TYGER NYGAARD ► jonathan bellini

À présent il faut que je raconte tout, c'est ça ? T'es pas une fouine toi, je dirai plutôt un sangsue ... Ça va être quoi après, le nombre de poils de dos que j'ai ? Pourquoi mon hamster est mort ? Quand est la fin du monde ? Tu sais tout le monde a une part d'ombre, une qui est bien profondément enterrée et qu'on ne ressort que pour les grandes occasions. La mienne j'ai creusé bien longtemps avant de parvenir à la jeter au fond de ce trou béant. Ça prendra des siècles pour parfaitement la recouvrir. Mais écoute, j'vais te la faire simple, les grands discours c'est pas pour moi et sois heureux de savoir ça, tu es l'un des rares à y avoir droit ... Nan j'déconne, voilà l'histoire du petit prince dans toute sa splendeur.

Comme on le sait déjà, t'es né à Wellington, petit dernier d'une fratrie de cinq enfants ; Gavin l'aîné ayant cinq ans de plus que toi, Marty jumeau avec Oprah avec qui t'as une différence de trois ans et la petite Reggie, née une année avant toi. Ta mère était l'une de ses filles de grande famille, si belle que très tôt elle a commencé le mannequinat et qu'elle rapidement devenue un modèle connue dans le monde entier. Si bien qu'elle est devenue une égérie, passant le plus clair de son temps à poser pour tel ou tel magasine que chez vous. Quant à ton père, un pur américain venu à la conquête du bout du monde que représentait la Nouvelle-Zélande pour lui, il était politicien. Tu sais plus exactement quel était son avis sur quoi, tu t'en es toujours énormément moqué, il était tellement souvent en voyage d'affaire qu'il t'arrivait même d'oublier son visage.
Donc ton enfance se résume à une nourrice, l'école, tes frères et sœurs. T'as toujours entretenu une bonne relation avec eux puisque vous n'aviez en fait pas une grande différence d'âge, c'est même plutôt bizarre d'être aussi proche les uns des autres, tu peux même dire que Papa n'a pas chômé en rentrant des ses voyages d'affaires.
T'as toujours eu de bons résultats à l'école, bien que trop peu discipliné, le genre à mettre la salle sans dessus dessous, ou alors à passer son temps à rêvasser n'importe quand. Sincèrement tu te faisais chier là-bas, aujourd'hui ça a un peu changer mais bon ... Puis t'es désolé, mais parfois ce qu'on vous apprend ça n'a jamais eu d'utilité dans ta vie. Quelqu'un t'a déjà demander dans la rue la distance Londres-Paris en train allant à 230 km/h, mais ne pouvant circuler qu'en faisant des pauses tous les 100km et empruntant un nouveau circuit ? Non ? Tant mieux pour toi, tu as perdu huit années de ta vie le cul posé sur une chaise, même pas confortable en plus.
Ça a été ça ta tendre enfance passée à entendre des conneries à l'école, à supporter les caprices de Reggie, les querelles pour un biscuit des jumeaux et à voir défiler les filles dans la chambre de Gavin. Lui c'était un bon, il savait profiter de l'absence des parents. A partir de ses treize ans tu ne sais sais pas combien de "camarades de classe" il a invité à venir pour "étudier" mais son niveau de biologie devait être au point après ça. A ton entrée au collège t'as continué à affirmer tes idées et ta personnalité. Avant ça t'étais le petit dernier qu'on trimballait partout, un peu le fardeau gesticulant pour les quatre autres. Bah ouais, quand la nourrice était pas là, fallait bien un pigeon ou deux pour te gérer. Enfin tu dis ça, mais les jumeaux arrivaient toujours à s'en tirer, prétextant une invitation, un anniversaire ou quoi, ils étaient vraiment malins pour ça. C'était donc sur Gavin que ça tombait le plus souvent. Au fond tu crois que ça lui plaisait quand même, il t'amenait au parc pour jouer, il t'a appris à faire du vélo, du roller et c'est même lui qui t'a fait fumer la première fois, mais bon ça ... Donc tu peux dire que c'est lui qui t'a élevé. Bon ok, quand votre mère rentrait elle s'occupait de nous, enfin elle vous embrassait le front puis allait se coucher. Tu lui en veux pas, c'est une gentille femme, pas une excellente mère, mais c'est la tienne et tu la changerai pas. Tu passais ton temps libre entre le club de boxe, le centre de football et tes crayons de couleur. T'adorai la musique mais interdiction d'en faire car ça ne fait pas "bien". Ton cul ouais, dès tes treize ans t'as squatté la voisine étant professeure de musique et de chant. T'allais après les cours sonner chez elle pour une leçon contre un peu de compagnie. C'était drôlement cool quand t'y repense, c'est même ça qui t'a donné envie d'étudier l'art plus tard.
Mais on le sait, toutes les bonnes choses ont une fin. Pour toi ce fut à l'âge de seize ans que tout a basculer, putain qu'est-ce que tu déteste ce chiffre. Alors tu vois à cet âge là, tu es au lycée, bon ok jusque là tout va bien, sauf qu'à un moment on te demande de choisir ton orientation et là, c'est la merde. Tu voulais être un putain d'artiste, mais Monsieur Papa s'est clairement foutu de ta gueule. « Tu veux chanter ? Mais mon p'tit gars, va sous la douche avec un shampoing et chauffe la salle ! Pas besoin de faire des études pour ça, c'est con. Oriente toi vers la politique, ton chemin est tout tracé, t'as juste à me suivre. » T'avais donc chercher du soutien auprès de ta mère, peine perdue d'avance. « Artiste ? Oui c'est une belle passion mon chéri, mais ton père a raison ... Non le mannequinat ce n'est pas pareil, oh et puis tu m'embête ! » De future rockstar plein de filles, te voilà passé à un vieux gars le crâne chauve écoutant les plaintes du peuple. Sauf que non, jamais de la vie tu ne feras ça, tu ne voulais pas et pour montrer que tu t'y opposais, tu es passé à la vitesse supérieure.
Sortie, conneries, pendant longtemps tu t'es largement fait plaisir à repousser tes limites en ne te cachant pas l'espace d'une seconde à tes parents. Bon, leur réaction n'a pas été celle que t'avais prévu, car en réalité c'est Gavin qui s'amusait à te remonter les bretelles puisque les géniteurs n'étaient quasiment jamais au nid. Finalement tu es parvenu à obtenir gain de cause et suivre le cursus qui te plaisait. Mais pas n'importe où, Papa avait réussi à t'obtenir une place à Harvard en jouant de ses relations et de ton bulletin pas si mauvais que ça. T'as fêté ça à la projet X, bye bye les îles, salut les États-Unis. Ton départ était prévu au mois d'août, pour arriver tranquillement à la rentrée tout frais. Pendant un mois t'as fais ... Tout et n'importe quoi, tu partais pour l'Amérique bordel !T'en as tellement profiter, que là t'as eu le plus gros problème de ta vie. Tu t'en rappelle comme si c'était hier.
T'étais à l'entraînement de football, ton dernier avant le départ d'ailleurs, quand vint le moment d'aller aux vestiaires pour se changer. Tu ne sais pas pourquoi mais t'as plus traîné que d'habitude, et t'es tombé sur Saul, un pote de longue date. « Hey mec ça va ? T'avais pas l'air top sur le terrain, un truc te tracasse ? » T'étais pas un bâtard à cent pour cent quand même, tu prenais soin de tes potes. Enfin pote. Sans que tu ne comprenne pourquoi Saul te plaquait contre le mur en t'attrapant par la gorge. « Tu ose me demander après ce que tu as fais connard ?!  » Tu le regardai, interloqué par sa soudaine violence, lui qui avait toujours été un de tes meilleurs potes. Tu tentai de me dégager en le repoussant, lui faisant comprendre de te lâcher. « T'es un gros con Tyger ! J'te faisais confiance putain ! Comment tu as pu ! » Tu comprenais toujours pas, commençant à t'impatienter et t'échappant de son emprise en portant ta main à ma nuque. « Mais bordel de quoi tu parles ? J'ai fais quoi pour te rendre dans cet état ?! » A nouveau tu te retrouvais contre le mur, Saul t'attrapant par le col de ton tee-shirt et te secouant comme une poupée de chiffon. T'essayais de protester, mais à chaque fois son poing venait s'abattre sur ta joue. « Merde arrête ! »  A chaque fois ses coups redoublaient d'ardeur. Il finit par te jeter à terre, se mettant au dessus de toi et frappant ton visage avec ses poings. « Enfoiré ! Elle a que seize ans ! Et c'est ma sœur, ma petite sœur ! » Tout te revint en un flash. Lors d'une soirée arrosée la sœur de Saul était venue te voir, tu savais qu'elle avait toujours eu un béguin pour toi mais tu l'avais repoussé à chaque fois. Sauf cette nuit là, t'avais craquer à cause de ton état peu enviable ... Des larmes tombaient sur ton front, son frère était anéanti et il te détruisait. Tu le suppliais d'arrêter, mais il était aveuglé par son désespoir. Il avait beau être plus âgé que toi, tu faisais à peu près huit centimètres de plus que lui et ayant pratiqué la boxe, t'aurais pu avoir l'avantage. Mais tu ne voulais pas frapper un pote, pourtant il ne te laissait pas le choix. Il s'acharnait sur ta face, laissant tes bras libres. S'en était assez, tu lui rendais ses coups dans l'estomac et il tomba à la renverse. Tu saignais énormément, ta bouche était couverte de sang, ton œil gauche te faisait souffrir et tu crachais de la bave rouge. Saul était recroquevillé sur lui-même dans un coin, pleurnichant. « Elle est enceinte Tyger, bordel de merde » T'étais choqué, tu le regardai quelques secondes puis trou noir. Résultat, mâchoire cassée, lèvre ouverte, hématome à l’œil, nez fracturé. Il t'avait bien amoché cet idiot, comme quoi l'amour fraternel rend fort comme un gladiateur. T'avais fait passer ces blessures pour une bagarre dans un bar mal famé. Mais tu lui en ai jamais voulu, c'est bête hein. Tu l'as plus jamais revu ou sa sœur même, n'ayant parlé de cette histoire à personne. T'étais parvenu à avancer ton arrivée en Amérique de deux semaines pour fuir tout ça. Six ans que tout ça c'est passé, six putains d'années