happy new year, dumbass. (ballwood ♥)

Tu parles plus vite que tu réfléchis, mauvais point sans doute. Et pourtant, tu t’engouffres dans ton dressing, disparaissant de son champ de vision comme si ça te faisait rien, comme si ça te passait au-dessus, alors même que t’as rarement été si tendue. Ta valise étalée au sol, t’attrapes ci et là quelques vêtements que tu disposes à l’intérieur avec un manque de délicatesse flagrant. Lorsqu’il te rejoint dans la pièce, d’abord, tu ne daignes même pas le regarder. A ses paroles, tu souffles d’agacement. Tu te redresses alors pour planter ton regard dans le sien, l’air sévère. « On dirait bien que c’est comme ça que je te vois. » lâches-tu en serrant ta mâchoire. Au moment où il t’avoue qu’il aurait préféré mourir que te remplacer, tu ris jaune. « Peut-être que c’est ce qui aurait dû arriver. » Tu parles, mais tu n’en penses rien. D’ailleurs, en réfléchissant à ce que tu viens de dire, ton cœur se resserre et tu grimaces. Pourquoi t’as dit ça, comme si t’y pensais réellement. « Excuse-moi, c’est pas ce que je voulais dire… » que tu soupires en détournant le regard. Tu restes plantée là, au milieu de la pièce, un instant, à tenter de réorganiser tes idées mais rien n’y fait…

Ne voulant pas que cette conversation très animée ne s'envenime vraiment, je préfère suivre ma fiancée jusqu'au dressing. Et j'essaie vainement de la retenir, de la faire comprendre que je ne compte pas filer à Bali sans elle... Malheureusement la jeune femme n'en démordait pas et là elle prononçait les mots qui font très mal. En les entendant, je sens comme une lame me transpercer le cœur et sur le coup, j'essaie de faire comme si je n'avais rien entendu mais franchement c'est difficile... Je comprends qu'elle soit super en colère à cause de mon retour, de mon départ en catastrophe d'hier soir mais l'entendre dire que j'aurais dû mourir, c'est difficile à encaisser... « Je... » dis-je mais je n'arrive pas à prononcer le moindre mot, tellement je suis sous le choc alors je préfère détourner les talons pour descendre jusqu'au mini-bar afin d'en sortir une bouteille d'alcool. Je me sers un verre mais à la première gorgée, ça m'a dégoûté. Dans un mouvement de colère, je balance le verre contre le mur.

Animée par ta colère, bouffée par ta rancœur, tu parles sans réfléchir. Et lorsque tes paroles dépassent définitivement tes pensées, lorsque des mots trop durs sortent de sa bouche et l’attaquent comme du venin, ton cœur se resserre. T’as mal d’avoir dit ça et, lui, ne s’en tire visiblement pas mieux. Tu t’attendais pas toi-même à dire quelque chose de la sorte, y a probablement pas pire. Tu soupires, tu t’excuses, mais il quitte la pièce sans tourner la tête. Un instant, tu te figes sur place, ton regard dans le vague. C’est le bruit de casse qui te fait manquer un battement de cœur, ce bruit qui résonne dans la villa trop calme. Et tu te précipites au rez-de-chaussée, manquant de louper une marche dans l’escalier et de t’y écrouler, ce qui t’arrache un cri de surprise. Tu traverses le hall en vitesse pour chercher Magnus que tu retrouves dans l’une des nombreuses pièces. « Magnus… » murmures-tu en tentant de capter son regard. « Je suis désolée, je voulais pas dire ça… je le pensais pas… » Tu t’es blessée toi-même, probablement autant que tu l’as blessé lui. Et entendre le verre s’éclater contre le mur, celui que t’observes en mille morceaux au sol, ça t’a fait peur. Peur pour lui, peur de ce qu’il avait pu faire. Et ça t’a surtout faite redescendre en pression instantanément, comme si ton amour pour lui avait repris le dessus dans un élan soudain de conscience.

En entendant les mots de ma fiancée, je suis resté figé sur place et je ne savais pas trop quoi dire. Mais au moment où elle essayait de se rattraper, je préfère détourner les talons pour quitter la pièce. Et aussitôt je file jusqu'au mini-bar du salon où je m'étais servi un verre de whisky... Mais à la première gorgée, j'ai eu envie de vomir parce que je n'aime pas boire pour rien comme actuellement. Certes je faisais beaucoup de soirées jusqu'à très récemment mais jamais je n'avais bu en pleine journée comme là. Du coup, j'ai balancé le verre contre le mur dans un mouvement de colère et là j'étais à deux doigts d'exploser comme le verre en question. Mais je lutte pour garder mon calme... Ce n'était pas le moment de craquer, je me disais intérieurement que ma fiancée ne le pensait pas etc. D'ailleurs, celle-ci s'est précipitée pour venir à ma rencontre et elle s'excuse pour ses mots très déplacés. Je n'arrive même pas à parler tellement je suis encore sous le choc causé par ses mots. « J'ai la chance d'être en vie... Mais pas l'un de mes collègues. Il ne verra pas la nouvelle année comme tout le monde... » murmure-je doucement sans pouvoir lever les yeux vers elle, pour qu'elle ne voit pas mes larmes. Celles-ci commencent à couler lentement sur mon visage. « Et je sais que tu ne voulais pas dire ça... »

Tu t’excuses en tentant de capter son regard et pourtant, pas un instant il ne relève les yeux vers toi. Tu fronces légèrement les sourcils à ses mots, tentant de comprendre où il veut en venir. C’est seulement lorsqu’il te dit qu’il savait bien que tu ne le pensais pas que tu comprends. Et à cet instant, tu secoues la tête de droite à gauche en te mordillant la lèvre inférieure, te rapprochant de ton fiancé. Tu déposes tes mains sur son visage pour l’attirer contre toi, le plaquant doucement contre ta poitrine. Comme pour tenter de le calmer, tes doigts caressent ses cheveux. « Je suis désolée chaton… » murmures-tu en déposant un baiser sur sa tête. « Tu veux en parler ? Qu’est-ce qu’il s’est passé… ? » Tu sens que ça ne va pas et tu t’en veux de ne pas lui avoir demandé à minima s’il allait bien. Tu t’es contentée de sortir de tes gonds pour avoir raté un pauvre avion alors que l’un de ses collègues était décédé la nuit précédente… l’égoïsme à l’état pur.

J'avais du mal à me remettre de ces mots très virulents de ma fiancée, du coup j'ai décidé de m'éloigner un peu d'elle afin de me calmer mais Leslie était vite venue à ta rescousse. Comme elle me prenait dans ses bras, je lui fais enfin des aveux sur le décès de mon collègue lors de l'intervention de la veille, dévoilant l'une des raisons de mon retard. Finalement, ma chérie s'est calmée et elle me plaque un peu plus contre elle tout en s'excusant, me demandant aussi ce qu'il s'est passé... Sans la regarder, je me mets à raconter l'une des pires nuits de ma carrière de pompier. « Je ne sais pas si tu as regardé les informations... Mais un grave incendie a ravagé un immeuble non loin du port. Cette opération était un échec total, parce que sur les cinquante locataires, nous avons pu en sauver que dix... » Oui nous sommes arrivés trop tard et je n'avais pas du tout aimé me retrouver dans une telle situation. « Carter, mon binôme était un homme d'honneur qui venait toujours d'avoir un fils... Hier soir sa femme a accouché... Mais il est venu nous aider quand même. Il est retourné dans l'immeuble parce qu'il a entendu des cris d'enfants... Et là, l'immeuble s'est effondré... Je me sens tellement fautif. »

Tu plaques sa tête contre ta poitrine en venant caresser ses cheveux délicatement comme pour tenter de l’apaiser et de le calmer de son énervement. Mais lorsqu’il te raconte ce qu’il s’est passé, tu presses un peu plus ta main sur sa tête pour le serrer plus fort contre toi. « Magnus… » murmures-tu. Ca te brise le cœur de le savoir dans cette situation et de pas t’être attardée plus tôt sur son état. « Je suis désolée… » Désolée pour lui, pour son collègue et toutes les autres personnes présentes. « Mais c’est le risque de votre métier chaton… t’as pas à t’en vouloir, c’est pas de ta faute… et personne n’est fautif dans cette histoire. Ca aurait pu être toi ou n’importe qui d’autre à sa place… » Et tu veux pas l’entendre dire qu’il aurait préféré que ce soit lui. Parce que t’es persuadée que c’est pas de la faute de ton fiancé, il est humain comme tous les autres, et Carter a pris la décision d’entrer dans l’immeuble tout seul visiblement.

Je ne voulais pas qu'elle me voit dans cet état-là, mais je n'avais pas le choix, elle a réussi à me faire craquer littéralement. Si ce n'était pas ma fiancée, je pense que j'aurais laissé les choses comme ça et je me serais enfui littéralement... Mais j'aime Leslie et je ne veux surtout pas la perdre. Du coup, je lui explique ce qu'il s'est passé hier soir, terminant mon aveu avec une phrase choc... Je suis fautif de la mort de mon binôme. « Je t'ai déjà racontée qu'on a une crédo chez les pompiers et qu'on marche toujours par paires... On entre ensemble, on sort ensemble et on reste ensemble... » réponds-je en regardant ma fiancée, les yeux brillants et flamboyants même si je n'arrivais pas à pleurer. Puis je reprends sur le même ton : « J'ai laissé mon coéquipier entrer alors que je savais que ce n'était pas du tout une bonne idée... C'est pour que je me sens fautif, je n'avais pas les couilles pour le sauver alors que tout s'effondrait à vue d'oeil... Je ne mérite même pas ma médaille de héros et mon grade etc... » sur ces mots, je sors la médaille qu'on m'avait offerte ce matin avant que je ne parte précipitamment pour rejoindre ma fiancée à l'aéroport... « Un homme d'honneur est mort et il la méritait beaucoup plus que moi, le chanceux. »

Le voir comme ça, entendre sa voix et son histoire, ça te fend le cœur. Tu t’en veux pour ton égoïsme mais les choses sont déjà faites. Et tu refuses d’entendre que si son coéquipier est mort, c’est de sa faute. Ca te rappelle bien trop ses années à l’armée et le cauchemar qui lui est arrivé, tu sais qu’il s’en veut toujours. Tes mains sont plaquées sur sa barbe tandis que tes pouces caressent délicatement ses joues. Tu déposes un baiser sur son front lorsqu’il cesse de parler. « Arrête Magnus, s’il te plaît. » lui réponds-tu en plongeant ton regard dans le sien. T’en démordras pas, c’est pas de sa faute. Ca peut pas être la faute de ton fiancé, son collègue était pleinement conscient de ce qu’il faisait, qu’il soit rentré seul ou non. « Tu mérites ta médaille. Il a décidé de prendre le risque seul, Magnus. Il savait ce que ça pouvait lui coûter et le suivre n’aurait rien changé. Je suis désolée de ce qui est arrivé… mais t’es en vie et j’aurais pas supporté que ça t’arrive… » C’est égoïste, quelque part. Mais, oui, tu préfères que ce soit son collègue plutôt que lui, le mieux aurait encore été qu’aucun ne soit touché. La vie en a juste décidé autrement…

Même si ma fiancée disait que ce n'était pas de ma faute, à mes yeux j'aurais dû faire quelque chose pour empêcher la mort de mon binôme, l'un de mes meilleurs amis. Ce qu'il s'est passé hier soir, me rappelait horriblement l'embuscade mortelle que ma section avait connu il y a cinq années de cela... Du coup, il va de soit que j'éprouvais encore plus de culpabilité là... Leslie te demande d'arrêter, m'obligeant même à la regarder dans les yeux tandis qu'elle assurait clairement que je méritais ma médaille etc. Et pour conclure, elle dit qu'elle n'aurait pas supporté que je meure aussi. « Je ne veux vraiment pas de cette médaille... Je trouve que c'est une insulte pour les personnes qui ont péri hier soir. Je ne suis pas un héros, je ne fais que mon travail... » dis-je en inspirant profondément avant de serrer Leslie dans mes bras et de mettre ma main sur son ventre. « Je ne veux pas vous abandonner... Je suis désolé... »