Nick D. Griffin ► Richard Harmon

La lune brille accompagnée par ses fidèles étoiles. Certaines sont plus éclairées que d'autres et je sens mon regard se perdre parmi cette douce nuit. J'apprécie tout particulièrement me retrouver assis, dans une solitude qui m'est désormais presque familière, à contempler le ciel durant de longues minutes et penser à tout ce qui s'est produit dans ma vie pour que j'en arrive ici. Je n'aime pas me plaindre, car je sais très bien qu'il y a toujours pire que soi, que quelque part dans ce vaste monde, au moins une personne à un passé plus important, plus douloureux que le mien et surtout qui vit peut-être toujours dans la souffrance. Mais je m'égare dans mes pensées..

Revenons à une date plutôt importante de ma vie, le 26 mai 1995, plus précisément le jour de ma naissance. Je n’ai pas d’énorme souvenir de ce jour-là à vrai dire à part ce que maman pouvait m’en dire. Passons plutôt à mon enfance, les choses dont je me souviens réellement. J’ai eu une enfance géniale ! Mes parents ont toujours fait en sorte que je grandisse dans la joie et le bonheur, ils m’ont toujours offerts des cadeaux, même lorsque ce n’était pas un jour de fête. Mon père et ma mère sont vraiment deux personnes extraordinaires qui ont toujours absolument tout fait pour moi et ma sœur. J’ai tendance à l’oublier parfois celle-là, mais effectivement une grande sœur de cinq ans de plus que moi fait partie de ma vie. Évidement je suis bien plus beau, intelligent et drôle qu’elle, mais si je lui dis elle se vexe. Je n'ai pas beaucoup de souvenirs d’elle durant mon enfance, elle était déjà à l’école et moi, je grandissais seulement. On a eu la chance de naître dans une famille avec des finances élevées, bien qu’à l’époque, je ne m’en rendais absolument pas compte.Mon premier jour d’école était quelque chose d’assez mémorable également. Contrairement à certains enfants, je n’avais pas cette crainte d’aller une journée quelque part sans mes parents. Leurs travails occupaient absolument tout leurs temps et c’est donc une nourrice qui s’occupait de ma sœur et moi. Le détachement parental n’a donc pas été une difficulté de mon côté. Je n’en ai jamais voulu à mes parents de ne pas trop s’occuper de moi, enfin.. Au début si, je ne comprenais pas pourquoi les autres enfants de l’école avaient leurs parents qui les attendaient à la fin de la journée et pas les miens, c’était presque toujours la nourrice qui m’accompagnait et venait me rechercher après l’école. Papa et maman m’ont ensuite expliqué qu’ils ne savaient rien faire à ça, que je devais prendre sur moi le temps qu’ils aient un peu de temps libre. Je ne dirais pas que j’ai grandi seul car ma sœur était présente, du moins plus que mes parents à la maison et s’est occupée de moi quand ils ont décidés que prendre une nourrice n’était plus nécessaire.

Lorsque je repense à mes moments d’adolescence, mes souvenirs sont beaucoup plus clairs malgré le fait que j’ai jamais été un ado extraordinaire, j’avais ma bande de potes avec qui j’en ai fait des conneries. On était quatre : le premier avait la côte avec les filles, très dragueur. Le deuxième plutôt agressif, toujours énervé. Le troisième était lui plutôt calme, réfléchis, le côté positif de nous quatre. Et puis il y avait moi, je complétais ce trio de fou furieux, car j’étais tout simplement un mélange des quatre réunis, j’aimais bien de temps en temps draguer les filles, les faire succomber à mon charme. Je ne dirais pas que je faisais exprès de provoquer d’autres gars du bahut pour ensuite leur taper dessus, mais je n'en étais pas si loin que ça. En dehors de tout ça, j’avais mes moments de calme aussi, j’ai toujours aimé contempler le ciel durant de longs instants pendant que la musique dans mes oreilles me faisait m’évader ailleurs lorsque j’avais besoin de souffler un peu. Quand j’étais avec mes potes, je pouvais enfin oublier tous les problèmes qui me passaient par la tête, que ça soit la pression que me mettait mon père pour reprendre l’entreprise familiale quand il prendrait sa retraite, ma mère qui elle me prenait la tête avec les études malgré ma promesse d’aller un jour à Harvard, que c’était plus important qu’une société pouvant faire faillite à n’importe quel moment, les profs qui se demandaient ce que j’avais par la tête lorsque je dérapais à l’école, etc.. Mes amis m’ont toujours aidé à oublier le stress que représentait ma vie d’adolescent, et même si on est plus en contact, je les porterais toujours dans mon cœur. Leurs loyautés envers moi et leurs manières d’être étaient tout simplement fabuleux. Je pourrais parler pendant des heures des personnes formidables qu’ils sont, de tout les fou rires qu’on a partagé ensembles, le demi-parpaing que j’ai lancé dans la tête d’un mec nous ennuyant, les cailloux qu’on jetait dans la tente d’un inconnu avant de s’enfuir à toute vitesse, quand mon pote avait manqué de se noyer dans la piscine, etc. etc.. J’aurais vraiment tout donner pour ces gars et je doute qu’un jour, je puisse rencontrer mieux dans ma vie en terme d’amitié. C’est grâce à eux que j’ai forgé mon sens de la loyauté, d’accorder ma confiance à d’autres personne que ma famille, ils m’ont réellement changé et je ne les remercierais jamais assez pour ça...

Bref.. Je m’égare, il y a longtemps que je n’ai plus pensé à ce jour, le fameux 31 juillet 2017. Le pire jour de ma vie. Cette date restera marquée à vie dans mon esprit, dans mon âme, cette date m’a complètement changée.. J’ai encore des frissons en y repensant, des pensées qui me mettent une énorme boule au ventre mélangeant à la fois ma tristesse et ma haine. Je ne peux m’empêcher de serrer le poing lorsque j’évoque la soirée du vingt juin tellement les émotions que je ressens à propos de ce jour sont fortes, je regrettais d’être venu au monde ce jour-là.

Tout allait bien, j’étais chez moi devant un film dans le salon familial jusqu’au moment où mes potes me proposent de sortir à une soirée. Évidement vu mon côté fêtard, j’avais accepté. L’heure du rassemblement approchait et donc après avoir prévenu ma sœur que je sortais, pris les clés de chez moi et mon téléphone accompagné de mes écouteurs comme à mon habitude quand je sors même si ce n’est que pour les utiliser pendant cinq minutes de marche et j’avais rejoint finalement mes potes, au coin d’une rue à proximité de nos maisons à chacun. Je ne connaissais pas le gars qui faisait la soirée, mais apparemment, c’était un cousin d’un de mes amis. Je n'aime pas trop poser des questions donc je suis mon célèbre trio jusqu’à arriver au lieu de fête et d’y pénétrer. Je saluais quelques personnes que je connaissais de vue ou bien de nom puis j’ai accompagné mes gars pour se servir des verres d’alcool. Je n’avais envie de penser a rien d’autre que la fête ce soir, c’était dans ce but que je ne coupais avec rien l’alcool que je me déversais dans mon verre. J’en ai bu précisément quatre avant de sortir dans le jardin à l’arrière de la maison et prendre mon téléphone pour voir si j’avais reçu des SMS, il y faisait écrit « 6 appels manqués » de ma sœur en plus. Dans ma tête, tout devient flou, autant d’insistance alors qu’elle savait très bien que j’allais à une soirée, c’est qu’il s’était passé quelque chose d’anormal et j’avais un très mauvais pressentiment. Sortit de mes pensées par la vibration du téléphone dans ma main, la revoilà qui m’appelle une septième fois. Je ne perds pas une seule seconde et j’appuie sur le bouton pour décrocher l’appel. Je n’ai même pas le temps de prononcer un seul mot qu’elle me balance une phrase qui m’a glacer le sang, des mots qui ont résonné dans ma tête comme un coup de poignard en plein cœur. Lorsqu’elle me dit mot pour mot en pleurs : « Papa et maman ont eu un accident de voiture, ils n’ont pas survécu au crash.... » Le temps s’arrête autour de moi, je sens que j’ai du mal à respirer, à récupérer mon souffle, j’étais clairement en état de choc et sans perdre une seconde de plus, je fonce à travers la foule de gens qui s’était rassemblée à l’intérieur et je cours sans m’arrêter une seule seconde, je me presse d’ouvrir la porte de chez moi pour me diriger dans le salon où j’aperçois ma sœur, uniquement ma sœur toujours en larme qui vient directement me prendre dans ses bras lorsqu’elle m’aperçoit. Je ne me rendais pas encore compte de ce que je vivais, encore choqué par cette annonce ou plutôt parce que je ne voulais pas y croire.. Mes deux parents morts.. Comment aurais-je pu y croire une seule seconde.. Assis côté passager dans la voiture de sœur, elle me raconte comment est-ce qu’elle a appris cette nouvelle, l’hôpital a trouvé son numéro dans les dossiers de coordonner de notre mère et ils l’ont appelée. Nos parents ont été percutés par une autre voiture de face, qui roulait en sens inverse et surtout à toute vitesse. Lorsque l’ambulance est arrivée sur place, il était déjà trop tard pour eux, le choc les avaient tués sur le coup et j’avais l’impression d’être mort moi aussi.

Je sors de mes pensées par la suite en essuyant la larme qui coulait de mon œil droit avec la manche de mon pull et je regarde avec insistance l’étoile la plus brillante du ciel. Nul doute que là où est ma mère aujourd’hui, elle serait fière de savoir qu’aujourd’hui, je suis à Harvard malgré l’héritage de notre fortune qui m’aurait permis de vivre tranquillement jusqu’à la fin de mes jours.