Try to go on with my life (+) Andréa

Ce que je m'emmerdais chez moi. Pas le droit de conduire, pas le droit de marcher trop longtemps. Et si ce n'était que ça, je ne m'en plaindrais pas. Mais en plus, j'avais perdu l’ouïe lors de l'accident et je ne l'avais dit à personne à l'exception de Nora.Les gens pensaient que j'avais de la difficulté à suivre les conversations à cause des traumatismes crâniens. Dans un sens, c'était logique mais il y a aussi le fait que j'essayais de lire sur les lèvres et c'est pas tout le monde qui parlait en me regardant ou qui articulait bien. Du coup, je finissais par rester seule chez moi. C'était plus simple. Plus simple que d'expliquer à tout le monde que je n'entendais plus rien, plus simple que de voir la pitié dans leurs yeux. La pauvre gamine de 19 ans qui avait vécu un événement traumatisant, qui en ressortait avec des séquelles. Les médecins disaient que ça pouvait être une effet à court terme, que ça pouvait bien revenir du jour au lendemain. J'avais bien hâte que ça revienne du coup parce que je devenais folle avec ce silence constant.
À un tel point que si je continuais de rester dans l'appartement, j'allais le devenir encore plus. DU coup, j'avais décidé de m'habiller juste pour aller marcher un peu. J'avais besoin de prendre l'air, juste aux alentours. J'enfila rapidement un manteau, mes bottes et aussitpot que j'ouvris la porte, je tomba face à face avec Andréa, le poing dans les airs comme si elle allait cogner à la porte. "Andy, hey, je m'attendais pas à te voir. T'avais cogné, j'ai rien entendu." D'ailleurs, j'entendais même pas ma propre voix. Des fois, j'avais peur de me mettre à crier ou de parler tout bas sans le savoir.

Neyla a vécu des jours difficiles dernièrement. T'as pas trop osé la déranger parce que tu savais pertinemment qu'elle avait besoin de repos. Tu l'as donc laissé tranquille, jusqu'à aujourd'hui. Ton amie te manque et tu dois t'assurer que tout va bien avant de prendre l'avion en direction du Mexique. T'es vraiment dégoûtée qu'elle ne puisse pas venir. Tu te voyais déjà boire des cocktails en bord de plage avec ta brune préférée. Déception totale quand elle t'a annoncé qu'elle ne pourrait pas être du voyage.
T'enfiles un manteau et tu décides de lui faire une visite surprise. Tu marches jusqu'à son appartement. Tu n'hésites un instant à prendre le métro et puis, tu te dis que ce n'est pas une bonne idée. Imaginons qu'un nouvel accident se produise et que tu ne puisses pas te rendre au Spring Break ?! Non, tu décides de marcher. De plus, ça éliminera la tablette de chocolat que tu t'es mangé ce matin au réveil parce que c'est la seule chose qui te donnait envie.
Arrivée devant chez Neyla, tu toques une première fois. Pas de réponse. Pourtant, si tu te concentres bien, tu peux distinguer des bruits de pas. Du coup, tu toques une nouvelle fois. Et encore une fois. Enfin tu t'apprêtes à rétorquer, t'as le poing en l'air lorsque la demoiselle daigne enfin te répondre. Elle a l'air vraiment surprise de te voir derrière la porte alors, tu la questionnes du regard avant de lui répondre : Ca fait trois fois que je toque, tu te fous de moi ? Tu rigoles parce que la situation est tout de même comique.

Ayant pris l'habitude d'avoir mon petit train-train quotidien dans le silence, je ne faisais pas trop attention au bruit environnant. En même temps, je ne l'entendais pas. Difficile d'en tenir compte. Du coup, je me préparais tranquillement pour sortir de chez moi, aller prendre un peu l'air. C'est en ouvrant la porte que la surprise s'installa sur mon visage. Je tomba face à face avec Andréa qui avait la main levée, montrant clairement son intention de cogner à la porte. Aussitôt que je vis ses lèvres bougées, mon regard se riva sur celle-ci, essayant de comprendre ce qu'elle venait de dire. Avec la pratique, je devais plutôt douée d'ailleurs. "Ouais, je... je devais être concentrée dans ce que je faisais." dis-je en évitant le regard de mon amie. Je détestais ne pas dire la vérité, cacher quelque chose. Mais on m’interdisait tellement de chose, on me prenait en pitié parce que j'avais des conséquences suite à cette accident. Ça en venait frustrant et je préférais éviter maintenant. Du coup, faisant comme si rien était, je rigola voyant qu'Andréa faisait de même, via son expression. "Qu'est-ce qui t'amènes?" lui demandai-je tout sourire en espérant qu'elle ne remarque pas mon état maussade dû à mon confinement dernièrement. Je savais que je devais me reposer, mon entourage l'avait compris aussi. Mais passer son temps seule et dans le silence, c'était chiant. "Viens, entre." dis-je en rebroussant chemin pour refermer la porte derrière nous. La petite balade irait à plus tard.

Tu files voir Neyla parce que ça sera bientôt le Spring Break et t'es pas certaine que ton amie t'accompagne. En fait, t'es quasiment sûr qu'elle ne se pointera pas et elle va beaucoup te manquer. T'as besoin de passer du temps avec elle mais surtout, t'assurais qu'elle aille bien. T'aimes pas spécialement les hôpitaux donc, t'as pas pris le temps d'aller la voir là-bas. Ni elle, ni personne d'autre, à vrai dire. Du coup, tu frappes à sa porte une fois, deux fois. Tu commences à paniquer. Peut-être qu'elle est sortie, après tout, ça sert à rien de s'imaginer le pire. Finalement, après quelques minutes, tu te retrouves en face à face avec la jolie brune qui s'apprête à partir. Tu secoues la tête de gauche à droite, finis par rire de la situation mais en vrai, t'es contente qu'elle vive dans un immeuble sans quoi, tu te serais gelée les fesses dehors pendant un sacré bout de temps. Si tu me payes un verre, je pourrais peut-être te pardonner. Tu hausses les épaules, sourire aux lèvres avant de pénétrer dans son appartement qui ressemble plus à un palace qu'autre chose. Tu retires ta veste et la déposes sur le porte manteau. Comme d'habitude, tu fais comme chez toi. Je venais prendre de tes nouvelles et tenter de te faire venir au Spring Break par la même occasion. Comment tu te sens ? Tu te doutes bien que ça ne doit pas être facile. T'es bien contente de n'avoir pas pris le métro ce jour-là. A vrai dire, tu comatais de la veille. T'étais sortie, t'avais trop bu et t'avais raté les cours. Heureusement pour toi. T'aurais surement pas supporter un autre drame alors que tu avais toujours le décès de ton frère dans le crâne.

Pourquoi je commençais à m'en faire avec ce que les autres pensaient de moi? Ça n'avait jamais été un soucis pour moi. Et pourtant, aujourd'hui, j'étais là à garder pour moi le fait que je n'entendais plus, que j'avais perdu l'ouie dans ce stupide accident de métro. Probablement par peur qu'on me prenne encore plus en pitié qu'on le faisait déjà. La pauvre petite, elle perd l'ouïe en plus d'avoir été dans le coma.
Du coup, je me retrouvais dans des situations où je n'osais pas rien dire et où j'avais l'air bizarre à toujours fixer les lèvres des autres. Certains pensaient que c'était l'effet de mes médicaments contre les douleurs. Oui, ils avaient des effets du genre mais pas aussi longtemps. Fixant toujours mon amie, son visage, mon regard faisait des allées et venues sur ses lèvres aussitôt que je voyais celles-ci s'agiter. "Un verre. Ouais, je peux faire ça. On va fouiller dans la réserve de Willem, il s'en rendra pas compte." L''avantage d'avoir un coloc souvent absent et qui se gardait une bonne réserve. Je pouvais aller piocher dedans sans problème. Et ce même s'il s'en rendait compte, il n'en serait pas fâché. Laissant la demoiselle enlevée sa veste pour la mettre sur le porte-manteau, je me dirigea vers la cuisine pour y sortir deux verres avant de regarder dans une des armoires pour y trouver quelques bouteilles à déposer sur le comptoir. "Tu veux quoi?" dis-je en me relevant pour déposer la dernière bouteille avant de lever les yeux vers mon amie dont les lèvres bougeaient. Et merde, j'avais probablement manqué ce qu'elle venait de dire. "Tu disais? J'ai pas entendu." En espérant qu'elle ne le prenne pas mal. Ça faisait assez impoli de faire: bah, j'écoutais pas en fait alors que dans le fond, ce n'était pas du tout le cas.

Bon le moins que l'on puisse dire c'est que la tache risque d'être compliquée. Tu es ici pour faire changer Neyla d'avis. T'as très envie qu'elle vienne avec toi au Spring Break mais tu sais aussi qu'elle a besoin de repos. Elle a vécu un véritable traumatisme dans le métro et toi, t'es pas capable de comprendre ça. Enfin si parce que toi aussi tu as traversé des moments difficiles. en réalité, tu en as traversé un seul mais, c'était celui de trop. T'as toujours le décès de ton frère jumeau dans un coin de ta tête. C'est toujours cet événement qui te fait n'importe quoi. Tu perds la tête, tu deviens quelqu'un d'autre, ingérable. Tu sais que quelqu'un réagit d'une façon différente. Peut-être que Neyla s'en sortira sans séquelles. En tout cas, tu te dois d'être présente pour elle et de t'en assurer. Sourire aux lèvres tu pénètres dans sa demeure en lui demandant quelque chose à boire. Elle évoque son colocataire et tu esquives un sourire. Tu t'en fiches de ce qu'elle va voler tant que vous pouvez en profiter un minimum. Tu déposes ton manteau avant de la rejoindre dans la cuisine. Tu t'appuies contre le comptoir en observant les bouteilles qu'elle dépose sur celui-ci. Une dernière avant de te demander ce que tu veux et le choix reste difficile à faire. T'es du genre à tout aimer et peu importe l'heure, t'es capable de faire la fête et de t'enfiler une bouteille. Ca fait un peu alcoolique mais c'est bel et bien le cas. Sans doute que tu as un problème avec l'alcool, oui. Whisky coca, ça fera l'affaire. Tu hésites à rajouter : Autant commencer doucement mais, tu n'es pas certaine que cette phrase la fasse rire. Tu lui expliques les raisons de ta venue et souris quand elle te demande de répéter. Tu secoues la tête un instant avant de la questionner du regard : Neyla, t'es sure que ça va ? Tu me parais super bizarre ! En tout cas, elle n'est pas comme d'habitude et ça te perturbe.

J'avais encore du mal à accepter ma nouvelle condition. Je ne savais même pas si c'était seulement temporaire ou si ça pouvait devenir permanent et clairement, j'avais la trouille. Et si je me retrouvais comme ça pour toujours, si je ne pouvais plus entendre un seul son pour le restant de mes jours? Je paniquais simplement à y penser. Pourtant, mon médecin continuait de me dire que ça arrivait souvent dans les cas de traumatismes crâniens comme ceux que j'avais subi, que ça pouvait revenir à tout moment. Mais comment espérer que les autres acceptent ça alors que même moi, je ne l'acceptais pas. Ça me frustrait en fait de manquer ce que les autres disaient.
Allant vers la cuisine, je commença à sortir quelques bouteilles d'alcool que je déposa sur le comptoir. Prenant soin de bien regarder mon amie alors qu'elle me disait ce dont elle avait envie, j'approuva en disant: "C'est parti pour deux whisky coca." J'attrapa rapidement deux verres avant de commencer le tout, gardant toujours un oeil sur Andréa au cas où elle dirait quelque chose. Ce qui fut rapidement le cas. Je ralentis donc la cadence sur les verres. déposant même la bouteille en me disant que j'avais l'air étrange comparativement à d'habitude. Posant mes mains sur le comptoir et soupirant, je commença à m'expliquer: "Hum... comment dire ça? J'entends plus. Des séquelles de l'accident selon le médecin. Et je déteste ça, vraiment. C'est l'enfer essayer de suivre sur les lèvres et pas pouvoir rien faire à cause de tout ça." Fallait que ça sorte, fallait que je dises à quel point je détestais la situation.

Tu es en position de comprendre que certaines situations sont compliquées à vivre. T'en as vécu une grosse, une seule et c'était la mort de ton frère jumeau. Encore aujourd'hui tu portes les séquelles de ce jour-là et de cette absence. Tu comprends que c'est compliqué pour elle d'en parler et tu ne lui demandes pas de se confier. Tu veux savoir comment elle se sent. Tu veux t'assurer qu'elle aille bien et lui montrer que t'es là, en cas de besoin. Tu veux aussi savoir si elle compte partir en vacances avec toi parce que ça ne sera jamais pareil sans elle, bien évidemment.
Tu pénètres à l'intérieur de l'appartement et tu lui demandes un truc à boire. Tu ne sais pas quelle heure il est exactement mais, l'apéro n'a pas d'heures et tu lui demandes un whisky coca. Elle t'accompagne volontiers et là, une seconde fois, tu parles dans le vide. Neyla est totalement ailleurs. T'as l'impression de parler à un mur et ça commence à te faire flipper. Elle lâche la bouteille, pose ses mains comme si elle s'apprêtait à faire une révélation du feu de dieu et t'attends patiemment, un flippant un peu. Tu sens ton coeur qui bat un peu plus rapidement suite à cette pression. Elle t'explique qu'elle n'entend plus, séquelle de l'accident et là, tout prend sens. Tu prends quelques secondes pour souffler. Franchement, ça aurait pu être pire, elle aurait pu devenir complètement cinglée. Tu fais attention cette fois-ci à la regarder. Tu articules peut-être un peu plus que la normale mais bon, t'es blonde après... Donc c'est pour ça que tu m'as pas entendu frappé ? Donc, j'aurais pu me casser le poignet sur la porte parce que t'as pas jugé bon de me prévenir par message ? C'est temporaire ou...? Toi, t'y connais rien, t'as pas fait médecine. Tu veux savoir si elle a eu plus d'informations sur le sujet.

Dans un sens, c'était tellement différent d'aborder le monde sans entendre un seul son. La seule chose que je croyais entendre, c'était ma propre voix dans ma tête. Tout ça, ça remettait les choses en perspective. Je ne pouvais plus faire mille et une chose à la fois. Même écouter quelqu'un en même temps de réfléchir devenait plus difficile parce que je devais me concentrer sur les lèvres de l'autre personne. C'est ce qu'on appelle vivre le moment présent, non?
Du coup, aussitôt que j'essayais de faire deux choses en même temps, je manquais un bout de la conversation. Et on me prenait pour une demeurée. Soupirant doucement, je finis par avouer la vérité à mon amie, lui disant que je n'entendais plus rien. D'ailleurs, celle-ci se mit à me regarder tout en articulant ridiculement. Je partis à rire sans me retenir. "Tu sais que tu peux parler normalement." dis-je avant de reprendre pour répondre à ses questions "Silence total. J'te jure, c'est la merde. Les médecins disent que c'est temporaire, que c'est probablement juste un effet de mes traumatismes crâniens. Ça peut prendre quelques jours, quelques semaines. Ça dépend de chaque cas." finissai-je en haussant les épaules. Combien de temps pouvais-je être dans cet état? J'en savais pas plus que les autres pour le moment. J'imagine que je le saurai quand ça va arriver. En attendant, je faisais du bien que je pouvais pour ne rien laisser paraître. "Tout ceux qui le savent me prenne en pitié et je déteste ça. Déjà qu'on m'oblige à rien faire... Et... et je sais pas. J'ai l'impression de faire pitié moi-même et ... je sais pas." C'était la première fois que j'en parlais aussi ouvertement. Ça faisait du bien de laisser tout ça sortir.

Neyla t'annonce la nouvelle et tu restes bouche bée. Tu t'attendais à tout sauf à ça et surtout, tu ne comprends pas pourquoi elle ne t'en a pas parlé avant. Tu comprends mieux pourquoi elle ne répond à tes appels. Elle s'occupe juste à répondre furtivement à tes textos comme si elle cachait quelque chose. Bah en effet et, ce n'est pas une petite nouvelle. On ne peut pas se passer de cette information.
Forcément, tu articules bêtement parce que tu te dis que ça lui facilitera les choses. Elle se fout de toi en précisant que tu peux parler normalement. Tu lui tires la langue en guise de réponse avant d'avoir grimacer également de façon exagérée.
Elle t'explique que c'est super handicapant, qu'elle n'entend vraiment rien. Du coup, tout devient logique dans ta tête. Tu hoches la tête et écoutes la suite. C'est temporaire mais, pas de date précise. Tu soupires. Et les sons hyper forts ? Genre, si je t'emmène en boîte ? Est-ce que tu entends un peu ? Et est-ce que c'est bénéfique ou au contraire, ça aide pas du tout ? T'aimerais pouvoir faire quelque chose pour elle mais malheureusement, y a pas grand chose que tu puisses faire si ce n'est continuer à la traiter comme avant pour ne pas qu'elle se sente différente et c'est d'ailleurs ce dont elle te parle par la suite. Crois-moi, moi je te prends pas en pitié. Et d'ailleurs, j'en ai rien à faire que tu n'entends plus rien. T'as toujours tes deux yeux donc, je vais encore te proposer d'aller au sring break te bourrer la gueule avec moi et Matter les beaux mecs sur la plage! Tu rigoles avant de prendre une nouvelle gorgée de ta boisson.