Invité
est en ligne
Invité
Chiara n’arrivait pas à bouger. Elle ne savait plus depuis combien de temps elle se tenait là, debout, les bras ballants. Ce devait faire un certain temps car ses épaules et son dos étaient devenus raides et engourdis, mais elle ne le sentait pas. Cela s’était passé il y avait presque un mois, pourtant rien n’avait bougé et l’on pouvait aisément supposé que l’explosion avait eu lieu le jour même. Lorsque Chiara avait appris la nouvelle de l’attentat à la bombe sur CNN, les journalistes avaient beaucoup parlé du bilan humain et des dégradations majeures subies par le Transept, le parking du Yard et le Cambridge Common. De la Widener Library en revanche on avait seulement parlé de vitres soufflées et de quelques blessés, si bien que Chiara ne s’était pas inquiétée. Elle n’avait même pas pensé à contacter ses connaissances dans le professorat ou l’administration de l’université pour vérifier les dires des journalistes. Dans la soirée suivant l’attentat on avait appris la suspension des cours, le temps de penser les blessures tant physiques que psychologiques. La nouvelle avait un peu peiné le petit génie sicilien, mais elle comprenait. Et puis elle pouvait très bien continuer à étudier seule, elle en avait les capacités et la possibilité. Rien n’avait été dit quand à une hypothétique fermeture de la Widener Library. Le lendemain matin Chiara avait donc préparé sa sacoche comme tous les jours, à la différence près qu’elle s’était équipée pour une journée de recherche à la bibliothèque et non pas pour aller en cours. Ce qu’elle avait vu en arrivant sur le campus l’avait pris aux tripes. Partout des gravats de bâtiments, de la poussière, des traces de calcination des objets provenant de salles de cours éparpillés, du sang à certains endroits. Les forces de l’ordre étaient à pied d’œuvre depuis la veille et avaient établis un périmètre de sécurité empêchant quiconque non autorisé de pénétrer dans le campus. Chiara ne pensa pas une seule seconde que cela était normal, elle trouvait au contraire scandaleux qu'on l'interdise de circuler sur ce campus qu’elle considérait comme sa maison. Furieuse, elle avait tenté de forcer les barrages mais son petit corps tout frêle ne faisait évidemment par le poids face aux armoires à glace chargés de la sécurité. Elle avait tout de même demandé à voir ce qu’il était advenu de la Widener Library, on lui avait indiqué un bâtiment dont une grande partie s’était effondrée.
C’était devant le cordon de sécurité que ce trouvait donc à présent Chiara, aussi dévastée que sa chère bibliothèque. Le bâtiment avait une architecture ressemblant à celle des temples grecs et la jeune italienne en était venue à considérer cet endroit comme son sanctuaire personnel. Pour l’heure il était coupé en deux, tout comme l’âme de Chiara. S’il arrivait quoi que ce soit à ce bâtiment, elle était touchée elle aussi. Sur le coup de l’émotion elle se dit qu’elle aurait mille fois préféré se trouver ici au moment de l’explosion et souffrir avec sa bibliothèque. Elle ne pouvait pas imaginer l’horreur qu’avait pu ressentir ceux qui avaient véritablement été piégés à l’intérieur de la Widener Library, leurs cris de détresse et les pleurs sur leurs visages. Elle se sentit alors idiote d’avoir raisonné de la sorte. Cet attentat ne l’avait pas touchée directement, et pire, il avait provoqué la mort de dizaines d’innocents. Elle n’avait pas le droit de souhaiter faire partie des pertes. Mais quoi qu’on en dise, elle était une victime. La vie de Chiara était indéniablement liée à cette bibliothèque. Un bâtiment pouvait se reconstruire, une personne aussi. Cela prenait du temps, mais le résultat en valait toujours la peine. Chiara allait se relever et traverser cette expérience. Cela ne serait l’affaire que de quelques semaines et il y avait tellement d’autres endroits où elle pouvait continuer ses recherches en ville. Soudainement revitalisée par cet élan d’enthousiaste, la jeune femme se surpris à sourire d’un air victorieux. Elle pivota énergiquement sur elle-même et se dirigea un pas décidée vers la sortie du campus. Perdue dans ses pensées, elle n’avait pas remarquée que d’autres étudiants, professeurs ou simples citoyens de Cambridge étaient venus observer par eux même l’ampleur du désastre provoqué par cet attentat. Aveuglée par son énergie nouvelle qui la poussait hors de l’enceinte de son petit monde, elle se retrouva soudain au sol sans comprendre comment ni pourquoi, l’épaule toute endolorie. Une femme également clouée par terre lui faisait face, il ne lui fallut pas beaucoup de temps pour comprendre que cette inconnue l’avait violemment bousculée au point de les faire chuter toute les deux. Exaspérée, Chiara s’exclama d’un ton désagréable : « Ça vous arrive de regarder où vous mettez les pieds espèce de gourde ?! ». Elle ne pensa pas une seule seconde pouvoir être en tort, elle était beaucoup trop méticuleuse pour ça.
C’était devant le cordon de sécurité que ce trouvait donc à présent Chiara, aussi dévastée que sa chère bibliothèque. Le bâtiment avait une architecture ressemblant à celle des temples grecs et la jeune italienne en était venue à considérer cet endroit comme son sanctuaire personnel. Pour l’heure il était coupé en deux, tout comme l’âme de Chiara. S’il arrivait quoi que ce soit à ce bâtiment, elle était touchée elle aussi. Sur le coup de l’émotion elle se dit qu’elle aurait mille fois préféré se trouver ici au moment de l’explosion et souffrir avec sa bibliothèque. Elle ne pouvait pas imaginer l’horreur qu’avait pu ressentir ceux qui avaient véritablement été piégés à l’intérieur de la Widener Library, leurs cris de détresse et les pleurs sur leurs visages. Elle se sentit alors idiote d’avoir raisonné de la sorte. Cet attentat ne l’avait pas touchée directement, et pire, il avait provoqué la mort de dizaines d’innocents. Elle n’avait pas le droit de souhaiter faire partie des pertes. Mais quoi qu’on en dise, elle était une victime. La vie de Chiara était indéniablement liée à cette bibliothèque. Un bâtiment pouvait se reconstruire, une personne aussi. Cela prenait du temps, mais le résultat en valait toujours la peine. Chiara allait se relever et traverser cette expérience. Cela ne serait l’affaire que de quelques semaines et il y avait tellement d’autres endroits où elle pouvait continuer ses recherches en ville. Soudainement revitalisée par cet élan d’enthousiaste, la jeune femme se surpris à sourire d’un air victorieux. Elle pivota énergiquement sur elle-même et se dirigea un pas décidée vers la sortie du campus. Perdue dans ses pensées, elle n’avait pas remarquée que d’autres étudiants, professeurs ou simples citoyens de Cambridge étaient venus observer par eux même l’ampleur du désastre provoqué par cet attentat. Aveuglée par son énergie nouvelle qui la poussait hors de l’enceinte de son petit monde, elle se retrouva soudain au sol sans comprendre comment ni pourquoi, l’épaule toute endolorie. Une femme également clouée par terre lui faisait face, il ne lui fallut pas beaucoup de temps pour comprendre que cette inconnue l’avait violemment bousculée au point de les faire chuter toute les deux. Exaspérée, Chiara s’exclama d’un ton désagréable : « Ça vous arrive de regarder où vous mettez les pieds espèce de gourde ?! ». Elle ne pensa pas une seule seconde pouvoir être en tort, elle était beaucoup trop méticuleuse pour ça.
(Invité)