UNTOUCHED ♣ The VeronicasUne naissance des plus normales. Un hôpital, une mère qui crie à s’époumoner, la péridurale n'existe pas encore. Un père présent, inquiet pour sa femme et son enfant, il a peur qu'elle ne naisse pas normalement, qu'elle ne crie pas, qu'il y ait une anomalie quelque part. Des sages-femmes qui aident la mère dans cet instant de souffrance intense, une souffrance qui se conclut sur de la joie. La joie d'être mère pour de vrai. C'est en pleine nuit que le travail a commencé, vers vingt-et-une heures, le seize janvier mille neuf cent quatre-vingt-trois. C'est seulement à six heures du matin, le dix-sept janvier, que j'ai daigné sortir de mon petit nid douillet et bien chaud, j'ai nommé l'utérus de ma mère. Comme tous les enfants qui viennent de voir le jour, j'ai été accueillie par une claque sur les fesses pour que je pleure. T'es bien accueillie dans ce bas monde, à coup de claque ! C'est quand tu sais ça que tu comprends que la vie c'est pas facile, et que des claques dans la gueule t'en prendras, physiquement ou mentalement. « Comment voulez-vous l'appeler, cette petite princesse ? » Mes parents se sont regardés et se sont engueulés. « Blake ! - Non, Lightning ! - Blake ! Lightning ! » et ce pendant vingt minutes. Puis la sage-femme les a regardés, souriante. « Pourquoi pas Blake Lightning, tout simplement ? » Un regard complice s'est installé, et c'est ainsi que j'ai trouvé mon identité.
Suite à cela, une enfance basique. J'ai appris à marcher, parler, tout ça pour que plus tard on me dise de fermer ma gueule et de pas bouger. Logique...ou pas. A trois ans, j'ai appris que j'allais avoir un petit frère, parce que je suis l’aînée de la famille. Un petit frère, ce petit être destructeur, chiant, qui court partout et qui casse tes jouets. « Ils ont attendu que je sois à l'école pour le fabriquer ou quoi ? » me disais-je intérieurement à ce moment là. Après l'avoir su, le lendemain, je demandais à mes copines ce que ça faisait d'avoir un petit frère. Les réactions étaient horrifiantes, finalement, je ne voulais pas de cet être perturbateur dans ma petite vie tranquille. Le soir même, j'ai regardé mes parents. « Si vous me donnez un petit frère, je déménage chez mamie avec Doudou ! » crise de fou rire des intéressés. Le voilà arrivé, six mois plus tard. Riley Luke. Et ce que je pensais qui allait arriver une fois qu'il allait grandir, n'arrivait finalement pas. Pas avec lui, en tout cas. Puisqu'en tout, nous sommes six frères et sœurs. Moi, Riley Luke, Marley Snow, Christina Vanille, Jaimie Anakin et la petite dernière Keyshia Leïa. Me demandez pas où ils ont pondu les prénoms, c'est tout ce que je demande.
BLACKLISTED ME ♣ Reprobate LoveL'adolescence, la pire époque de la vie, j'imagine. Je ne suis pas assez vieille pour avoir testé les autres. La pire époque pour les parents, puisque nous entrons dans une rébellion quand à l'autorité, mais pas uniquement pour cela. On demande des conseils sur les relations amoureuses, les relations sexuelles, mais surtout on se cherche. Et ça, ils le craignent. « Et si notre enfant était gay ? » se demandent-ils au détour d'une discussion des moins sérieuses. Et c'est là que tout se déclenche comme une bombe à retardement. « Conseil de famille ! » cria mon père, lors d'une soirée comme une autre. Toute la famille se réuni autour de la grande table de salle à manger, alors que lui reste debout, un regard grave. « Les plus jeunes ne sont pas concernés, seulement vous trois. » dit-il en me pointant du doigt avec Riley et Marley, ma sœur. On avait seize, treize et douze ans. Les deux petits étaient donc rassurés que rien ne leur était reproché. Nous, les trois grands, écarquillions les yeux. « Qu'est-ce qu'on a fait ? » dis-je en allumant une cigarette, le regard plein de provocation. « Éteins cette merde, et ce n'est pas une question de qui a fait quoi... » Il resta silencieux quelques secondes avant de prendre une grande inspiration. « Blake, est-ce que tu te sens attirée par les femmes ? Riley par les hommes ? Marley par les femmes ? » Crise de fou rire par les deux plus jeunes adultes, alors que je tirais longuement sur ma cigarette. « Ca changerait quoi à ta vie, papa ? La bible dit de s'aimer les uns les autres, alors peu importe le sexe, c'est une personne qu'on aime... » Drôle de façon de faire son coming-out, je dois l'avouer. « Alors oui, j'aime les femmes, mais j'aime aussi les hommes. D'ailleurs, quand je ramène Elena à la maison, c'est parce que je sors avec elle. » Il vient vers moi, livide, sans expression, avant de me tourner une gifle. « Comment oses-tu faire ça sous mon toit ? - Parce que je l'aime et que je savais que t'allais réagir comme ça, parce que t'es un putain de réac' ! » J'écrasais ma cigarette avant de me lever, le défiant du regard. Tout le monde était choqué de son geste alors que je continuais de le provoquer. « Je sais que tu serais grave plus heureux si j'me faisais culbuter par un mec sous ton toit, mais je préfère la douceur d'une femme. Sur ce, bonne fin de...conseil de famille. »
Elena. Mon premier amour, mon premier baiser, ma première fois en tout. Je l'ai connue au collège, en avant dernière année. Au départ, rien ne laissait présager une histoire aussi douce au début et amère sur la fin. On ne pouvait pas se voir sans s'insulter, on se détestait face au monde, on s'aimait face à nos miroirs respectifs, cela durant une année entière. On se regardait discrètement en cours, jusqu'à que nous nous retrouvions à la même soirée, face à face pour un pari stupide, le jeu de la bouteille. Le pari stupide était qu'elle devait me lécher la joue. Elle s'est approchée de moi, m'a fixée de son regard océan alors que je me mordais la lèvre. L'osmose se fit. Une main posée sur ma joue, ses lèvres capturaient les miennes en ébullition à leur contact. Les regards étaient étonnés, certains même disaient « Mais elles se détestaient pas y'a encore une heure ? » Non, on ne s'est jamais vraiment détestées, on se provoquait, à savoir qui de l'autre allait céder. Un jeu dangereux. Elle était brune, les cheveux courts, un style un peu punk, ni trop masculine ni trop féminine. Peu de poitrine, assez grande de taille, et des bras où j'aimais me blottir durant deux ans. J'ai su que notre histoire allait se terminer en voyant ses fréquentations devenir de moins en moins fréquentables. Drogues à tout va. Cocaïne, héroïne, crack, ecstasy... Je ne voulais pas devenir dépendante de tout ça, même par amour. Je savais que je n'arriverais pas à l'aider, puisqu'elle ne voulait pas s'aider elle-même. Un soir, j'ai reçu un appel de sa mère en larmes. « Elle est à l'hôpital, sa vie est en danger. » Je suis partie en courant jusqu'à l'hôpital où elle se trouvait, malheureusement je suis arrivée au mauvais moment dans la salle d'examens. « Heure du décès, 23h21... » Effondrement, larmes, cris. Les médecins essayent de m'expliquer les raisons de ce décès. Overdose. Dix-neuf ans le jour même. Nous étions séparées mais je l'aimais encore. Je l'ai vue descendre dans les abysses de la drogues du moment où je lui ai dis « On arrête là, j'veux pas te voir te détruire. » En vérité, je l'ai détruite, je l'ai tuée, indirectement.
ONE MORE NIGHT ♣ Maroon 5Après la mort d'Elena, je me suis noyée dans une dépression et dans l'alcool. Seule ma mère osait me parler d'elle car elle l'aimait bien. Mon père, lui, avait du mal à digérer cette relation malgré les deux années que j'ai passé avec elle et malgré notre séparation. Il ne l'aimait pas beaucoup, mais il était affecté de son départ et de mon état après cela. Il ne disait rien en face de moi, mais ce sont les dires de ma mère, elle ne mentirait pas là dessus. J'ai mis du temps à m'en remettre, mais je suis allée de l'avant, peu à peu. « Tu dois te relever et essayer » disait Marley en me serrant dans ses bras. « Tu es ma grande sœur, sois forte, je serais toujours là. »Je suis allée de l'avant, mais certainement pas avec la bonne personne. Un mec, tatoué de la tête aux pieds, plutôt mignon, qui semblait doux, gentil. Je m'étais bien trompée, à ses côtés j'ai vécu l'enfer. Je suivais mon parcours d'infirmière, je devais avoir vingt et un ans, un truc comme ça. J'ai galéré à réussir le concours, mais finalement j'avais réussi après trois écris. Pour payer mes études, j'ai bossé dans un club de strip-tease puisque j'ai fait de la danse durant quinze ans, danse classique et moderne, j'ai également fait du hip-hop avec des potes blacks. Lap dance, strip-tease, les vieux dégueulasses qui essayent de toucher, de consommer ton corps. Deux ans à faire ça, deux ans où t'es célibataire. Puis Tad. C'était son surnom, c'est comme ça que je l'ai toujours connu, Tad. Je ne connais pas son prénom, ni son nom. Tad. Trois ans de « bad romance », trois ans d'enfer. Les insultes, les coups, être forcée à certaines choses que je ne voulais pas faire. Une sorte de viol pseudo consenti. « T'es ma meuf, je fais ce que je veux de toi, sale traînée ! » Un coup de poing dans la gueule, un coup de poignard dans mon cœur, traversant mon âme, les larmes roulant sur mes joues « Arrêtes, s'il te plait ! » Tu essayes de crier, tu miaules seulement un petit son. Tu as mal et lui, continue de te frapper. Coup de pieds dans le ventre, tu es à terre, tu essayes de t'enfuir, tu n'arrives plus à bouger. Il t'écarte les cuisses et commence les sévices, tu pleures encore. « Non, je veux pas ! » Il a ce sourire sadique et satisfait, tu te débats, il te frappe à nouveau, tu saignes. Ca fait huit mois que ça dure. Le lendemain, tu prépares tes affaires et tu te barres de chez lui. Tu retournes chez tes parents, pleine d’hématomes. Tu regardes ta mère « J'prends la tronçonneuse, j'ai un truc à faire avant de revenir... » Tu vas dans le garage, prends l'instrument et tu te pointes chez lui à l'heure de sa pause. Tu sonnes, il sort. « Bébé, pourquoi tu sonnes, pourquoi tes affaires sont plus là ? » Il prend son regard inquisiteur, tu démarres la tronçonneuse. « J'vais te crever fils de putain ! » Il part en courant, tu lui cours après. « T'es hystérique Blake ! » Enfin débarrassée de cet enfoiré, après deux autres années.
Quelques mois après, tes parents te demande de garder ta petite sœur, la petite dernière, Keyshia. Tu acceptes, c'est ton jour de repos. Tu joues avec elle, mais tu t'inquiètes. Ca fait trois heures qu'ils sont partis, ils ne t'ont pas prévenue qu'ils étaient bien arrivés, ou qu'ils allaient revenir. Tu les appelles et tu tombes sur une voix inconnue. Etrange. « Euh, je suis bien sur le portable de Chuck Corona ? - Oui mademoiselle, vous êtes ? - Sa fille... - Ca me rend la tâche bien plus compliquée... Je suis le major Dickens, des pompiers de Vancouver, vos parents on eu un grave accident et... - Non...pas ça... - Je suis désolé. » Tu raccroches et tu demandes un conseil de famille express. Tout le monde est là. « J'ai essayé d'appeler les parents, j'ai une mauvaise nouvelle...je suis tombée sur un pompier, papa et maman sont...partis... » Tu t'effondres, tout le monde s'effondre. « Je prends la garde de Keyshia, j'ai une situation. Mais je vais à Cambridge, j'ai eu un poste à Harvard. »
La petite a cinq ans maintenant, toute ta fratrie est restée au Canada, mais ils viennent te voir quand ils peuvent, tu gères ta vie comme tu peux, tu ne cherches plus vraiment l'âme sœur, tu prends ce qui vient quand ça vient. C'est la vie mon kiwi !