BASILE MULLIEZ ► don benjamin

Chère vie d'avant;

C'est le trentième jour. Quatre semaines et demi, 720 heures, 43 200 minutes avec un téléphone en mode avion, une messagerie pleine et un cœur vide. Ce bon vieux Paul Verlaine disait : "elle ne savait pas que l'Enfer, c'est l'absence" et moi je dis que maintenant elle le sait sûrement. Parfaite léthargie, un coma artificiel les yeux grands ouverts. Je t'écris parce qu'il n'y a plus de Whisky, parce que les étoiles crient trop fort ce soir et parce qu'il est temps de rentrer à la maison. T'es comme une ex un peu trop envahissante, celle qui veut absolument savoir pourquoi on l'a quitté sans un mot, pourquoi on l'a abandonné. Tu me souffles que t'as le droit de savoir, tu reviens chuchoter à mon oreille comme un vieux souvenir abîmé, une bribe du passé qu'on veut oublier, mais qui a compté quand même. T'as raison, j'ai des comptes à te rendre. J'espère que t'as du temps, parce que moi j'ai jamais eu beaucoup de mots, mais ce soir je vais te les donner et tu vas devoir les garder pour toi.

J'ai jamais été très cool avec toi, j'ai même été un sombre connard en fait. Je m'en excuse maintenant, parce que je serai pire dans celle qui suit.

Jour 1 : Les vagues dansent doucement contre la coque du bateau amarré, le retour à la terre ferme après une semaine de croisière mêlant la WH à leurs invités. On l'a attendu ce putain de Spring Break, on l'a rêvé, on a compté les jours qui nous séparaient de notre exil, celui dont on avait tant besoin. On y est, on y est enfin. Mon iPhone vibre dans la poche de mon jean's après à peine quelque pas foulés sur le sol des Bahamas. Mes sourcils se froncent machinalement en découvrant le numéro sur l'écran, je prétexte d'aller chercher mes valises pour m'éloigner de l'exaltation générale et fait signe à Elliot que je reviens d'ici peu de temps. Mais je ne reviendrai pas.

Jour 2 : Par le hublot, je jette un dernier regard au paysage magnifique que je n'aurai pas le temps d'apprivoiser. Ce putain d'avion me ramène à Paris, moins de vingt-quatre heures après notre arrivée au Spring Break. J'ai passé la nuit dans un hôtel à l'écart des étudiants, le téléphone éteint comme tout le reste. Et je le sens, je le sais, tout va changer maintenant. Il n'y aura pas de retour en arrière possible, à force de prendre des tournants dans une vie on revient au point de départ. Ma capitale m'a manqué si souvent, ma dame de fer, mes pavés, mon métro, j'attendais impatiemment le moment d'y retourner. Mais ça ne devait pas être maintenant, ça ne devait pas être comme ça. Pour la toute première fois, Paris je te déteste. Je ferme les yeux pour oublier le soleil, l'odeur du Monoï et des cocktails, pour oublier la couleur de vos sourires. Je vais devoir arrêter de penser à vous maintenant, je vais devoir arrêter de penser tout court.

under.c .. suspens oblige, tu connaîs