ALLISTAIR OESTERWIND ► jeffrey dean morgan

« T'es pas sérieux... Dis-moi que t'es pas sérieux Stan.. » Le rire nerveux qui l'avait pris s'arrête net lorsqu'il comprend que son ami est on ne peut plus sérieux. Il avait prévu son coup depuis plusieurs mois, sans en faire part à Allistair, puisque sa loyauté au petit gang semblait battre de l'aile depuis un bon bout de temps. « Tu peux pas faire ça ! Tu sais ce que tu risques si tu te fais choper ? Si vous tous vous vous faites choper ? » rectifie-t-il en désignant chacune des personnes présentes et complices. Il n'a pas peur de se mettre les gens à dos, même si ces gens font partie d'un gang, mais le fait qu'il connaisse bien change un peu la donne il doit avouer. « On ne se fera pas choper. On a prévu le coup depuis longtemps et d'ailleurs, on ne te remercie pas de ton aide. » L'échange de regard assassin sous le regard médusé des autres autour. Bon sang, il prie pour que Stan ne s'aventure pas plus loin sur ce terrain, qu'il ne cherche pas à lui trouver des torts. La mâchoire serrée, il encaisse et tente de se concentré sur sa respiration pour ne pas s'énerver davantage. « Monsieur quitte le navire et ose trouver quelque chose à redire. » Stan plaisante, il le sait, mais ça a du mal à passer pour lui et le jeune homme se contient pour ne pas répondre. C'est ça où son poing part sans le vouloir. « Mais je te pardonne. En fait, si on est ici, c'est parce qu'on veut tous que tu nous accompagnes sur ce coup, comme au bon vieux temps. T'es malin, rapide, t'as les yeux partout. On peut pas s'passer d'un atout comme toi. » Stan lui donne une tape dans le dos. Une tape qui se voulait amicale mais quand on sait l'état dans lequel se trouve le jeune Oesterwind, il ne valait mieux pas s'approcher de trop près. « Alors ? Tu te joins à nous ? » Allistair fronce les sourcils. Il prend de longues secondes de respiration, à les regarder tous dans les yeux, comme si chacun tour à tour lui donnait la motivation d'accepter la besogne, l'encourageait à les rejoindre. Allistair finit par reposer son regard sur Stan. Son ami. Son frère. Celui qui a toujours voulu son bien. Il rit jaune quand il repense aux bêtises qu'il a pu croire. Un léger sourire narquois étire ses lèvres, laissant penser à une réponse positive. « Allez tous vous faire foutre. » Ni une, ni deux, il tourne les talons et se dirige vers le vieux taudis qui lui sert de bagnole sous les yeux médusés du comité. Ils n'ont pas l'habitude de se voir refuser des propositions, alors faut leur pardonner. Il peut les entendre crier, lui hurler des obscénités à la figure, mais il ne prend pas la peine de se retourner : C'est comme ça que tu nous remercie ? Sans nous, t'es personne Oesterwind ! Tu peux essayer de te convaincre ou faire semblant d'être quelqu'un, ça ne changera rien ! Il allait leur montrer à ces crétins s'il n'est personne. Watch me, leur dit-il mentalement, alors qu'il s'engouffre dans la voiture.



« Eh regarde un peu ça ! La classe hein ! » « La grande classe oui ! »confirma Brianna avec un rire quelque peu moqueur et amusé. Allistair contempla fièrement le fruit de plus d’une semaine de travail pour la retape de la chambre. Il pouvait rajouter bricoleur à son CV bien rempli désormais. Non mais regardez-le : hier, il était ce pauvre adolescent paumé qui trainait dans les rues. Aujourd’hui, il a été diplômé de Harvard, il a voyagé, il a épousé une femme merveilleuse et ont eu quatre gamins, bosse auprès des plus grandes entreprises de notre temps… Que demander de plus ? Cette pièce, il l’a voulait parfaite et avait donc décalé tous ses projets pour terminer ces travaux le plus rapidement possible afin de ne pas rendre la pièce invivable trop longtemps. Un sourire de gamin illuminait son visage et il ne s’en rendait probablement pas compte. Allistair leva les deux mains au-dessus de sa tête en signe de vainqueur en clamant fièrement « Enfin fini ! » Son petit moment de gloire fut très vite interrompu. Bree lui adressa un regard un peu suspicieux. « Tu crois ? » Ses larges sourcils se froncent doucement sur son visage, il ne comprenait pas… Il suivit le regard de celle-ci qui menait jusque dans le parquet de la chambre et c’est à ce moment qu’il observa l’état de la pièce. Elle avait en effet besoin d’un petit coup de balai et d’aspirateur !
Au bout d’une bonne heure de nettoyage acharnée tels de vrais maniaques de la propreté, le couple se laisse tomber sur le canapé, et la matriarche sur son mari. « Tu penses que ça va lui plaire ? Est-ce qu’il faudrait pas plus décorer ou.. je sais pas moi. À moins que l’on mette ces meubles de... » « Elle va adorer. » l’interrompt-elle en chuchotant. « Il ne faudrait pas non plus créer un trop grand décalage qui pourrait la mettre mal à l’aise. » La déstabiliser, c’était la dernière chose qu’il voulait. Il se souvient encore de ce moment ou sa femme et lui avaient posé leur regard sur cette jeune fille, qui semblait triste, mais rayonnante tout de même. Ils n’ont pas longtemps hésité. L’accueillir chez eux. Lui donner la chance que tous ces orphelins méritaient d’avoir. « Tu as raison… Bon, je crois que je vais aller me reposer un peu. » parvenait-il à dire dans un souffle, les yeux fermés et fatigués. Il se serait presque endormir comme ça dans la minute qui suivait si une nouvelle fois Brianna ne l’avait pas coupé et réveillé. Elle le faisait souvent, ça en était parfois tellement agaçant que paradoxalement, il avait fini par l’aimer aussi pour ça. « Non ce dont tu as le plus besoin c’est d’une bonne douche. » « Toi aussi… Quelle coïncidence ! » finit-il par dire en feignant d’être surpris. Elle fronça les sourcils et Allistair réprima un rire en se mordant discrètement les lèvres. Il observa le plafond quelques seconde en guise de réflexion. « Etant donné que la douche du rez-de-chaussée est encore en travaux, il ne nous reste que la douche à l’étage… On va devoir partager… » « Ca n’a jamais été un problème. » dit-elle un sourire en coin avant de filer à l’étage. Ils sont beaux, amoureux. Rien ne pouvait les arrêter. Jamais. Enfin c’est ce qu’ils pensaient.




Fier. C’est le moins que l’on puisse dire. Le restaurant gastronomique est même prévu pour la soirée pour l’occasion. Quand son enfant reçoit sa lettre d’admission pour Harvard, il fallait faire les choses biens. Alors qu’il noue sa cravate tandis que son épouse sort tout juste de la douche, une idée lui traverse l’esprit et sans même la réviser à deux fois, il la partage. « On devrait déménager. » Elle se tourne vers lui et le regarde, attendant une suite, une explication peut être. « À Boston. On devrait tous déménager à Boston. Se rapprocher de Harvard, tous ensemble. » De la façon dont elle le regarde, comme s’il avait perdu la raison, il comprend d’ores et déjà que ce ne sera pas une mince affaire de faire entendre son projet sorti de nulle part. « Et puis ça nous ferait un nouveau départ. Là où tout a commencé pour nous deux. Un retour aux sources comme qui dirait. » hausse-t-il les épaules, un mince sourire aux lèvres. Il ne sait pas quel autre argument donner pour la convaincre de tout abandonner et recommencer à zéro. Ça paraissait complètement dingue quand il y repense. « On trouvera facilement du travail là bas. Je commencerai à chercher dès demain même. » Parce qu’il était prêt à tout pour elle, pour eux, pour leur famille. Il ferait n’importe quoi. « Dis oui... »

trois mois plus tard...

« Cohen, voilà le dossier à envoyer tout de suite à Shepard et… C’est quoi ce remue-ménage ? » fit-il en désignant du menton l’attroupement des costards et cravates devant l’ascenseur. Elle soupirait doucement, et il s’imaginait que ce devait être parce qu’il ne l’appelait pas par son prénom, mais non c’était autre chose. « Je sais pas, une nouvelle recrue peut être ? Une poupée brune sortie tout droit d’Harvard ? Une avec une vingtaine d’année au compteur et qui arbore déjà un CV de trois pages, qu’en sais-je ? » Sa phrase s’était étouffée dans sa gorge, exprimant une jalousie qu’Oesterwind ne pouvait pas manquer. D’ailleurs, elle le savait bien et c’était pour ça qu’elle s’était retenue de dire un mot de plus mais c’était déjà trop tard. Le directeur financier adressa un sourire mutin à son assistante. « Oh la ferme. » « C’est pas très correct de t’adresser à moi de cette manière. Je suis ton patron je te rappelle. » il ne lui en tenait pas rigueur. Il aimait bien lui rappeler la hiérarchie entre eux, qui une fois qu’ils avaient quitté le bâtiment, n’existait plus. C’était étrange, mais c’était une relation qu’il chérissait en tant que telle, parce qu'il savait qu'il pouvait compter sur elle en dehors du travail également. Il lui offrait un dernier sourire taquin avant de s’en aller voir de lui-même ce qu’il en était de plus près. « Retournez donc à vos affaires messieurs, vous n’avez donc pas assez de travail peut être ? Je peux arranger ça … » Tel Moïse qui écartait l’eau, les hommes de bureaux s’écartèrent et retrouvèrent leur poste tandis qu’Allistair parvint à se frayer un chemin jusque ladite nouvelle recrue, son sang ne fit qu’un tour. « Wowowo ! Bas les pattes messieurs ! Un regard de travers ou une pensée qui dérape, et je vous promet que je vous ferai regretter d’être né homme.. Retournez à vos postes. » Le calme enfin de retour, il regarde sa fille. Légèrement mécontent du raffut causé par la célébrité et le talent de ce brin de jeune fille qui a aujourd’hui bien grandi. « Reena. Tu aurais pu me prévenir avant de créer une émeute ici.. Mais je suis content de te voir. » fit-il, les bras grands ouverts.