Lancelot P. Calixte ► Nick Bateman

« Les ténèbres du Moyens-Âge ne sont que celles de notre ignorance. »

Cataclop, cataclop. Le bruit des sabots se fait plus rapide, plus proche. La peur est palpable, mais aussi la détermination qui est à son apogée. Lancelot, aussi rapide que le vent, chevauche fièrement son destrier en quête. Les cris du roi le suppliant de revenir se firent plus lointains derrière lui et tandis qu'il s'éloigne, le souvenir de la dame du lac et de son adoubement se firent plus intenses. C'est comme si une petite lucarne s'était allumée dans son crâne.. comme si on essayait de lui montrer en images, ce que les mots ne peuvent dire et tandis qu'il tente en vain de les chasser, la porte d'un futur lointain souvrit à la volée. Son cheval s'y engouffra, sans se poser de questions....


« En enseignant l'histoire, on enseigne aussi les préjugés du passé. »

C'est ainsi que Frédéric St-Aubert, referme le livre du passé. Enseignant d'histoire de culture française, il termine son cours dans une note théâtrale. Au détriment de tous et à la stupéfaction qui dépasse l’entendement, il demande à ses jeunes élèves d'écrire une dissertation sur l'histoire de Lancelot. Une histoire qui le passionne depuis tout petit... puis une petite voix fluette et une main, s'élève dans sa classe maintenant terminée. « Mais monsieur, il n'y a pas eu de suite à l'histoire ? Il y surement quelque chose que vous nous avez pas dit ! » comme tout enseignant qui se respecte, il sourit. D'un sourire amusé et joyeux. « Mais c'est bien là la beauté de la chose, mon enfant ! Laissez aller votre imagination, écrivez une suite au sujet. Tout est permis, même les idées les plus saugrenues.. maintenant filez ! fatigué, mais pas mécontent que sa classe sois officiellement terminée sur une bonne note, il prit ses affaires et file chez lui. Il n'eut cependant pas le temps de rejoindre sa voiture, car le directeur l'intercepte juste à temps, lui proposant une opportunité qu'il ne peut refuser. « Frédéric ! Enfin te voilà ! clama haut et fort le grand directeur bedonnant. « J'ai une proposition à te faire. Viens donc dans mon bureau. intrigué, il le suivit d'un pas rapide jusqu'à son petit bureau qui lui profère de l'importance. « Qu'elle est donc cette proposition ? Je vous écoute. Monsieur Auberny. » un raclement de gorge se fit alors entendre et le professeur dut attendre quelques minutes intenses. « Que diriez-vous d'aller enseigner l'histoire au Brésil ? Vous serez doublement payé votre voyage le sera aussi. l'homme eut du mal à comprendre. Enseigner l'histoire de la France au Brésil, à des jeunes qui ne comprennent pas sa langue ? Comment allait-il faire ? La proposition est aussi alléchante que étrange. Il osa demander : « La proposition est alléchante, mais avez-vous penser au comment je vais enseigner ? Les jeunes là bas ne connaissent probablement pas notre langue et moi encore moins la leur. Il y eut un long moment de silence gênant. Le directeur n'avait donc pas pensé à ça ? Parfois, il se demande comme un homme bedonnant a pus devenir directeur d'université.  « Et bien, je vous payerais un interprète s'il le faut, mais ça serait bien pour eux comme pour vous de connaître une toute autre culture. Alors, acceptez-vous ? » là. c'était plus logique. Le français hocha la tête, tout de même content mais abasourdi et le directeur joigne ses deux mains, dans un grand geste théâtral et les fit claquer. « Alors c'est décidé, vous partirez d'ici deux mois. En attendant vous pouvez vous atteler à apprendre quelques mots portugais, ce ne sera pas de trop. Je m'occupe de vous trouver un remplaçant.» à ces mots, l'homme de la trentaine dût se retenir de crier de joie. Le Brésil ? Il avait toujours rêvé d'y aller ! Et ces jolies filles en petite tenue durant le carnaval.. ça va être un pur délice. L'aspect jungle, humide et chaud du Brésil l'avait toujours attirés ainsi que ses animaux, ses oiseaux connus comme étant les aras, les perroquets. Frédéric sortit du bureau presque en dansant et rentra chez lui, des étoiles dans les yeux.


« Le monde est un livre et ceux qui ne voyagent pas n'en lisent qu'une page. »

Le jour J. Le jour tant attendu par monsieur. Pendant deux mois, il avait enseigné la tête dans les nuages, s'occupant à apprendre le portugais durant ses temps libres. Son remplaçant se nommait Christophe Montgeron. Il demanderait des nouvelles par email à chaque fois qu'il pourra. Pour l'instant, sa tête est trop remplie de mots inconnus et d'images du Brésil, future destination. L'avion décolle à dix-huit heure moins le quart. Paré pour un vol de durée de dix-heure et demie, il s'occupe tant bien que de mal sur son siège. Devoirs, dissertations à corriger et livre portugais/français.

Le voyage se passe sans encombres, à part quelques turbulences fortes par moments. Habitué à l'avion, ce n'est pas la première fois qu'il le prend et pourtant, pour ce voyage, c'est tout comme. En arrivant, il resta pétrifié par la stupeur. La beauté des alentours est à couper le souffle et par la fenêtre du hublot, il distingue le vert de l'espèce de jungle. Gros soleil. Une voix mécanique s'élève dans tout le compartiment. « Bem-vindo ao Brasil! » pour ce qu'il avait appris de la langue portugaise, ceci veux dire "bienvenue au Brésil! ". Heureusement qu'il a son petit livret avec lui, sinon il serait perdu. Le vol avait été retardé par un moteur en panne, mais maintenant qu'ils sont arrivés, cet incident est derrière lui. Frédérique fixe les panneaux accrochés au plafond indiquant des parkings, des directions dans l'aéroport. Aidés des symboles, il suivit un panneau qui l'amène jusqu'à un quai. Dans sa hâte, il bouscula une femme Brésilienne. Il la rattrapa et sa beauté lui coupa le souffle.   « Désolé.. euh je veux dire perdão ! » bredouilla-t-il avec un horrible accent. La femme, lui souri de ses dents blanches étincelantes et il se rassura un peu. « Precisa de ajuda? » d'un mouvement rapide mais maladroit, il empoigna son livret et le feuillette à la hâte. « Uh ... je ... eu procuro do quai 10. je ... eu .. eu não sou brasileiro. » amusée, la femme se met à rire et lui répondit en français avec un drôle d'accent, au grand étonnement de celui-ci. « Ne voué en faites pas. Lou qué est là bas. » dit-elle en pointant un endroit pas loin. Il y vit des gens y attendre et un autobus arriver. Il remercia la femme et partit en courant, comme un sauvage vers l'endroit pointé. Il arriva juste à temps et monta dans le bus, direction son hôtel.

Encore une fois, ce fut un coup de maître de la part du directeur, qui avait tout prévu. Un hôtel luxueux et confortable. Voyage entièrement payé ! Quel chanceux il est. Puis l'image de la belle brésilienne lui revient en tête. Yeux foncés, peau basanée, belles courbes... zut, il s'égare encore, mais putain qu'elle est belle et sexy ! Il donnerait n'importe quoi, rien que pour revoir à nouveau. Coup de foudre ? Certainement. Cependant, il se force à la chasser de son esprit et avance d'un pas confiant dans la hall de l'hôtel. Mon dieu, quel luxe ! Une fontaine en plein milieu, un lustre au plafond. Moquette douce au sol. En plus, les hôtes et le maître d'hôtel sont tellement amicaux. Ou alors ils sourient, mais c'est une facette. Qu'importe, tant qu'il ne tombe pas sur une gueule qui fait la tronche. On le conduit à sa chambre et même un valet prend ses valises pour les monter par l’ascenseur. Il fut encore plus ébloui par sa chambre, qui en fait, est un loft. Vue sur l'incroyable paysage de Rio. Il remercie le valet et prend ses quatre énormes valises. Il est ici pour trois ans, alors autant amené sa garde robe...


« Tout le monde est un génie, mais si vous jugez un poisson à sa capacité à grimper aux arbres, il risque de passer sa vie à croire qu'il est stupide. »

Son tout premier cours ici. Sa première rencontre avec son interprète. Nerveux ? Oui, plus que jamais, mais aussi fébrile et heureux. Enseigner était un rêve pour lui, mais faire connaître son savoir à des jeunes gens d'un autre pays, d'une autre culture, c'est comme un miracle. En arrivant dans sa classe, on le regardait d'un œil intrigué et méfiant et quelle surprise ? Son interprète n'est autre que la femme rencontrée à l'aéroport. C'est un rêve qui se réalise, un paradis qui s'offre à lui. C'est tellement ironique comme situation ! Risible, qui plus est. Les élèves arrivent tous en même temps. « Bien le bonjour ! Alors aujourd'hui, on va avoir comme tâche de se présenter convenablement. L'histoire n'est pas pour aujourd'hui. Ça vous va ? » Il avait l'impression de parler a des gens en maternelle, mais il fallait qu'il commence en douceur et rien de mieux que de belles présentations en bonne et dues forme. L'interprète Shana P. Calixte Zuniga transmit ses ordres aux élèves, et le cours fila à toute allure...


« Le meilleur moment de l'amour, c'est quand on monte l'escalier. »

Cela fait bientôt un ans et demi qu'il est au Brésil et il a trouvé sa perle rare. Une perle enceinte, bien sûr. Plus heureux que jamais, il a apprit les rudiments de la langue portugaise et s'améliore de jours en jours. Ses étudiants l'adore et sont même adeptes de l'histoire de France et du monde. Jamais il n'a connu pareil bonheur et dans ses rapports, preuve qu'il est amoureux, il fait de très nombreuses fautes ou parfois il parle en portugais. Son directeur le lui fait remarquer, mais il s'en fiche bien sûr. Pour lui, rien n'est plus beau. Il a deux fils en route, car sa bien-aimée est enceinte de jumeaux. Tellement de bonheur est à venir pour sa petite future famille ! En cours, il est plus distrait que jamais. On a remplacé sa femme par un autre interprète, à cause de sa grossesse gémellaire. Tout ça est bien beau, jusqu'à ce que sa femme accouche d'un jumeau mort né et d'un vivant. Miraculeux ou pas ? À cet instant l'homme ne saurait le dire. Profondément touché, mais également heureux. Des émotions contradictoires se disputent la place dans sa tête et son cœur, mais une domina le reste. Celle d'un amour d'un père, de l'instinct sauvage qui le pousse a le protéger. Un mot, un seul s'échappa de ses lèvres... Lancelot.



« Durant l'enfance on aime rêver, une fois adulte, on rêve d'aimer. »

Enfant tellement innocent et tellement facile à vivre. Il n'a jamais su qu'il a eu un frère jumeau mort, et le saura probablement plus tard. Son père et lui descend d'une lignée royale, du preux chevalier Lancelot. Son père est tellement fier du sang bleu qui coure dans leurs veines qu'il n'hésite pas une seule seconde à le clamer haut et fort ! D'ailleurs, tous les soirs avant de se coucher, ses parents lui lisent l'histoire de ses ancêtres. Tellement palpitant ! Le petit, relate même l'histoire à les écoles. Son père est devenu un être très respecté à l'école, pourtant tous deux n'échappent pas aux préjugés quant à sa famille. Parlant le portugais, sa langue maternelle, mais aussi le français, c'est un petit destiné à un brillant avenir. Et pourtant... autant ils ont de la chances d'être brésiliens, autant le Brésil lui-même est un enfer. Le jour c'est un paradis, la nuit un cauchemar. Drogue, vols, viols, meurtres, trafics d'organes.. c'est seulement quand son père reviens, un rein en moins, qu'il prend conscience du réel danger que représente son pays. C'est pour cette raison que, les trois ans de son père écoulés, ils déménagent en France.


« C'est le joyeux bordel d'une génération qui crève. »

Citation drôle et lugubre, mais pourtant tellement véridique. Les jeunes d'aujourd'hui, ça s'affale sur le canapé et joue à des jeux vidéos, ou alors passent leur temps sur leurs téléphones, leurs ordinateurs. Lancelot ne fait parti de cette majorité. Son père enseigne encore, malgré son rein en moins. Chaque semaines il doit aller à l'hôpital se faire alimenter ou je ne sais quoi. Sa mère, passe son temps à l'école elle aussi et ils se croisent. Pourtant, c'est comme s'il lui manquait une partie de lui.. car plus les années passent, plus un vide se creuse dans son âme. Lorsqu'il rêve, il voit son frère mort qui lui parle. « Mon frère... tu me manques. » et lorsqu'il se réveille, il a cette sensation de vide et de tristesse. C'était son jumeau et même mort-né, ils partageait presque le même esprit. Ses parents remarquent sa mine attristée, mais dès qu'il essaie d'aborder le sujet de son frère, ils font mines de n'avoir rien entendus. C'est cette période qui le marque le plus. Il se vide complètement, devenant presque dépressif même. Celle qui est venue le sauver, comme un ange venu du ciel, c'est Louve. Il fit sa rencontre et c'est comme si tous ses soucis s'envolaient.


« Être réel n'arrive pas d'un seul coup. »

C'est cette période qui le sort de sa petite léthargie des pensées. Il était complètement obnubilé par son frère, qu'il avait failli laisser passer la perle rare. Pourtant, c'est à l'immeuble voisin qu'il rencontre un beau jeune homme. Comme son père avant lui, les formalités sont importantes. Alors il crut être une bonne idée d'aller se présenter et de l'inviter à une soirée. Plus jeune que lui, mais l'âge on s'en fiche non ? C'est durant cette même soirée, qu'il trouve le moyen de toucher la joue de son interlocuteur avec ses lèvres. Un doux baiser mêlé d'amusement. Lui faisant savoir qu'il était intéressé et qu'il ne le laissera pas partir comme ça, sans qu'un lien se forme entre eux. Après cette soirée, ils se sont revus plusieurs fois, pour officialiser leur couple trois mois plus tard. Adulte, c'est pourtant l'âge des belles conneries la vingtaine non ? Et il commet l'erreur d'en faire une. Son fiancé Beaudelaire, était à l'opéra pendant que lui fricotait avec une amie à lui. Une amie à laquelle il tenait fort, mais il est lâche au point de le cacher à son fiancé. C'est sûrement la pire journée de sa vie, car c'est la tête complètement défoncée à l'alcool, qu'il finit nu au lit, après avoir baisé sauvagement celle qui dormait. Le pire c'est que c'est l'être qu'il aimait qui les trouva tous les deux, aux lit. « Attend ! Beaud' ! Je... je peux t'expliquer. » Non. Ce connard ne pouvait pas expliquer le bordel dans sa tête. Il l'avait fait. Il l'avait trompé. Pourquoi ? Lui-même ne savait pas. C'était un connard de haut nom et il regarda sa vie partir, ses affaires à la main. Il se retrouva a pleurer dans son lit, réveillant ainsi son amie, ou plutôt son amie moderne. « Qu'est-ce qui se passe ? » alors tranquillement, il lui demanda de partir. Sans faire d'histoires, elle obéit sans chercher à comprendre. C'est d'ailleurs, dans cette seule et même chambre qu'il pleure toute les larmes de son corps, avant de s'endormir.

Deux ans, peut-être trois plus tard, des attentats sont annoncés aux nouvelles et l'amie de Lancelot compte parmi les victimes du bataclan. Une fois de plus, son cœur en miettes se désintégra. Totalement dévasté, il déménage aux État-Unis, précisément à Cambdrige, là où il s'évertue à penser à autre chose et à continuer ses études en histoire. Pourtant, Harvard se révèle une école chère où seuls les déterminés peuvent entrer. Il y retrouve d'ailleurs, sa meilleure amie d'enfance et de toujours, Louve.
Il en tombe éperdument amoureux.