Un sourire vaut mieux que mille mots [Tamsin]

C'est souvent les yeux embués et les joues humides que je quitte cet endroit. Aujourd'hui n'allait certainement pas être différent. Ces enfants m'apportaient un bonheur infini. Certains me rappelaient ma petite sœur, forcément, et certains me rappelaient même moi à leur âge. J'ai ramené Groot, aujourd'hui. Groot ? C'est ma guitare. Ils sont toujours fous de joie lorsque je la ramène. Je marche doucement entre les grands murs du Massachussetts General Hospital. La vérité, c'est que je déteste les hôpitaux. J'y ai passé trop de temps en compagnie de ma sœur, j'y ai passé trop de temps en compagnie de mon père, et j'ai failli y passer, tout simplement. Les murs sont trop blancs, il n'y aucune gaité. Les portes sont trop grises, y'a pas plus maussade. Heureusement que j'arrive rapidement devant celle qui me sépare de ces petits anges. Je pousse la porte, et tout devient tout de suite bien plus coloré. Les enfants, par dizaine, se jettent sur moi. Je les enlace, les embrasse, les décoiffe pour les embêter. Après quelques minutes, je m'installe sur un tabouret beaucoup trop petit pour moi, puis je leur chante une chanson. Une de leur préférée, une qu'ils m'ont quémandé. Mon regard se pose sur eux, j'essaye de ne pas me laisser submerger par l'émotion. Ma sœur me manque, l'après-fête est vraiment le pire moment de l'année. Après quelques applaudissements, je souris et me lève, puis aperçois une silhouette à travers le hublot. Je me précipite pour ouvrir la porte avant qu'elle n'ait le temps de prendre un autre couloir. "Tam ?" Attention captée. Je souris lorsqu'elle se retourne vers moi.

Ce qu'on oublie pas, dans les hôpitaux, c'est l'odeur. Cette odeur, c'est partout la même. Que les murs soient blancs, colorés, qu'ils soient décorés, c'est toujours la même odeur. Pourtant, tristement, on s'y habitue. Si j'ai décidé d'être bénévole avec les enfants malades, c'est que je l'ai trop été. J'ai trop été présente ici pour me moquer de ce qu'ils pouvaient ressentir, surtout en période de fête, quand les plus chanceux ont le droit de sortir, d'aller passer du temps en famille, que d'autres sont bloqués à passer les fêtes de fin d'année sur un fond blanc immaculé.

On est nombreux à être bénévoles parce qu'on a connu ça, plus jeune. Je le connais encore par moment, à venir faire des examens, mais je reste discrète. C'est histoire de vérifier si tout vas bien, un examen de routine. Je venais de sortir du cabinet après avoir fait quelques tests et je prenais le chemin de l'extérieur. J'étais arrivée plus tôt pour venir voir quelques enfants (mes favoris, je l'avoue) et je me dirigeais vers la sortie. "Tam ?" je me retourne et le regarde en souriant. "Jeff !" approche de l'homme, le prend dans ses bras en guise de bonjour. Je me souviens quand on était bénévoles ensemble, on s'amusait bien. L'ambiance était bizarrement plus légère quand il était dans les parages. Il savait y faire avec les enfants, alors que moi je me débrouillais à peine. "Qu'est-ce que tu fais là ?" question stupide, je sais ce qu'il faisait, forcément, il était venu pour les enfants. Je rigole débilement à ma question et secoue la tête, "Ouais non j'ai rien dis !" transformons la question, plutôt. "Tu fais quoi après ?" on pourrait sortir, prendre un verre, aller s'amuser, trouver quelque chose de plus léger que l'hôpital.

Je suis devenu bénévole dans cet hôpital seulement quelques mois après mon arrivée aux États-Unis. Depuis la naissance de ma sœur, j'ai appris l'importance de donner du temps aux autres. Surtout ceux qui en ont besoin. Je n'ai pas d'handicap, pas de maladie incurable.. mais j'ai pas eu une enfance facile. Quelques années que je viens dans cet hôpital au moins une fois par mois, et le moins que l'on puisse dire c'est que j'ai fais des rencontres très intéressantes. Pas seulement chez les enfants, mais également parmi les bénévoles. Et la plus marquante d'entre elles se retrouve maintenant à me serrer dans ses bras. "Qu'est-ce que tu fais là ?" J'ouvre la bouche pour lui répondre, mais elle m'interrompt avant même qu'un son ne puisse en sortir. "Ouais non j'ai rien dis !" C'est sûr que c'est un peu obvious. Je viens rarement pour un rhume, puis j'ai ma guitare dans la main et c'est pas vraiment la kermesse ici. "Tu fais quoi après ?" J'hausse les sourcils légèrement. Je ne m'attendais pas vraiment à ce qu'elle me demande ça. C'est vrai qu'on a l'habitude de se côtoyer ici, mais notre relation n'a jamais véritablement dépasser les murs blancs de cet établissement. "Hmm, laisse moi regarder.." Je sors mon portable, fais genre de regarder mon agenda. "T'as de la chance, rien de prévu." Je relève les yeux vers elle, souris brièvement. "Mais d'abord." Je lève ma guitare. "Tu viens chanter un duo avec moi. Et si tu refuses, j'balance aux enfants qui sont tes favoris." Un regard plein de malice dans les yeux, je souris en coin.

Il a toujours été adorable avec les enfants, toujours avec les autres bénévoles aussi. Pour être franche, je suis pas certaine de pouvoir lui citer un seul défaut. Il arrive même à être drôle, intriguant. J'avoue que parfois, je le trouvais plutôt même charmant. Il a jamais rien tenté, c'est dommage, on aurait potentiellement pu explorer de ce côté. "Hmm, laisse moi regarder.." Je le regarde sortir son portable, et j'ai un sourire en coin. Ma tête approche, essaie de voir par dessus l'écran. "T'as de la chance, rien de prévu." Je relève la tête, grand sourire aux lèvres. Parfait, ça m'ajoute dans l'agenda alors. "Mais d'abord. Tu viens chanter un duo avec moi. Et si tu refuses, j'balance aux enfants qui sont tes favoris." Je le regarde, explose de rire et secoue la tête. Impossible. "Déjà, tu sais pas qui sont mes favoris parce que j'les aime tous !" sauf deux-trois, les plus relous d'entre eux. J'y peux pas grand chose au final si les parents ont loupés l'éducation, malade ou pas, ça se travaille un enfant qui est impoli et mal élevé. "Et ensuite, vraiment, t'a pas envie que je chante." grimace, "Je sais vraiment pas chanter." c'est un talent réel que j'aurais adoré avoir, mais je m'en sors mieux à faire la cuisine qu'à aligner quelques vocalises. "Mais j'serais ravie de t'écouter !" lui offre un grand sourire, probablement le plus beau jusqu'à maintenant.

Dire que Tamsin ne m'attirait pas serait mentir. Pour être totalement franc, j'avais craqué sur elle la première fois que mon regard s'était posé sur ses yeux noisettes. La belle brune me troublait et j'avais mis quelques temps avant d'oser lui adresser la parole pour la première fois. Malgré toutes nos discussions et le temps passé ensemble, je n'avais pourtant jamais rien tenté. Faut dire qu'entre nous, ça n'avait jamais été ni l'endroit ni le moment. Je n'avais jamais passé la moindre minute avec elle en dehors d'ici. Difficile de laisser un jeu dangereux s'installer en plein milieu d'enfants malades. Et qu'on se le dise, l'hôpital est l'endroit le moins sexy de Boston. Je range mon portable lorsque je vois qu'elle tente d'y jeter un coup d’œil. Mon agenda est vide, c'est d'une tristesse. J'essaye de marchander un petit duo avec elle, mais ça ne prend pas. "Déjà, tu sais pas qui sont mes favoris parce que j'les aime tous !" Je ris légèrement. "T'as jamais su me mentir, Tam." C'est pas aujourd'hui qu'elle aura du succès. "Et ensuite, vraiment, t'a pas envie que je chante. Je sais vraiment pas chanter." Je fais une petite moue. Mais si c'est pour le bien de mes oreilles, et de celles des enfants, alors soit. "Mais j'serais ravie de t'écouter !" Arque un sourcil, souris légèrement. "Hmm.." Je reste dubitatif. "Très bien.." Je la regarde de bas en haut. "Mais tu me promet de me chanter quelques notes un autre jour, j'ai envie d'entendre le massacre." Je me mord la lèvre, souris. "Viens" disais-je par la suite, prenant sa main pour l'attirer dans la salle avec moi. "Tout le monde ! Mademoiselle Tamsin Watts !" Lançais-je, présentant l'américaine comme si c'était la star du moment.

"T'as jamais su me mentir, Tam." Parce que j'y met pas forcément d'efforts, c'est pas des choses importantes, ça. Par contre, complète vérité quant à ma capacité de chanter. Vraiment. Je pense que c'est pas un don, d'avoir ma voix. Je m'en plains pas quand on parle, mais quand on chante, c'est autre chose. J'ai autre fois été une enfant qui rêvait d'être une princesse, puis une chanteuse, comme la plupart des petites filles de la planète. "Hmm.. Très bien.." Il vient de me mater, là ? "Mais tu me promet de me chanter quelques notes un autre jour, j'ai envie d'entendre le massacre." souris, hoche la tête. "Viens" Je le laisse attraper ma main, le suit jusqu'à la salle avec lui. Je m'y attendais pas particulièrement, mais il a un show à tenir, apparemment. "Tout le monde ! Mademoiselle Tamsin Watts !" fait la révérence en riant, forcément la plupart savent déjà qui je suis, mais jouer le jeu, c'est toujours amusant. Je suis étonnée qu'il connaisse mon nom de famille, cela dit. Je pensais pas qu'il en savait autant. "J'ai entendu dire que Jeff savait chanter.." grimace un peu, remet en cause le talent de l'homme, "du coup j'me suis dis que j'allais venir voir !" s'assoit parmis les enfants, regarde avec des grands yeux. J'attends, pas les plus belles notes, pas de te féliciter, non, j'attends comme une enfant que tu tombe, que tu te casse un peu la figure, que j'en rigole.

J'étais content de passer un moment avec elle en dehors de l'hôpital, il est vrai. Mais j'avais promis aux enfants une dernière chanson, et j'étais un homme de parole. Tamsin hocha la tête, acceptant ma proposition. Si elle pensait que j'allais oublier un jour, elle se mettait le doigt dans l’œil. J'avais hâte de voir la belle Tamsin perdre tout son charme en lançant quelques notes de travers. Ou peut-être que ça allait avoir l'effet inverse, qui sait ? J'entraine la jeune femme dans la salle puis fais les introductions. Évidemment, tout le monde l'a connait déjà. "J'ai entendu dire que Jeff savait chanter.. du coup j'me suis dis que j'allais venir voir !" Je la regarde prendre place, sourire aux lèvres. "Merci à Tamsin, qui est une femme très occupée on le sait tous." Je lui fais un clin d’œil puis je m'installe une nouvelle fois sur le tabouret trop petit. "Bien.. Qui veut écouter une chanson sur l'amour ?" La plupart des enfants se mirent à huer et je lâcha un petit rire. "Parfait, car ce n'est pas ce que j'avais prévu." Je met la guitare, Groot, sur mes genoux puis commence quelques accords avant de chanter pour accompagner la mélodie. Mon regard se pose souvent, un peu trop souvent, sur Tamsin. J'ai pas l'habitude de chanter devant des adultes, c'est vrai. Sa présence me trouble, un peu. La musique se termine, mon chant avec, et je souris sous les applaudissements des enfants. "Pour les autographes, il faudra voir avec mon agent.." dis-je en me redressant et en désignant Tamsin de la main. Je vais voir chaque enfant pour les saluer puis retourne auprès de la belle brune, calant ma guitare dans son étui en cuir. "Prête ?"

J'étais persuadée qu'il avait une copine. Il sait y faire, avec les filles. ça se voit dans ses gestes, ça se voit dans la facilité qu'il a à me regarder, à me sourire. "Merci à Tamsin, qui est une femme très occupée on le sait tous." Je rigole et secoue la tête. J'ai déjà du mal à libérer du temps pour lui offrir une après-midi, bien sûr que je suis occupée. La plus occupée de toutes. "Bien.. Qui veut écouter une chanson sur l'amour ?" Je suis les autres enfants en montrant mon indignation. On est pas venu pour ça, non. Moi en l'occurence, encore moins. Je suis une enfant, je guette le faux-pas, je le surveille. "Parfait, car ce n'est pas ce que j'avais prévu." Je souris en l'écoutant, imitant les autres enfants, attrapant quelques mains pour bouger un peu avec eux. "Pour les autographes, il faudra voir avec mon agent.." je le regarde, choquée, et m'exfiltre rapidement de la bande des trois pommes pour aller plus près de lui. "Prête ?" hausse un sourcils, "bien sûr ! c'est toi la diva qui se fait désirer, ici." souris en coin, le regardant ranger son instrument, roulant des yeux, faisant l'impatiente. Je taquine, évidemment. Une fois tous les deux sortis, je le regarde, lance mon plus beau sourire, "bon ! tu m'emmène où ?" oui, toi, parce que même si c'est elle qui a proposé, elle avait pas réellement d'idée. Elle avait besoin de changer d'air et disons que Jeff, lui, était sur le chemin.

Ca me fait tout drôle de chanter devant Tamsin. On se connait depuis quelques temps déjà, et pourtant je ne crois pas qu'elle m'ait déjà entendu. J'ai pris l'habitude de pousser la chansonnette devant des enfants ou devant des inconnus. C'était autre chose, c'était bien aussi. Et je dois avouer que, finalement, je n'étais pas si stressé que cela. Le petit spectacle est terminé, je dis au revoir aux enfants puis retourne auprès de la jeune femme. "Bien sûr ! c'est toi la diva qui se fait désirer, ici." Je souris, puis fais mine de balancer mes longs cheveux invisibles en arrière. "C'est vrai que je suis une diva." Je range ma guitare, remet ma veste, sous l'œil impatient de Tamsin qui me tire un sourire. "Bon ! tu m'emmène où ?" Réfléchis un instant, puis quitte la salle avec un dernier lancé de main vers les enfants. "J'te paye un verre ?" J'avance dans les couloirs à ses côtés. "Et quand je dis un, c'est évidemment plus." Je la regarde avec un léger sourire. Notre première fois hors de l'hôpital. C'était un grand pas minuscule pour nous. "J'ai envie de savoir ce qui se cache derrière ce jolie minois." Car au final, je n'en savais que très peu sur elle. "Et ne me dis pas qu'il n'y a rien d'intéressant, car c'est impossible." J'en sais peu, mais suffisamment. Quelques minutes de marche, de route, et nous voilà devant le bar.

Une vraie diva celui-là, ça m'étonne même pas. Les artistes, tous des incompris de toute façon. Il n'en serait qu'un de plus sur la liste. "C'est vrai que je suis une diva." Je le regarde faire et rigole en secouant la tête, le regardant faire, attendant qu'il termine. "J'te paye un verre ?" hoche la tête, ravie. On dit jamais non quand c'est gratuit, j'ai même entendu dire que c'était meilleur. "Et quand je dis un, c'est évidemment plus." L'hôpital commence lentement à faire parti du paysage derrière nous. "Plus ? C'est parfait, ça m'va !" encore une fois, j'aime mon indépendance, j'aime savoir que je suis au contrôle, mais se faire inviter, c'est quand même pas si mauvais. "J'ai envie de savoir ce qui se cache derrière ce jolie minois." secoue la tête, "Et ne me dis pas qu'il n'y a rien d'intéressant, car c'est impossible." il essaie de lire dans mes pensées, maintenant ? "J'dirais surtout que ça sera très court !" pas grand chose à dire, on a vite fait le tour. Mes études, ma vie, ma famille, le tout est en réalité assez vide, il se passe plus grand chose dans ma vie et je parle jamais de sentiment, donc on aura mieux fait de retourner l'attention sur toi. Arrivés devant le bar, je souris, "J'espère qu'ils ont un billard, j'suis super forte !" faux, j'ai remporté quelque fois, plus par chance et parce que la partie adverse était bourré que par réel talent, en vrai. "et j'ai hâte de te battre." souris en coin, la tamsin est joueuse, par définition. Surtout quand l'homme est physiquement plaisant.