(MEGARA) take it easy on me

Je roule des yeux quand tu décris la scène en faisant référence à comment elle se serait déroulée deux ans plus tôt, quand on ignorait encore notre lien de parenté. « Arrête de parler de tout ça, tu vas finir par avoir envie de moi soeurette! » Et ça pourrait paraître étrange, de dire ‘soeurette’ et ‘avoir envie de l’autre’ dans la même phrase, mais faut bien avouer qu’entre nous il n’y avait pas de complexes. On ne pouvait pas se reprocher d’avoir couché ensemble à l’époque, on ne savait rien de tout ça. L’ironie du sort, comme on dit. « Quoi? Tu veux que je souffre? » fis-je d’un air faussement indigné, un peu exagéré. « Tu deviens insolente, fais gaffe. » que je réplique quand tu me tires la langue. Puis tu te lèves, prête à t’occuper de moi. « Dans la salle de bain j’pense qu’il devrait y avoir une trousse de premiers soins. C’est obligatoire normalement. Faut juste que tu désinfectes les plaies et que tu me refasses un pansement pour la nuit. Rien de bien compliquée. Estime-toi heureuse, je te demande pas de faire mes points de suture! » J’me rappelle vaguement la tête de Dina quand elle a du percer ma peau à l’aiguille. Elle avait pas l’air contente, ni même à l’aise. Mais elle l’avait fait, et elle m’avait surement sauvé la vie. Bien que Serah ne soit toujours pas au courant de cette histoire d’ailleurs…

Je riais légèrement à tes mots ambigus. Y’avait que nous pour faire ça, d’un regard extérieur ça serait assez étrange. Voir complètement déplacé. Mais on était comme ça. On avait commencé en faisant bien pire, au final. Et puis, on était deux séducteurs dans l’âme. Donc les répliques ambiguës, elles étaient presque inévitables. « Me tente pas. Va chercher la trousse au lieu de dire des bêtises! » Je secoue la tête en riant légèrement et me laisse tomber allongé sur le lit, légèrement relevé, appuyé sur les coudes pour vérifier tes gestes quand même. Tu reviens avec le nécessaire, tu me désinfectes — ce qui m’arrache quelques grimaces — et me panses les plaies et je te rends ton sourire. « Merci. » Je me redresse, enfile à nouveau mon t-shirt pour cacher tout ça. Puis, s’installe un blanc, un silence un peu gênant. Alors après de longues secondes, je m’assois sur le lit en tailleur, les yeux posés sur toi. « T’as jamais pensé à… reprendre ton vrai nom? » Enfin, le nom de papa. Mon nom. J’comprendrais que non en soi, parce que rien ne te lie à cette famille pleine de mensonges et de faux-semblants. Mais ça avait piqué ma curiosité.

Fallait que je pose la question. Il fallait que je t’en parle, de ce qui me trottait dans la tête depuis quelque temps. Mon nom. Ton nom, en fait. Qui pourtant, ne voulait rien dire pour toi. T’as l’air surprise, confuse même quand tu te passes la main sur le visage. T’es pas obligée de répondre. On peut changer de sujet, si tu veux. « Mon père est un connard fini, Meg. » rétorquais-je du tac au tac. « Il veut plus me voir juste parce que je veux faire quelque chose de ma vie, moi-même, et ne pas reprendre son entreprise. Quel genre de père réagit comme ça? » Depuis décembre. Ça faisait plus de trois mois que je n’avais pas de nouvelles de lui. Ma mère m’envoyait quelques textos par ci par là pour s’assurer que tout allait bien, mais lui? Silence radio. C’est qu’il était borné cet idiot, en plus. Tu te redresses pour me regarder, la conversation étant devenue bien plus sérieuse. « Oui. J’y ai pensé. Mais c’est pas à moi de décider. J’vois même pas pourquoi tu prendrais un nom qui ne veut rien dire pour toi. » Même pour moi, il veut pas dire grand chose à part ‘j’ai de l’argent’. « J’sais pas. T’sais, j’ai l’impression que ma famille ne se résume plus qu’à toi maintenant et c’est… » J’haussais les épaules, ne sachant pas trop quoi dire. C’est désolant? Ouais, sûrement.