dis-je, pour tenter d’aller à la pêche aux infos. Je ne me suis jamais vraiment intéressé à la sexualité de Harlow, parce que c’est sa came qui m’attirait et que j’ai appris il y a un moment qu’il vaut mieux ne pas mélanger les plaisirs. Ce n’est pas maintenant que je suis en couple que je pourrais profiter de lui d’une toute autre façon, mais cela ne m’empêche pas d’être curieux. Toujours le nez où il ne faut pas, ce n’est pas nouveau. « C’est peut-être pas plus mal. » Pour leur amitié, en tout cas, mais Raph est surpris car, s’il n’ira clairement pas juger, il imaginait la jeune femme droite dans ses bottes. « Ouai… c’est mon bébé et en même temps, j’ai pas fait énormément pour développer le truc. A part être le client le plus fidèle. » Et je n’en suis pas peu fier. J’ai donné quelques idées, par-ci par-là, des directives et c’est mon équipe qui a toujours géré pour moi contre un chèque. Mais si j’y réfléchi, je me suis malgré tout investi dans les lieux et ça me ferait clairement chier de voir quelqu’un d’autre à la tête du LUX. « J’arrête là. » Dis-je lorsqu’il tente de me passer la fin du joint, préférant ne pas risquer de me faire griller et engueuler comme gosse pour un si petit écart.

@Raphaël Desrosiers LUX, cambridge 12.09.2021

bad habits lead to late nights
Bien sûr que ça me faisait chier de te perdre comme client. Les centres de désintoxication se faisaient du blé sur le dos des gens comme toi, pendant qu’il était mieux d’être clean dans la vie plutôt que défoncé H24. « ouais » Les meufs étaient reloues en règle générale, ça ne changeait pas. Maintenant, tout le temps. Cependant, quand je pense à Milo, je me dis que je ne pourrais pas vivre sans elle. Elle restait ma petite sœur et jamais de la vie je ne l’échangerai contre quiconque. Les autres ? Pas indispensable dans le fond. Toutes remplaçables. « ouais, je la laisse dans son truc. mais t’as pas intérêt à aller la voir si t’as besoin d’un truc. t’es mon fidèle client, me déçois pas » Je faisais le signe avec mes doigts pour dire que je te surveillais. Ouais, si quelqu’un devait te filer de la came le jour où tu retomberas, ce sera moi, personne d’autre. « c’est le moment de te mettre la tête dans l’boulot mon vieux » que j’dis d’un sourire narquois, avant de te proposer la fin du joint. Mais tu déclinais gentiment, ne me dérangeant pas plus que ça pour le coup. Je finissais de fumer avant d’écraser le mégot dans le cendrier entre nous. « du coup j’commence quand officiellement ? »

Ma soeur, ma femme, Karma. Toutes ces femmes font partie de ma vie à une échelle différente et je sais parfaitement que je sacrifierais tout pour elles, même pour la dernière qui m’a pourtant tourné le dos cet été. « T’inquiètes, tu seras le premier informé si j’ai besoin d’un truc. » Mais ça n’arrivera pas. Du moins, j’essaye de m’en convaincre, car je ne souhaite pas avoir fait tout ça pour rien. Ces derniers mois ont été douloureux, physiquement comme mentalement, et rien que pour ne jamais avoir à repasser par un sevrage, je veux tenir. « Ouai, j’ai pas mieux à faire de toute façon. » Fini les nuits jusqu'à quatorze heures parce que je sortais jusqu’au petit matin. Le temps me semble long maintenant que j’ai des journées “normales” alors je peux bien me mettre à fond dans le boulot pour ne pas devenir fou. C’est peut-être même l’occasion de commencer à travailler sur mon projet de restaurant mais je ne veux pas m’emporter parce que s’il y a bien un truc sur lesquels les psys ont insisté, c’est la stabilité. Je n’ai pas envie de m'éparpiller, même si ça me permettrait d’avoir l’esprit ailleurs et, peut-être, oublier trente secondes le manque qui me ronge.  « Jeudi ? Comme ça t’as un shift pas trop intense pour commencer, avant le weekend. » Les jeudis sont loin d’être calmes mais ça lui permettra toujours de se mettre dans le bain plus facilement qu’un vendredi.

@Raphaël Desrosiers LUX, cambridge 12.09.2021

bad habits lead to late nights
J’étais légèrement possessif concernant les clients réguliers que j’avais. Et comme tu étais l’un deux, il m’était inconcevable que t’ailles te fournir chez quelqu’un d’autre. Tout ce que je voulais finalement, c’était que tu replonges dans tes travers et qu’on reprenne cette relation d’amitié où on l’avait laissée, avant que tu ne viennes à aller en désintox. « perf » Au moins, c’était dit. Je ne savais pas trop où t’en étais dans ta tête vis à vis de ça, mais il était certain que je n’allais pas manquer de te le rappeler, surtout quand je jugerai que tu es suffisamment faible et que la tentation sera bien trop grande pour la repousser. Finalement, après petit écart de conversation, c’était sur mon shift que je revenais. Jeudi pour premier jour visiblement. « ça me va, c’est nick- » Pas le temps de finir que je sentais mon téléphone vibrer. Je décroche en me relevant, avant de m’éloigner un peu pour éviter les oreilles baladeuses. Un hochement de tête plus tard et l’appel coupé, je me tournais vers toi. « on a un deal vieux. j’dois te laisser, ma nuit est pas finie. on se recapte avant que je prenne officiellement mon poste » Je te présentais mon poing, pour un check en bonne et due forme, avant de finalement m’éclipser du bureau pour vaquer à mes occupations bien moins… légales.

hj: