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Je suis de mauvaise humeur. Vous me direz, c’est habituel. Je n’ai jamais été de ces hommes souriants et solaires. Moi j’insuffle la glace, la prestance qui tient à distance. La méfiance dans le regard. Je ne porte que trop les stigmates de ma culture slave. Si bien que cela me demande toujours quelques efforts d’adoucir mes traits, d’insuffler un semblant de lumière là dans la glace méprisée de mes orbites. La seule finesse qui me comporte elle se révèle au bout de mes phalanges. Mains graciles, mains expertes, qui déchirent et analysent les corps, qui pianotent en secret les mélodies sur un piano grand luxe que j’offre seulement à mes oreilles. Celles-ci tiennent présentement le deuxième gobelet de café de ma journée. Passant la porte du commissariat, je me renfrogne aux bruits du tumultes, des voix empressées, des téléphones qui n’arrêtent pas de sonner. Tout juste un regard de mépris vers les donuts gras et autres pâtisseries. Les Américains savent nourrir les clichés. Je passe la hall puis le couloir, jusqu’à retrouver mon bureau dédié aux consultations judiciaires, mon activité se partageant entre cette pièce et la morgue. Rapidement, la fliquette vient me donner l’emploi du temps de la matinée, je l’écoute distrait, un vague sourire aux lèvres. « Amenez-moi le premier Staton s’il vous-plaît. » Je termine le breuvage, gobelet dans le sac, retirant mon manteau pour le ranger avec application, enfilant la blouse blanche qui me donne un semblant de rôle dans ce chaos, outils disposés, on m’apporte le fardeau. Un jeune caucasien retrouvé en état d’ivresse et agressant tout ce qui passe. On ne sait pas qui a commencé alors dans le doute, on constate l’étendue des dégâts. « Bonjour. » dis-je alors que celui-passe la porte accompagné de l’Agent. « Je suis le Docteur Jasinski, je ne suis pas là pour savoir ce que vous avez fait mais simplement pour constater vos blessures. Installez-vous. » Mon regard se porte sur lui, il n’a pas l’air si terrible. Sans doute une mauvaise histoire, un chagrin d’amour. Pathétique. « Vous pouvez nous laisser. » Je ne pense pas qu’il s’en prendra à moi. Et de toute manière, j’aimerais bien voir ça.
@Mickey Ainsworth
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