things will change in time (zach)

( only in summertime things will change with time but only in summertime  @Zachary Knyazev )

Daya elle a le palpitant en panique. Depuis son arrivée au Etats-Unis, la mexicaine trouve le réconfort dans l'immuable, dans ses petites habitudes, soigneusement mises en place au cours des ces huit dernières années. Toujours le même café, le même bar, la même routine. Elle aime le changement, mais seulement lorsqu'il est contrôlé, lorsqu'elle maîtrise la situation. Aujourd'hui, c'est un de ces jours où la situation va basculer. Où l'un de ces rituels va perdre tout son sens, pour prendre une nouvelle forme, incertaine. Depuis quelques temps, Daya se plait à échanger avec un correspondant anonyme. Quelqu'un à qui elle a envoyé un sms par erreur et qui fait à présent partie de son quotidien. Puis au bout d'un moment, on a l'impression qu'on s'est déjà tout dit, et on aimerait pour une fois aller boire un verre avec cette personne, lui prêter le dernier livre qu'on a lu, ou tout simplement décrypter ses émotions dans son regard plutôt qu'à travers les emojis qu'il utilise. C'est un risque à prendre. Un risque qu'en vrai, ça soit plus vraiment pareil. Un risque de perdre un ami, de retirer tout le sens de leur relation. Voilà pourquoi Daya se trouve soudainement mal à l'aise alors qu'elle traverse le parc où elle lui a donné rendez-vous. C'est une belle journée de fin d'été, particulièrement propice à traîner dans l'herbe après une journée de travail ou de cours. Après quelques minutes de marche, Daya se décide à sortir le drap qu'elle avait dans son sac pour s'installer par terre, en attendant que ce fameux Zach la rejoigne. Elle scrute chaque personne qui passe près d'elle, elle étudie les mouvements des gens, leurs regards. Elle essaye de deviner s'il s'agit enfin de Zachary ou non. Une attitude qui lui vaut de déstabiliser les passants qui se sentent observés avec trop d’insistance. A un moment, quelqu'un finit même par lui demander s'ils se sont déjà rencontrés ou si elle a besoin d'aide. Elle secoue la tête confuse en lâchant un pardon, je vous ai confondu avec quelqu'un d'autre, avant de plonger son visage entre les pages d'un livre qui traînait dans le fond de son sac. Tant pis, c'est lui qui devra la reconnaître. Son téléphone sur sa cuisse, elle reste attentive à tout message qu'elle pourrait recevoir de Zach, lui demandant où elle se trouve.

( only in summertime things will change with time but only in summertime  @Zachary Knyazev )

Les secondes s'écoulent au compte goûte dans l'esprit de Daya. Elle n'a jamais été très patiente et encore moins dans une telle situation. Pourtant elle a l'habitude de la pression. Elle a eu une enfance et une adolescence chaotiques, rythmées par les impacts de balle dans les façades de sa rue. Elle a l'habitude de se soumettre à l'avis des autres, et ce à chaque fois qu'elle monte sur les planches pour jouer des rôles qui lui collent bien trop à la peau. Mais là, c'est différent. Cette fois le danger réside dans le fait de risquer quelque chose qui lui a beaucoup apporté ces derniers temps. Risquer une amitié, une habitude à laquelle elle avait pris goût. Et si c'était pas pareil ? Et s'ils n'avaient rien à se dire ? En fin de compte, pourquoi vouloir changer quelque chose qui fonctionnait bien ? C'est le principe même de l'évolution. Il faut nager pour ne pas se noyer. Alors Daya elle nage, en espérant que cela soit à la même vitesse que Zach. En espérant qu'ils restent sur la même longueur d'ondes. Le visage plongé dans son livre, elle ne le voit même pas arriver et sursaute en entendant son propre prénom. Elle se retourne pour faire face à son correspondant mystère. « Oui c'est moi. Tu es Zach c'est ça ? » qu'elle lui demande, léger sourire perlant sur le bout de ses lèvres. La nervosité mêlée à la joie. C'est donc lui. Elle a un peu du mal à y croire à vrai dire. « Tiens, je te fais un peu de place, viens t'asseoir. » qu'elle l'invite en se décalant un peu sur le drap. Elle range son livre et son téléphone dans son sac puis se tourne vers Zach tandis qu'il prend place à côté d'elle. Elle profite de ces quelques secondes pour l'observer attentivement. Il est plus grand qu'elle l'imaginait. Même si elle n'aurait jamais été capable de le reconnaître dans la rue, il y a quelque chose de familier dans son regard. Elle retrouve son caractère dans les petites expressions faciales qu'il arbore. Cet air sérieux mais bienveillant, son sourire timide. C'est bien lui, cela ne fait aucun doute. « C'est marrant, maintenant que je te vois en vrai, je me rends compte que je ne t'avais pas inventé d'apparence dans mon esprit. » qu'elle lui dit amusée. C'est compliqué de se faire une idée avec quelques mots échangés à travers un écran. On peut deviner le caractère, éventuellement un style de personne, mais difficilement un physique. « D'ailleurs, comment tu as fait pour me reconnaître ? » elle demande en se rappelant qu'il l'a trouvée sans même lui envoyer de message pour lui demander comment elle serait habillée, ou le moindre indice sur elle.

( only in summertime things will change with time but only in summertime  @Zachary Knyazev )

Daya n'avait certes pas imaginé à quoi pouvait ressembler Zachary, elle s'était tout de même repassé la scène de leur rencontre en boucle dans sa tête, particulièrement au cours de ces dernières heures. Le pire scénario aurait été la gêne. Qu'ils se retrouvent tous les deux, l'un face à l'autre, sans savoir quoi dire, ni à quel moment. Qu'ils perdent leur complicité et qu'ils n'osent plus jamais se reparler. C'est pourquoi Daya tente immédiatement de briser la glace, en l'invitant à s'asseoir près d'elle, puis en parlant la première. Elle s'exprime assez facilement sur ses sentiments, sur ce qu'elle pense. Jusqu'à présent, ils étaient devenus amis uniquement en parlant par messages, le but de leur rencontre était évidemment de se voir en vrai, alors pourquoi ne pas commencer à parler de ça ? Elle s'amuse de cette première impression que lui laisse Zachary, du fait qu'elle parvienne à le reconnaître dans sa façon de se mouvoir, de parler. Il doit probablement penser la même chose d'elle de son côté, alors elle lui demande comment il a fait pour la reconnaître. La réponse qu'il lui donne lui arrache un sourire. « T'es observateur. » qu'elle retient de lui. Observateur et attentif. Elle s'en serait un peu doutée, mais par moments elle oublie que le jeune homme en face d'elle est loin d'être un inconnu. Elle le savait déjà, qu'il était intelligent, elle a simplement du mal à faire le lien entre les conversation sur son téléphone et le Zachary assis à côté d'elle. « Moi je pense que je t'aurais reconnu à ton sourire. C'est peut-être un peu bête, mais j'ai l'impression de déjà le connaître à travers tes messages. » elle rajoute. Daya et son sixième sens. Cette manie qu'elle a de toujours analyser les gens, les mots qu'ils utilisent, l'expression sur leur visage. Parfois, elle se dit qu'elle aurait du être psychologue, ou travailler dans la police. Deux univers qu'elle fuit à présent comme la peste, le premier par crainte de devoir avouer ses failles, le second par crainte de finir dans le premier avion pour le Mexique. « Je vais être franche, oui j'étais un peu stressée. C'est la première fois que je rencontre quelqu'un après lui avoir parlé aussi longtemps par messages. » admet-elle. Inutile de parler de rencontres Tinder, qui n'ont simplement rien à avoir avec celle-ci. « Et toi ? Ton retour à Boston se passe bien ? » elle finit par demander à son tour, se souvenant qu'il était encore en Italie quelques semaines plus tôt.

( only in summertime things will change with time but only in summertime  @Zachary Knyazev )

Daya elle a cette fâcheuse tendance de tout sur-analyser, limite diagnostiquer. Le moindre petit détail, sera perçu comme un indice pour la mener à des conclusions parfois trop hâtives, mais souvent véridiques. Alors quand elle remarque le côté observateur de Zachary, elle ne peut s'empêcher d'y voir une certaine sensibilité. Quelqu'un qui prête une attention particulière au monde qui l'entoure sera forcément moins concentré sur sa propre personne. A travers leurs messages échangés, Daya avait perçu cet aspect de la personnalité de Zach, mais à présent il lui semble encore plus fort. Est-ce parce qu'ils se rencontrent pour la première fois ? En tout cas, la mexicaine a un don pour savoir quand quelque chose ne va pas chez quelqu'un et si ce n'est pas aujourd'hui, ce sera forcément plus tard. Parfois, c'est comme si elle souhaiter leur trouver des failles, afin de se persuader que les siennes sont moindres en comparaison. Une habitude probablement malsaine mais qu'elle n'est pas prête de perdre. Pas tant qu'elle n'aura pas fait la paix avec son passé. Elle hoche vivement la tête de gauche à droite à la nouvelle question de Zach. « Non, pas du tout. Pourquoi je serais déçue ?? » elle s'étonne. C'est pas le genre de Daya, de juger, de s'arrêter à la première impression. Puis comment aurait-elle pu être déçue, sans attentes particulières. La seule source de déception possible, serait que leur complicité ne soit pas la même en vrai, mais ça elle serait incapable de le savoir si tôt. « Si tu veux tout savoir, t'as gagné des points en arrivant à me trouver du premier coup. » qu'elle rajoute, pour le mettre un peu plus à l'aise. Le sourire aux lèvres, elle s'amuse du dépaysemennt subit par Zach, notamment au niveau de la langue et du climat. C'est quelque chose qu'elle a également expérimenté il y a quelques années, lorsqu'elle est arrivée du Mexique. « Je veux pas te déprimer, mais même après huit ans ici je me suis toujours pas habituée à la météo. » elle lance, se rendant compte que trop tard qu'elle vient de faire référence à son passé. Elle regrette cette remarque presque aussitôt prononcée. « Mais sinon oui, je m'y plais. C'est les Etats-Unis après tout, et je me vois pas franchement rentrer chez moi un jour. C'est ici chez moi. Enfin je suppose. » elle souligne leur chance de vivre dans un tel pays. Certes, avec de nombreux défauts, mais beaucoup de qualités également. Mais Daya, elle continue de se confier, de faire référence au Mexique. Elle fait rarement ça, mais avec Zach ça a l'air différent. Elle se sent en confiance en sa compagnie. « Bref, oui aujourd'hui cet après-midi c'est repos. En général, je travaille le matin, puis le soir je fais des représentations mais pas aujourd'hui. D'ailleurs tu devrais venir me voir un de ces quatre ! » elle s'enthousiasme. Son activité en cabaret est largement plus intéressante que les ménages qu'elle fait pour garder la tête hors de l'eau financièrement.

( only in summertime things will change with time but only in summertime  @Zachary Knyazev )

Si Daya est venue vivre à Boston, c'est pour l'unique raison que la famille qui l'a accueillie à son arrivée du Mexique vivait déjà ici. Daya, elle s'est laissée ballottée à travers le pays juste pour pouvoir se sentir en sécurité. Elle ne l'avait jamais vraiment été, pas même lorsqu'elle était une gamine respectueuse des codes de son quartier. C'était quelque chose de nouveau. De pouvoir se coucher le soir, sans craindre ce que le lendemain lui réserve. C'était ça que lui vendaient les Etats-Unis. La promesse d'un avenir meilleur. Mais c'est terminé. Aujourd'hui, Daya est de retour dans l'instabilité, dans l'incertitude. Elle ne sait pas si tout-à-l'heure, elle pourra rentrer chez elle. Si en chemin une patrouille ne lui demandera pas ses papiers, pour découvrir qu'elle n'est pas en règle pour la renvoyer chez elle. Ce sont des gestes simples qui lui sont refusés. Se promener tranquillement dans la rue. Se blesser en faisant une mauvaise chute et être envoyée à l'hôpital, où on se rendra compte que sa situation n'est pas en règle. Daya est comme une funambule, à deux doigts de basculer d'un côté ou de l'autre de la ligne directrice qu'elle s'est donné dans la vie. Elle sourit donc mélancoliquement à la remarque de Zachary. Daya elle a pas forcément le luxe de choisir où elle veut vivre. Mais ça ne l'empêche pas de rêver. « New-York. » qu'elle lui répond sans avoir besoin d'une minute pour réfléchir. « Parce qu'à New-York il y a Broadway. Je sais, c'est un fantasme, mais j'ai vraiment envie d'y tenter ma chance, quitte à changer d'avis une fois sur place. » elle s'excuse presque immédiatement pour ce choix. Elle a l'habitude qu'on lui lance des regards sceptiques quand elle explique qu'elle souhaite faire carrière dans ce milieu. On dit d'elle qu'elle est naïve, pas sérieuse. Pourtant, personne n'est plus sérieux que Daya quand il s'agit de son métier. D'ailleurs, elle ne tarde pas à inviter Zach à venir la voir à l'occasion. Certains jeunes acteurs n'aiment pas que leurs proches viennent les voir, car ils ne sont pas encore très à l'aise avec le fait d'avoir un public. Ce n'est pas le cas de la mexicaine, au contraire. Elle a toujours eu ça dans le sang, et ça lui ferait vraiment plaisir qu'un jour Zach soit dans le public. « Bien entendu. L'entourage des acteurs a toujours droit aux meilleures places. » qu'elle dit en lui adressant un clin d'oeil. S'il le souhaite, elle pourra même lui montrer les coulisses. C'est ce que Daya préfère dans le milieu. Voir l'équipe se préparer. Lorsqu'on assiste à un spectacle en tant que simple spectateur, on ne voit que ce qu'on est censé voir, alors qu'il y a tellement plus une fois les rideaux baissés. « Vas-y, je t'écoute. » Daya fronce les sourcils. Être franche et honnête ne lui pose pas de problème, mais l'air grave de Zachary lui inspire un minimum de méfiance. Elle lâche un petit rire gêné en entendant sa question. C'en est une bonne. A vrai dire, c'est le genre de question que tout le monde se pose, mais que personne n'ose dire à voir haute. « Oui et non. Disons que je n'ai pas vraiment le choix, il faut que je travaille, que je paie mon loyer etc. Alors forcément, c'est pas ce qu'il y a de plus agréable, et si je pouvais ne vivre que du théâtre, je le ferais. Mais ce n'est pas le cas, alors on finit par y trouver de bons côtés. » elle lui répond calmement. C'est triste et c'est injuste, mais dans la vie il faut parfois se forcer. « Cela me permet de rencontrer des gens, d'apporter un peu de positif dans leurs vies, même si ce n'est que faire leur ménage. » la mexicaine essaye de convaincre Zachary, mais aussi elle-même.