Cael Weaver ► Alex Pettyfer

Aussi loin que je me souvienne, je n’ai jamais été seul, parce qu’à mon premier regard sur le monde, c’était elle que je vis en premier. Charlie, ma jumelle, mon équilibre, celle qui à jamais rythmera chacun de mes pas, de mes pensées, de mes actes. A cet âge là je ne le savais encore pas, pourtant j’ai toujours eu de la chance, parce que je l’avais elle. A deux on serait toujours plus fort que tout, c’est ce que je me disais, et même lorsque le monde autour de nous s’effritait, je savais que mon équilibre à moi resterait intact tant qu’elle serait près de moi.

Nous avons passé notre petite enfance en France, c’était si parfais que j’en oubliais presque cette vie-là, cette vie où rien ne pouvait nous atteindre. Des moments d’amour, d’insouciance, comme si rien autour de nous ne pouvait nous faire du mal, et c’était d’autant plus douloureux lorsque notre microcosme de plaisirs enfantins s’écroulait pour faire une place à ce qui seraient les premières larmes qui couleraient sur mes joues. Ça n’était pas tant l’idée de voir mes parents divorcés, même si à sept ans on était assez grand pour comprendre, ce qui m’affectait le plus c’était le chagrin de Charlie.

Ce jour là je me promettais, et à elle aussi, qu’on ne serait jamais séparé. Il était hors de question d’imaginer le monde sa ma sœur, et même si on s’en construisait un nouveau en Amérique, dans la ville natale de notre mère, il ne passait pas une journée sans que tout les deux on reste l’un près de l’autre. Ici les gens étaient différents, plus amusant je dirais, même si notre père me manquait, j’appréciais l’idée de vivre dans un pays où râler n’était pas un sport national. Même les chats abandonnés dans la rues avaient l’air plus heureux, ou alors c’était le sourire de maman qui arrivait à gonfler le mien.

C’est à Boston que je rencontrais Alison, elle était comme un rayon de soleil sur cette ville. Lorsque la politique de l’école voulait que les jumeaux pour des raisons d’attention en cours soient séparés, je lançais mon dévolu sur celle qui m’accompagnerait dans chaque recoin de ma nouvelle école. On était encore des enfants, et rien n’avait d’importance, enfin c’est ce que je croyais jusqu’à ce que je me rende compte que déjà à notre âge ma jumelle ne considérait pas ma meilleure amie comme je l’aurais voulu.

J’aurai aimé que Charlie puisse partager du temps avec nous, qu’on arrive à rester tout les trois, tout le temps, mais c’était le premier déclencheur qui nous avait permis malgré nous de prendre du recul, ma sœur et moi. Si Charlie n’étripait pas Alison quand elle venait dormir à la maison, elle ne venait pas pour autant jouer avec nous. D’une certaine façon je m’en voulais un peu, mais quand je regardais les yeux pétillant de ma meilleure amie j’arrivais à me consoler, juste un peu.

J’essayais de dissocier l’amour que j’avais pour ma sœur, et cette amitié qui venait prendre une place considérable dans ma vie de petit garçon. Très vite j’apprenais que les filles c’était bien plus compliqués que les garçons. Je grandissais, plutôt épanoui sous l’affection des deux filles qui me suivraient tout au long de mon adolescence. C’est seulement quelques années plus tard que je comprenais les réticences de ma sœur envers Alison, quand je voyais ma jumelle commencer à passer du temps avec d’autres garçons, j’avoue que c’était plus que difficile à gérer.

Depuis qu’on était arrivé en ville, je la protégeais, la surprotégeais surement, mais quand sa maladie avait été diagnostiquée, c’était l’épée de Damoclès de trop qui planait au-dessus de nos têtes. Chaque fois que ma sœur se mettait à tousser, à avoir du mal à respirer, c’était comme si l’air se bloquait également dans ma gorge, je pouvais ressentir sa douleur, même si celle-ci pour moi n’était que physiologique. Je ne sortais jamais sans Ventoline dans ma poche, parce que même si Charlie gardait toujours la sienne sur elle, je préférais avoir une double sécurité.

Vers l’Age de 15 ans je m’inscrivais dans une équipe d’handball, ça me permettait d’évacuer un peu ma fougue, et c’était un de nos moment à nous avec Alison, parce qu’à chaque fois que je pouvais sortir pour une exhibition, elle était là, toujours la première pour m’encourager. Je crois que c’était à cause d’elle que Charlie n’a jamais vraiment aimé m’écouter parler du hand, mais jusque là j’arrivais encore à trouve du temps, de l’amour et de l’énergie pour mes deux princesses.

On grandissait, et Charlie aussi, je la voyais devenir une femme, et ça m’inquiétait d’autant plus que je devais surveiller ses fréquentations. A mesure que les formes de ma sœur prenaient de l’ampleur bien placée, je voyais les plus mauvais garçons de la ville tourner autour d’elle. J’avais dû intervenir plusieurs fois, ma jumelle n’étaient pas au courant, c’était Alison qui pansait mes plaies quand je me battais pour défendre l’honneur de ma sœur. Je savais en la regardant s’occuper de moi que je pourrais toujours compter sur elle, même si je ne lui rendais peut-être pas toujours l’attention qu’elle aurait dû avoir.

Quand on fêtait mes 18 ans, les miens et ceux de ma sœur, je m’isolais avec Alison, les joues un peu rougissantes en essayant de lui faire comprendre que le cadeau qui me plaisait le plus cette année, c’était de la voir toujours à mes côtés, toujours plus belle chaque année. Je lui demandais maladroitement de sortir avec moi, aussi maladroitement qu’on pouvait le demander à sa meilleure amie. Je n’en parlais même pas à Charlie, j’estimais qu’elle n’avait pas besoin de tout savoir, et que ce premier baiser resterait entre moi et Alison.

C’est seulement quelques semaines après que ma jumelle nous surprenait en train de s’embrasser d’un vrai baiser passionné. J’abandonnais même mon amoureuse le temps de courir après ma sœur qui me claquait déjà la porte de sa chambre au nez. Je soupirais en regardant la scène, d’un côté ma sœur qui était tout pour moi, de l’autre ma meilleure amie, celle qui je le savais était l’amour d’une vie. Je repartais dans les bras de mon amie pour continuer ce qu’on avait commencé. On vécu pendant trois ans un amour si pure qu’il ferait rougir les anges du ciel. Mais pendant ces trois ans, je n’avais pas pris conscience du fait que je délaissais ma jumelle.

Quand je retrouvais Charlie en train de se planter une seringue dans le bras il était trop tard. J’attrapais la seringue pour la balancer contre le mur, serrant ma moitié dans mes bras en pleurant toutes les larmes de mon corps. Je lui avais promis d’être toujours là, et pourtant j’avais l’impression de l’avoir trahie. Ce jour là je prenais la décision. Je ne pouvais pas abandonner ma sœur, pas dans cet état, et tant que je vivrais mon amour avec ma meilleure amie, Charlie continuerait de dépérir.

J’ai été lâche, plus que lâche en expliquant à Alison que je déménageais à l’étranger. On avait juste changé de quartier, j’avais demandé à mon père de nous trouver un appartement en ville, rien que pour moi et Charlie, un endroit où je pourrais m’occuper d’elle chaque seconde. Je changeais d’école avec le cœur brisé, en essayant de me convaincre que c’était la meilleure chose à faire. J’ai eu du mal à annoncer ça à ma meilleure amie, de voir tant de tristesse dans ces yeux, si je n’aimais pas tant ma sœur je n’aurais pas pu le supporter.

Je sais que ma jumelle aurait fait la même chose pour moi, on était lié, pas seulement par le sang ou par notre date de naissance. On était lié par ce karma qui nous remmenait constamment à lui. Je crois que sans Charlie je ne verrais plus notre père aujourd’hui. Quand j’avais décidé qu’il ne méritait plus notre confiance, c’était ma sœur qui m’avait forcé à lui donner une nouvelle chance. Elle qui pourtant avait eu du mal à accepter une nouvelle belle-mère, elle n’avait pas hésiter à me forcer malgré moi à discuter avec lui.

Je lui en voudrai toujours d’avoir laissé notre mère repartir, pourtant même si Charlie lui en voulait autant que moi, elle était resté là, avec moi, main dans la main jusqu’à ce qu’ensemble on trouve une solution. Il avait promis de m’aider à trouver un poste important dans un cabinet médical à Boston, j’aurais préféré me débrouiller tout seul, mais c’est Charlie qui m’épaulait comme elle l’avait toujours fait. Ensemble on réussissait à absorber la confrontation, même si nous ne retrouverions jamais le père de notre enfance, j’acceptais de lui témoigner le respect qui lui était du, uniquement parce que mon éducation et mon affection pour ma sœur m’empêchait d’être insultant.

Ces dernières années je les passais à prendre soin de celle qui remontait la pente doucement, pendant que je n’avais plus de nouvelle de l’autre. Je voyais Charlie qui retrouvait doucement des couleurs, et ses rires pouvait me faire oublier tout ce que j’avais sacrifier pour elle. Je continuais quand même mes années de médecine, en m’occupant de ma sœur avec une attention d’autant plus étroite que je surveillais chacune de ses allées et venue. Plus question qu’elle touche à la drogue, j’avais même du mal à la laisser avec une bouteille d’alcool à la main.

Il m’arrivait de sangloter tout seul dans mon lit, si ma jumelle sortait la tête de l’eau, si elle retrouvait le sourire, et la force de se battre, moi je me rappelais de ce sourire que j’avais perdu. Celui d’Alison qui avait malgré nous souffert de ce lien trop étroit entre jumeaux. Même si Charlie n’avait jamais accordé une réelle chance pour mon amour avec ma meilleure amie, elle restait là, toujours pour me consoler. Elle ne m’avait jamais demander d’abandonner Alison, et si elle ne me dirait jamais non plus de retourner vers elle, je sais qu’au fond d’elle-même, Charlie ne voulait que me voir heureux également.

J’entamais mes dernières années d’études de médecine, mon père m’avait trouvé une bonne place dans le cabinet d’un ami à lui et je pouvais continuer mon internat aux côtés d’un des médecin le mieux réputé de Boston. Charlie avait l’air d’allé beaucoup mieux, tellement que je songeais sérieusement à recontacter Alison. Je ne sais pas si elle arriverait à me pardonner un jour, pourtant cette année on allait fréquenter la même école, je décidais de demander mon transfert à Harvard pour terminer mes années où j’avais pu les commencer.