Youpiiiiii
Oops… Le cri de joie venait de glisser entre mes lèvres trop soudainement et de façon foutrement trop imprévisible que je risquais de faire sursauter Nixon qui se trouvait à mes côtés. Mes yeux se mettaient à briller de ce bonheur qui m’habitait pendant quelques instants et qui me poussait à sourire comme un abruti. Je ressemblais sans doute à un gamin qui venait de gagner le grand prix dans un quelconque concours. Je ressemblais à ce gamin qui n’était pas fichu de cacher sa joie aussi puissante que réelle. Je la laissais simplement exploser au grand jour dans cette chambre sans même m’en rendre compte, sans même me soucier de ce qu’on pourrait penser de ma réaction. Alors, ouais, sur l’instant, je ressemblais sans doute à un gamin qui n’était pas fichu de se contrôler. Je n’étais plus qu’un gosse qui n’était plus capable de prendre le dessus sur le tourbillon d’émotions qui pulsait à l’intérieur de mon être. Et, putain, ça me changeait tellement. Il était si rare que je me laisse autant aller. Il était tellement rare que je laisse mes émotions prendre le dessus au point de me pousser à crier sans le moindre préambule. De temps en temps, il arrivait que mes émotions prennent le dessus bien sûr. Je n’étais pas un robot capable d’opérer une supervision constante sur tout ce qui se passait en moi. Je n’étais guère un robot qui ne ressentait rien et qui ne confiait pas certains de ses sentiments, certaines de ses pensées. Non… Moi j’étais juste un réel maniaque de ce contrôle qui tentait toujours de brider les émotions un peu trop puissantes qui pouvaient changer toute la donne. J’essayais sans cesse de peser le moindre de mes propos et la moindre de mes réactions afin d’envisager le futur d’une discussion ou même d’une relation… Néanmoins, il y avait tant de fois où ces tentatives de contrôle me filaient entre les doigts. Lorsque mon trouble Borderline prenait le dessus, les émotions me submergeaient si violemment qu’elles finissaient trop souvent par prendre le dessus sur tout le reste. Elles devenaient maîtresses de chaque instant et je n’étais plus que la victime de ces putains de crises que j’avais tant de mal à gérer. Ce n’était guère les seuls moments où mes émotions m’échappaient. Elles m’échappaient dès lors que le flirt commençait, que la température augmentait et que le sexe entrait en jeu – sauf quand je travaillais en tant que prostitué bien sûr, mais là ce n’était pas les mêmes limites, ce n’était pas la même histoire… Non… Mes émotions m’échappaient lorsque ces choses se déroulaient pour le plaisir… Alors oui, j’étais parfaitement capable de m’amuser à flirter avec les personnes autour de moi sans que cela n’ait la moindre conséquence. Mais, je savais qu’en m’engageant sur ce chemin, je prenais toujours le risque de dérailler. Il y avait toujours la possibilité pour que mon désir et mes envies m’échappent à tel point que je ne serais plus maître de rien. Il y avait toujours la possibilité pour que les sensations soient multipliées à tel point que je me retrouvais incapable de m’échapper et que je risquais de m’attacher… Un peu trop fort. Il suffisait de trouver le bon partenaire qui pouvait tout renverser… La personne qui avait le pouvoir de me faire dérailler… Une personne comme Lukas… Une personne comme Nixon… Oh putain, ouais Nixon… Avec mon sexy tatoué, mes émotions m’échappaient encore plus. Le contrôle s’effaçait au fil des mois. En présence du jeune homme, je me sentais toujours plus humain parce que j’avais l’impression de pouvoir être moi. Entièrement. Totalement. Sans le moindre secret. Sans le moindre voile. Sans le moindre contrôle. Avec lui, je n’étais jamais jugé. J’étais toujours bien accueilli. J’étais sans cesse comblé. Et damn… Peut-être même oserais-je dire que j’étais réellement aimé pour ce que j’étais quand bien même j’étais un être trop complexe composé de milliards de cicatrices si douloureuses… Nixon ne me regardait pas comme les autres. Il ne cherchait pas à me prendre avec des pincettes. Il était juste vrai avec moi. Il était juste lui avec moi. Et j’étais juste moi avec lui. Oh… Attendez… Cette réaction de pur et soudain bonheur était peut-être donc parfaitement normale et prévisible au final parce que Nixon était là. Il n’y avait que lui dans cette chambre avec moi et je savais qu’à ses côtés, je pouvais relâcher cette pression constante de contrôle qui cognait sur mes épaules. Je savais que cette réaction peut-être un poil excessive pour une foutue pizza se contenterait de faire sourire l’artiste qui se trouvait à mes côtés. Je savais qu’il ne me jugerait pas pour ça, qu’il ne m’aimerait pas moins parce que je me comportais un peu trop comme un gosse foutrement heureux. Alors, ouais, j’avais laissé ce cri m’échapper sans ressentir la moindre peur. Ce cri qui venait du fin fond de mon cœur alors que mon sexy tatoué m’accordait cette pizza tant souhaitée et tout juste demandée. J’étais si heureux de voir que mon idée de nourriture n’était pas renvoyée au loin. J’étais ravi de voir que ma demande était acceptée sans même que cela ne pose de problème. Je gagnais au moins ça aujourd’hui dans cette cage blanche qui me faisait si mal au ventre et qui allait me garder prisonnier pendant de trop nombreux jours. Coincé dans ces lieux, je ne pouvais guère effacer ce métro qui continuait de se dessiner à l’intérieur de mon esprit dès lors que mes yeux se fermaient. Je ne pouvais pas effacer ce wagon empli d’horreur qui se plaisait à venir cogner dans ma tête pour me donner si mal encore, pour me faire si peur. Malgré les soins prodigués dans cet hôpital, je ne pouvais même pas effacer les blessures dont j’avais été victime. Elles étaient là. Je le savais. Je les sentais. Tout comme je sentais cette angoisse dévorante qui refusait de quitter mon être malgré tous mes efforts. Et, putain, coincé dans cette chambre, coincé dans cet état, je ne pouvais même pas obtenir de Nixon qu’il me fasse l’amour même si j’en mourrais d’envie… Enfin… Je n’étais pas franchement à plaindre en vérité. J’obtenais déjà beaucoup. J’avais droit à la présence de mon sexy tatoué au sein de ma chambre ce matin. Un sexy tatoué qui reviendrait me voir souvent tant que je serais coincé sur ce putain de lit. Un sexy tatoué qui reviendrait d’ailleurs dès ce soir afin de m’apporter des vêtements qui, avec un peu de chance, porteraient son parfum. Il reviendrait ce soir avec cette pizza que je venais de lui quémander. Oh ouais, ce soir, je pourrais manger une pizza et cela me rendait si heureux que j’avais crier ce ‘youpi’ comme un gosse. Il en fallait vraiment peu pour me faire plaisir en cet instant… Après ce violent accident qui aurait pu me coûter la vie. Ce ne fut que quelques minutes après mon cri que je me rendais compte de ma voix foutrement trop élevée, je m’empressais alors de porter mes mains à mes lèvres tout en faisant une tête de gosse un peu trop coupable. Oops… Mes mains se baissaient lentement alors que je mordillais ma lèvre avant de reprendre la parole pour expliquer ma réaction peut-être un peu trop vive pour un simple repas.
Je… Désolé… Je… J’sais plus si je te l’ai dit que j’suis Italien… Enfin… Ma maman était Italienne et je… J’ai passé une bonne partie de ma vie en Italie alors je… Euh… J’sais pas… Les pizzas c’est rassurant… Ce… C’est comme si… Comme si je retournais un peu chez moi quand… Quand tout allait bien…
J’haussais doucement les épaules en mâchouillant lentement ma lèvre comme si cela pouvait m’aider à me calmer d’autant me dévoiler… Enfin… Non. J’étais stupide. Je n’avais aucune putain de raison de m’angoisser parce que je ne me dévoilais pas tant que ça en fait. Dans la réalité, les choses étaient si différentes de l’intérieur de ma tête. En soufflant ce ‘quand tout allait bien’, je savais que je parlais de cette vie avant que Maman ne soit assassinée sous mes yeux. Je parlais de cette vie avant que mon père ne se mette à me battre tous les jours. Je parlais de cette vie lorsque je ne faisais pas encore parti de la mafia et que je n’étais pas ce prostitué forcé d’obéir ou de mourir. Je parlais de cette vie quand je n’avais pas encore tué un homme… Ouais, en soufflant ce ‘quand tout allait bien’, je remontais des années en arrière à l’intérieur de ma tête. Néanmoins, dans la réalité, Nixon allait simplement penser que ce ‘quand tout allait bien’ signifiait simplement que c’était avant l’accident, avant que je ne me retrouve coincé dans cette chambre d’hôpital en si mauvais état physique et mental. Et, franchement, je n’allais pas chercher à lui ouvrir de nouvelles portes. Non. Pas ce matin. Pas ces portes. Je n’étais pas prêt. Pas encore. Secouant la tête, je ne voulais plus penser à toutes ces histoires et je finissais par m’asseoir dans ce lit où j’avais déjà passé trop d’heures couché. Ce lit que je n’allais pas avoir le droit de quitter avant plusieurs jours. Ce lit dont je ne pourrais m’échapper qu’en acceptant d’avancer avec des béquilles. Ce putain de lit que je détestais tant. Est-ce que je détestais autant ce lit si Nixon y passait la nuit ? Tout contre moi ? Sans doute pas non… Je crois même que j’aimerais bien ça. J’aimerai tellement que le jeune homme puisse rester à mes côtés ce soir en ramenant la pizza. J’aimerai tellement qu’il puisse juste être là à mes côtés toute la nuit. Putain, j’en avais tellement besoin. Néanmoins, il n’en aurait sans doute pas le droit. Le personnel de l’hôpital ne le laisserait pas faire. Et, de toute façon, je ne pouvais pas lui demander ça. Je ne pouvais pas quémander autant de la part du jeune homme. Nous serions serrés dans ce lit. Il ne dormirait sans doute pas bien vu les cauchemars violents qui m’agitaient. Et, je ne voulais pas ça. Je ne voulais pas être responsable de son mal-être. Non. Tant pis pour moi… Il faudrait juste que j’apprenne à tolérer ce lit en solitaire pendant quelques jours. Mais, ce n’était pas le moment d’y penser. Non. Pas tout de suite. Il y avait plus important. Je m’étais assis dans ce lit avec le fichu désir d’embrasser mon sexy tatoué. Néanmoins, au lieu de me lancer dans cet acte, je préférais juste confier mon bonheur de l’avoir ici dans cette chambre. Il apaisait tellement mon cœur. Il calmait si réellement mon angoisse. Et, putain, ça faisait tellement de bien de ne pas être seul après une nuit si catastrophe, après un événement si bouleversant. Ça faisait juste du bien de l’avoir à mes côtés encore plus lorsque Nix’ franchissait lui-même les derniers centimètres nous séparant afin de m’offrir ce baiser dont j’avais réellement besoin dans le fond. Ce baiser qui me donnait encore plus envie de crier ‘youpi’ alors que tout mon corps se réveillait. Enfin ! J’avais l’impression d’être sorti de ce métro et d’être en vie. C’était tellement rassurant. Mon cœur battait plus vite, mais c’était juste délicieux. Aussi délicieux que toutes ces sensations qui tordaient mon bas-ventre. La main de Nixon dans mon cou me faisait vibrer à tel point que je me sentais de nouveau à ma place. Et, bien trop vite, le baiser prenait fin laissant place à une interrogation. Une interrogation fichtrement légitime puisque habituellement je ne me gênais jamais pour m’emparer des lèvres de Nixon. N’importe où. Chez lui. Sur le campus. Dans la rue. Même dans un bar. Je me foutais du monde qui nous entourait. Je me fichais de ce que les gens pourraient dire. Si j’en avais envie, je n’avais aucune raison de me priver de le faire. Je prétendais que mon hésitation venait de cette accident et de ma ressemblance avec ce raton laveur tout brisé. Néanmoins, au fond de mon cœur, je savais que c’était plus profond et que ça venait juste de ma peur de ne pas savoir contrôler tout ça… Tout ce que je ressentais pour Nixon. Et, pour éviter de penser à cette réalité effrayante, je finissais même par agir retirant cette chemise d’hôpital pour dévoiler mon torse blessé à Nixon. Je sortais ma jambe de sous les couvertures comme pour lui prouver que j’étais bel et bien ce raton laveur tout cassé. C’était également une façon de lui montrer l’emplacement de mes blessures et c’était bien non ? Oui, c’était bien parce que je voulais qu’il sache. Parce qu’il serait sans doute celui qui prendrait le plus soin de moi après cette horreur. Parce que c’était chez lui que je finirais en sortant d’ici… La mine inquiète du jeune homme me déplaisait. Je n’aimais pas l’inquiéter… Aussi, je me mettais à babiller des mots forts sur ma peur du métro et surtout sur mon attachement envers lui. Des mots si puissants. Des propos si réels. Et, je finissais par ne plus hésiter à déposer mes lèvres sur celles si tentatrices de Nixon. Avec passion. Avec amour. J’en perdais la tête. Je voulais m’y abandonner. Totalement. Complètement. Ma main remontait sur la cuisse de Nixon alors que je déposais mon front contre le sien faisant entendre mon envie de lui… Une envie à laquelle il refusait de répondre puisqu’il stoppait ma main sifflant des mots qui me faisait mal. Des mots qui, au final, n’avaient aucune raison de me faire souffrir. Ses lèvres me le prouvaient. Ses propos me le confirmaient. Il veillait simplement sur moi. Il ne voulait pas me faire plus de mal. Il ne voulait pas me foutre encore plus en l’air. Et, je comprenais. C’était difficile à accepter tant j’avais envie de lui et tant j’étais prêt à tout pour ça. Mais, je l’acceptais… Ouais… Il le fallait. Je pouvais me contenter de toute cette tendresse qu’il m’offrait en laissant ses lèvres parcourir mon visage. Nix’ avait soufflé qu’un raton laveur ne s’apprivoisait pas et j’avais rétorqué du tac au tac qu’il pouvait tout apprivoiser en rigolant. Son rire se mêlait au mien alors qu’il me confiait qu’il voulait bien essayer. Et, sans même être capable de réellement réfléchir, je demandais soudainement « Attends… On… On est d’accord que c’moi le raton laveur hein ? T’en ramène pas un vrai chez toi ? » Mes sourcils se fronçaient comme ceux d’un gamin qui tentait réellement de réfléchir et d’y voir clair au sein de toute cette situation. Zut, ce n’était pas de ma faute. L’accident m’avait foutu la tête en l’air. La fatigue ne m’aidait clairement pas à réfléchir. Aussi, je balançais ces interrogations alors que j’allais sans doute passer pour un pauvre petit fou. Néanmoins, ce n’était pas vraiment de ma faute. Je n’avais pas pu m’empêcher d’imaginer Nixon en train de ramener un vrai raton laveur chez lui pour tenter de l’apprivoiser. C’était mignon ces bêtes là, mais elles pouvaient vous foutre la frousse aussi et je ne voulais clairement pas cohabiter avec un raton laveur. Puis, zut, de toute façon, ils étaient mieux à l’état sauvage. Ils étaient mieux en liberté et pas fermé dans le studio de Nixon. En revanche, moi je serais bien mieux fermé dans le studio du jeune homme. Je voulais bien être ce raton laveur. Ouais, l’idée me plaisait réellement et j’avais envie de laisser mon sexy tatoué m’apprivoiser comme personne ne l’avait encore jamais fait. Je voulais le laisser tenter de gagner cette partie. Non… Damn, je voulais vraiment le laisser gagner. Je voulais juste fermer les yeux et me laisser embarquer au sein de cette histoire en lui laissant totalement le contrôle. Encore plus alors que Nixon me parlait du kintsugi et de l’or que j’avais plein les veines. Il était si parfait… Il était si tendre… Il était si attentionné. Sa main serrait la mienne sur sa cuisse. Ses lèvres se déposaient sur ma tempe me rassurant. Il m’attirait plus près de lui et les larmes coulaient le long de mes joues parce que, merde, j’étais foutrement touché par ce qu’il venait de dire. J’étais fichtrement épris de ce garçon qui se trouvait à mes côtés. Et, je ne savais pas quoi souffler après une telle déclaration. J’avais tellement de mal à croire en ces mots si doux. J’avais tant de mal à croire que ces mots pouvaient m’être destinés. Moi… Si bancal. Si malade. Si cassé. Je finissais juste par laisser échapper l’interrogation qui cognait si violemment dans mon crâne depuis des semaines. Qu’avais-je fait pour mériter Nixon dans ma vie ? Je me sentais si chanceux. Lorsque Nix’ souffla que j’avais eu assez de cran pour poser nu dans un cours universitaire, un rire passa entre mes lèvres au travers de mes larmes et je rétorquais trop vite.
On peut remercier ma pauvreté alors j’crois…
J’haussais les épaules après ces quelques mots de pure vérité. Parce que ouais, malgré le salaire minable, c’était bel et bien ma pauvreté qui m’avait poussé à détacher l’offre d’emploi du tableau d’affichage. Mon besoin d’argent et mon incapacité à assurer de trop nombreuses nuits en tant que prostitué m’avaient poussé à opter pour ce job au salaire dérisoire. Et, là, face à Nixon, dans cette chambre trop blanche, je l’avouais sans hésitation. Attendez… C’était la première fois que je soufflais ça à Nixon… Non ? Je ne savais plus. Tout s’embrouillait à l’intérieur de ma tête. Et, de toute manière, ma pauvreté n’était pas vraiment un secret. Nixon devait sans doute le savoir depuis le premier jour de notre rencontre lorsque j’avais cherché à négocier pour gagner un peu plus d’argent en posant en privé pour lui. Peut-être qu’il savait ou peut-être qu’il supposait juste sans réellement savoir et là je venais de lui offrir la confirmation. Qu’importait. Ça ne comptait pas. Je balayais cette histoire d’argent parce que je n’avais aucune envie de m’attarder sur mon statut financier. Non. Je ne voulais pas me mettre à angoisse sur ce sujet parce que, putain, comment est-ce que j’allais faire pour travailler avec mes béquilles ? Mon patron n’accepterait jamais de me laisser travailler dans cet état. Et… Non. Je ne devais pas y penser sinon j’allais faire une crise d’angoisse là tout de suite et ce n’était pas le moment. Je préférais relever les yeux pour les poser sur le visage de Nixon alors que j’ouvrais de nouveau la bouche comme si je n’étais pas fichu de me contrôler ce matin. « T’sais… J’suis vraiment heureux d’avoir osé poser dans ce cours malgré mon angoisse… J’serais passé à côté de toi sinon et je… J’ose plus imaginer ma vie sans toi… » Un sourire nostalgique naissait sur mes lèvres alors que ces mots venaient encore une fois du plus profond de mon cœur. Il fallait que je me taise. Parce que là c’était la merde. Je me livrais de plus en plus. Je ne faisais plus attention à rien et j’étais trop stupide. J’étais carrément en train de m’engager à vie dans une relation sans étiquette avec Nixon… Non ? Si… Sans doute… Et, même si ça faisait pulser agréablement mon cœur, je sentais la panique battre au fond de mon ventre. Il fallait que j’agisse. Je venais déposer un rapide smack sur les lèvres de Nixon avant de me dégager de ses bras parce que je n’étais pas bien installé. Non, j’étais trop loin de lui et ça ne me convenait pas. J’avais bien compris que nous ne coucherions pas ensemble. Mais, rien ne m’interdisait de me rapprocher de mon sexy tatoué. Lentement, je calculais le moindre de mes mouvements pour éviter de tomber ou de me faire mal. Néanmoins, quelque chose me soufflait que Nixon était prêt à réagir à toute situation d’urgence. Je savais qu’il ne me quittait pas des yeux. Je savais qu’il serait capable de réagir au quart de tour si quelque chose tournait mal. Alors ça me rassurait et je finissais par bouger déposant mes jambes sur les genoux de Nixon avant de me faire glisser au plus proche de lui. Je me blottissais contre le jeune homme déposant ma tête sur son épaule et je fermais les yeux. Mon sexy tatoué avait déposé une main rassurante dans mon dos. Son autre main remontait le long de mon mollet gauche me rappelant la première fois qu’il m’avait touché dans son studio. Cet effleurement tout premier qui avait été le début de ma chute pour lui, le début de notre relation si merveilleuse dont je ne voulais plus me passer. Il s’arrêtait à mon genou prenant bien soin de ne pas caresser plus haut comme s’il savait ce qui pouvait arriver s’il osait s’y aventurer. Ça me tirait un sourire amusé qui se transformait bien vite en un sourire de bonheur lorsque sa main se déposait sur ma hanche. Je soupirais de satisfaction. J’étais tellement bien là. En sécurité. Vivant. Aimé… Franchement, j’aurais pu m’endormir en quelques minutes. J’aurais pu sombrer dans un sommeil agréable me foutant de bloquer Nixon sur ce lit pendant des heures entières… Ou peut-être que je ne m’en fichais pas tellement et c’était pour cela que je ne parvenais pas à lâcher prise et à m’endormir. Non… À la place c’était autre chose qui lâchait prise. Mon contrôle total s’évaporait et je laissais un ‘je t’aime’ glisser entre mes lèvres. Un ‘je t’aime’ si naturel et si empli d’amour. Trois. Deux. Un. Je me rendais compte de ce que je venais de souffler et je me redressais trop vite gémissant sous la douleur. Heureusement que je n’avais pas bougé mes jambes parce que ça aurait été pire. Je décollais ma tête de son torse alors que j’avais si mal au ventre sous la panique qui accélérait mon cœur. Je ne pouvais plus bouger. La voix de Nixon me tirait de cette panique avec ce ‘doucement’ qui me poussait à me rendre compte que je respirais comme un dingue. Je tentais de réguler ma respiration ne prêtant pas attention aux mots de Nixon. Je faisais juste attention à son regard si rassurant. Je tentais de me concentrer sur les mains de mon sexy tatoué qui ne m’avaient pas quitté. Il y en avait toujours une dans mon dos et… Et l’autre s’était posée sur ma cuisse. Je fermais les yeux un instant parvenant à mieux réguler ma respiration affolée. La plaisanterie de Nix’ ne me tira même pas un sourire. Et, putain, je ne parvenais plus à parler babillant des pronoms sans le moindre sens. L’artiste ne tarda pas à reprendre la parole et je me concentrais alors qu’il me demandait si c’était sorti sans filtre, n’est-ce pas ? Putain. Il me connaissait si bien. J’acquiesçais même si je savais qu’il n’attendait guère de retour de ma part parce qu’il continuait me questionnant encore une fois. J’avais peur de ce que ça pouvait représenter, il se trompait ? Non. Bien sûr que non. Il ne se trompait pas. Et, je secouais négativement la tête pour le lui prouver. Damn it… Depuis combien de temps Nixon savait-il aussi bien lire en moi ? La question cognait et s’effaçait bien vite puisque le jeune homme déposait son front contre le mien me murmurant qu’il n’allait pas s’enfuir pour ce que j’avais dit, qu’il n’avait pas peur d’aimer et d’être aimé. Mais, il me laissait décider si je voulais revenir en arrière et effacer ce que j’avais dit. Seulement si je voulais continuer… J’allais lever des yeux paniqués vers lui lorsque le silence se fit entendre. Mais, je n’eus pas à le faire puisque les lèvres de Nixon se déposait sur les miennes. Un baiser lent. Un baiser court. Mais, bordel, un baiser si réparateur. Il plantait son regard dans le mien avant de me dire qu’il n’avait pas la moindre hésitation à faire le chemin avec moi. Et… SHIT ! Est-ce que j’étais toujours vivant ? Est-ce que mon cœur battait encore ? Je ne savais plus. Mais, je savais exactement ce que je voulais lui répondre. Alors, sans la moindre hésitation, mes prunelles plantées dans celles de Nixon, je murmurais « Je… J’veux pas revenir en arrière… Je… J’pas envie d’effacer ça… Je… J’le pense vraiment… Je… J’le ressens réellement… Je… Je t’aime Nix’… » Ouais, j’étais sûr et certain de moi. Tellement que je pouvais répéter de nouveau ces trois petits mots. Je baissais les yeux sachant parfaitement ce que je devais dire après, sachant parfaitement les mots qui devaient glisser entre mes lèvres par la suite parce qu’il y en avait un autre… Parce qu’il y avait Lukas… Là quelque part… Dans mon cœur. Et, j’avais tellement peur de le dire. J’avais tellement peur de faire fuir Nixon… J’avais tellement peur de le perdre. Alors, comme si j’avais peur de le voir disparaître si je lui en laissais la possibilité, je revenais me caler contre lui déposant de nouveau ma tête sur son épaule. Je triturais son haut entre mes doigts tandis que l’inquiétude filtrait entre mes lèvres.
Je… Est-ce… Est-ce que… Malgré ça… On… Ce… Ç’peut continuer comme avant ? Je… J’ai… J’suis pas encore prêt à me poser… Dans… Dans quelque chose de sérieux… D’exclusif… S’il te plaît…
Oops… Le cri de joie venait de glisser entre mes lèvres trop soudainement et de façon foutrement trop imprévisible que je risquais de faire sursauter Nixon qui se trouvait à mes côtés. Mes yeux se mettaient à briller de ce bonheur qui m’habitait pendant quelques instants et qui me poussait à sourire comme un abruti. Je ressemblais sans doute à un gamin qui venait de gagner le grand prix dans un quelconque concours. Je ressemblais à ce gamin qui n’était pas fichu de cacher sa joie aussi puissante que réelle. Je la laissais simplement exploser au grand jour dans cette chambre sans même m’en rendre compte, sans même me soucier de ce qu’on pourrait penser de ma réaction. Alors, ouais, sur l’instant, je ressemblais sans doute à un gamin qui n’était pas fichu de se contrôler. Je n’étais plus qu’un gosse qui n’était plus capable de prendre le dessus sur le tourbillon d’émotions qui pulsait à l’intérieur de mon être. Et, putain, ça me changeait tellement. Il était si rare que je me laisse autant aller. Il était tellement rare que je laisse mes émotions prendre le dessus au point de me pousser à crier sans le moindre préambule. De temps en temps, il arrivait que mes émotions prennent le dessus bien sûr. Je n’étais pas un robot capable d’opérer une supervision constante sur tout ce qui se passait en moi. Je n’étais guère un robot qui ne ressentait rien et qui ne confiait pas certains de ses sentiments, certaines de ses pensées. Non… Moi j’étais juste un réel maniaque de ce contrôle qui tentait toujours de brider les émotions un peu trop puissantes qui pouvaient changer toute la donne. J’essayais sans cesse de peser le moindre de mes propos et la moindre de mes réactions afin d’envisager le futur d’une discussion ou même d’une relation… Néanmoins, il y avait tant de fois où ces tentatives de contrôle me filaient entre les doigts. Lorsque mon trouble Borderline prenait le dessus, les émotions me submergeaient si violemment qu’elles finissaient trop souvent par prendre le dessus sur tout le reste. Elles devenaient maîtresses de chaque instant et je n’étais plus que la victime de ces putains de crises que j’avais tant de mal à gérer. Ce n’était guère les seuls moments où mes émotions m’échappaient. Elles m’échappaient dès lors que le flirt commençait, que la température augmentait et que le sexe entrait en jeu – sauf quand je travaillais en tant que prostitué bien sûr, mais là ce n’était pas les mêmes limites, ce n’était pas la même histoire… Non… Mes émotions m’échappaient lorsque ces choses se déroulaient pour le plaisir… Alors oui, j’étais parfaitement capable de m’amuser à flirter avec les personnes autour de moi sans que cela n’ait la moindre conséquence. Mais, je savais qu’en m’engageant sur ce chemin, je prenais toujours le risque de dérailler. Il y avait toujours la possibilité pour que mon désir et mes envies m’échappent à tel point que je ne serais plus maître de rien. Il y avait toujours la possibilité pour que les sensations soient multipliées à tel point que je me retrouvais incapable de m’échapper et que je risquais de m’attacher… Un peu trop fort. Il suffisait de trouver le bon partenaire qui pouvait tout renverser… La personne qui avait le pouvoir de me faire dérailler… Une personne comme Lukas… Une personne comme Nixon… Oh putain, ouais Nixon… Avec mon sexy tatoué, mes émotions m’échappaient encore plus. Le contrôle s’effaçait au fil des mois. En présence du jeune homme, je me sentais toujours plus humain parce que j’avais l’impression de pouvoir être moi. Entièrement. Totalement. Sans le moindre secret. Sans le moindre voile. Sans le moindre contrôle. Avec lui, je n’étais jamais jugé. J’étais toujours bien accueilli. J’étais sans cesse comblé. Et damn… Peut-être même oserais-je dire que j’étais réellement aimé pour ce que j’étais quand bien même j’étais un être trop complexe composé de milliards de cicatrices si douloureuses… Nixon ne me regardait pas comme les autres. Il ne cherchait pas à me prendre avec des pincettes. Il était juste vrai avec moi. Il était juste lui avec moi. Et j’étais juste moi avec lui. Oh… Attendez… Cette réaction de pur et soudain bonheur était peut-être donc parfaitement normale et prévisible au final parce que Nixon était là. Il n’y avait que lui dans cette chambre avec moi et je savais qu’à ses côtés, je pouvais relâcher cette pression constante de contrôle qui cognait sur mes épaules. Je savais que cette réaction peut-être un poil excessive pour une foutue pizza se contenterait de faire sourire l’artiste qui se trouvait à mes côtés. Je savais qu’il ne me jugerait pas pour ça, qu’il ne m’aimerait pas moins parce que je me comportais un peu trop comme un gosse foutrement heureux. Alors, ouais, j’avais laissé ce cri m’échapper sans ressentir la moindre peur. Ce cri qui venait du fin fond de mon cœur alors que mon sexy tatoué m’accordait cette pizza tant souhaitée et tout juste demandée. J’étais si heureux de voir que mon idée de nourriture n’était pas renvoyée au loin. J’étais ravi de voir que ma demande était acceptée sans même que cela ne pose de problème. Je gagnais au moins ça aujourd’hui dans cette cage blanche qui me faisait si mal au ventre et qui allait me garder prisonnier pendant de trop nombreux jours. Coincé dans ces lieux, je ne pouvais guère effacer ce métro qui continuait de se dessiner à l’intérieur de mon esprit dès lors que mes yeux se fermaient. Je ne pouvais pas effacer ce wagon empli d’horreur qui se plaisait à venir cogner dans ma tête pour me donner si mal encore, pour me faire si peur. Malgré les soins prodigués dans cet hôpital, je ne pouvais même pas effacer les blessures dont j’avais été victime. Elles étaient là. Je le savais. Je les sentais. Tout comme je sentais cette angoisse dévorante qui refusait de quitter mon être malgré tous mes efforts. Et, putain, coincé dans cette chambre, coincé dans cet état, je ne pouvais même pas obtenir de Nixon qu’il me fasse l’amour même si j’en mourrais d’envie… Enfin… Je n’étais pas franchement à plaindre en vérité. J’obtenais déjà beaucoup. J’avais droit à la présence de mon sexy tatoué au sein de ma chambre ce matin. Un sexy tatoué qui reviendrait me voir souvent tant que je serais coincé sur ce putain de lit. Un sexy tatoué qui reviendrait d’ailleurs dès ce soir afin de m’apporter des vêtements qui, avec un peu de chance, porteraient son parfum. Il reviendrait ce soir avec cette pizza que je venais de lui quémander. Oh ouais, ce soir, je pourrais manger une pizza et cela me rendait si heureux que j’avais crier ce ‘youpi’ comme un gosse. Il en fallait vraiment peu pour me faire plaisir en cet instant… Après ce violent accident qui aurait pu me coûter la vie. Ce ne fut que quelques minutes après mon cri que je me rendais compte de ma voix foutrement trop élevée, je m’empressais alors de porter mes mains à mes lèvres tout en faisant une tête de gosse un peu trop coupable. Oops… Mes mains se baissaient lentement alors que je mordillais ma lèvre avant de reprendre la parole pour expliquer ma réaction peut-être un peu trop vive pour un simple repas.
Je… Désolé… Je… J’sais plus si je te l’ai dit que j’suis Italien… Enfin… Ma maman était Italienne et je… J’ai passé une bonne partie de ma vie en Italie alors je… Euh… J’sais pas… Les pizzas c’est rassurant… Ce… C’est comme si… Comme si je retournais un peu chez moi quand… Quand tout allait bien…
J’haussais doucement les épaules en mâchouillant lentement ma lèvre comme si cela pouvait m’aider à me calmer d’autant me dévoiler… Enfin… Non. J’étais stupide. Je n’avais aucune putain de raison de m’angoisser parce que je ne me dévoilais pas tant que ça en fait. Dans la réalité, les choses étaient si différentes de l’intérieur de ma tête. En soufflant ce ‘quand tout allait bien’, je savais que je parlais de cette vie avant que Maman ne soit assassinée sous mes yeux. Je parlais de cette vie avant que mon père ne se mette à me battre tous les jours. Je parlais de cette vie lorsque je ne faisais pas encore parti de la mafia et que je n’étais pas ce prostitué forcé d’obéir ou de mourir. Je parlais de cette vie quand je n’avais pas encore tué un homme… Ouais, en soufflant ce ‘quand tout allait bien’, je remontais des années en arrière à l’intérieur de ma tête. Néanmoins, dans la réalité, Nixon allait simplement penser que ce ‘quand tout allait bien’ signifiait simplement que c’était avant l’accident, avant que je ne me retrouve coincé dans cette chambre d’hôpital en si mauvais état physique et mental. Et, franchement, je n’allais pas chercher à lui ouvrir de nouvelles portes. Non. Pas ce matin. Pas ces portes. Je n’étais pas prêt. Pas encore. Secouant la tête, je ne voulais plus penser à toutes ces histoires et je finissais par m’asseoir dans ce lit où j’avais déjà passé trop d’heures couché. Ce lit que je n’allais pas avoir le droit de quitter avant plusieurs jours. Ce lit dont je ne pourrais m’échapper qu’en acceptant d’avancer avec des béquilles. Ce putain de lit que je détestais tant. Est-ce que je détestais autant ce lit si Nixon y passait la nuit ? Tout contre moi ? Sans doute pas non… Je crois même que j’aimerais bien ça. J’aimerai tellement que le jeune homme puisse rester à mes côtés ce soir en ramenant la pizza. J’aimerai tellement qu’il puisse juste être là à mes côtés toute la nuit. Putain, j’en avais tellement besoin. Néanmoins, il n’en aurait sans doute pas le droit. Le personnel de l’hôpital ne le laisserait pas faire. Et, de toute façon, je ne pouvais pas lui demander ça. Je ne pouvais pas quémander autant de la part du jeune homme. Nous serions serrés dans ce lit. Il ne dormirait sans doute pas bien vu les cauchemars violents qui m’agitaient. Et, je ne voulais pas ça. Je ne voulais pas être responsable de son mal-être. Non. Tant pis pour moi… Il faudrait juste que j’apprenne à tolérer ce lit en solitaire pendant quelques jours. Mais, ce n’était pas le moment d’y penser. Non. Pas tout de suite. Il y avait plus important. Je m’étais assis dans ce lit avec le fichu désir d’embrasser mon sexy tatoué. Néanmoins, au lieu de me lancer dans cet acte, je préférais juste confier mon bonheur de l’avoir ici dans cette chambre. Il apaisait tellement mon cœur. Il calmait si réellement mon angoisse. Et, putain, ça faisait tellement de bien de ne pas être seul après une nuit si catastrophe, après un événement si bouleversant. Ça faisait juste du bien de l’avoir à mes côtés encore plus lorsque Nix’ franchissait lui-même les derniers centimètres nous séparant afin de m’offrir ce baiser dont j’avais réellement besoin dans le fond. Ce baiser qui me donnait encore plus envie de crier ‘youpi’ alors que tout mon corps se réveillait. Enfin ! J’avais l’impression d’être sorti de ce métro et d’être en vie. C’était tellement rassurant. Mon cœur battait plus vite, mais c’était juste délicieux. Aussi délicieux que toutes ces sensations qui tordaient mon bas-ventre. La main de Nixon dans mon cou me faisait vibrer à tel point que je me sentais de nouveau à ma place. Et, bien trop vite, le baiser prenait fin laissant place à une interrogation. Une interrogation fichtrement légitime puisque habituellement je ne me gênais jamais pour m’emparer des lèvres de Nixon. N’importe où. Chez lui. Sur le campus. Dans la rue. Même dans un bar. Je me foutais du monde qui nous entourait. Je me fichais de ce que les gens pourraient dire. Si j’en avais envie, je n’avais aucune raison de me priver de le faire. Je prétendais que mon hésitation venait de cette accident et de ma ressemblance avec ce raton laveur tout brisé. Néanmoins, au fond de mon cœur, je savais que c’était plus profond et que ça venait juste de ma peur de ne pas savoir contrôler tout ça… Tout ce que je ressentais pour Nixon. Et, pour éviter de penser à cette réalité effrayante, je finissais même par agir retirant cette chemise d’hôpital pour dévoiler mon torse blessé à Nixon. Je sortais ma jambe de sous les couvertures comme pour lui prouver que j’étais bel et bien ce raton laveur tout cassé. C’était également une façon de lui montrer l’emplacement de mes blessures et c’était bien non ? Oui, c’était bien parce que je voulais qu’il sache. Parce qu’il serait sans doute celui qui prendrait le plus soin de moi après cette horreur. Parce que c’était chez lui que je finirais en sortant d’ici… La mine inquiète du jeune homme me déplaisait. Je n’aimais pas l’inquiéter… Aussi, je me mettais à babiller des mots forts sur ma peur du métro et surtout sur mon attachement envers lui. Des mots si puissants. Des propos si réels. Et, je finissais par ne plus hésiter à déposer mes lèvres sur celles si tentatrices de Nixon. Avec passion. Avec amour. J’en perdais la tête. Je voulais m’y abandonner. Totalement. Complètement. Ma main remontait sur la cuisse de Nixon alors que je déposais mon front contre le sien faisant entendre mon envie de lui… Une envie à laquelle il refusait de répondre puisqu’il stoppait ma main sifflant des mots qui me faisait mal. Des mots qui, au final, n’avaient aucune raison de me faire souffrir. Ses lèvres me le prouvaient. Ses propos me le confirmaient. Il veillait simplement sur moi. Il ne voulait pas me faire plus de mal. Il ne voulait pas me foutre encore plus en l’air. Et, je comprenais. C’était difficile à accepter tant j’avais envie de lui et tant j’étais prêt à tout pour ça. Mais, je l’acceptais… Ouais… Il le fallait. Je pouvais me contenter de toute cette tendresse qu’il m’offrait en laissant ses lèvres parcourir mon visage. Nix’ avait soufflé qu’un raton laveur ne s’apprivoisait pas et j’avais rétorqué du tac au tac qu’il pouvait tout apprivoiser en rigolant. Son rire se mêlait au mien alors qu’il me confiait qu’il voulait bien essayer. Et, sans même être capable de réellement réfléchir, je demandais soudainement « Attends… On… On est d’accord que c’moi le raton laveur hein ? T’en ramène pas un vrai chez toi ? » Mes sourcils se fronçaient comme ceux d’un gamin qui tentait réellement de réfléchir et d’y voir clair au sein de toute cette situation. Zut, ce n’était pas de ma faute. L’accident m’avait foutu la tête en l’air. La fatigue ne m’aidait clairement pas à réfléchir. Aussi, je balançais ces interrogations alors que j’allais sans doute passer pour un pauvre petit fou. Néanmoins, ce n’était pas vraiment de ma faute. Je n’avais pas pu m’empêcher d’imaginer Nixon en train de ramener un vrai raton laveur chez lui pour tenter de l’apprivoiser. C’était mignon ces bêtes là, mais elles pouvaient vous foutre la frousse aussi et je ne voulais clairement pas cohabiter avec un raton laveur. Puis, zut, de toute façon, ils étaient mieux à l’état sauvage. Ils étaient mieux en liberté et pas fermé dans le studio de Nixon. En revanche, moi je serais bien mieux fermé dans le studio du jeune homme. Je voulais bien être ce raton laveur. Ouais, l’idée me plaisait réellement et j’avais envie de laisser mon sexy tatoué m’apprivoiser comme personne ne l’avait encore jamais fait. Je voulais le laisser tenter de gagner cette partie. Non… Damn, je voulais vraiment le laisser gagner. Je voulais juste fermer les yeux et me laisser embarquer au sein de cette histoire en lui laissant totalement le contrôle. Encore plus alors que Nixon me parlait du kintsugi et de l’or que j’avais plein les veines. Il était si parfait… Il était si tendre… Il était si attentionné. Sa main serrait la mienne sur sa cuisse. Ses lèvres se déposaient sur ma tempe me rassurant. Il m’attirait plus près de lui et les larmes coulaient le long de mes joues parce que, merde, j’étais foutrement touché par ce qu’il venait de dire. J’étais fichtrement épris de ce garçon qui se trouvait à mes côtés. Et, je ne savais pas quoi souffler après une telle déclaration. J’avais tellement de mal à croire en ces mots si doux. J’avais tant de mal à croire que ces mots pouvaient m’être destinés. Moi… Si bancal. Si malade. Si cassé. Je finissais juste par laisser échapper l’interrogation qui cognait si violemment dans mon crâne depuis des semaines. Qu’avais-je fait pour mériter Nixon dans ma vie ? Je me sentais si chanceux. Lorsque Nix’ souffla que j’avais eu assez de cran pour poser nu dans un cours universitaire, un rire passa entre mes lèvres au travers de mes larmes et je rétorquais trop vite.
On peut remercier ma pauvreté alors j’crois…
J’haussais les épaules après ces quelques mots de pure vérité. Parce que ouais, malgré le salaire minable, c’était bel et bien ma pauvreté qui m’avait poussé à détacher l’offre d’emploi du tableau d’affichage. Mon besoin d’argent et mon incapacité à assurer de trop nombreuses nuits en tant que prostitué m’avaient poussé à opter pour ce job au salaire dérisoire. Et, là, face à Nixon, dans cette chambre trop blanche, je l’avouais sans hésitation. Attendez… C’était la première fois que je soufflais ça à Nixon… Non ? Je ne savais plus. Tout s’embrouillait à l’intérieur de ma tête. Et, de toute manière, ma pauvreté n’était pas vraiment un secret. Nixon devait sans doute le savoir depuis le premier jour de notre rencontre lorsque j’avais cherché à négocier pour gagner un peu plus d’argent en posant en privé pour lui. Peut-être qu’il savait ou peut-être qu’il supposait juste sans réellement savoir et là je venais de lui offrir la confirmation. Qu’importait. Ça ne comptait pas. Je balayais cette histoire d’argent parce que je n’avais aucune envie de m’attarder sur mon statut financier. Non. Je ne voulais pas me mettre à angoisse sur ce sujet parce que, putain, comment est-ce que j’allais faire pour travailler avec mes béquilles ? Mon patron n’accepterait jamais de me laisser travailler dans cet état. Et… Non. Je ne devais pas y penser sinon j’allais faire une crise d’angoisse là tout de suite et ce n’était pas le moment. Je préférais relever les yeux pour les poser sur le visage de Nixon alors que j’ouvrais de nouveau la bouche comme si je n’étais pas fichu de me contrôler ce matin. « T’sais… J’suis vraiment heureux d’avoir osé poser dans ce cours malgré mon angoisse… J’serais passé à côté de toi sinon et je… J’ose plus imaginer ma vie sans toi… » Un sourire nostalgique naissait sur mes lèvres alors que ces mots venaient encore une fois du plus profond de mon cœur. Il fallait que je me taise. Parce que là c’était la merde. Je me livrais de plus en plus. Je ne faisais plus attention à rien et j’étais trop stupide. J’étais carrément en train de m’engager à vie dans une relation sans étiquette avec Nixon… Non ? Si… Sans doute… Et, même si ça faisait pulser agréablement mon cœur, je sentais la panique battre au fond de mon ventre. Il fallait que j’agisse. Je venais déposer un rapide smack sur les lèvres de Nixon avant de me dégager de ses bras parce que je n’étais pas bien installé. Non, j’étais trop loin de lui et ça ne me convenait pas. J’avais bien compris que nous ne coucherions pas ensemble. Mais, rien ne m’interdisait de me rapprocher de mon sexy tatoué. Lentement, je calculais le moindre de mes mouvements pour éviter de tomber ou de me faire mal. Néanmoins, quelque chose me soufflait que Nixon était prêt à réagir à toute situation d’urgence. Je savais qu’il ne me quittait pas des yeux. Je savais qu’il serait capable de réagir au quart de tour si quelque chose tournait mal. Alors ça me rassurait et je finissais par bouger déposant mes jambes sur les genoux de Nixon avant de me faire glisser au plus proche de lui. Je me blottissais contre le jeune homme déposant ma tête sur son épaule et je fermais les yeux. Mon sexy tatoué avait déposé une main rassurante dans mon dos. Son autre main remontait le long de mon mollet gauche me rappelant la première fois qu’il m’avait touché dans son studio. Cet effleurement tout premier qui avait été le début de ma chute pour lui, le début de notre relation si merveilleuse dont je ne voulais plus me passer. Il s’arrêtait à mon genou prenant bien soin de ne pas caresser plus haut comme s’il savait ce qui pouvait arriver s’il osait s’y aventurer. Ça me tirait un sourire amusé qui se transformait bien vite en un sourire de bonheur lorsque sa main se déposait sur ma hanche. Je soupirais de satisfaction. J’étais tellement bien là. En sécurité. Vivant. Aimé… Franchement, j’aurais pu m’endormir en quelques minutes. J’aurais pu sombrer dans un sommeil agréable me foutant de bloquer Nixon sur ce lit pendant des heures entières… Ou peut-être que je ne m’en fichais pas tellement et c’était pour cela que je ne parvenais pas à lâcher prise et à m’endormir. Non… À la place c’était autre chose qui lâchait prise. Mon contrôle total s’évaporait et je laissais un ‘je t’aime’ glisser entre mes lèvres. Un ‘je t’aime’ si naturel et si empli d’amour. Trois. Deux. Un. Je me rendais compte de ce que je venais de souffler et je me redressais trop vite gémissant sous la douleur. Heureusement que je n’avais pas bougé mes jambes parce que ça aurait été pire. Je décollais ma tête de son torse alors que j’avais si mal au ventre sous la panique qui accélérait mon cœur. Je ne pouvais plus bouger. La voix de Nixon me tirait de cette panique avec ce ‘doucement’ qui me poussait à me rendre compte que je respirais comme un dingue. Je tentais de réguler ma respiration ne prêtant pas attention aux mots de Nixon. Je faisais juste attention à son regard si rassurant. Je tentais de me concentrer sur les mains de mon sexy tatoué qui ne m’avaient pas quitté. Il y en avait toujours une dans mon dos et… Et l’autre s’était posée sur ma cuisse. Je fermais les yeux un instant parvenant à mieux réguler ma respiration affolée. La plaisanterie de Nix’ ne me tira même pas un sourire. Et, putain, je ne parvenais plus à parler babillant des pronoms sans le moindre sens. L’artiste ne tarda pas à reprendre la parole et je me concentrais alors qu’il me demandait si c’était sorti sans filtre, n’est-ce pas ? Putain. Il me connaissait si bien. J’acquiesçais même si je savais qu’il n’attendait guère de retour de ma part parce qu’il continuait me questionnant encore une fois. J’avais peur de ce que ça pouvait représenter, il se trompait ? Non. Bien sûr que non. Il ne se trompait pas. Et, je secouais négativement la tête pour le lui prouver. Damn it… Depuis combien de temps Nixon savait-il aussi bien lire en moi ? La question cognait et s’effaçait bien vite puisque le jeune homme déposait son front contre le mien me murmurant qu’il n’allait pas s’enfuir pour ce que j’avais dit, qu’il n’avait pas peur d’aimer et d’être aimé. Mais, il me laissait décider si je voulais revenir en arrière et effacer ce que j’avais dit. Seulement si je voulais continuer… J’allais lever des yeux paniqués vers lui lorsque le silence se fit entendre. Mais, je n’eus pas à le faire puisque les lèvres de Nixon se déposait sur les miennes. Un baiser lent. Un baiser court. Mais, bordel, un baiser si réparateur. Il plantait son regard dans le mien avant de me dire qu’il n’avait pas la moindre hésitation à faire le chemin avec moi. Et… SHIT ! Est-ce que j’étais toujours vivant ? Est-ce que mon cœur battait encore ? Je ne savais plus. Mais, je savais exactement ce que je voulais lui répondre. Alors, sans la moindre hésitation, mes prunelles plantées dans celles de Nixon, je murmurais « Je… J’veux pas revenir en arrière… Je… J’pas envie d’effacer ça… Je… J’le pense vraiment… Je… J’le ressens réellement… Je… Je t’aime Nix’… » Ouais, j’étais sûr et certain de moi. Tellement que je pouvais répéter de nouveau ces trois petits mots. Je baissais les yeux sachant parfaitement ce que je devais dire après, sachant parfaitement les mots qui devaient glisser entre mes lèvres par la suite parce qu’il y en avait un autre… Parce qu’il y avait Lukas… Là quelque part… Dans mon cœur. Et, j’avais tellement peur de le dire. J’avais tellement peur de faire fuir Nixon… J’avais tellement peur de le perdre. Alors, comme si j’avais peur de le voir disparaître si je lui en laissais la possibilité, je revenais me caler contre lui déposant de nouveau ma tête sur son épaule. Je triturais son haut entre mes doigts tandis que l’inquiétude filtrait entre mes lèvres.
Je… Est-ce… Est-ce que… Malgré ça… On… Ce… Ç’peut continuer comme avant ? Je… J’ai… J’suis pas encore prêt à me poser… Dans… Dans quelque chose de sérieux… D’exclusif… S’il te plaît…
@Nixon Sherwood
(Neal T. Hood-Spritz)