KHLOE FORBES-NIELSEN ► Audreyana Michelle

La pauvre gamine. C'est ce que tout le monde se disait. J'ai pas besoin qu'on me prenne en pitié. Oui, peut-être que je n'ai pas eu la vie la plus facile, peut-être que la plupart des gens sont plus chanceux que moi. Mais la vie que j'ai menée a fait de moi celle que je suis aujourd'hui et malgré toutes les choses blessantes et décourageante qu'on a pu me dire, je suis fière de celle que je suis et de l'endroit où je suis rendue.
Je suis née d'une femme sans grand avenir et d'un homme dont j'ignore l'identité. La seule chose que je sais de ce dernier est qu'il était européen. D'où mes origines. Apparemment, ma mère était une grande voyageuse. Une globe-trotteuse comme on les appelle. Dès la fin de son lycée, elle parcourait le monde avec cette soif de savoir qu'ont les jeunes adultes. C'est en Europe qu'elle tomba sur ce charmant jeune homme avec qui elle passa du bon temps. Histoire d'un soir ou amourette de vacances? Peu importe, une fois de retour en Amérique, tout ce qu'elle avait de lui était un prénom et un bébé. Ouais, c'est là que j'ai décidé de pointer le bout de mon nez. Grossesse difficile, fini les voyages pour la future maman. Vous imaginez à quel point elle m'en a voulu avant même que je sois au monde.
Ça ne s'est pas amélioré quand j'ai mis le nez dehors. Bébé, elle me laissait pleurer pendant des heures, ne s'occupant pas de moi. Ce sont mes grands-parents, ma grand-mère, plus précisément qui s'occupait de moi. À un tel point que je me rappelle encore du parfum aux pommes sucrées qu'elle portait. On habitait d'ailleurs chez mes grands-parents. Une jeune femme sans étude, sans emploi, ça n'a pas grand chose. Bref, elle m'a clairement ignoré toute mon enfance. Par chance, j'avais mes grands-parents ainsi que mes cousins et cousines pour veiller sur moi.
Quand j'ai eu huit ans, mon grand-père est décédé. Comme ma grand-mère se faisait vieille et que ce n'est certainement pas ma mère qui allait s'en occuper, celle-ci s'installa dans un foyer pour personnes âgées. Avec ma mère, on garda la maison où j'avais grandi. Ce n'est pas parce qu'on était rendu seules qu'elle allait commencé à s'occuper de moi. Oh non, pas du tout. J'ai dû apprendre à me faire à manger seule, à garder la maison propre puisque ma mère recevait souvent des "clients" à la maison. Je suis pas stupide, je sais très bien ce qu'elle faisait. J'essayais de quitter la maison chaque fois, trouvant refuge dans le studio de ma grand-mère. Refuge que je perdis trois ans plus tard quand elle nous quitta également. Je n'avais plus d'autre choix que de rester à la maison. Si ça n'avait été que de ses clients qui venaient et partaient, ça n'aurait pas été si difficile à supporter. Non, ce n'était pas tout. Avec ses clients venait toute ces cochonneries; la drogue, l'alcool. Et par le fait même, la violence de ma mère. âgée d'à peine douze ans, je recevais des coups de ma propre mère alors qu'elle criait à tue-tête. Elle hurlait que j'avais gâché sa vie, que si je n'avais pas décidé de me pointer, elle aurait continué sa vie de voyageuse sans rien demander à personne, sans rien devoir à personne. Quand ça finit par se savoir, on me retira à ma mère pour me placer chez ma tante. Tante qui m'avait bien trop longtemps ignorer elle aussi. Elle ne voulait rien à voir à faire avec l'enfant de sa soeur dépravée. Après tout, ce monde de pauvreté, elle l'avait quitté depuis belles lurettes et ne voulait pas que ces enfants le connaissent. Manque de chance pour elle, elle se retrouva tutrice d'une gamine de 14 ans battue. Bien qu'elle tenta de ne pas le montrer, je savais qu'elle avait un certain dédain pour moi, de la pitié aussi. Par chance, mes cousins et cousines n'eurent pas tous la même réaction. Je passa un an chez eux avant qu'on me retourne auprès de ma mère qui était simplement en dépression, disait-on. Elle devait simplement prendre ses anti-dépresseurs et voir un thérapeute et me voilà retournée dans cette enfer. Et cette fois-ci, c'était pire. Je n'avais plus que ma mère à m'inquiéter. Elle avait un nouveau petit copain, un dealer de drogue, qui s'y est mis lui aussi. Mais il ne s'est pas contenté des coups. À plusieurs reprises, j'ai pleuré sentant ses mains sur ma peau, me sentant prisonnière sous son corps. C'est à partir de ce jour que je me suis faite le serment de quitter cette endroit dès que je le pourrais, de fournir tout les efforts nécessaire pour quitter cette vie merdique et leur faire payer ce qu'ils m'ont fait. Je voyais déjà Harvard comme la solution mais c'était encore tellement loin. C'est ma cousine qui me sauva de leurs griffes avant que je ne m'effondre. J'avais gardé contact avec elle malgré mon retour à la maison et voyant que quelque chose n'allait pas, elle est venue me chercher avec mon cousin. Quand j'explosa en pleurs, lui racontant ce que je subissais depuis un an et demi, les procédures furent engagées de nouveau pour me retirer, et pour de bon cette fois-ci. Encore une fois, c'est ma tante qui due s'occuper de moi. Je lui montra rapidement que j'étais déterminée à faire quelque chose de ma vie, à aller plus loin que tout ceux me connaissant pourrait le penser. C'est donc à 18 ans que j'intégra Harvard avec une détermination infaillible et un lourd passé derrière moi. Du moins, c'est ce que j'essaie de me faire croire. Même s'il est maintenant impossible pour ma mère et son petit ami de me faire du mal, une partie de moi garde cette crainte. Ce n'est pas quelque chose dont j'aime parler. À l’exception de ma famille, personne n'est au courant et ça va rester ainsi.