DALE HAMILTON ► gary oldman

Né de parents avocats extrêmement sollicités à Londres, Dale n'a jamais manqué de rien et a toujours vécu dans le luxe procuré par la profession importante de ses géniteurs. Deuxième enfant d'une fratrie de quatre, il a appris très tôt les valeurs familiales, mais les parents Hamilton n'étaient pas souvent à la maison, laissant ainsi leurs enfants au bon soin d'une gouvernante. Très tôt, Dale s'est découvert une passion pour les sciences - passion probablement amplifiée par sa grande soeur, de trois ans son aînée, alors qu'elle lui en parlait constamment - et il ne l'a jamais abandonnée depuis. Dale a également un frère de quatre ans son cadet et une petite soeur qui en a dix de moins ; la dernière de la famille.

Enfant, Dale était un petit garçon assez turbulent, mais très intelligent. Rapidement, ses parents l'ont inscrit à des cours de soccer et de boxe afin de canaliser son énergie : s'il a arrêté le soccer et l'a désormais remplacé par la course, il n'a jamais arrêté la boxe et s'en sert encore comme échappatoire. Adolescent, il a rapidement compris qu'il désirait entreprendre des études de médecine et il savait déjà qu'il désirait devenir chirurgien. Neurochirurgien. Sa grand-mère maternelle était atteint de la sclérose en plaques et c'est d'ailleurs la raison principale pour laquelle Dale a décidé plus tard de se spécialiser en neurologie.

Très proche de sa famille, Dale a toujours protéger son frère et ses deux soeurs, mais il a néanmoins décidé d'aller faire ses études de médecine à l'Université d'Oxford, d'abord et avant tout pour s'éloigner un peu du domicile familial et voler de ses propres ailes, mais aussi parce qu'il était tombé amoureux du campus lors de sa première visite.

Il déménage donc à Oxford afin d'y entamer ses études, y restera pour les premières années de spécialisation et de résidence avant de retourner à Londres. Dale a trente et un ans lorsqu'il décide de partir aux États-Unis plusieurs mois afin d'y acquérir certaines connaissances supplémentaires et c'est à ce moment-là qu'il tombe amoureux d'une belle blonde malheureusement déjà fiancée. Il l'apprend un peu tard, malgré tout, puisque la jeune femme le lui dévoile exactement au même moment où elle lui avoue également être enceinte. De lui. Elle porte son enfant, mais elle aime son fiancé et non seulement elle ne compte pas le quitter, mais elle décide également de lui mentir et demande donc à Dale de sortir de sa vie.

Un peu sous le choc, perdu aussi, c'est donc à ce moment précis de sa vie où le jeune chirurgien décide de revenir à Londres auprès de sa famille. Il y termine sa résidence, le coeur lourd de cette annonce qu'on lui a faite et se surprend même à espérer que l'enfant ne soit pas de lui, qu'elle se soit trompée. Les remords sont un peu moins grands puisqu'il rejette la faute sur elle, se dit que si elle a trompé son fiancé une fois, avec lui, elle peut bien l'avoir fait à d'autres reprises. Il n'en parle à personne, un peu honteux et surtout, bien décidé à oublier cet enfant qui pourrait être le sien et dont il ne saura jamais rien. Il apprend néanmoins, quelques mois plus tard, que l'enfant est une fille et qu'elle a été prénommée Feldt. Toute sa vie, à partir de ce moment-là, Dale s'intéressera à elle, l'espionnera bien malgré lui afin d'en savoir un peu plus. Plus elle grandira, plus Dale comprendra qu'elle est véritablement sa fille puisqu'il y aura un air de ressemblance qui ne trompera personne.

Toutefois, peu de temps après son retour à Londres, Dale rencontre une femme qui devient rapidement son épouse. Alaska nait alors que le chirurgien a 32 ans, mais il prend conscience assez vite que la mère de sa fille a beaucoup de problèmes qui ne se régleront pas aisément. Il finit par la quitter lorsque l'enfant a cinq ans, décide de tout laisser derrière lui pour rejoindre l'hôpital au sein duquel il avait déjà travaillé plusieurs années auparavant, à Boston. Laisser la femme derrière s'avère être beaucoup plus aisé qu'abandonner l'enfant, mais il ne sait plus comment gérer sa vie. Il a réellement l'impression d'avoir tout gâché, mais les sentiments qui le talonnent sans cesse sont contradictoires. Il aime sa fille, bien sûr, mais il ne peut plus vivre comme ça et il considère que la petite a besoin de sa mère davantage - après tout, lui-même est souvent absent.

Il débarque donc à Boston, rejoint le département de neurochirurgie du Massachusetts General Hospital. Exigeant, minutieux et extrêmement talentueux, Dale grimpe rapidement les échelons et s'adapte à toutes les situations. Il sait garder son calme lorsque c'est nécessaire, mais parvient également à s'énerver lorsque la situation l'exige. Franc, autoritaire et strict, il a rapidement acquis une certaine réputation au sein de l'hôpital et on le considère particulièrement prétentieux, parfois même carrément insensible. Or, c'est une façade qu'il se doit d'arborer pour ne pas sombrer.

Il rencontre une femme qui deviendra sa nouvelle épouse alors qu'il vient tout juste d'atteindre la quarantaine. L'amour n'est plus une chose facile pour Dale. Trop de fois, il a été blessé et trop de fois, il a dû abandonner derrière lui des personnes importantes pour lui afin de poursuivre son rêve d'être heureux. D'abord un peu égoïste, c'est lorsqu'il rencontre les enfants de celle qui deviendra sa femme qu'il comprend vraiment tout ce qui manque à sa vie. Elle met plusieurs mois avant de lui présenter ses enfants, d'abord parce qu'ils ne se voient pas si souvent que ça à cause de leurs horaires respectifs de travail et aussi parce qu'elle veut être sûre que ce soit sérieux entre eux avant de faire entrer un homme dans leur vie. Rapidement, il prend ces deux enfants sous son aile et si le courant passe tout de suite avec Declan, sa soeur se montre plus réticente à sa venue. Elle n'est pas une enfant facile, mais heureusement pour lui, la mère de la fillette le laisse gérer comme il peut, lui permet même une certaine dose de discipline et lui fait entièrement confiance. Rapidement, ils se marient et Dale adopte les enfants officiellement.

Feldt et Alaska sont toujours dans ses pensées, néanmoins, mais il ne peut pas tout gâcher maintenant. Il a une nouvelle famille et ses enfants sont entre de bonnes mains - du moins, il l'espère. Dale travaille beaucoup et sa femme semble accepter facilement leur nouveau train de vie, ce qui n'est pas pour lui déplaire. Elle ne lui reproche pas ses absences répétées, d'autant plus qu'il ramène beaucoup d'argent à la maison.

Dale a quarante-sept ans lorsqu'Alaska revient dans sa vie. Dans leur vie. Il comprend rapidement que l'adolescente est brisée par la vie, qu'elle a besoin d'un toit et il la fait entrer sans vraiment demander la permission. Elle est sa fille, après tout, il ne peut pas la laisser dehors. Elle a exactement le même âge que la fille de sa femme, il espère donc qu'elles pourront s'entendre, toutes les deux. Évidemment, sa femme est d'accord pour garder l'adolescente avec eux, même si ce n'est pas forcément une tâche aisée. Les adolescents ne s'entendent pas et Dale fait un effort important afin de renouer avec Alaska. Il l'aide à se sortir de plusieurs situations difficiles, la récupère aux urgences lors de ses accidents, s'accroche. Pourtant, lorsqu'elle fait une overdose, le chirurgien comprend qu'elle est en train de devenir exactement comme sa mère et il abandonne. Il a essayé, vraiment, mais elle ne veut rien comprendre et il ne la laissera pas détruire sa famille. Elle est assez grande pour se débrouiller toute seule puisqu'elle ne veut décidément pas de son aide. Les relations sont tendues entre eux et Feldt ne veut toujours pas lui parler, même si Dale avait envoyé Alaska pour tenter de la convaincre. Parfois, Dale se dit que sa femme doit vraiment l'aimer pour rester avec lui malgré tous les changements importants dans sa vie. Il se réfugie dans le travail, encore une fois, abuse parfois sur la bouteille - une mauvaise habitude qui reprendra du poil de la bête lorsqu'on lui interdira la salle d'opération - et peine à vivre avec ses erreurs et ses regrets. Il s'inquiète terriblement pour ses enfants, mais il a cette désagréable impression d'impuissance maintenant qu'ils sont adultes à leur tour et qu'ils peuvent aisément l'envoyer chier sans aucun remord.

***

L'instrument semble vibrer dans sa main et Dale ne parvient pas à libérer suffisamment l'espace pour retirer complètement les derniers tissus tumoraux. Lorsqu'il jette un bref coup d'oeil à l'horloge qui se trouve dans la salle d'opération, il constate qu'ils y sont installés depuis plus de huit heures désormais. La fatigue les guette tous, mais les tremblements de sa main droite sont maintenant trop importants pour lui permettre de réaliser efficacement son travail.

« Dr. Hamilton ? »

Le médecin tente de se concentrer sur le cerveau de sa patiente, comprend rapidement que les tremblements s'amplifient et qu'il n'y arrivera pas. Furieux contre lui-même, Dale recule d'un pas et abandonne ses instruments entre les mains de sa résidente.

« Je vous laisse terminer. »

Il se décale un peu afin de lui faire de la place et la jeune femme semble surprise pendant quelques fractions de secondes avant de retrouver un contrôle parfait de ses émotions. Dale sait qu'elle en est capable, mais c'est bien la première fois qu'il lui laisse poursuivre une chirurgie qu'il a commencée. Ses mains tremblent encore et il croise les bras sur son thorax, tente de se concentrer sur le travail de sa résidente. Ce qui vient tout juste de se passer s'avère inhabituel et le personnel médical qui l'assiste lui jette quelques regards inquiets, sans néanmoins le lui faire remarquer.

Ce n'est qu'une heure plus tard, lorsqu'il quitte la salle d'opération en jetant violemment ses gants et son masque dans la poubelle, qu'il prend conscience de la gravité de la situation. Pour la première fois en plus de vingt ans de carrière, Dale Hamilton a abandonné une chirurgie en cours de route.

Il se libère de sa blouse, rejoint le vestiaire des employés et ferme les yeux devant le reflet que lui renvoie le miroir. Il ouvre le robinet, se passe un peu d'eau froide sur le visage et soupire lourdement.  

Il relève la tête lorsque la porte s'ouvre sur son collègue et ami depuis son arrivée ici, un peu moins de vingt ans auparavant.

« Hey, Jules m'a dit ce qui s'est passé en salle d'op'. Ça te ressemble pas. Tu vas bien ? »
« Dure semaine. » marmonne-t-il en refermant le robinet et en tournant les talons pour rejoindre son casier.
« Je te connais et je sais qu'il y a un truc que tu me dis pas. »
« Vraiment ? Écoute, j'ai mal dormi et c'était une longue journée. »
« Et ta main ? »

Instinctivement, Dale glisse sa main droite dans la poche de son uniforme et hausse les épaules.

« La fatigue, probablement. »
« Tu devrais passer des examens. » propose légèrement son ami en fronçant néanmoins les sourcils. « Je connais un autre bon neurologue qui pourrait te prendre rapidement. » Il se désigne d'un modeste signe de la main, sourit alors qu'il prend place sur l'un des bancs qui fait face aux casiers.
« J'ai déjà fait les tests. »

Son collègue attend patiemment qu'il en dise davantage, mais visiblement, Dale compte demeurer muet.

« Tu vas me le dire ou bien je vais devoir aller vérifier dans ton dossier ? »
« Je peux te poursuivre pour ça. »
« Mais tu ne le feras pas. C'est pour ton bien, tu le sais. »
« Tout est sous contrôle. » ajoute-t-il en haussant une nouvelle fois les épaules alors que sa main recommence à trembler, une caractéristique particulière de la maladie de ...
« Parkinson, c'est ça ? »
« T'es allé voir dans mon dossier ? »
« Je ne suis peut-être pas chirurgien, mais tu oublies que je suis neurologue ? »
« Ma femme n'est pas au courant. Les enfants non plus. »
« Quels médicaments tu prends ? »
« Sélégiline. Ça fonctionne assez bien jusqu'à maintenant. »
« Je te conseille de prévenir Fawkes. S'il l'apprend par quelqu'un d'autre ... Et j'ai d'autres examens à te faire passer. Demain matin. Rentre chez toi pour l'instant, repose-toi. »

Dale soupire une nouvelle fois alors qu'il sait qu'il a raison. Fawkes est le chef de service du département de neurologie et même si Dale et lui se sont rapprochés au cours du temps, il demeure sans pitié. C'est lui qui proposera à Dale d'intégrer Harvard en tant qu'enseignant titulaire puisqu'il lui interdira de pratiquer la chirurgie.