DINESTO + You'll come tumblin' down.

Tu t'étais apprêtée comme à ton habitude, légèrement aguicheuse et provocante sur les bords. Assez pour en faire tourner des têtes, marquer les pupilles et faire freiner des cerveaux. Mais tu t'en branles, ce soir tu recherches rien en particulier, tu recherches aucun corps à la dérive, aucune  âme dans laquelle croquer quand une seule suffit à te renverser l'esprit. Basile. T'es bouffé par le souvenir, par les bonds en arrière que s'amuse à te faire revivre ton subconscient. Et te voilà face à ce mur, là où tout a commencé, tout a prit fin et tes doigts courageux viennent se poser sur les briques imparfaites qui ont ruinés ta peau ce soir là. Celui du massacre émotionnel, psychologique. Le bruit d'un Klaxon te fais sursauter, tu tournes la tête vers le chauffard en question avant de jeter un dernier coup d'œil au mur vide de vous pour reprendre le pas vers l'entrée du Lord. À l'intérieur, ton regard voyage sur quelques visages, les places encore livres avant d'en choisir enfin une à l'abris de tous. Tu avances jusqu'à elle, et ton regard tombe sur une table au hasard sur ton chemin. Mauvaise pioche. Troublée par la vision, par ce visage si familier, ce visage lugubre qui te fous la boule au ventre dans la seconde. Le souffle coupé, des battements de cils rapides pour évacuer le bouleversement de cette rencontre inattendue, et reprends la marche rapidement jusqu'à la place au fond du bar. Les mains moites, la respiration qui s'accentue, et les questions qui viennent tourmenter ton esprit pourtant apaisé jusque là. Ernesto. Bordel, Ernesto que tu répétais en boucle sans oser prononcer un mot. Tu pries intérieurement pour qu'il ne t'ai pas reconnu, pour qu'il t'ai oublié et qu'il ne se souvienne pas de ton visage. Et l'image de ton frère qui vient te renverser te fige instantanément, l'idée qu'il soit au courant d'où tu te trouves te tétanise et pendant un quart de seconde tu penses même à prendre la fuite mais le serveur qui attend depuis déjà quelques secondes à tes côtés vient te tirer de tes idées noires. - Désolé.. Euh.. Tu lèves les yeux vers lui, complètement paumée, les baissant à nouveau sur le bois de la table comme pour y chercher des réponses ou n'importe quoi de rassurant. - Un mojito s'il vous plaît. Que tu réponds la voix moins affirmée qu'à ton habitude.

J'étais venue ici un nombre incalculable de fois. Un nombre incalculable de fois où je ne t'ai jamais croisé et il en aura fallut que d'une seule, une seule petite fois pour réussir à me déstabiliser, à me faire détester cet endroit en sachant que t'en fais partie. Alors, oui, on a pu partager des bons moments tous les deux en Italie, en fait on a pas partagé grand chose mise à part mon lit et nos haines similaires envers nos frères respectifs. Mais ce soir, c'est plus toi et moi contre eux, c'est toi contre moi avec eux. Alors je me laisse envahir par un petit coin sombre du bar, discrète pour une fois en pensant bêtement que ça suffirait pour que tu ne te souviennes pas et que tu restes gentiment assis à ta place. Je l'ai bêtement cru jusqu'à ce que tu viennes me surplomber de ton ombre, te tenant debout face à moi pour m'arracher un profond soupir. Je décale ma mâchoire, humidifie mes lèvres avant de mordre celle inférieure. - Qu'est ce que tu veux Ernesto ? Je levais enfin les yeux vers toi, péniblement, atrocement. Je te connaissais assez bien pour savoir que tu n'étais pas juste là pour qu'on se remémore les bons souvenirs ensemble, autour d'un verre comme deux vieux amis. On était tout sauf ça, on était rien en fait mais t'as le pouvoir de me terrasser aujourd'hui. Je dévie le regard à nouveau, le figeant sur l'entrée du bar où l'ambiance est agitée. - Seule, j'suis une grande fille. Sèche, je sais bien que tu connaissais la réponse à ta question avant même de la poser. Sauf que ça te fais plaisir de remuer les couteaux dans les plaies, que t'étais sûrement encore là-bas à tenter de calmer sa rage quand je me suis barrée du jour au lendemain. Alors.. - Qu'est ce que tu veux ? Je répète à nouveau, les doigts tapant contre le bois de la table.

J'arque un sourcil, te regarde un instant avant de plisser les yeux dans une grimace. - Quoi ? T’es plus le grand pote de mon frère tu vas m’dire ? Que je soufflais sans y croire une seconde. Je roulais des yeux, déjà lasse de la situation délicate dans laquelle tu venais de volontairement me mettre. Et je sais que t’aimes ça, me voir comme ça, déstabilisée.. Craintive, t’aimes voir que t’as le pouvoir de me mettre à terre si l’envie t’en prenait. Et moi, je déteste ça, je déteste le fait que toi, tu puisses avoir une réelle emprise sur moi. - Okay.. Mais pourquoi tu restes là alors ? T’as pas d’autres choses à gérer que de parler avec une cliente ? Ta main venait plaquer la mienne contre la table, me faisant cesser mes mouvements, un geste franc, imprévu qui me font lever les yeux vers toi. Je reste immobile quelques secondes, le temps de me défaire de ton regard noir qui était littéralement en train de me fusiller. - J’suis encore libre de faire ce que je veux que je sache.. Alors si ça te conviens pas, retourne à ta place. Je levais légèrement ma main pour en faire dégager la tienne, recommencent à pianoter sur la table avec plus d’entrain, en faisant plus de bruit juste pour te narguer. Juste pour que tu te casses une bonne fois pour toute.

J’attendais ce moment depuis que mes yeux se sont posés sur toi en arrivant dans ce bar. J’attendais le moment où tu te servirais enfin de mon frère pour m’atteindre, pour me toucher parce que t’es le mieux placé pour savoir qu’il n’y a que ça pour me faire glisser de mon piédestal. Je souris sans sourire, nerveusement en serrant les dents de frustration. Je me retiens de te mettre mon poing dans la gueule trop bien façonné pour une pourriture comme toi. Je me retiens de te défigurer à l’instant même où tu attires mon frère dans la conversation, moi qui fait tout pour oublier qu’il a même existé un jour. - T’es pathétique.. Je souffle en plissant les yeux, grimaçant de dégoût en secouant la tête de gauche à droite. - T’as trouvé que ça ? Me menacer avec mon frère ? C’est petit Ernesto. T’es petit de toute façon, t’as jamais été très grand alors ça change pas grand chose. - Tu crois que j’ai besoin de toi ? Je pouffe un rire moqueur, arquant un sourcil avant de dévisager les lieux d’un coup d’œil. - C’est plutôt mon frère qui aurait dû te surveiller à toi, quand tu venais secrètement dans ma chambre pendant qu’il dormait. Que je lance en posant ma main ouverte contre la commissure de mes lèvres, comme pour te murmurer un secret. Je ris encore, me laisse retomber contre le dossier de ma chaise. - Tu crois qu’il est au courant que son pote s’est tapé sa sœur ? Je fronce les sourcils en faisant mine de ne pas savoir la réponse, quand je la connaissais plus que bien. Ta main encercle ma mâchoire, tes lèvres trop près des miennes et mon regard qui se baisse dessus. Je te regarde, fixement, je te défie même sans dire un mot. - Ça te plais pas que je te fuis ? Je demande avec insolence, le sourire en coin pour te narguer un peu plus. Titiller encore tes nerfs.