MILA A VERSACE ► SCARLETT LEITHOLD

disorder. apocalyptique. l’enfance échouée, à la dérive au milieu des vagues gourmandes. une seule bouée de sauvetage, lui, un frère aux émotions mortes depuis trop longtemps. bouée ou ancre, elle ne sait pas trop mila quand elle s’y accroche à bout de bras. quand elle ne voit que ça a quoi se retenir pour ne pas périr dans la solitude. elle aurait pu avoir la vie de rêve, les parents, le clébard qui va bien et les goûters pour quatre heures. elle aurait pu avoir le monde si elle l’avait voulue, parce que ses grands yeux, eux, ils en attiraient du monde. ils en berçaient quelques uns au foyer des délaissés. mais pas lui, personne ne le regardait à lui. pas un regard, pas une attention déchue. le visage écorché, les yeux qui saignent, le sauvage en décalage qu’ils craignent trop pour s’en approcher. pour tenter de l’apprivoiser quand ils savent d’avance, dans l’obscurité de ses traits, que c’est voué à l’échec. alors mila elle n’avait pas le choix, incapable de lâcher prise, d’abandonner le radeau en ruine de sa chaire et son sang. elle est restée, vivant dans le regard d’un père trop pointilleux. crevant dans les directions d’un frère à l’esprit étroit.

Au fond du ciel, désert lugubre où meurt le bruit,
Qu'un peu de cendre rouge éparse dans la nuit !

lover. le cœur qui bat. pour le danger, pour lui. les picotements dans tout le corps, pour la lune et l’adrénaline au fond de cette chambre aussi délabrée qu’eux. il a les traits plus durs, plus fermes, plus vieux. il l’a mise dans tout ses états lui et sa froideur électrisante, passionnante. même sa bague au doigt n’a pas suffit à éloigner milena, non, au contraire ça l’a rendue encore plus accroc. cette idée de devoir se cacher, cette frénésie dans les nuits chaudes entre la peur et le désir insurmontable. elle en a laissée des plumes, des morceaux de cœur et même son organe entier. quand elle est ressortit, il n’y avait plus rien d’elle que la mare de sang dans lequel elle baigne. elle suffoque. c’était plus de l’amour mais de l’addiction, c’était plus sain mais vicieux. il tirait les ficelles d’un coeur trop plein, d’une gosse beaucoup trop naïve pour en comprendre le sens. mila, tout ce qu’elle voulait, elle, c’était le genre d’histoire qui colle à la peau.. les bleus, les cicatrices de brulures, le goût du fer entre les lèvres, les organes vitaux chamboulés. ça, ça lui a collé à la peau. et elle est restée là, presque inerte au coin de cette rue, faisant défiler les secondes d’une vidéo balancée. une vidéo mêlant la gosse d’un ambassadeur de la mode et un pauvre mec, montrant la passion éternelle que mila ressentait à ce moment-là. montrant les courbes fléchir, le coeur s’affoler, les yeux rêveurs d’une mila comblée. toute son intimité dévoilée au grand jour, son jardin secret étalé comme s’il n’avait jamais compté.

L'homme n'a rien qu'il prenne, et qu'il tienne, et qu'il garde.
Il tombe heure par heure, et, ruine, il regarde
Le monde, écroulement.

harvard. les découvertes, la fuite, les maux, les injures, les représailles qu’elle ne supporte plus. mila est fatiguée de fuir, voilà un an que la vidéo a fait rage un peu partout dans le monde. voilà un an que son coeur s’est arrêté de battre, une année entière à se façonner une image qui l’aiderait à tenir contre vents et marées. elle n’a plus peur aujourd’hui mila, plus peur de retrouver un frère féroce, plus peur d’affronter un père noyé dans la déception, plus peur d’affronter la vie. harvard, le début ou la fin d’un fardeau trop pesant.