Appel de Leslie vers Magnus

Samedi 29 septembre, 00h09. Ta main encore tremblante plonge dans ton sac à la recherche de ton téléphone, totalement bouleversée par ce qui vient de t’arriver. Paniquée, tu n’as de cesse de tourner ta tête en arrière, pour voir si une nouvelle fois il te suit. Si cette fois encore, il va t’attraper comme une furie. Tes pieds nus claquent dans les flaques d’eau tandis que la pluie dégouline sur ton corps à peine camouflé, dont les marques de bataille ressortent un peu plus à chaque minute. Du bout de ton doigt, tu lances un appel vers Magnus. Un appel qui reste sans réponse. Et tu réitères, une fois, deux fois, trois fois. En vain. Reniflant sans grâce aucune, les yeux rougis par ta tristesse et ta peur, tu tapes machinalement un message sur ton écran pour le supplier de te répondre. Et, une nouvelle fois, tu lances l’appel. Une fois que tu espères être bonne, murmurant de vagues « Pitié… » en l’attente d’une réponse, la gorge serrée.

Je sortais d'une grosse intervention et je venais tout juste de rentrer à la caserne, lorsque je vois un nombre incalculable d'appels de ma petite amie. Je fais signe à mes collègues que j'avais un coup de fil à passer parce que je pense qu'il s'agit d'une sacrée urgence pour que Leslie m'appelle autant alors qu'elle sait que je suis de garde ce soir. Finalement je décroche tout en retirant ma tenue d'intervention. « Bébé ?! Qu'est-ce qu'il t'arrive ? ». Je lui demande ça tout en m'installant sur le camion.

Lorsqu’enfin sa voix résonne à ton oreille, tu craques. Tu tentes comme tu peux d’étouffer le bruit de tes pleurs, soufflant longuement pour te donner le courage d’enfin lui parler après un silence qui t’a semblé être une éternité. « Ce mec… » réponds-tu d’une voix tremblante en jetant un nouveau coup d’œil derrière toi. « j’ai cru qu’il allait me tuer. » En réalité, tu sais même pas par où commencer, totalement paniquée par ce qu’il vient de t’arriver.

entendre ma copine craquer comme ça au téléphone, ça me mettait clairement en alerte. Il a du lui arriver quelque chose de grave, donc je lui demande aussitôt ce qu'il se passait. Mon sang n'en fit qu'un tour lorsqu'elle m'avoue qu'un mec avait failli la tuer. « Quoi ?! Un mec voulait te tuer ?! Racontes-moi tout... C'était où ? Comment il était ? ». Honnêtement j'ai envie de me barrer de là et d'aller rejoindre ma copine.

Tu sais pertinemment qu’en lui racontant ton agression, ton petit-ami ne restera pas les bras croisés. Mais t’as besoin de l’appeler, de lui dire, de te vider, d’être rassurée. « Je suis passée dans cette ruelle pour rentrer du bar… quand je l’ai vu, j’ai senti que quelque chose n’allait pas, je l’ai su… j’ai voulu partir mais il m’a rattrapée… » lui racontes-tu en déglutissant. Et, après une courte pause pour te redonner du courage, tu reprends : « Il m’a attrapée par le bras Magnus, j’ai pas réussi à m’en défaire… personne ne m’a aidée, personne. Il m’a tirée au travers de la route, on a manqué de passer sous les roues de plusieurs voitures… Je… » Tu penches ta tête en arrière, reniflant un grand coup. « Ce type m’a secouée avant de me jeter parterre… et l’instant d’après, il me portait. Il m’a embarquée avec lui et j’avais beau me débattre, il refusait de me laisser repartir… Puis il est tombé, j’en ai profité pour partir en courant, le plus vite que j’ai pu… » Cette fois, tu serres les dents. Tu te souviens de son regard, il t’a marqué. Son visage quant à lui restera longuement gravé dans ta tête, ça ne fait pas de doute. « Il m’a sauté dessus Magnus. Il m’a balancée à terre. Si t’avais vu son regard… j’ai vraiment cru que j’allais y passer, je suis certaine qu’il en aurait été capable… »

Je laisse ma copine raconter son expérience traumatisante, et de ce qu'elle me raconte, ça fait sacrément froid dans le dos. « Il avait quoi ce connard à s'attaquer à toi comme ça ! Si je le retrouve, je lui refais le portrait... Tu as vu comment il était ?  » dis-je avec colère parce qu'on ne touche pas à ma Leslie ! Même Alec n'avait pas le droit de la frapper hein ! « Putain j'ai envie de te récupérer là pour te ramener à la maison... ». Cela me rappelle ce que j'avais en tête de faire aussi. « Calmes-toi... C'est fini maintenant, restes bien dans ta suite, je viendrais illico après le taff de demain. Et je veux que tu viennes vivre à la maison avec moi. Je n'osais pas te le proposer mais là je ne peux plus te laisser seule dans un hôtel. »

Attentive à ses paroles, tu en profites pour accélérer le pas pour rentrer plus rapidement à l’hôtel où tu dors depuis qu’Alec t’a mise à la porte. Sa dernière proposition te fait légèrement sourire, mais impossible pour toi d’en oublier ce qu’il s’est passé. « J’ai juste vu qu’il était asiatique, rien de plus… il avait l’air jeune, la vingtaine. Je lui ai griffé le visage pendant que je me débattais, je crois qu’il saignait… » Aucune certitude, mais il te semble avoir vu un liquide relativement foncé sur son visage aux rares instants où ce dernier était éclairé. « Je suis sur le chemin de l’hôtel, j’essaie de me dépêcher… je suis pieds nus, ma robe est déchirée et il pleut, c’est minable… » renifles-tu une nouvelle fois, la gorge toujours nouée, la voix tremblante et cassée. « On en parlera quand tu seras là, si ça ne te dérange pas… j’ai juste envie de rentrer, je suis à bout… »

Un asiatique ?! Rien qu'à cette information, j'ai envie de faire un meurtre mais je me retiens. Néanmoins je vais chercher ce type-là pour lui faire comprendre qu'on ne touche pas ma copine sans subir les conséquences adéquates. « C'est bien que tu aies pu lui laisser un petit souvenir... ». Je me tais légèrement alors que ma petite amie me dit qu'elle est en train de courir pieds nus sous la pluie. « Fais attention... Tu arrives bientôt j'espère ? Sinon je prends le camion de pompier et je viens te récupérer. Et ça me va d'en parler demain. Comme ça je pourrais te prendre dans mes bras aussi. »

Tu réfléchis à tout signe distinctif que ce type pourrait avoir, mais t’en vois pas d’autre. Clairement, tu retiendras pas Magnus de lui faire payer ce qu’il t’a fait, parce qu’il s’agit pas d’un truc minime. C’est gros, ce qui s’est passé. « Il paraît que les tours en camion de pompier font sourire tous les enfants… » que tu lui réponds pour tenter de te détendre le temps de rentrer. « J’ai surtout l’impression de tourner en rond, je vais finir par perdre la tête. J’ose supposer que l’hôtel n’est pas loin. » Aucune envie de passer plus de temps à l’extérieur encore.

Je le retrouverais ce fameux type qui avait osé agresser ma Leslie ! Non mais oh ! « Oui et les adultes aussi donc ça te fera sourire chérie. » répondis-je d'un air amusé pour l'aider à se détendre un peu, mais ça n'allait pas être facile. Pour moi aussi, je sens que je vais ruminer cette annonce de ma petite amie pendant toute ma garde là. « Tu aurais du appeler un taxi. Je reste au bout du fil jusqu'à ce que tu rentres. »